Dictionnaire topographique, historique et statistique de la Sarthe/CÉRANS

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CÉRANS ET FOULLETOURTE ; CERENS ; CEREN, CERAN, SERENS : voir l’étymologie de ce nom à l’alinéa antiquités. Commune cadastrée, du canton et à 11 kilom. 1/2 N. N. O. de Pontvallain ; de l’arrondissement et à 20 kil. N. N. E. de la Flèche ; à 22 kil. S. S. O. du Mans. Anciennement du doyenné d’Oizé, de l’archidiaconé de Château-du-Loir, du diocèse et de l’élection du Mans. — Distances légales, 13, 22 et 25 kilomètres.

descript. Bornée au N. O. et au N., par la Suze et Roizé ; au N. E., par Pârigné-le-Pôiin ; à l’E., par Yvré-le-Pôlin et Oizé ; au S., par la Fontaine-S -Martin ; à l’O., par Mézerai. La forme de cette commune est celle d’un carré presque régulier, dont les angles correspondent aux quatre points cardinaux. Diamètres centraux : d’angle à angle, du N. au S., 7 kilomètres ; de l’E. à l’O., 9 kilom. ; du milieu des côtés, du N. E au S. O., et du N. O au S. E., 5 kil. 1/2. Cette commune a deux points principaux d’agglomération, le bourg de Cerans, situé presque à l’extrémité E. de son étendue, et le joli village de Foulletourte, formant à-peu-près le point central, bâti sur les deux côtés de la route royale de Paris à Nantes, à 1 kil. 6 hectom. O. S. O. du bourg. (Voir pour tout ce qui est particulier à ce village l’article foulletourte). — Le bourg de Cerans, assez joli, situé dans un vallon de peu d’étendue, se compose de 75 maisons formant plusieurs petites rues, qui entourent l’église de l’O. à l’E. par le N. Celle-ci ayant deux bas-côtés, fort bien décorée, appartient au genre gothique. Clocher en flèche élevée. Cimetière attenant au bourg au S., clos de murs, planté d’arbres autrefois, et qui devrait l’être encore, son exposition pouvant le rendre nuisible à la salubrité du bourg. — Le hameau de la Soultière, à 12 hect. au S. du bourg, est célèbre pour avoir vu naître le savant naturaliste P. Belon. Voir hist. civ.

populat. De 306 feux autrefois, elle en compte aujourd’hui 502, qui se composent de 1,112 individus mâles, 1,102 femelles ; total, 2,214, dont 172 dans le bourg, 498 dans le village de Foulletourte ; le surplus épars dans la campagne.

Mouv. décenn. De 1793 à 1802, inclusivement : mariages 160 ; naissances, 609 ; décès, 481. — De 1803 à 1812 ; mar., 152 ; naiss., 598 ; déc., 561. — De 1813 à 1822 : mar., 172 ; naiss., 599 ; déc., 567.

hist. eccles. Eglise dédiée à la Vierge ; belle assemblée le 15 août, fête de l’Assomption. La cure était à la présentation du prieur d’Oizé. — Suivant la tradition locale, il exista au lieu où se trouve l’église de Cerans, un coudrier dans lequel la Vierge apparaissait et faisait des miracles : on construisit d’abord une chapelle près de cet arbrisseau, laquelle fut successivement agrandie au point où elle est aujourd’hui, à mesure de l’accroissement de la population. — Sur le chemin de Foulletourte à Oizé, on rencontre la chapelle du Léard, nommée ainsi d’un peuplier noir, léard ou liard, vulgairement, qui était planté dans cet endroit et dans lequel était placée une statue de la Vierge : il se passa, dit aussi la tradition, des choses surnaturelles en ce lieu. — Une autre chapelle, sous l’invocation de S.te -Catherine, bâtie sur un petit monticule, existait au passage de Foulletourte ; vendue pendant la révolution, on a construit sur son emplacement l’auberge du Faisan. Cette chapelle fut possédée à la fin du 15e siècle par Gilles de Luxembourg, prêtre, protonotaire du S.-Siége, lequel en rend déclaration le 6.e d’avril 1502, à Jean le Maczon, Chevalier, seigneur de Foulletourte, d’Auvers et de Berus. — Sept bénéficiers se partageaient les dixmes de Cerans : le curé, dont le prieur de Château-en-l’Hermitage venait prendre le tiers des grains ; le prieur d’Oizé, pour un tiers ; celui de Roizé, pour un sixième ; le chapelain de la chapelle S.te -Catherine ; le prieur de la Fontaine- S.-Martin ; et le chapelain de la chapelle S. -Lazare d’Oizé. — Nous parlons à l’article Bourrai, du motif des prières qui se font dans l’église de Cerans, pour le repos de l’âme de la mère de S.-Louis.

hist. féod. La seigneurie de paroisse était annexée à la vicomté de Foulletourte et au manoir de la Cour du même nom.

