Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Voltigeur hollandais
Voltigeur hollandais. Les marins de toutes les nations croient à l’existence d’un bâtiment hollandais dont l’équipage est condamné par la justice divine, pour crime de pirateries et de cruautés abominables, à errer sur les mers jusqu’à la fin des siècles. On considère sa rencontre comme un funeste présage. Un écrivain de nos jours, à fort bien décrit cette croyance dans une scène maritime que nous transcrivons :
« Mon vieux père m’a souvent raconté, lorsque, tout petit, il me berçait dans ses bras, pour m’accoutumer au roulis, et il jurait que c’était la pure vérité, qu’étant un jour ou plutôt une nuit dans les parages du cap de Bonne-Espérance, un malavisé de mousse jeta par-dessus bord un chat, vivant qu’il avait pris en grippé, et qu’aussitôt, comme cela ne pouvait manquer d’arriver, un affreux coup de vent assaillit le navire, lequel, ne pouvant supporter une seule aune de toile, fut obligé de fuir à sec devant la bourrasque, avec la vitesse d’au moins douze nœuds. » Ils étaient dans cette position, lorsque, vers minuit, ils virent tout à coup, à leur grand étonnement, un bâtiment de construction étrangère courir droit dans le lit du vent, qui était cependant alors dans sa plus grande violence. Pendant qu’ils examinaient ce singulier navire, dont les voiles pendaient en lambeaux, et dont les œuvres mortes étaient recouvertes d’une épaisse couche de coquillages et d’herbes marines, comme s’il n’eût pas été nettoyé depuis de longues
» — Au nom de Dieu tout-puissant, je l’ordonne de qui Lier mon bord ! s’écria enfin le capitaine, en s’adressant au spectre. À peine ces mots eurent-ils été prononcés, qu’un cri long et aigu, tel que mille voix humaines n’auraient pu en produire un semblable, domina le bruit de la tempête, qu’un horrible coup de tonnerre ébranla le bâtiment jusqu’à sa quille… »
Le navire eut le bonheur d’échapper ; ce qui est rare.
On dit encore que ceux qui ont reçu les lettres que les matelots-fantômes du navire appelé le Voltigeur hollandais envoyaient à leurs parents et amis ont vu qu’elles étaient adressées à des personnes qui n’existent plus depuis des siècles.