Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Alting 2

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ALTING (Jacques), fils du précédent, a été professeur en théologie à Groningue. Il naquit à Heidelberg, le 27 de septembre 1618, pendant la députation de son père au synode de Dordrecht. Toute son enfance fut un perpétuel changement de lieu (A). Il fit ses études à Groningue avec beaucoup de succès ; et, comme sa grande passion était pour les langues orientales, il s’en alla à Embden, l’an 1638, afin de profiter des lumières du rabbin Gumprecht Ben-Abraham. Il alla en Angleterre l’an 1640, s’y fit connaître aux plus grands hommes, y prêcha, et y fut reçu prêtre de église anglicane par le docte Jean Prideaux, évêque de Worcester. Il avait résolu d’y passer toute sa vie ; mais il accepta la profession en hébreu, que la mort de Gomarus rendit vacante à Groningue. Il y fut installé le 13 de janvier 1643, le même jour que Samuel Des-Marets fut installé à la profession de théologie que le même Gomarus avait exercée. Les titres et les charges d’Alting augmentèrent avec le temps : il fut reçu docteur en philosophie, le 21 d’octobre 1645 ; prédicateur académique, l’an 1647 ; docteur et professeur en théologie, l’an 1667. Il avait fait deux voyages à Heidelberg, l’un en l’année 1651, l’autre en l’année 1662 : et il avait reçu mille témoignages d’estime de l’électeur palatin Charles Louis, qui le sollicita plusieurs fois d’accepter là une chaire de théologie, de quoi il s’excusa honnêtement. Il se brouilla dans peu de temps avec son collègue Samuel Des-Marets ; et il était difficile que cela n’avînt, vu que leur méthode d’enseigner n’était pas la même, et que sur divers points ils n’avaient pas les mêmes principes. Alting s’attachait à l’Écriture, sans aucun mélange de théologie scolastique. Il entrait dans la carrière de la gloire ; il se hâtait de s’y avancer : il ne manquait ni d’esprit ni d’érudition pour soutenir ses sentimens. Les premières leçons qu’il fit chez lui sur le catéchisme attirèrent tant d’auditeurs, que, faute de place dans sa chambre, il fallut qu’il se servît de l’auditoire académique. Il avait pour lui la plupart des étudians étrangers. Son collègue était habitué à se servir des distinctions et de la méthode des scolastiques : son nom faisait du bruit depuis long-temps ; il publiait quantité de livres ; il avait un grand feu d’esprit, beaucoup de savoir ; les proposans du pays s’attachaient à lui comme au chemin le plus sûr d’avoir une église ; car toutes les paroisses étaient servies par des ministres qui avaient étudié selon sa méthode. En voilà plus qu’il n’en faut pour allumer et pour entretenir la division, quand même le tempérament ne se mettrait pas de la partie. Alting avait à combattre des obstacles très-puissans : la pluralité des voix et l’autorité de l’âge étaient du côté de son adversaire, qui d’ailleurs avait pour lui une batterie capable de gendarmer tout le monde, et de réveiller les préjugés les plus vénérables ; c’était de dire qu’Alting était un innovateur, un homme qui remuait les bornes sacrées que nos pères avaient si sagement mises sur les confins de la vérité et du mensonge. Il devint accusateur public seulement sur XXXI propositions erronées qu’il imputait à Jacques Alting. Les curateurs de l’académie envoyèrent aux théologiens de Leide l’écrit de l’accusateur et la réponse de l’accusé, sans en avertir les parties, et les prièrent de prononcer là-dessus. On rendit un jugement digne de remarque (B) : on trouva Alting exempt d’hérésie ; on blâma seulement son imprudence à forger de nouvelles hypothèses ; d’autre côté, on trouva que Des-Marets avait manqué de modestie et de charité[a]. Ce dernier n’acquiesça point à ce jugement, et n’accepta pas l’offre du silence : il voulut que la cause fût examinée par les consistoires, par les classes et par les synodes ; mais les supérieurs n’y voulurent pas consentir, et défendirent d’écrire ni pour ni contre le jugement des théologiens de Leide : ainsi l’ouvrage de Des-Marets, Audi et alteram partem, fut supprimé. Cette querelle fit un grand bruit, et eût pu avoir de fâcheuses suites, par la vocation de Des-Marets à l’académie de Leide[b] ; mais il mourut à Groningue[c] avant que de prendre possession de cet emploi. Il se fit une manière de réconciliation au lit de mort (C) : j’en parlerai dans les remarques. Alting fut obligé de se plaindre qu’on l’avait joué (D), et ne fut point en repos après avoir été délivré d’un adversaire si terrible : le clergé grondait éternellement contre ce qu’il appelait innovations (E) ; mais le bras séculier arrêtait par sa prudence les tempêtes synodales ou consistoriales, et menaça d’interdiction ceux qui, dans quelque assemblée ecclésiastique, remueraient la querelle de ces deux athlètes. Alting n’eut guère de santé les trois dernières années de sa vie ; et enfin, une fièvre continue qui n’avait duré que neuf jours, l’ôta de ce monde, le 20 d’août 1679. Il mourut pieusement, résigné aux ordres de Dieu ; et recommanda plusieurs fois à Menso Alting, son cousin, bourgmaître de Groningue, l’édition de toutes ses Œuvres. On a satisfait à ce désir quelques années après sa mort, par l’impression de cinq volumes in-folio (F). Il avait vécu hors du mariage jusqu’à l’âge de près de trente ans : enfin, il s’ennuya de cet état, et se maria (G). S’il avait encore vécu quelque temps, il aurait composé deux livres, l’un en latin, l’autre en flamand. Le premier eût été une Apologie de sa doctrine, et l’autre une Histoire de sa Vie depuis son professorat ; et l’on aurait vu par ce moyen l’injustice qu’on lui avait faite, en lui suscitant une longue suite de chagrins[d] (H). Voilà ce que j’ai extrait de sa Vie, qui est à la tête du premier volume de ses Œuvres. Si quelqu’un trouve des faussetés dans cet article, je le prie de ne s’en prendre pas à moi, qui n’ai fait que rapporter fidèlement ce que m’a fourni l’ouvrage que j’ai cité. J’avertis une fois pour toutes, que je ne me rends point caution de ces sortes de récits. Je conclus par cette remarque : c’est qu’Alting état un théologien fort attaché au texte de l’Écriture, au coccéianisme et au rabbinisme. Cette dernière application l’exposa à une terrible injure (I). Il prêchait bien en trois langues, en allemand, en flamand et en anglais.

