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Dictionnaire portatif de peinture, sculpture et gravure/BLANC

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BLANC. Il y a pluſieurs blancs pour l’uſage de la Peinture. Le blanc de plomb eſt celui que l’on employe le plus, parce qu’il eſt le plus beau. On le trouve chez les Marchands de couleurs, en écailles, en trochiſques, & broyé à l’huile. Il ſe tire du plomb que l’on enterre : au bout de pluſieurs années il ſe forme du plomb même des écailles qui deviennent d’un fort beau blanc. Félibien dit que ce blanc a quelques mauvaiſes qualités, mais que l’huile avec lequel on le broye, les corrige. Le Dictionnaire de Trévoux dit, que le blanc de plomb eſt une rouille de plomb, qu’elle ſe fait à la vapeur du vinaigre, & qu’on l’appelle autrement céruſe ; mais il ſe trompe ; car la céruſe eſt bien différente du blanc de plomb ; elle n’eſt pas d’un ſi beau blanc, & eſt beaucoup plus groſſiere ; elle ſe fait auſſi différemment comme on peut le voir dans l’article céruſe.

Les Peintres ſe ſervent d’un autre blanc, quand ils peignent à fraiſque. Il ſe fait avec la chaux éteinte depuis long-tems, & de la poudre de marbre blanc, preſque autant de l’un que de l’autre. Quelquefois il ſuffit d’un quatriéme partie de poudre de marbre ; cela dépend de la qualité de la chaux, & ne ſe connoît que par la pratique ; car s’il y a trop de marbre le blanc noircit. Felib.

BLANC de perle, eſt un blanc un peu gris, qui ſe fait avec du Bismuth.

BLANC & Noir, ſorte de Peinture à fraiſque, qui ſe conserve à l’air. Les Italiens la nomment Sgraffito, qui veut dire égratigné ; parce qu’en effet ce n’eſt, à proprement parler, qu’un deſſein égratigné, qui ſe fait de la maniere ſuivante.

On détrempe du mortier de chaux & de ſable à l’ordinaire, auquel on donne une couleur noirâtre, en y mêlant de la paille brûlée. De ce mortier on fait un enduit bien uni, que l’on couvre d’une couche de blanc de chaux, ou d’un enduit bien blanc & bien poli. Après cela on ponce les cartons deſſus pour deſſiner ce que l’on veut, & le graver enſuite avec un fer pointu, pour découvrir l’enduit ou blanc de chaux qui cache le premier enduit compoſé de noir, ce qui fait que l’ouvrage paroît comme deſſiné à la plume & avec du noir. Lorſqu’il eſt achevé, on a coutume de paſſer ſur tout le blanc qui ſert de fond, une teinte d’eau un peu obſcure, pour détacher davantage les figures, & faire qu’elles paroiſſent comme celles qu’on lave ſur du papier. Mais ſi l’on ne repréſente que des groteſques ou feuillages, on ſe contente d’ombrer ſeulement un peu le fond avec cette eau, auprès des contours qui doivent porter l’ombre. Félib.

BLANC à dorer, eſt un blanc que les Doreurs couchent ſur le bois, pour faire l’aſſiette de l’or en feuilles.

Ce blanc ſe fait avec du plâtre bien battu, que l’on faſſe dans des tamis bien fins ; on le noye d’eau, on l’affine le plus qu’on peut, & l’on en forme des petits pains que l’on fait bien ſécher. On ſe ſert auſſi du blanc de Rouen ou d’Eſpagne, ou de Troyes. Il y a une Carriere à Séves près de Paris, dont la terre eſt fort blanche, & qui étant affinée peut auſſi ſervir. Félib.

BLANC. Couleur la plus éclatante de toutes, & qui ſe marie avec les autres pour en faire de différentes teintes à l’infini.

Le Blanc de plomb eſt le meilleur & le plus beau que les Peintres puiſſent employer. C’eſt une eſpece de rouille de plomb, faite par artifice. Il ſeroit mieux aux Artiſtes de le faire eux-mêmes, ou de l’acheter en écailles, & le faire broyer ſous leurs yeux, pour éviter d’être trompé par la malverſation de quelques Marchands qui y mêlent de la céruſe quand ils le broyent chez eux, parce qu’elle eſt moins chere, & vendent ce mélange pour vrai blanc de plomb.