Dictionnaire historique de Feller/Nlle éd., 1847/Zoroastre

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ZOROASTRE, philosophe de l’antiquité, que les uns font plus ancien qu’Abraham, et que d’autres reculent jusqu’à Darius, qui succéda à Cambyse. Huet prétend qu’il n’est point différent de Moïse ; Grégoire de Tours croit qu’il est le même que Cham, et observe que Zoroastre signifie Etoile vivante ; l’abbé Banier conjecture que c’est Mesraïm ; et Justin, dans son abrégé de Trogue-Pompée, le fait roi des Bactriens ; enfin d’autres le disent disciple d’Elie ou d’Elisée. Les sectateurs de Zoroastre subsistent encore en Asie, et principalement dans la Perse et dans les Indes, lis ont pour cet ancien philosophe la plus profonde vénération, et le regardent comme le grand prophète que Dieu leur avait envoyé pour leur communiquer sa loi. Ils lui attribuent même un livre qui renferme sa doctrine. Cet ouvrage, rapporté en France par Anquetil Duperron, a été traduit par le même dans le recueil qu’il a publié sous le nom de Zend-Avesta, 1771, 3 vol. in-4. L’original a été déposé à la bibliothèque royale. Si on en croit Meiners, dans un Mémoire lu à l’académie de Gœttingue le 18 septembre 4779, cet original, rédigé à l’instance d’Anquetil par deux prêtres persans, ne mérite aucune confiance (voy. le Journ. hist. et litt., 1er juillet 178 (1, p. 571) ; mais quel qu’il soit, il ne contient rien de favorable à sa prétendue antiquité, et renferme des caractères manifestes d’indien nouveau, de judaïsme et de christianisme. S’il est effectivement de Zoroastre, comme Anquetil le prétend, il y a bien à rabattre de l’idée qu’on veut nous donner de ce philosophe. Voltaire, quoique grand admirateur de ces vieilles marottes, qu’on appelle à l’aide de ce siècle, avoue que c’est un fatras abominable dont on ne peut lire deux pages sans avoir pitié de la nature humaine. L’auteur, ajoute-t-il, est un fou dangereux. Nostradamus, et le médecin des urines, sont des gens raisonnables en comparaison de cet énergu-


mène. Le nom de gaure on de guèbre, que portent les soi-disant disciples de Zoroastre, est odieux en Perse ; il signifie en arabe infidèle, et on le donne à ceux de cette secte comme un nom de nation. Ils ont à Ispahan un faubourg appelé Gaurabard, ou la ville des gaures, et ils y sont employés aux plus basses et aux plus viles occupations. Les gaures sont ignorants, pauvres, simples, patients, superstitieux, d’une morale rigide, d’un procédé franc et sincère, et très-zélés pour leurs rites. Ils croient la résurrection des morts, le jugement dernier, et n’adorent qu’un seul Dieu : ce qui pourrait faire croire que ce ne sont que des juifs ou des chrétiens dégénérés, dont la croyance est altérée par le mélange des opinions et les rites des anciens Perses. (Quoiqu’ils pratiquent leur culte en présence du feu, en se tournant vers le soleil, ils protestent n’adorer ni l’un ni l’autre. Le feu et le soleil étant les symboles les plus frappants de la divinité, ils lui rendent hommage en se tournant vers eux. On a sous le nom de Zoroastre des Oracles magiques ; Louis Tiletanus les publia à Paris en 1304, avec les Commentaires de Piéton Gemistus. Ils ont été imprimés plusieurs fois depuis.