Dictionnaire philosophique/Garnier (1878)/Axe

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Éd. Garnier - Tome 17
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AXE[1].

D’où vient que l’axe de la terre n’est pas perpendiculaire à l’équateur ? pourquoi se relève-t-il vers le nord, et s’abaisse-t-il vers le pôle austral dans une position qui ne paraît pas naturelle, et qui semble la suite de quelque dérangement, ou d’une période d’un nombre prodigieux d’années ?

Est-il bien vrai que l’écliptique se relève continuellement par un mouvement insensible vers l’équateur, et que l’angle que forment ces deux lignes soit un peu diminué depuis deux mille années ?

Est-il bien vrai que l’écliptique ait été autrefois perpendiculaire à l’équateur, que les Égyptiens l’aient dit, et qu’Hérodote l’ait rapporté ? Ce mouvement de l’écliptique formerait une période d’environ deux millions d’années : ce n’est point cela qui effraye, car l’axe de la terre a un mouvement imperceptible d’environ vingt-six mille ans, qui fait la précession des équinoxes, et il est aussi aisé à la nature de produire une rotation de vingt mille siècles qu’une rotation de deux cent soixante siècles.

On s’est trompé quand on a dit que les Égyptiens avaient, selon Hérodote, une tradition que l’écliptique avait été autrefois perpendiculaire à l’équateur. La tradition dont parle Hérodote n’a point de rapport à la coïncidence de la ligne équinoxiale et de l’écliptique ; c’est tout autre chose.

Les prétendus savants d’Égypte disaient que le soleil, dans l’espace de onze mille années, s’était couché deux fois à l’orient, et levé deux fois à l’occident. Quand l’équateur et l’écliptique auraient coïncidé ensemble, quand toute la terre aurait eu la sphère droite, et que partout les jours eussent été égaux aux nuits, le soleil ne changerait pas pour cela son coucher et son lever. La terre aurait toujours tourné sur son axe d’occident en orient, comme elle y tourne aujourd’hui. Cette idée de faire coucher le soleil à l’orient n’est qu’une chimère digne du cerveau des prêtres d’Égypte, et montre la profonde ignorance de ces jongleurs qui ont eu tant de réputation. Il faut ranger ce conte avec les satyres qui chantaient et dansaient à la suite d’Osiris ; avec les petits garçons auxquels on ne donnait à manger qu’après avoir couru huit lieues pour leur apprendre à conquérir le monde ; avec les deux enfants qui crièrent bec pour demander du pain, et qui par là firent découvrir que la langue phrygienne était la première que les hommes eussent parlée ; avec le roi Psamméticus, qui donna sa fille à un voleur, pour le récompenser de lui avoir pris son argent très-adroitement, etc, etc.

Ancienne histoire, ancienne astronomie, ancienne physique, ancienne médecine (à Hippocrate près), ancienne géographie, ancienne métaphysique : tout cela n’est qu’ancienne absurdité, qui doit faire sentir le bonheur d’être nés tard.

Il y a sans doute plus de vérité dans deux pages de l’Encyclopédie, concernant la physique, que dans toute la bibliothèque d’Alexandrie, dont pourtant on regrette la perte.



  1. Questions sur l’Encyclopédie, deuxième partie, 1770. (B.)


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