Cette vicomté appartenait en dernier lieu à la maison de Broc, à un membre de laquelle appartient encore la maison de la Cour. — Un petit fief, attaché à la métairie de la Jeunaisière, était la propriété de M. Charles Le Paige, neveu de l’auteur du Dictionnaire du Maine. Voir, pour le surplus de l’histoire seigneuriale, l’article foulletourte.

hist. civ. On prétend, et cela paraît certain, que les Anglais campèrent dans la lande qui occupe le sud du territoire de Cerans ; qu’ils en furent débusqués par le connétable Duguesclin ; que, dans leur fuite vers Pontvallain, ils y enterrèrent de l’argent ; et que, trois siècles après, trois anglais vinrent le déterrer nuitamment et en chargèrent plusieurs mulets. « En bêchant la terre aux environs du bourg, dit Le Paige, on trouve une grande quantité d’ossemens humains, ce qui fait juger qu’il s’y est donné un combat. » — La commune de Cerans a été le théâtre de plusieurs événemens remarquables, pendant les guerres civiles de l’ouest. Ces événemens ayant eu lieu au passage de Foulletourte, c’est à cet article que nous en faisons mention.

Françoise Gaudin, épouse du sieur Tansorier, légua à la commune de Cerans, les bordages de la Vieille-Moite en la Suze et de la Tesserie, en Cerans, pour l’établissement d’écoles de charité. Un instituteur et une institutrice primaires, ont chacun une allocation sur cette dotation, pour l’instruction gratuite des enfans des indigens.

On a dit longtemps que le célèbre voyageur et naturaliste P. Belon était originaire de la paroisse d’Oizé. Né au hameau dé la Soultière, où l’on voit deux très-anciennes maisons dont l’une paraît avoir été son berceau, il appartient bien certainement à la commune de Cerans, qui se fait honneur de le revendiquer. Oizé peut aisément se consoler de cette perte, ayant donné le jour au P. Mersenne, qui n’a pas moins de célébrité. « Tous les amis de la science et de leur pays, (nous écrit M. Lahaye, chirurgien et naturaliste amateur, qui possède à Foulletourte un cabinet très-intéressant d’objets d’histoire naturelle), désireront, comme moi, qu’un monument convenable, puisse consacrer sur le lieu, l’honorable souvenir de la naissance de P. Belon ; et qu’une inscription, placée au coin de la rue de Foulletourte par où on va à la Soultière, indique au voyageur curieux sa proximité, et l’engage à s’écarter un instant de sa route, pour faire ce pèlerinage au lieu sacré, berceau de l’homme célèbre qui, le premier en France, a r’ouvert avec succès aux naturalistes, la carrière des Aristote, des Pline, des Mathiole, des Dioscoride, que l’ignorance de plusieurs siècles avait fermée. » Voir à la biographie, la notice sur P. Belon.

antiq. Il en est de l’étymologie du nom de Cerans comme de tant d’autres, à la recherche desquelles on ne parvient qu’à s’égarer. On a cru que ce nom pouvait venir de l’expression se rend, se soumet, employée dans les capitulations, lors des guerres des seigneurs dans le moyen âge. Mais il fallait dans ces actes, désigner au préalable le lieu qui motivait l’assertion, et il n’est pas naturel de croire qu’elle eut pu le remplacer, relativement à Cerans. Au reste, n’est-il pas surprenant que, lorsqu’on fait venir d’isis, le nom de la commune voisine, Oizé ; on n’ait pas songé à trouver l’étymologie de celle-ci, dans le nom de cérès : le rapport de nom nous semblerait bien plus frappant.

