Encyclopédie des ouvrages de dames/Broderie au passé et Broderie d’or

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Thérèse de Dillmont (p. 109-132).

Bande. — Broderie avec fil d’or, cannetilles et lames.


Broderie au passé et Broderie d’or


En parlant de « Broderie au passé, et de « Broderie d’or », on songe généralement à des ouvrages exécutés sur des fonds très riches, tels que le velours, le brocart, la peluche et autres étoffes du même genre.

Il existe cependant une foule d’objets, brodés à la perfection avec des fils de soie et des fils d’or sur des tissus communs ; les broderies persanes et mauresques se distinguent surtout sous ce rapport, et le travail le plus délicat et le plus minutieux est souvent exécuté sur un fond de toile ordinaire.

Ceci nous prouve que tout genre de points est susceptible d’être appliqué sur n’importe quel fond de tissu, selon le goût et la fantaisie de chacun, et que, de même, les points de broderie au passé et une partie de ceux de la broderie d’or peuvent être reproduits avec toute espèce de fournitures, au nombre desquelles nous citerons en première ligne les articles de coton, lin, laine, ramie et soie de la marque D.M.C.

La broderie au passé dite aussi broderie plate. — Les dessins d’ornements, figurant des fleurs de convention, sont toujours les motifs les plus avantageux pour la broderie au passé. Il convient d’éviter autant que possible, de copier servilement des fleurs naturelles, à moins que l’on ne possède un talent suffisant pour produire des ouvrages à l’aiguille imitant parfaitement la peinture et qui aient une réelle valeur artistique.

Généralement on choisit, pour broder des fleurs et des feuilles petites et délicates, le point de plumetis, fig. 189 et 190, ou le point au passé empiétant.


fig. 221. Point au passé empiétant.
Point au passé empiétant (fig. 221). — Tous les points de ce genre de broderie doivent être faits de la même longueur. La longueur de ces points dépendra de la grosseur du brin employé ; ils seront courts avec un brin fin, et plus longs, avec un brin plus gros.

On fera empiéter les points les uns sur les autres, ainsi que l’explique la gravure. Les points se feront par rangs, ceux du second rang pénétrant suffisamment dans ceux du premier pour que les deux, points paraissent n’être qu’un seul et que les rangs soient noyés l’un dans l’autre.

On commence toutes les fleurs et toutes les feuilles par la partie extérieure et jamais par le calice ou par la tige. Donc, lorsque le dessin exige des teintes dégradées on commencera toujours par celle du bord, la hauteur de ton variant suivant l’éclairage de l’objet.

Les points suivront, dans tous les cas, le mouvement du dessin.


fig. 222. Point d’Orient.
Points d’Orient (fig. 222, 223, 224). — Les trois points qui suivent et que nous avons groupés sous la même dénomination de points d’Orient, sont aussi connus sous le nom de points Renaissance ou de points arabes.

Si nous les appelons points d’Orient, c’est qu’on les retrouve dans la plupart des broderies orientales et il est plus que probable que nous les devons aux peuples de l’Asie, qui excellaient, de tout temps, dans l’art de la broderie.


fig. 223. Point d’Orient.
Ces points ne peuvent être utilisés que pour les dessins d’une certaine dimension et exécutés à grands traits.

On fait d’abord les points dans le sens de la longueur ; si le brin employé est doux, soyeux, on peut faire ressortir l’aiguille à côté du dernier point pour économiser le brin et pour ne pas trop alourdir la broderie. Mais si le brin a une forte torsion, s’il est sujet à vriller, on devra faire passer son aiguillée sous l’étoffe et la ramener à la ligne de départ du premier point, de sorte que tous les fils de la première pose qui forment le fond seront lancés du haut vers le bas. La même marche est à suivre pour les fig. 223, 224, 225 et 226.


fig. 224. Point d’Orient.
Lorsque tous les fils verticaux sont posés, on tend un fil en ligne horizontale, que l’on retient par des points isolés, laissant entre eux un espace de 6 fils verticaux. Sur les fils transversaux, les points d’arrêt alternent avec ceux qui ont été posés en premier lieu, ainsi que l’indique la fig. 222.

