Dictionnaire historique Juigné/6e éd., 1661/Platon

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Platon Philosophe très-fameux, & Prince de la secte Academique, fils d'Ariston Athénien : fut ainsi appellé à cause de ses grandes espaules, grand front & grand corps, ou selon d'autres, pour l'amplitude de ses paroles, estant auparauant appellé Aristoclés, selon que l’escrivent Suidas & Laërce. Il nasquit vers la 88. Olympiade, le mesme iour qu'Apollon en Delphes. Ælian liv. 10. de sa diverse Hist. Pline &autres difent qu'estant encore au berceau, il se trouva un eflein d'Abeilles qui avoit pofé son miel dans sa bouche; ce qui prefageoit la douceur de son éloquence future. Eftant encore ieune, il s'exerça fort à la luicte & à la peinture i il compofa des Tragédies & autrcs Poèmes. Depuis, il fuiuit la dif- pline de Socrate, & en après il s'achemina en Italie pour entendre les Pythagoriciens Eurythe, & Philolaus, les Livres duquel il acheta 10000. deniers qui reuiennenc à peu prés de mille es-

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cus. De là il s'achemina en Égypte, où il conféra auec les Prestres & Gymno-sophistes, & croit-on que là il prit la connoissance des Livres de Moyse. Il nauigea par trois fois en Sicile, dont la première fut pour remarquer les flammes perpétuelles du mont Gibel. Estant de retour, il fut pris par les Pirates en l'isle Ægine, & ayant esté vendu il fut racheté par un certain Niceres Cyreneen, il retourna pour la seconde fois en Sicile pour la deliurer de la tyrannie du ieune Denys : Mais puis après que Dion fut chassé par les Siciliens, il s'y en alla pour la dernière fois, à la prière d'Architas, afin de reconcilier Dion avec Denys, lequel l'y receut avec grand honneur ; mais depuis ayant entré en soupçon de la fidelité de Platon, il quitta, s'estant à grand'peine sauvé de ses embusches. Il mourut aagé de 80. ans. d’un phthiriafe ou maladie pediculaire, & fut enterré en l'Académie où il avoit philosophé longuement après son retour d'Égypte. Ce personnage fut versé en toutes sortes ide disciplines, & spécialement en toutes les parties & recherches plus relevées de la Philosophie, doüé d'une éloquence singulierc, & d'un celeste esprit pour comprendre tous les secrets de la Diuinité autant qu'il se peut par nature ; si bien qu'il a esté appellé divin Platon, l'honneur des Philosophes, & le Moyse Attique ; comme après Numenius Pythagoricien, le remarquant Ioseph. Suidas, Iustin Martyr, & autres; & mesme Sainct Augustin l’a tant prisé, qu'en son Livre contre les Académiques il a escrit, que sien la doctrine de Iefus-Christ il luy faloit user de raisons & dédudions, il n'en iroit chercher ailleurs qu'es escrits de ce personnage ; ce qui est vérisié par Saint Denys Areopagirc, Saint Cyrille, Eusebe, & d’aucres, disans que les Platoniciens sont vrais Chrestiens, excepté en quelques poincts. C'est pourquoy Apulée & Varron, selon saint Augustin, estimoiêt

O O o o o o iij pluton estre non seulement superieur des Héros, mais égal aux Dieux mesmes, par ce que luy seul de tous les philosophes estoit entré au cabinet de la Diuinité supréme ; aussi les Mages luy sacrifioient comme à un Dieu. Ses opinions ont esté fortes & vigoureuses, & grandement approchantes de la verité Chrestienne : Carcil establissoit premièrement la vraye Philosophievau desir de la connoissance de la Diuine sagesse ; Tenoit l’ame estre immortelle, & qu’elle passoit de corps à autre sans relasche : Mettoit pour principe des choses, Dieu & la matière, celuy là comme l’esprit & la cause, & celle cy informe & infinie de laquelle font composées toutes choses : mais qu’il n’y avoit rien de fait témérairement, ains que tout estoit estably par ordre, que toutes les choses du monde estoient composées des quatre Elemens, qu’il y avoit un seul monde & non sans nombre, basty de Dieu, mais lequel estoit animé & immortel, ne pouvant estre réduit à néant & se dissoudre en ce qui n’estoit point, que les Dieux avoient le soin des choses humaines, & qu’il y avoit des bons & mauuais Anges. Le style Grec d’iceluy, selon Aristote, tient le milieu entre l’oraison soluë, & les vers & carmes, avec telle douceur & éloquence, que l’on disoit que si Iupiter eust voulu parler, il ne se fust point seruy d’autre discours que de celuy de Platon : ses escrits sont presque tous partis & divisez en dialogues esquels il introduit tousiours parlant son maistre Socrate, traittant de plusieurs diverses matières de toutes les parties de philosophie, physique, Morale, Logique, Oeconomique, politique, & generallement de tout ce que peut conceuoir l’esprit humain de haut &de releué. Ses Liures traduits de Grec en plusieurs langues font foy de sa dostrine & philosophie vrayment diuine, comme aussi plutarque en la vie de Dion. Laërce liv. 3 de la vie des Philosophes. Augustin liv. 8. ch. 4. de la Cité de Dieu, & autres infinis.