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Dictionnaire des mœurs/Texte entier/S

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S

Sagesse = Elle eſt un peu ſévere & un peu triſte. Heureuſement elle eſt ſuivie aſſez généralement du plaiſir ſecret de s’enorgueillir de ſes ſacrifices.

Satiété = État où, lorſqu’on n’a point d’humeur, on peut faire d’excellentes plaiſanteries, & donner de très-bonnes leçons.

Satyre = Elle triomphera toujours plus comme vice, que comme talent. Les plaiſirs de l’eſprit ne ſont ni auſſi vifs, ni auſſi généraux que ceux de la malignité.

Scandale = Il y a un ſcandale de fait, & un ſcandale de forme ; l’un fait ſuppoſer un reſte de mœurs ; l’autre en annonce la perte totale.

Scélérats = Peu d’hommes doivent autant à la nature que certains ſcélérats ; elle les deſtinoit à avoir de grandes vertus : ils ont trahi ſes vœux.

Scrupule = Il eſt de toutes les apparences, la plus trompeuſe. On lui donne pour origine, le rigoriſme des mœurs, ou la perfection des ſentiments. Ce n’eſt communément que la petiteſſe de l’eſprit, unie à la froideur de l’ame.

Secours = La plupart reſſemblent aux ruſes de la guerre. C’eſt le vice qui manœuvre pour triompher de la vertu.

Séduction = C’eſt un état que le ſot ne peut pas définir, que le malhonnête homme ne peut connoître, & que le ſage éclairé n’oſe pas condamner.

Sensibilité = Elle n’a beſoin ni de parler, ni d’agir, ni de ſe plaindre, ni de remercier, dans quelque cas que ce ſoit. On devine ſon ſilence.

Sensuel = Homme qui épuiſe ſes ſens dans de petites jouiſſances ; & dont l’ame ne peut jamais s’élever juſqu’à la ſphere des grands plaiſirs.

Sentence = Celle de l’eſprit & celle de la loi ne different d’autorité, que lorſque les mœurs, abſolument perdues, bornent l’exercice de la raiſon au châtiment des crimes.

Service = Obtenir des ſervices & en rendre, eſt un commerce ; mais, à prendre les choſes dans le ſens moral, ce commerce ruine plus de gens qu’il n’en enrichit.

Servitude = Elle eſt attachée à tous les états par les paſſions ; & elle eſt dans tous les cœurs par les vices.

Sexe = Il eſt l’image des ſaiſons ; il en a l’influence.

Sifflet = Il ſert à tromper l’eſprit, autant qu’à l’humilier ; car il eſt bien ſouvent dans la main des ſots.

Silence = Celui du ſentiment & de la douleur dit ſouvent plus que l’éloquence de l’eſprit ; mais il faut un ſens particulier pour l’entendre : la multitude en eſt privée, & ne connoît pas ſon malheur.

Sincérité = En devenant tous les jours plus rare, elle ſauve des crimes à l’humanité, qui ne ceſſeroit d’en abuſer ; elle nous oblige encore en nous quittant.

Société = C’eſt un grand vaiſſeau qui menace ruine, & dont l’architecture pompeuſe & brillante ſe conſerve aſſez bien.

Solitude = Elle remplit de près les promeſſes qu’elle a faites de loin, lorſqu’on y porte une ame devenue honnête, & un eſprit déſabuſé ; mais elle fait éprouver toutes les impoſtures de l’optique, lorſqu’on ne s’eſt vu ſoi-même qu’à travers ce verre trompeur.

Soupçon = Il faut être ſans expérience pour le condamner, & ſans amour-propre pour le ſouffrir.

Subtilité = L’homme ſubtil ne croit pas être un mal-honnête homme, un fourbe ; il eſt quelque choſe de pis, puiſqu’il échappe par ſon art, à la rigueur des Loix.

Supplanter = C’eſt la derniere maniere de prouver la férocité de l’ambition, l’audace de l’intrigue & l’inſuffiſance des Loix.

Systeme = Joignez-y de l’audace & de l’opiniâtreté, fût-il très-fou, il réuſſira mieux qu’une opinion ſimple produite avec modeſtie. L’eſprit de l’homme veut être ſubjugué.