Dictionnaire pratique et historique de la musique/Cornet
Cornet, n. m. 1. Ancien instrument
à vent, appelé plus précisément
C. à bouquin, d’après la forme de son
embouchure, qui était une sorte de
bocal. Il se construisait en bois, en
cuir, en métal et formait une famille
largement employée depuis la seconde
moitié du xve s. jusqu’au milieu du
xviie, époque où elle disparut devant
les progrès du hautbois et du basson.
L’orchestre de danse que représente
la tapisserie de N.-D. de Nantilly
(xve s.) se compose d’un grand et
d’un petit cornets droits et de deux
C. recourbés, du type dit cornetto
torto. Virdung (1511) et Agricola (1545) ne donnent que des figures
de C. droits, appelés en Allemagne
Zinke. Leur sonorité forte et pénétrante
était alors grandement appréciée.
Cornets à bouquin.
Augustin de Vérone, joueur de
C. au service de Charles-Quint en
1502 et plus tard attaché à la musique
du roi de France, se rendit
célèbre par ses exécutions, tant à la
chambre qu’à la chapelle où il jouait
« avec les chantres ». En 1532, Marc
de Vérone et plusieurs cornettistes
français et étrangers servaient le roi
François Ier. Sous Louis xiii, trois
« dessus muets ou cornets » remplaçaient
dans la chapelle royale autant
de voix aiguës ; l’un d’eux était Claude
Quiclet, dont Mersenne vantait l’habileté
en le disant capable de « sonner
une chanson de 80 mesures sans
reprendre haleine ». On composait
des concerts de C., comprenant cinq
modèles d’instruments, que Jacques
Cellier (1585) nomme « dessus,
hautecontre, taille, sacqueboute et
pedalle » et qui étaient appelés en
Italie, d’après leur forme extérieure,
cornettino, cornetto diritto (droit),
C. curvo (courbe), C. torto (tordu,
ou recourbé sur lui-même). Le musée
du Conservatoire de Paris possède
plusieurs dessus de C. en cuir ou en
bois recouvert de cuir, percés de
7 trous, tailles de C., en cuir, à pans
coupés, de 1 m. 07 de longueur, et basse
de C. en forme de S, en cuir, de fort
diamètre. L’orchestre de l’Orfeo, de
Monteverde (1607), comprend plusieurs
parties de C. La dernière apparition
d’un instrument de cette famille
dans l’orchestre eut lieu dans
la version italienne de l’Orfeo de
Gluck (1762), où une partie de cornetto
s’ajoute à trois parties de trombones
pour constituer un quatuor
d’instruments de cuivre qui double
le quatuor à cordes dans le chœur :
Ah ! se intorno a quest’ urna funesta.
|| 2. Instrument à vent, en cuivre,
à embouchure, à tube conique, d’une
longueur théorique de 1 m. 314, enroulé
en forme d’un cor de petites dimensions.
Abandonné aujourd’hui, il était
appelé naguère C. de poste ou de
postillon et servait, dans le temps
où la circulation se faisait par voitures
ou par « diligences », sur les
grandes routes, à annoncer par des
fanfares éclatantes l’arrivée ou le
passage du véhicule. Son timbre était
éclatant, son répertoire « guilleret ».
Construit en ut, il sonnait les mêmes
harmoniques que le clairon. || 3. Instrument
à vent, en cuivre, à embouchure
et à pistons, appelé C. à pistons,
qui est proprement un clairon muni
de trois pistons. On le construit en si
bémol, avec un corps de rechange
en la, quelquefois en ut. Son tube
conique a pour longueur théorique
1 m. 475. Joué sans l’aide des pistons,
il fournit exactement les mêmes sons
que le clairon. Avec les pistons, son
étendue dans le ton de si bémol est
de deux octaves et une quinte à partir
du mi naturel de la clef de fa. Le premier
spécimen en fut construit à
Paris par Halary et essayé, sous le
nom de C. d’harmonie, à l’Opéra,
dans Guillaume-Tell de Rossini (1829).
Cornet à pistons.
Bien qu’employé,
à de
rares intervalles,
par Meyerbeer,
Gounod, Berlioz,
la vulgarité
irrémédiable de son
timbre l’a tenu éloigné
de l’orchestre
symphonique ou dramatique. Mais sa
facilité d’exécution a assuré sa fortune
dans les musiques régimentaires,
les fanfares civiles et les orchestres
de danse. Quelques musiciens se sont
fait une renommée de virtuose sur
le C., notamment Arban († 1889),
qui a laissé une méthode pour cet
instrument. || 4. Jeu d’orgues, de la
série des jeux de mutations composés.
On ne le fait pas parler dans le grave.
À partir de l’ut du milieu de l’échelle,
il fait ordinairement entendre sur
chaque note fondamentale les cinq
premiers sons harmoniques :
Les orgues importantes ont jusqu’à trois jeux de C., placés au Grand Orgue, au Récit et en Écho. Ces jeux ont beaucoup de puissance et sont d’un grand effet. || 5. C. acoustique, appareil destiné à corriger le défaut de sensibilité de l’ouïe, chez les personnes atteintes de surdité. On construit un grand nombre de variétés de C. acoustiques, qui reposent toutes sur le principe de la concentration et l’amplification des vibrations.