  1. Cùm Altingium ab omni hæreseos notâ absolverent, in ipso autem prudentiam in procudendis novè inventis, in Maresio modestiam et charitatem requirerent. Vita Jacobi Alting.
  2. Et res miram habitura catastrophen, Maresio quamquam sene ad theologiæ professionem Lugdunum in Batavis vocato. Vita Jacobi Altingii.
  3. Au mois de mai 1673.
  4. Ex Vitâ Jacobi Altingii in limine Operum, editor. Amstelodami, an. 1687.

(A) Toute son enfance fut un perpétuel changement de lieu ] Car, à l’âge de deux ans, on l’envoya chez Chrétien Chytræus, ministre de Bretten. L’année suivante, sa mère, nonobstant sa grossesse, fut obligée de se retirer à Heilbron, où elle le mena ; et de là, au bout d’un an, il fallut se retirer à Schorndorf : Sequente mox anno propter imminentem Heidelbergæ obsidionem, matre etiam comite, eâque tum gravidâ, Hailbronnam, indequè exacto anno Schorndorfium missus est[1]. Henri Alting, son père, l’amena ensuite, avec toute sa famille, à Embden, par des chemins détournés. D’Embden il se transporta à Leide, où il fut précepteur des fils du roi de Bohème. La peste l’obligea d’aller de Leide à Honslaerdijk ; enfin il passa de Honslaerdijk à Groningue lorsqu’il y fut appelé pour la profession en théologie, l’an 1672. Jacques Alting était alors âgé de neuf ans.

