À valider

Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle/Astragale

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Assise <
Index alphabétique - A
> Attributs
Index par tome

ASTRAGALE, s. m. C’est la moulure qui sépare le chapiteau du fût de la

colonne. Dans les ordres romains, l’astragale fait partie du fût ; il est composé d’un cavet, d’un filet et d’un tore (1).
Cette forme est suivie généralement dans les édifices des premiers temps du moyen âge. Le fût de la colonne porte l’astragale ; mais, à partir du XIIe siècle, on voit souvent l’astragale tenir au chapiteau, afin d’éviter l’évidement considérable que son dégagement oblige de faire sur le fût. Tant que la colonne est diminuée ou galbée, cet évidement ne se fait que dans une partie du fût ; mais quand la colonne devient un cylindre parfait, c’est-à-dire lorsque son diamètre est égal du bas en haut, à dater des premières années du XIIIe siècle, l’astragale devient, sans exception, un membre du chapiteau. Son profil varie du Xe au XVIe siècle, comme forme et comme dimension. Dans les édifices de l’époque carlovingienne, l’astragale prend, relativement à la hauteur du chapiteau et au diamètre de la colonne, une plus grande importance que dans les ordres romains ; le cavet s’amoindrit au dépend du tore, ou disparaît complètement (2)[1], ou bien est remplacé par un ornement.
La forme de l’astragale romain faisant partie du fût de la colonne est surtout conservée dans les contrées où les monuments antiques restaient debout. À Autun, à Langres, dans la Bourgogne, dans la Provence, en Auvergne, l’astragale conserve habituellement ses membres primitifs jusqu’au XIIIe siècle ; seulement, pendant le XIIe siècle, ils deviennent plus fins, et le cavet, au lieu de se marier au fût, en est séparé par une légère saillie (3)[2]. Quelquefois, à cette époque de recherche dans l’exécution des profils, le tore de l’astragale, au lieu de présenter en coupe un demi-cercle, est aplati (4)[3], ou est composé de fines moulures, ou taillé suivant un polygone (5)[4]. À mesure que la sculpture des chapiteaux devient plus élégante et refouillée, que les diamètres des colonnes deviennent moins forts,
les astragales perdent de leur lourdeur primitive et se détachent bien réellement du fût.
Voici (6) un astragale de l’un des chapiteaux du chœur de l’église de Vezelay (premières années du XIIIe siècle) ; (7) des chapiteaux de la galerie des rois de Notre-Dame de Paris (même époque). Puis enfin nous donnons (8) le profil de l’astragale adopté presque sans exception pendant le XIIIe siècle ; profil qui, conformément à la méthode alors usitée, sert de larmier à la colonne.

Quelquefois dans les édifices de transition, l’astragale est orné ; dans le chœur de la cathédrale de Paris, quelques chapiteaux du triforium sont munis d’astragales composés de rangées de petites feuilles d’eau (9) ; plus tard encore trouve-t-on, surtout en Normandie, des astragales décorés, ainsi qu’on peut le remarquer dans le chœur de la cathédrale du Mans (10). Pendant le XIVe siècle, les astragales s’amaigrissent, leurs profils deviennent moins accentués (11).

Au XVe siècle, ils prennent au contraire de la lourdeur et de la sécheresse, comme tous les profils de cette époque ; ils ont une forte saillie qui contraste avec l’excessive maigreur des colonnettes ou prismes verticaux (12). Il n’est pas besoin d’ajouter qu’au moment de la renaissance l’astragale romain reparaît avec les imitations des ordres de l’antiquité.

  1. A, de la crypte de l’église Saint-Léger à Soissons ; B, de la crypte de l’église de Saint-Denis en France ; C, de la nef de l’église Saint-Menou (Bourbonnais).
  2. Cathédrale de Langres.
  3. Clocher vieux de la cathédrale de Chartres.
  4. Salle capitulaire de Vézelay, A ; église de Montréal, B (Bourgogne).