On trouve sur le territoire de Cerans, de nombreux amas d’antiques scories de fer, notamment sur les bords du ruisseau le Fessard, au Gué-de-Chigné, où un banc très-épais de ces scories fait présumer qu’il y a existé une forge mue par l’eau. D’autres amas semblables, à Renonce et sur la lande de Bruon, ont dû être le résultat de forges à bras. Le minerai pouvait se rencontrer alors sur son territoire, du moins trouve-t-on près du lieu de la Coutrie, un grès roussard richement ferrugineux. — Nous avons décrit à l’article Bruon, le dolmen et le peulven qui se rencontrent sur cette lande.

hydrogr. Cette commune, qui se trouvait presqu’en entier comprise anciennement dans la forêt de Longaunai (voir ce mot), est arrosée par le ruisseau de Fessard, qui la traverse à-peu-près par son centre, de l’E. à l’O., en passant au-dessous de Foulletourte, à qui elle procure un abreuvoir et un lavoir, et la limite à l’O. ; celui de la Poterie, coule du N. E. au S. O., passe au N. du bourg de Cerans, et va se jeter dans le précédent, à 8 hectom. à l’O. de Foulletourte : cours, 4 kil. 1/2 ; l a petite rivière de Vesanne, l’arrose et la limite au S. O. — Moulins de Flouet, de Foulletourte, Neufs, Berseger, tous à blé, sur le Fessard. — L’étang de la Forterie, dans la lande du Bourrai, remis en eau depuis quelques années, est peuplé de carpes, tanches, goujons et brochets : on le pêche tous les trois ans.

géolog. Sol montueux, formant plusieurs collines assez élevées, dont l’une coupe la commune du N. au S. jusqu’à son centre, puis au S. O. jusqu’à son extrémité ; une seconde forme un plateau qui domine les deux parties agglomérées, du N. E. au S. E. et au S. Deux mamelons au N. O., composent ce qu’on appelle le pays haut de Cerans. De toutes ces hauteurs, la vue s’étend jusqu’au Mans, au N. ; et jusqu’aux monticules des Couévrons, au N. O. — Terrain secondaire et en partie d’alluvion, riche en productions minéralogiques, offrant au N., le grès ferrugineux et les sables ; à l’E., le calcaire secondaire et le tuffau, contenant des coquilles ; au S., le grès, recouvert d’un aggrégat de couleur brune, qu’on appelle petun, au S. O., le calcaire d’eau douce, par couches horizontales de 3 à 4 mètres de profondeur, renfermant des Lymnées ; à l’O., le calcaire jurassique, contenant différentes espèces d’Echinides, etc. Le silex corné, ou pierre cosse, est généralement recouvert d’un poudingue quartzeux, en roches considérables, qui s’élèvent au-dessus du sol. Un sable siliceux, fin, souvent grisâtre, recouvre toute la superficie des landes de cette commune.

Minéral. Chaux carbonatée spongieuse et pulvérulente ; quartz hyalin amorphe ; silex résinite ; fer sulfuré jaune ; fer hydroxidé géodique ; houille pyriteuse ? à 20, 30 pieds de profondeur ; lignites que l’on rencontre fréquemment lorsque l’on creuse des puits ; tourbes, dans le Bourrai ; schistes argileux ; terres à potier rouges, roses, jaunâtres, bleuâtres et blanches.

Fossiles : 2 Peignes ; Huître biauriculée, H. diluvienne ; Gryphée colombe ; 2 Térébratules ; 1 Lymnée ; 3 Echinides ; 2 Polypiers ; 2 Carpolithes ; bois fossiles de Palmier, et de 2 à 3 espèces d’arbres de la classe des dicotylédones.

Plant. rar. Campanula persicifolia, lin. ; C. patula, lin. ; Delphinium consolida, lin. ; Galanthus nivalis, lin. ; Helleborus fœtidus, lin. ; Lunaria annua, lin. ? ; Melampyrum arvense, lin. ; M. cristatum, lin. ; Menyanthes trifoliata, lin.. ; Ornithagalum umbellatum, lin. ; Physalis alkekengi, lin. ; Polygonatum uniflorum, desfont. ; Primula elatior, willd. ; Sanguisorba officinalis, lin., Saponaria officinalis, lin.