(B) On rendit à son sujet un jugement digne de remarque. ] Je ne prétends point prendre partie dans l’affaire particulière dont il s’agit en cette rencontre : je me contente de dire que, dans le général, on ne saurait s’empêcher, sur de pareilles contestations, de juger comme firent les théologiens de Leide. Ceux qui avancent de nouvelles hypothèses, se piquent trop de les soutenir au préjudice de la paix et de la tranquillité ecclésiastique et académique. Ils seront donc orthodoxes tant qu’il leur plaira ; mais ils n’auront pas assez de prudence : il y aura de la témérité dans leur fait ; car c’est être téméraire que de troubler le repos public sans une grande et urgente nécessité. Ceux qui s’opposent à une nouvelle méthode d’enseigner témoignent trop de passion : je veux croire que quelquefois il n’y a rien de personnel qui conduise leurs démarches ; mais ils outrent les choses, ils alarment toute l’Église pour des bagatelles ; ils font craindre la dépravation totale de la confession de foi, lorsqu’on n’y donne encore aucune atteinte. Ils seront donc zélés tant qu’il leur plaira : mais ils ne seront ni modérés, ni charitables, ni équitables. Ils seront même aussi imprudens que leurs adversaires : ils ne prennent pas garde qu’une nouvelle méthode dont on ne fait pas semblant de s’apercevoir tombe d’elle-même ; au lieu que, si on la choque de droit front, elle dégénère en parti. Le nouveau méthodiste aura des parens dans la régence qui le soutiendront de tous leurs cliens ; et ainsi, vous verrez bientôt la combinaison du droit civil et du droit canon, les factions d’état et les factions d’église, appariées ensemble. Que n’a-t-on point à craindre de ce conflit ? Qu’on épargnerait de maux à la religion et à l’état, si on se contentait de s’opposer aux innovations fondamentales !

(C) Il se fit entre lui et Des-Marets une manière de réconciliation au lit de mort. ] Un ministre de Groningue, voyant M. Des-Marets hors d’état de guérison, lui proposa de se réconcilier avec son collègue ; et, en suite de son acquiescement, alla proposer la même chose à M. Alting. Celui-ci fit réponse que le silence qu’il avait gardé au milieu des clameurs et des livres de son adversaire répondait de son humeur pacifique ; qu’il était toujours prêt d’accepter la paix sous des conditions raisonnables ; mais qu’il demandait réparation des injures qui avaient été publiées contre son honneur ; et qu’il ne voyait pas qu’on pût souhaiter aucune liaison avec lui, pendant qu’on le croirait tel qu’on l’avait dépeint. Le médiateur se retira sans proposer autre chose. Peu après, il se répandit un bruit par toute la ville, que M. Alting avait eu la dureté de refuser tout à plat la paix à un collègue mourant : tant il est vrai que les bruits de ville sont peu conformes à l’état naturel des faits ! Le médiateur, accompagné d’un autre ministre, retourna chez M. Alting, et tira de lui un formulaire de satisfaction. Ce formulaire ne plut point au malade, et celui que le malade dicta ne plut point à M. Alting : il fallut employer plus d’allées et de venues que pour la capitulation d’une forteresse. Enfin, le changement que M. Alting inséra au formulaire de M. Des-Marets ayant été accepté, à condition que M. Alting accepterait ce que M. Des-Marets y ajouta, afin que les conditions fussent égales de part et d’autre, on en vint aux signatures ; et ce fut là toute la réconciliation. Notez que les parties ne révoquèrent que les injures personnelles ; car pour ce qui est des accusations doctrinales, l’accusateur en remit le jugement à l’église[2].

(D) Alting fut obligé de se plaindre qu’on l’avait joué. ] Il fondait sa plainte sur la dernière édition du Système de Des-Marets, où il se voyait fort maltraité. Il prétendait que son adversaire devait abolir tous les monumens de la discorde ; et que, puisqu’il n’avait pas supprimé un ouvrage si outrageux, sa réconciliation n’avait pas été exempte de supercherie : Posteaquàm autem ad plures abiit (Maresius ).….. monitus fui ego[3] de Systematis novi perpetuis annotationtibus, quæ infândis maledictis cùm in alios tum in me constarent. Liber ille paucis ante mortem ipsius diebus vendi quidem cœperat, sed nondùm in meas ædes fuerat illatus….…. Curavi ergo afferri, atque indè didici quantoperè D. Maresius mihi illusisset, quandò in speciem concordiam redintegrari expetiit. Etenim quotiescunque verum illud est ac sincerum votum, non tantùm verbis pax initur. sed etiam abolentur omnia monumenta prioris inimicitiæ. Tenera namque conscientia ad suam ipsius infamiam spectare retur, si quod ipsamet damnavit atque ex suâ memoriâ abolitum voluit, universorum notitiæ ac memoriæ infixum dederit, editis contumeliosis chartis per universum orbem disseminatis. S’il m’est permis de dire un peu franchement ma pensée, il ne me semble pas qu’on ait eu raison de prétendre que Des-Marets supprimât tout un gros livre ; il eût fallu dédommager le libraire : et ainsi les frais de la réunion n’eussent pas été un simple dédit, un nollem factum ; ils eussent été une perte pécuniaire à la famille. Il ne s’agissait pas de trois ou quatre cartons : il s’agissait de l’ouvrage tout entier, comme le reconnaît Alting lui-même : Cùm in ipsius esset potestate totum opus suppressisse, quæ unica supererat in opere usquequaque sibi conjormi emendatio[4]. C’était assez qu’il déclarât dans un écrit signé de sa main, qu’il rétractait tout ce qu’il pourrait avoir dit ou publié contre la réputation de son adversaire. Ità ut indicta velit Cl. D. Maresius si quæ in dictis et scriptis ipsius in famam Cl. D. Altingii incurrere videantur [5]. Avec cela seul, il a pu mourir dans les formes, è morto canonicamente, comme on dit au delà des monts.

