Dictionnaire pratique et historique de la musique/Concert

La bibliothèque libre.
◄  Con
Concertant  ►

Concert, n. m. 1. Exécution musicale publique ou privée donnée en dehors de l’église ou du théâtre par un seul ou plusieurs musiciens. Dans le premier cas, on tend à adopter le mot angl. recital, en réservant le mot concert à l’acception de pluralité que comporte son étym., du lat. concentus, concinere. La Chronique du Religieux de Saint-Denis, décrivant l’entrée de Charles vi à Paris après son sacre (1380), dit : « Et ubique musicorum concentus instrumentorum auditus ». C’est, en effet, dans la participation des bandes de ménestrels aux fêtes de cour, aux cortèges, aux processions, aux divertissements populaires, qu’il faut chercher l’origine des C., dans toutes les contrées de l’Europe. À Paris, les premiers C. régulièrement organisés furent ceux de l’Académie fondée en 1570 par Baïf (Voy. Académie.) Ils eurent une courte existence et furent remplacés, pendant le xviie s., par des entreprises individuelles, également éphémères. Les « maîtres pour jouer des instruments » donnaient des C. chez eux « pour s’attirer pratique », et les riches amateurs tenaient pour élégant de réunir chaque semaine, en leurs salons, des « assemblées de C. ». Le 18 mars 1725 fut inauguré dans la salle des Suisses, au palais des Tuileries, le fameux C. spirituel fondé par Anne Danican Philidor et dont les séances, données aux jours où l’observation des fêtes religieuses suspendait les représentations de l’Opéra, ne prirent fin qu’à l’entrée de la Révolution. Son répertoire, pendant cet espace d’environ soixante ans, s’alimenta d’œuvres vocales et instrumentales composées par des maîtres français, et d’importations étrangères, que leurs auteurs venaient souvent apporter ou exécuter en personne. En 1762, les musiciens ordinaires du C. étaient au nombre de 93, dont 53 chanteurs et 40 instrumentistes, non compris le premier et le second chefs d’orchestre, Dauvergne et Aubert. Les séances servaient de modèle à celles des académies de province, et leur succès fit naître à Paris, vers 1775, une entreprise rivale, le C. des amateurs, appelé C. de la loge olympique, du nom du local où il se transporta en 1780. Pendant la Révolution, le public parisien fréquenta le C. de la rue de Cléry et les « exercices » public des élèves du Conservatoire, où furent pour la première fois entendus en France quelques fragments des Symphonies de Beethoven. Vers 1825-1830, les séances de l’école de Choron procurèrent la connaissance de plusieurs œuvres de Hændel et de maîtres anciens. Le 9 mars 1828 eut lieu, sous la direction de Habeneck, la première séance de la Société des Concerts du Conservatoire. On y exécuta la Symphonie héroïque de Beethoven. La perfection des exécutions a placé au premier rang des orchestres du monde cette société, qu’ont dirigée successivement, depuis 1828, Habeneck ; 1849, Girard ; 1860, Tilmant ; 1864, Hainl ; 1872, Deldevez ; 1885, Garcin ; 1892, Taffanel ; 1901, Marty ; 1908, Messager. Plusieurs tentatives furent faites, vers le milieu du xixe s., pour établir d’autres C., auprès du Conservatoire et dans des conditions plus accessibles. La Société des jeunes artistes, la Société Sainte-Cécile précédèrent, sans réussir, les C. populaires fondés et dirigés par J. Pasdeloup, dont la première séance eut lieu le 27 octobre 1861 et qui rendirent pendant un quart de siècle les meilleurs services. L’Association artistique, plus connue sous les noms de C. du Châtelet, ou C. Colonne, fut fondée en 1874 par Éd. Colonne, la Société des nouveaux Concerts, par Lamoureux, en 1880. Depuis sa construction en 1878, la salle des fêtes du palais du Trocadéro a abrité de nombreux festivals et des C. d’orgue, entre lesquels ceux d’Alex. Guilmant méritent un souvenir particulier. Auprès d’eux, les C. de la Schola Cantorum, succédant aux séances des « Chanteurs de Saint-Gervais », ont développé le goût des auditions historiques et préparé un public à la Société Bach, à la Société Hændel, à la « Société des instruments anciens ». On ne doit pas oublier l’activité des groupements consacrés à la musique de chambre et notamment le travail de la Société des derniers quatuors de Beethoven, pour la diffusion de ces suprêmes chefs-d’œuvre. Le rôle des C. dans la vie musicale ne s’est pas développé d’une façon moins continue ni moins large chez les autres nations de l’Ancien et du Nouveau Monde. Les C. se sont donnés d’abord en Italie dans les églises et dans les « hôpitaux » ou orphelinats, qui furent le berceau des Conservatoires ; en chaque grande ville de la péninsule existe aujourd’hui de brillantes institutions symphoniques ou chorales. En Belgique, les C. du Conservatoire de Bruxelles ont tenu, sous la direction de Gevaert, une place importante dans la culture de l’art. La Grande-Bretagne a compté de bonne heure un nombre élevé de sociétés et d’entreprises de C., entre lesquelles on nommera, à Londres, l’Academy of ancient music (Académie de musique ancienne) (1710-1792), le Professionnal C. (1785), la Philharmonic Society (1813), les C. du Cristal Palace, les Monday and Saturday popular C. (C. populaires du lundi et du samedi), la Sacred harmonic Society, le Bach choir, etc., et, dans les grandes villes du Royaume-Uni, le Manchester orchestra, les unions chorales de Glasgow, Édimbourg, etc. (Voy. Festival.) La plus célèbre des institutions de C. de l’Autriche, celle de la Société des Amis de la musique, à Vienne, date de 1772. Les C. du Gewandhaus (halle aux draps) de Leipzig furent fondés en 1781, comme suite à des séances inaugurées en 1743 ; dirigés successivement par Holler, Mendelssohn, Reinecke, ils furent la citadelle du classicisme en Allemagne, pour la musique instrumentale. La Singakademie (Académie de chant) de Berlin représentait les mêmes traditions pour la musique vocale. C’est