Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Ardents

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Henri Plon (p. 47-48).

Ardents, exhalaisons enflammées qui paraissent sur les bords des lacs et des marais, ordinairement en automne, et qu’on prend pour des esprits follets, parce qu’elles sont à fleur de terre et qu’on les voit quelquefois changer de place. Souvent on en est ébloui et on se perd. Leloyer dit que lorsqu’on ne peut s’empêcher de suivre les ardents, ce sont bien en vérité des démons[1].

Il y eut, sous le règne de Louis XIII, une histoire de revenant qui lit assez de bruit à Marseille ; c’était une espèce de feu ardent ou d’homme de feu. Le comte et la comtesse d’Alais voyaient toutes les nuits un spectre enflammé se promener dans leur chambre, et aucune force humaine ne pouvait le forcer à se retirer. La jeune dame supplia son mari de quitter une maison et une ville où ils ne pouvaient plus dormir. Le comte, qui se plaisait à Marseille, voulut employer d’abord tous les moyens pour l’expulsion du fantôme. Gassendi fut consulté ; il conclut que ce fantôme de feu qui se promenait toutes les nuits était formé par des vapeurs enflammées que produisait le souffle du comte et de la comtesse… D’autres savants donnèrent des réponses aussi satisfaisantes. On découvrit enfin le secret. Une femme de chambre, cachée sous le lit, faisait paraître un phosphore à qui la peur donnait une taille et des formes effrayantes ; et la comtesse elle-même faisait jouer cette farce pour obliger son mari à partir de Marseille, qu’elle n’aimait pas…


  1. Discours des spectres, liv. I, ch. vii.