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Dictionnaire national et anecdotique par M. De l’Épithète/CONJURATION

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CONJURATION : je l’ai définie au mot Complot. (Voyez ce mot.)

Parmi les trames infernales que le despotisme au désespoir a ourdies contre notre liberté, on pourroit distinguer plusieurs conjurations, si toutes elles n’étoient problématiques, ou du moins si l’on ne s’efforçoit pas de nous les rendre telles.

La plus fameuse (mais qui ne fut pas la premiere), est celle qui a donné lieu à la révolution, qui a déterminé un tas d’hommes illustres à voyager, & forcé un autre tas, qui n’avoit pas de goût pour les voyages, à paroître citoyens. Le bruit public donne à cette conjuration des chefs que je n’ose nommer… Lorsque je doute de leur crimes, & que je me plais à en douter, les circonstances qu’on me cite, les préjugés qu’on a contr’eux, approchent si fort de la conviction, que la plume me tombe des mains, & que le respect, non pour les coupables, mais pour le principal offensé à qui ils tiennent, me contient dans le silence.

Dans la seconde conjuration, il n’y a eu que des bouteilles cassées ; c’étoit un complot de cabaret, que j’aurois inséré dans cet article, si le public ne lui donnoit encore des chefs illustres.

On donne un seul chef à la troisieme conjuration que le public nomme, & que terre étrangere contient. On pourroit dire ici ce qu’un des compagnons de Pizarre disoit à ce général, lorsque les Péruviens voulurent faire une contre-révolution : Quoi ! encore un Inca ! Et que nous importe que les Incas soient nos ennemis, réparti Pizarre, quand le soleil est pour nous ?[1]

Si la premiere conjuration étoit atroce, la troisieme ne fut qu’extravagante.

La quatrieme conjuration dont il est fort question, est celle dont on accuse le marquis de Favras, qui jure que c’est un conte, & n’est pas le seul qui le jure. Mais ce conte, tout aussi extravagant, tout aussi absurde que celui qui l’a précédé, prend un tour de probabilité qui pourra nuire à M. de Favras, qui, s’il a un démenti, auroit un vilain soufflet, avec d’autant plus de raison qu’il n’est réclamé par aucun canton.

Je ne mets point au nombre des conjurations, des voyages faits en Dauphiné, des coalitions réelles ou supposées, des assemblées tenues aux Augustins, & les projets d’enrôlement de la rue Mazarine, &c. &c. Je n’aurois jamais fini si je voulois mentionner tout ce qu’on a tramé, & tout ce qu’on n’a osé tramer. Au reste, M. Du … travaille à une histoire des conjurations qui fera une terrible histoire, si M. Des …, son ami, lui tient parole, & revoit le manuscrit. Ce dernier est comme Crébillon pere, il broie du sang.

Au reste, le lecteur qui est pressé de lire, & a le bon esprit de ne croire qu’un centieme de ce qui est écrit, peut s’en tenir, en attendant, aux révolutions-Tournon.

  1. Les Incas se disoient enfans du soleil ; c’étoit une race royale.