Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Peyrarède

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PEYRARÈDE (Jean de)[* 1], gentilhomme gascon[a], et protestant (A), faisait de bons vers latins, et entendait bien la critique. Il se fit connaître à Paris vers le commencement du règne de Louis XIV. Il publia des remarques sur Térence, et des hémistiches qui achevaient les vers imparfaits de l’Énéide, à quoi il joignit quelques vers. Il dédia cet ouvrage à la reine de Suède [b]. Ses connections et ses conjectures critiques sur Florus ont mérité l’approbation de la Mothe-le-Vayer, qui les a suivies assez souvent, et qui l’a cité avec honneur (B). On parle quelquefois de lui dans les lettres de Balzac. J’en citerai un passage qui lui est fort honorable (C). On apprend dans une lettre qui écrivit de Paris, le 20 d’avril 1641, à Isaac Vossius[c], qu’il commençait à sentir les infirmités de la vieillesse, et que pendant trente années il avait été accablé de la mauvaise fortune, ou occupé à faire valoir son bien. Il paraît par cette lettre qu’il avait un fils[* 2].

  1. * Leclerc croit que son nom était Jean de la Peyrarède. C’est ainsi que Baillet l’appelle. Huet, qui en fait l’éloge dans son Commentarius de rebus ad eum pertinentibus, pag. 168, le nomme Peyraredus. Costar parle avec éloge de Peyrarède, dans son Mémoire des gens de lettres vivans, en 1655, imprimé dans le tome II des Mémoires de Desmelets.
  2. * La Monnoie, dans ses notes sur le n° 1489 des Jugemens des savans, de Baillet, dit que la Peyrarède n’a guère vécu au-delà de 1660 ou 1661. Joly ajoute qu’il avait alors plus de 70 ans.
  1. Il s’appellait nobilis Aquitanus dans ses ouvrages, comme l’abbé de Marolles le remarque au dénombrement des auteurs qu l’ont obligé.
  2. Voyez l’abbé de Marolles, là même.
  3. Elle est la CCCXXIVe. de celles qui ont été écrites à Jean Gérard Vossius.

(A) Protestant. ] Il l’était jusqu’à la délicatesse du zèle, si l’on veut tirer des conjectures d’une lettre de M. Balzac à M. Conrart. Mais qui vous a dit, lui demande-t-il[1], que j’avais de l’aversion pour les huguenots ? Ce ne saurait être n’y M. Conrart, ni M. de Saumaise, ni M. Daillé, que j’ai tant loués, et tant célébrés ; que j’aime, que j’honore, que j’estime si parfaitement, et par une profession si publique. Il faut sans doute que le bon monsieur de Peyrarède n’ait pas voulu faire différence entre la raillerie et le sérieux, et que dans la liberté de notre conversation, il ait pris au criminel quelque parole qui venait d’une intention innocente. Sans m’enfoncer en matière plus avant, je vous proteste, mon chèr monsieur, que je n’ai pas plus d’aversion pour les huguenots, que vous en avez pour les catholiques.

(B) La Mothe-le-Vayer.….….. l’a cité avec honneur. ]. « J’ai suivi l’interprétation du docte M. Peyrarède, » dit-il dans ses notes sur le XIXe. chapitre du IIe. livre[2]. Ailleurs il se sert d’une autre épithète encore plus relevée. Ces paroles, dit-il[3], sont assez obscures, je les ai interprétées selon l’exposition de l’illustre M. Peyrarède, L’abbé de Marolles le cite souvent dans ses remarques sur Stace.

(C) Je citerai un passage qui lui est fort honorable. ] « Le courrier de vendredi m’apporta des nouvelles de notre M. de Peyrarède. Savez vous bien que son nom fait déjà beaucoup de bruit à Paris, et que les Celtes admirent les Aquitains ? ou, s’il vous plaît que je vous le dise d’une autre façon, et que je parle d’un poëte poétiquement, le dieu de la Seine est étonné d’ouïr si bien chanter les muses de la Dordogne. Pour moi, je suis ravi de leur dernière composition : et si les âmes des bienheureux pouvaient être évoquées par les charmes des beaux vers, je ne doute point que celle du duc de Brézé ne descendît du ciel, a l’heure même qu’on lui dirait :

........Tu nube serenâ
Stellato fulgens apice, et radiante coronâ,
Ad tua sacra veni, quæ multo regia luctu
Concelebrat, sacrique chori, sanctusque senatus, etc.
Aspice ut ipsa gemens, ingenti affixa feretro,
Horridaque et laceris luget victoria pennis ;
Quæ quondàm tua castra, tuas comitata trinemes,
Hesperio toties mutas dùm sanguine pontum,
Deseruit tua signa semel : nunc cœdis acerbæ
Invidiam lenire velit : fatisque malignis
Imputat, infandæque excusat crimina cladis, etc.


Vîtes-vous jamais rien de plus noble, ni de plus pathétique, que cette pauvre Victoire, affligée de la mort de ce brave duc ? Quel spectacle de la voir avec ses habits tout déchirés, et ses ailes toutes rompues, faire pénitence de la faute qu’elle croyait avoir faite ; de la voir attachée et comme clouée à ce grand cercueil, qu’elle baigne de ses larmes ! Elle ne se peut consoler du malheur arrivé à Orbitello : elle voudrait bien en pouvoir accuser le mauvais destin : elle, etc.[4]. » C’est ce que M. de Balzac écrivit le 4 de décembre 1646.

  1. Balzac, lettre I à Conrart, liv. I, pag. m. 25, 26.
  2. La Mothe-le-Vayer, Remarques sur Florus, pag. 910. Voyez aussi, pag. 842.
  3. Là même, pag. 933.
  4. Balzac, Lettres choisies, IIe. part., livre III, lettre XXXVII, pag. m. 378,

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