Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Lampes perpétuelles

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Henri Plon (p. 398).

Lampes perpétuelles. En ouvrant d’anciens tombeaux tels que celui de la fille de Cicéron, on trouva des lampes qui répandirent un peu de lumière pendant quelques moments, et même pendant quelques heures ; d’où l’on a prétendu que ces lampes avaient toujours brûlé dans les tombeaux. « Mais comment le prouver ? dit le père Lebrun ; on n’a vu paraître des lueurs qu’après que les sépulcres ont été ouverts et qu’on leur a donné de l’air. Or, il n’est pas surprenant que dans les urnes qu’on a prises pour des lampes il y eût une matière qui, étant exposée à l’air, devînt lumineuse, comme les phosphores. On sait qu’il s’excite quelquefois des flammes dans les caves, dans les cimetières et dans tous les endroits où il y a beaucoup de sel et de salpêtre. L’eau de la mer, l’urine et certains bois produisent de la lumière et même des flammes, et l’on ne doute pas que cet effet ne vienne des sels qui sont en abondance dans ces sortes de corps.

Ferrari a voulu démontrer, dans une savante dissertation, que ce qu’on débitait sur ces lampes éternelles n’était appuyé que sur des contes et des histoires fabuleuses[1].

  1. Vers 1750 cependant, on fit, à Naples, la découverte d’un phosphore que l’on dut également au hasard. Le prince de San-Severo travaillait à un procédé chimique. Il ouvrit, à une heure après minuit, quatre cucurbites de verre. En voulant les examiner de trop près avec une bougie, la matière contenue dans un de ces vases prit feu sur-le-champ et donna une flamme jaune très-vive. Il laissa brûler pendant environ six heures la matière renfermée dans ce vase. La flamme, au bout de cet espace de temps, s’étant trouvée aussi belle et aussi forte qu’au premier instant, le prince San-Severo l’étouffa ; mais ayant voulu la raviver le lendemain, il n’y put parvenir qu’en ajoutant dans le même vase un quart d’once de la même matière, quoiqu’elle ne fût pas sensiblement diminuée de poids. Une fois rallumée, elle brûla six mois de suite, sans mouvement, sans altération de clarté, et sans déperdition apparente. Cette découverte justifia, jusqu’à un certain point, la vérité des lampes sépulcrales dont ont parlé les anciens, et que des savants modernes ont traitées de fables.