Dictionnaire historique de Feller/2e éd., 1797/Zoroastre

La bibliothèque libre.
◄  Zopyre
Zorobabel  ►

ZOROASTRE, philosophe de l’antiquité, que les uns font plus ancien qu’Abraham, & que d’autres reculent jusqu’à Darius, qui succéda à Cambyse. Huet prétend qu’il n’est point différent de Moïse ; Grégoire de Tours croit qu’il est le même que Cham, & observe que Zoroastre signifie Etoile vivante ; l’abbé Banier conjecture que c’est Mefraïm ; & Justin dans son Abrégé de Trogue Pompée, le fait roi des Bactriens ; enfin d’autres le disent disciple d’Elie ou d’Elisée. Les sectateurs de Zoroastre subsistent encore en Asie, & principalement dans la Perse & dans les Indes. Ils ont pour cet ancien philosophe la plus profonde vénération, & le regardent comme le grand prophete que Dieu leur avoit envoyé pour leur communiquer sa loi. Ils lui attribuent même un livre qui renferme sa doctrine. Cet ouvrage, apporté en France par M. Anquetil, a traduit par le même dans le recueil qu’il a publié en 1770, sous le nom de Zend-Avesta, 3 vol. in-4o. L’original a été déposé à la bibliothèque royale. Si on en croit M. Meiners dans un Mémoire lu à l’académie de Goettingue le 18 septembre 1779, cet original, rédigé à l’instance de M. Anquetil par deux prétres Persans, ne mérite aucune confiance (voyez le Journ. hist. & litt., i juillet 1780, p. 371) ; mais quel qu’il soit, il ne contient rien de favorable à sa prétendue antiquité, & renferme des caracteres manifestes d’indien nouveau, de judaïsme & de christianisme. S’il est effectivement de Zoroastre, comme M. Anquetil prétend, il y a bien à rabattre de l’idée qu’on veut nous donner de ce philosophe. Voltaire, quoique grand admirateur de ces vieilles marottes qu’on appelle à l’aide de celles de ce siecle, avoue que c’est un fatras abominable dont on ne peut lire deux pages sans avoir pitié de la nature humaine. L’auteur, ajoute-t-il, est un fou dangereux, Nostradamus, & le médecin des urines, sont des gens raisonnables en comparaison de cet énergumene. Le nom de Gaure ou de Guebre que portent les soi-disant disciples de Zoroastre, est odieux


en Perse ; il signifie en arabe Infidele, & on le donne à ceux de cette secte comme un nom de nation. Ils ont à Ispahan un fauxbourg appelle Gaurabard, ou la Ville des Gaures, & ils y sont employés aux plus basses & aux plus viles occupations. Les Gaures sont ignorans, pauvres, simples, patiens, superstitieux, d’une morale rigide, d’un procédé franc & sincere, & très-zélés pour leurs rits. Ils croient la résurrection des morts, le jugement dernier & n’adorent qu’un seul Dieu. Ce qui pourroit faire croire que ce ne sont que des Juifs ou des Chrétiens dégénérés, dont la croyance est altérée par le mélange des opinions & les rits des anciens Perses. Quoiqu’ils pratiquent leur culte en présence du feu, en se tournant vers le soleil, ils protestent n’adorer ni l’un ni l’autre. Le feu & le soleil étant les symboles les plus frappans de la Divinité, ils lui rendent hommage en se tournant vers eux. On a sous le nom de Zoroastre des Oracles magiques ; Louis Tiletanus les publia à Paris en 1563, avec les Commentaires de Piéthon Gemistus. Ils ont été imprimés plusieurs fois depuis.