cadastr. La superficie totale de la commune est de 3,252 hectares, 33 centiares, divisés ainsi qu’il suit : — Terres labour., et terres plantées en châtaigniers, 1,660 hect. 35 ar. 40 centiar, ; divisées en 5 class., de 4, 9, 16, 28 et 37 f. ; — Jardins, 73-29-55 ; 4 cl. : 37, 55, 73, 91 f. — Vergers, 0-44-0 ; 2 cl. : 37, 55 f. — Vignes, 17-17-10 ; 4 cl. : 4, 9, 18, 28 f. — Prés, 305-08-80 ; 5 cl : 6, 15, 20, 48, 66 f. — Pâtures, 54-87-50 ; 3 cl. : 4, 9, 14 f. — Taillis et futaies, 210-37-80 ; 4 cl. : 4, 9, 18, 28 f. — Pinières, 405-57-40 ; 3 cl. : 4, 11, 21 f. — Landes, bruyères, friches, 368-04-50 ; 4 cl. : 1, 2, 6, 9 f. — Aulnaies, 1-39-0 ; à 9 f. — Étangs, 26-84-30 ; 3 cl. : 4, 6, 9 f. — Mares, 0-13-0 ; à 2 f . — Superficie des propriétés bâties, 18-27-50 ; à 37 f. Objets non imposables : Egl., cimet., 0-43-60. — Rout., chem. et places publiques, 106-87-40 ; — Riv. et ruiss., 3-16-15. = 547 maisons, en 10 cl., de 3 à 80 f. — 7 maisons hors class., estim. 990 f. — 2 poteries, ensemble à 90 f. — 4 fourneaux à chaux, 65 f. — 3 tuileries, 110 f. — 4 moulins, 230 francs.

Total du Revenu imposable, 56,256 f. 41 c.

contrib. Foncier, 8,451 f . ; pers. et mobil., 1,428 f. ; port. et fen., 399 f. — 88 patentés : droit fixe, 780 f. ; dr. proport., 527 f. Total, 11, 585 f. — Chef-lieu de perception.

cultur. Terres légères, sablonneuses en majeure partie, dans lesquelles on cultive très-peu d’orge et d’avoine, froment davantage, beaucoup plus de seigle et de sarrazin ; maïs, pommes de terre, chanvre et lin ; prés de mauvaise qualité ; vignes ; beaucoup d’arbres à fruits et de marronniers. — Elèves d’un petit nombre de chevaux et de bœufs, pour l’agriculture locale seulement ; une plus grande quantité de jeunes vaches, moutons, porcs ; volailles engraissées à la manière de Mézerai. — Environ 30 charrues ; 27 fermes principales, 91 bordages, 100 petites tenues ; Assolement triennal.

comm. agric. Point d’exportation de grains, si ce n’est à charge de retour. Chanvre, fil, fruits, cidre estimé ; marrons et châtaignes. Jeunes vaches, beaucoup de porcs gras, poulardes, autres volailles, menues denrées. Vin de peu de qualité, consommé sur les lieux.

comm. industr. Trois poteries, trois tuileries, quatre fourneaux à chaux. Les argiles et la pierre nécessaires comme matières premières, se trouvent sur le sol, ainsi qu’on le voit ci-dessus, art. Minéralogie. Les pinières de la commune fournissent aussi le bois pour leur cuisson. La poterie de Foulletourte, à laquelle on applique un vernis, surpasse en beauté, dit-on, celles de Prévelles et de Ligron : elle s’écoule dans le commerce avec facilité.

foir. et march. Petit marché, fixé au mardi, très peu important. — 4 foires d’un jour : 1.er mardi de février, 2.e de juin, 3.e de septembre, 2.e de décembre (Décr. du 20 juillet 1811). Elles offrent quelques débouchés pour les porcs et les fils et tiennent, comme les marchés, à Foulletourte. — Les habitans fréquentent, en outre, les marchés de la Flèche, de Malicorne, de la Suze et de Pontvallain.

rout. et chem. Traversée du N. E. au S. O. par la route royale n.°23, qui passe dans le village de Foulletourte, la commune est exploitée par plusieurs chemins communaux, qui aboutissent tous à ce village, le véritable point central, par son industrie, son commerce et ses marchés. Le 1.er de ces chemins, de Foulletourte à Parigné-le-Pôlin, par le bourg de Cerans, que fit construire feu M. le comte de Broc, ressemble à une grande route par son bon état ; les autres qui conduisent à Mézerai, à Oizé, à Roizé, sont, par la nature de leur sol sablonneux, faciles à pratiquer ; celui qui mène à la Suze, est le plus difficile à entretenir.

habit. et lieux remarq. De jolies maisons, de bonnes auberges, de beaux cafés, dans Foulletourte ; des cafés aussi dans le bourg de Cerans. Rien de remarquable d’ailleurs dans les noms de lieux.

établ. publ. Mairie, succursale, école primaire pour les garçons, une autre pour les filles ; voir hist. civ. Résidence d’un notaire, d’un huissier, d’un percepteur, d’une brigade de gendarmerie à cheval, et prison de dépôt pour le passage des prisonniers. Bureau de déclaration des boissons, débit de tabac, débit de poudre de chasse. Relais de poste aux chevaux, bureau de poste aux lettres.

etabl. partic. Deux officiers de santé, une sage-femme.