Dictionnaire universel d’histoire et de géographie Bouillet Chassang/Tibère

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TIBÈRE, Tiberius Claudius Nero, 2e empereur romain, né en 42 av. J.-C., eut pour père Tiberius Nero et pour mère Livie, qui divorça pour épouser Octave. Encore jeune, il se distingua dans les guerres contre les Cantabres et contre les Germains, battit les Pannoniens révoltés (12), et, après la mort de son frère Drusus (9), acheva la défaite des Germains (8); il reçut à son retour le consulat et la puissance tribunitienne pour cinq ans (6). Son ambition et l'antipathie qu'il montrait pour les deux fils aînés d'Agrippa et de Julie (Caïus et Lucius), dans lesquels il voyait des rivaux dangereux, le firent exiler à Rhodes, où il passa six ans. Rappelé à Rome en l'an 2 de J.-C., il y tint le rang de simple particulier; mais, après la mort de Lucius et de Caïus (2 et 3), Auguste, qui déjà lui avait fait épouser Julie, sa fille, l'adopta en lui faisant adopter à lui-même Germanicus, fils de Drusus, et le décora de nouveau de la puissance tribunitienne; enfin il le désigna pour son héritier l'an 13. A la mort d'Auguste (14), Tibère feignit de résister aux instances du sénat, qui lui déférait le Titre d'empereur, et voulut paraître ne prendre ce titre que malgré lui et pour un temps. Il ne tarda pas néanmoins à mettre à mort Posthume, le seul des fils d'Agrippa qui vécût encore ; bientôt après, Germanicus, qui avait excité sa jalousie parce qu'il était aimé de l'armée, expira en Syrie, empoisonné par Pison, qui n'était que son instrument (19). S'abandonnant de plus en plus librement à son caractère défiant et sanguinaire, Tibère, secondé par son favori Séjan, préfet des cohortes prétoriennes, encouragea les délations, multiplia les crimes de lèse-majesté, et fit tomber les têtes les plus illustres : un fils aîné de Germanicus périt; Agrippine, femme de ce héros, fut exilée ; Livie elle-même, à qui l'empereur devait tout, lui devint insupportable. Devenu vieux, Tibère, soit pour échapper à la haine des Romains, soit pour se livrer plus facilement à ses vices, quitta Rome pour fixer son séjour dans l'île de Caprée (26) : c'est de là qu'il gouvernait l'empire et qu'il envoyait à Rome ses ordres homicides. Pendant qu'il s'endormait dans le repos et la débauche, peu s'en fallut que Séjan, à qui il laissait presque toute l'autorité, ne le supplantât : averti à temps du complot, Tibère déjoua les projets du perfide ministre, le fit arrêter en plein sénat et mettre à mort, en 31. Lui-même, il mourut en 37 : le préfet Macron, qui s'était empressé de proclamer Caligula, l'étouffa au moment où il semblait revenir à la vie. Tibère, justement flétri par Tacite dans ses Annales, est resté le type d'un tyran cruel et soupçonneux ; toutefois ce prince ne manquait pas de talent pour le gouvernement : il fit fleurir la paix, l'ordre, la justice dans les provinces, maintint la discipline dans l'armée, et administra bien les finances; on trouva dans son trésor 2700 millions de sesterces (env. 550 millions de francs). Ce prince avait cultivé la littérature : il laissa quelques poëmes tant grecs que latins, et des Mémoires fort courts, qui étaient la lecture favorite de Domitien ; ces ouvrages sont perdus.