Je me penchai. J’étais dans le lieu ténébreux ;
Là gisent les fléaux avec la nuit sur eux ;
Et je criai : « Tibère ! — Eh bien ? me dit cet homme.
— Tiens-toi là. — Soit. — Néron ! » L’autre monstre de Rome 5Dit : « Qui donc m’ose ainsi parler ? — Bien. Tiens-toi là. »
Je dis : « Sennachérib ! Tamerlan ! Attila !
— Qu’est-ce donc que tu veux ? répondirent trois gueules.
— Restez là. Plus un mot. Silence. Soyez seules. »
Je me tournai : « Nemrod ! — Quoi ? — Tais-toi. » Je repris : 10« Cyrus ! Rhamsès ! Cambyse ! Amilcar ! Phalaris !
— Que veut-on ? — Restez là. » Puis, passant aux modernes,
Je comparai les bruits de toutes les cavernes,
Les antres aux palais et les trônes aux bois,
Le grondement du tigre au cri d’Innocent trois, 15Nuit sinistre où pas un des coupables n’échappe,
Ni sous la pourpre Othon, ni Gerbert sous la chape.
Pensif, je m’assurai qu’ils étaient bien là tous,
Et je leur dis : « Quel est le pire d’entre vous ? »
Alors, du fond du gouffre, ombre patibulaire 20Où le nid menacé par l’immense colère
Autrefois se blottit et se réfugia,
Satan cria : « C’est moi ! — Crois-tu ? » dit Borgia.
Je ne pense pas que Wikisource doive rétablir la ponctuation du dialogue s'il est seul à en prendre l'initiative, mais j'aimerais savoir si parmi les éditeurs de Victor Hugo certains le font ou si cela ne se pratique jamais. --Zephyrus18 mars 2007 à 08:10 (UTC)[répondre]
E.R.L. JOURNAL DE LA MISSION Édition d'août. An 60ème.
FONTAINE D'ARCADIE.
XXIII
Je me penchai. J'étais dans le lieu ténébreux;
Là gisent les fléaux avec la nuit sur eux;
Et je criai: "Tibère! Eh bien?" me dit cet homme.
"Tiens-toi là. -Soit. -Néron!" L'autre monstre de Rome
Dit: "Qui donc m'ose ainsi parler? -Bien. Tiens-toi là."
Je dis: "Sennachérib! Tamerlan! Attila!
-Qu'est-ce donc que tu veux?" répondirent trois gueules.
"Restez là. Plus un mot. Silence. Soyez seules."
Je me tournai: "Nemrod! -Quoi? -Tais-toi." Je repris:
"Cyrus! Ramsès! Cambyse! Amilcar! Phalaris!
-Que veut-on? -Restez là." Puis, passant aux modernes,
Je comparai les bruits de toutes les cavernes,
Les antres aux palais et les trônes aux bois,
Le grondement du tigre au cri d'Innocent trois,
Nuit sinistre où pas un des coupables n'échappe,
Ni sous la pourpre Othon, ni Gerbert sous la chape;
Pensif, je m'assurai qu'ils étaient bien là tous,
Et je leur dis: "Quel est le pire d'entre vous?"
Alors, du fond du gouffre, ombre patibulaire
Où le mal menacé par l'immense colère
Autrefois se blottit et se réfugia,
Satan cria: "C'est moi! -Crois-tu?" dit Borgia.
Victor Hugo