Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Rémore

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Henri Plon (p. 575).
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Rémore, poisson sur lequel on a fait bien des contes. « Les rémores, dit Cyrano de Bergerac, qui était un plaisant, habitent vers l’extrémité du pôle, au plus profond de la mer Glaciale ; et c’est la froideur évaporée de ces poissons, à travers leurs écailles, qui fait geler en ces quartiers-là l’eau de la mer, quoique salée. La rémore contient si éminemment tous les principes de la froidure, que, passant par-dessous un vaisseau, le vaisseau se trouve saisi de froid, en sorte qu’il en demeure tout engourdi jusqu’à ne pouvoir démarrer de sa place. La rémore répand autour d’elle tous les frissons de l’hiver. Sa sueur forme un verglas glissant. C’est un préservatif contre la brûlure… » Rien n’est plus singulier, dit le P. Lebrun, que ce qu’on raconte de la rémore. Aristote, Ælien, Pline, assurent qu’elle arrête tout court un vaisseau voguant à pleines voiles. Mais ce fait est absurde et n’a jamais eu lieu ; cependant plusieurs auteurs l’ont soutenu, et ont donné pour cause de cette merveille une qualité occuhe. Ce poisson, qu’on nomme à présent succet, est grand de deux ou trois pieds. Sa peau est gluante et visqueuse. Il s’attache et se colle aux requins, aux chiens de mer ; il s’attache aussi aux corps inanimés ; de sorte que, s’il s’en trouve un grand nombre collés à un navire, ils peuvent bien l’empêcher de couler légèrement sur les eaux, mais non l’arrêter.