(E) Le clergé grondait éternellement contre... ses innovations. ] Les paroles que je m’en vais rapporter apprendront ce que c’était : Qualis fuerit utriusque ante mortem mutua conciliatio ipsiusmet autoris Epistola initio Mantissæ tomi quinti posita testatur. Quiescente Maresio, non sic tamen quiescendum sibi duxerunt qui ipsius partium fuerant. Nihil autem adeò dedisse operum videntur, quàm ut viâ quasi ecclesiasticâ per synodos, classes, et quas dicimus correspondentias, Altingii opinionibus obstisterent. Ità variis quidem fluctibus posteà jactatus vir optimus, suæ autem sententiæ tenacissimus tandem ferè enatavit ; siquidem quotiescunque aliquid proponeret ecclesiasticorum ordo, illud mox procerum edicto vel consulto rejectum est. Imò exauctorationis etiam pœna in eos constituta, qui de controversiis Maresio-Altingianis in cœtu aliquo pastorum quidquam moverent. Ità factum sæpiùs est ut generalibus etiam verbis concepta gravamina de periculosis novitatibus in spongiam incubuerint[6]. D’où paraît que Jacques Alting eût eu tout à craindre de la part des théologiens, s’il n’eût été protégé par les magistrats. Il est sûr que la puissance séculière et la puissance ecclésiastique ont besoin l’une de l’autre. Il faut quelquefois que celle-ci serve d’éperon à celle-là, et que celle-là serve de bride à celle-ci :

..............Alterius sic
Altera poscit opem res, et conjurat amicè[7].

(F) Ses œuvres ont été imprimées en cinq volumes in-folio. ] Feu M. Bekker, alors ministre d’Amsterdam, qui avait été disciple et bon ami de l’auteur, prit un soin particulier de cette édition. Elle parut à Amsterdam, en l’année 1687, et contient plusieurs sortes de Traités analytiques, exégétiques, pratiques, problématiques, et philosophiques, qui font foi, non-seulement de la vie laborieuse de Jacques Alting, mais aussi de son grand savoir. On peut connaître sa diligence par un autre endroit. La plupart des gens d’étude deviennent enfin paresseux à écrire des lettres : il n’a jamais connu ce défaut. Il en avait écrit cinq mille ; mais on n’a pu en publier qu’un petit nombre : Loquuntur epistolæ, quarum tam paucas ex 5000 publicari potuisse, id equidem dolendum. Erat autem ad scribendas luteras impiger[8] Le nom seul des théologiens à qui elles sont écrites montre qu’il n’était point Voetien.

(G) Il vécut près de trente ans hors du mariage, et enfin se maria. ] Vitam cœlibem ad annum ætatis trigesimum ferè perduxit, cujus tandem pertæsus junxit sibi tori sociam[9]. De huit enfans que Dieu lui avait donnés, il n’y en avait que trois en vie lorsqu’il mourut, dont l’un était médecin, un autre était avocat, et l’autre avait pris le parti des armes. Le premier et le dernier moururent peu d’années après leur père.

