Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Acco

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ACCO. Charles Étienne débite que c’était une vieille femme qui devint folle de chagrin en voyant dans un miroir de quelle manière la vieillesse l’avait enlaidie. Il cite le chapitre XVe du livre VIe. de Cœlius Rhodiginus ; mais on n’y trouve rien qui approche de cela[a]. Le continuateur de Moréri ajoute que cette femme se plaisait à parler avec son image devant un miroir, et que souvent elle faisait semblant de refuser ce qu’elle souhaitait fort Plutarque ajoute, poursuit-il, que c’est un mot dont les mères se servaient pour épouvanter les petits enfans et les retenir en leur devoir. Il cite le XVIe. livre de Cœlius Rhodiginus, et Cicéron II ad Atticum. Je ferai ci-dessous la critique de ce passage (A). En attendant, voici ce que dit Rhodiginus dans un lieu qu’on ne cite point[b]. Acco radotait de telle sorte, que, lorsqu’elle se regardait dans le miroir, elle s’entretenait avec son image comme si c’eût été une autre femme : on la voyait user de signes, de promesses, de menaces, de souris, et de tout ce qui a lieu dans une conversation. D’autres écrivent qu’elle tâchait quelquefois d’enfoncer un clou à coups d’éponge, comme si elle eût tenu un marteau. Rhodiginus n’en dit pas davantage. Pour ce qui est de Plutarque, il dit seulement que Chrysippe n’approuvait point que l’on nous fit peur de la justice de Dieu pour nous détourner du péché [c] ; car, disait-il, on ne manque pas de raisons qui combattent ce qui se dit sur les punitions divines, et qui montrent que ce discours ressemble à celui des bonnes femmes, qui font peur d’Acco et d’Alphito aux petits enfans (B), afin d’empêcher qu’ils n’abusent de leur loisir. Plutarque fait voir ensuite que Chrysippe se contredisait lui-même.

  1. Lloyd ne change rien, si ce n’est qu’il cite Rhodiginus au livre XVI, chap. II.
  2. Le chap. II du XVIIe. livre. Il dit qu’il a lu cela dans l’Épitome des adages de Tarræus et de Didyme.
  3. Plut. de Stoïcorum repugnant. pag. 1040, B.

(A) La critique de ce passage. ] 1o. Nul des trois auteurs qu’on cite n’a dit qu’Acco devint folle pour s’être vue dans un miroir, et qu’elle faisait semblant de refuser ce qu’elle souhaitait fort. C’est à Plutarque nommément que l’on attribue d’avoir dit cela ; puisque, après avoir rapporté la folie d’Acco, ses illusions touchant son image et sa dissimulation, on s’exprime ainsi, Plutarque ajoute. C’est dire que Plutarque a débité ces trois faits, et par conséquent c’est tromper le monde, vu que cet auteur dit seulement ce que j’ai cité de lui. 2o. Quelle négligence n’est-ce pas, que de citer Cicéron II ad Atticum ? Veut-on citer la IIe. lettre, ou bien le IIe. livre ? Faut-il laisser deviner cela aux lecteurs ? Faut-il leur laisser la peine de chercher quelle lettre c’est, quel livre c’est ? Ceux qui auront la patience de le chercher perdront bien leur peine. Ils trouveront dans la XIXe. lettre du IIe. livre, Certi sumus perrisse omnia : quid enim ακκιζóμεθα. tamdiù ? C’est ma IIIe. censure. Cicéron est cité à faux : il n’a rien dit d’Acco. Le mot grec dont il s’est servi, et dont plusieurs autres auteurs se servent pour signifier ce que nous appelons pateliner, biaiser, faire le difficile sur des choses que l’on souhaite passionnément ; ce mot, dis je, qu’Érasme a mis entre ses proverbes [1], a fait soupçonner qu’Acco avait été un hypocrite ; mais ce n’est qu’une conjecture, et il ne doit pas être permis de citer Plutarque, ni Cicéron, ni même Cœlius Rhodiginus, pour des conjectures que d’autres gens ont avancées.

(B) Qui font peur d’Acco et d’Alphito aux petits enfans. ] Je ne pense pas qu’il y ait de pays au monde, où l’on n’ait une semblable coutume. J’ai ouï condamner cela par de fort habiles docteurs. Les anciens Romains avaient leur Manducus, dont ils menaçaient les enfans, comme je le dirai sous ce mot-là.

  1. Voyez Accissare in Adagior. chil. II, cent. II, num. 99.

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