(H) On lui a fait injustice, en lui suscitant une longue suite de chagrins. ] Ceux qui aimeront mieux les paroles de l’original que mon abrégé trouveront ici de quoi satisfaire leur envie : Dixit inter alia (Altingius), si Deus sibi vitam viresque concederet, stare sibi animum duos libellos in lucem mittendi, alterum quidem quem orsus etiam est, quo se purgaret coram ecclesiâ ab heterodoxias et hæreseos crimine sibi intentato ; alterum verò quo Historiam vitæ suæ publicæ panderet, ab eo tempore quandò in academiâ docere cœpisset ; undè cuivis judicandum relinqueret, quo jure, quâ injuriâ tantùm ipsi molestiarum creatum fuisset.… Præ cæteris autem conquerebatur à malevolorum insidiis atque inimicitiis stetisse, quò minùs ut vellet publico inservire potuisset [10]. C’est assurément une chose bien déplorable que, par des guerres civiles, on empêche plusieurs excellens ouvriers de faire valoir leur talent au service de leur communion, et contre les ennemis de dehors, gens contre lesquels il faudrait toujours tenir toutes les forces du parti bien réunies. Je ne parle point du scandale que cela cause ; car, au contraire, il faut être scandalisé du peu de scandale que cela cause. Est-ce que pour se scandaliser à propos il faut un degré d’esprit à quoi peu de gens parviennent ? Est-ce que la coutume endurcit enfin à tout, et que, ab assuetis non fit passio ? D’où que cela vienne, il est certain que les peuples ont une indulgence excessive pour ceux qui entretiennent la discorde par des écrits violens, injurieux, remplis de chicaneries, sous le faux prétexte de zèle. Rien ne serait plus capable de corriger la démangeaison rongeante que l’on voit en certaines gens d’entasser livre sur livre, avec un fiel très-amer contre leurs confrères, que si les peuples se scandalisaient tout de bon de cette conduite, et donnaient des marques éclatantes de leur mépris, et de leur mécontentement. Mais, pendant qu’on les verra suivre le parti qui sait faire plus de vacarmes, et plus de fracas, il faut tenir la maladie pour incurable.

(I) Son application au rabbinisme l’exposa à une terrible injure. ] Il se vit traité de demi-juif, d’homme qui ne différait presque d’un juif que par le prépuce ; enfin d’homme qui se plaignait quelquefois de n’être pas circoncis, et à qui le prépuce pesait. L’occasion de ces injures fut qu’il avait soutenu que les points du nom tetragramme ne sont point propres à ce nom ; et qu’ainsi l’on n’en connaît pas la véritable prononciation, et qu’il ne faut point accuser de superstition judaïque ceux qui le lisent Adonaï. Voici le jugement que l’on fit de cette pensée : Impudentia est grammaticorum nonnullorum et filiorum Bicri negare ex superstitione judaïcâ oriri quòd in nomen aliter pronuncietur quàm legitur.... Sed per nos homines semi-judæi doctrinâ, studio, affectu, commercio, et qui solo ferè pondere præputii, et quo interdùm se gravari dolent distant à recutitis, insaniant ut libuerit...... Vestræ est impudentiæ, petulantiæ, et superbiæ in primo gradu, quod ausitis dicam scribere imperitiæ et ignorantiæ tot illustribus Ecclesiæ viris vobis etiam longè doctioribus, quòd id nominis enuncient et pronuncient uti scribitur[11]. Était-ce un sujet légitime de se mettre si fort en colère, et ne voit-on pas bien ici un exemple de ce qu’un philosophe païen a remarqué judicieusement ? Crede mihi, levia sunt propter quæ non leviter excandescimus, qualia quæ pueros in rixam et jurgium concitant. Nihit ex his quæ tam tristes agimus serium est, nihil magnum. Indè, inquam, vobis ira et infantia est, quòd exigua magno æstimatis. [12]. Que pourrait-on dire de plus fort contre un homme qui marchanderait son apostasie, et qui n’attendrait à se faire juif que la solution de trois ou quatre petites difficultés ?

  1. Vita Jacobi Altingii.
  2. Tiré d’une Lettre de Jacques Alting, insérée au Ve. volume de ses Œuvres.
  3. Alting., tom. V, Mantissæ, pag. 425.
  4. Idem, ibidem.
  5. Idem, ibidem.
  6. In Vitâ Jacobi Alting.
  7. Horat. de Arte Poët. vs. 410.
  8. Vita Jacobi Altingii.
  9. Ibidem.
  10. Ibidem.
  11. Oper. Altingii, tom. V, in Mantissâ, p. 426.
  12. Senec. de Irâ, lib. III, cap. XXXIV.

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