Pour faire le point représenté dans la fig. 223, on commence par faire le même fond que pour le dessin précédent. Les fils horizontaux sont un peu plus rapprochés les uns des autres que dans la fig. 222 ; les points d’arrêt sont lancés par dessus 2 fils.

Dans la fig. 224, les seconds points sont lancés obliquement par dessus les fils du fond ; les points d’arrêt sont faits dans le même sens.

Pour ces points on peut se servir, ou bien d’un seul fil très floche, tel que le Coton à repriser D.M.C[1], ou bien de deux sortes de cotons, tels que le Coton à repriser D.M.C pour le fond et d’un fil fortement tordu comme le Cordonnet 6 fils D.M.C[1] ou le Fil à pointer D.M.C[1] pour les points d’arrêt.


fig. 225. Point natté.
Point natté (fig. 225). — Après avoir préparé les fils en longueur, on exécute une espèce de natté par les points suivants. On passe trois fois le brin alternativement par dessous et par dessus 3 brins de fond. Pour faire cet ouvrage très correctement, on doit ramener le fil, par dessous, à son point de départ ; il faut donc toujours faire le point de droite à gauche.

Lorsqu’on reproduit ce fond brodé sur une étoffe de lin, au moyen de cotons D.M.C, on fera bien de prendre un fil de nuance unie pour les points verticaux et du Chiné d’or D.M.C No30[1] pour produire le natté du dessin.


fig. 225. Point de mosaïque.
Point de mosaïque (fig. 226). — Les broderies antiques, minutieusement exécutées, nous montrent souvent ce joli point occupant des surfaces sur lesquelles la peluche ou d’autres étoffes précieuses devaient être appliquées.

Ce point exige le même travail préparatoire que les quatre points précédents, avec cette différence qu’il n’est permis d’employer qu’un fil fortement tordu, tel que le cordonnet de soie ou le Cordonnet 6 fils D.M.C[1] ou bien encore le Chiné d’or D.M.C[1] ou la Ganse turque D.M.C.[1]

Chaque point sera fait séparément et passera par le tissu de fond, afin que les fils, formant le dessin, se gonflent légèrement, au lieu d’être plats comme dans les exemples précédents.


fig. 227. Bordure au point persan.
Fournitures : Cordonnet 6 fils D.M.C No10, 15, 20, 25 ou 30. — Couleurs : Vert-Mousse 471 et 469, Rouge-Cardinal 347, Jaune-vieil-Or 680, Violet-Mauve 315 et 316, Noir grand-teint 310.
Bordure au point persan (fig. 227). — Ce genre de broderie, originaire de la Perse, a une grande analogie avec le point expliqué dans la fig. 176.

Cependant, au lieu de faire sortir l’aiguille dans la direction indiquée sur la fig. 176, on la ramène, comme on peut le voir dans la gravure, dans l’espace compris entre les contours du dessin et derrière le fil formant le point suivant.

Avant de faire les pleins des dessins, on trace les contours par des points coulés ou par une ganse fine, fixée sur l’étoffe par des points de surjet invisibles sur la surface.

Ce joli motif s’adaptant aux emplois les plus divers est composé de feuilles à 7 lobes, brodées alternativement en vert foncé et en vert clair, de fleurettes à 3 feuilles, brodées de Rouge-Cardinal et à l’intérieur de Jaune-vieil-Or, et de petites feuilles, brodées de Violet-Mauve. Le sertissage de toutes les parties du dessin se fait soit en Noir grand-teint soit en Brun-Cachou.


fig. 228. Motif au point passé.
Fournitures : Selon le tissu : Fil à dentelle D.M.C, Cordonnet 6 fils D.M.C ou Coton à repriser D.M.C. — Couleurs : Pour les fleurs : Rouge-Géranium 351 et 352. — Pour les points d’armes : Jaune-Rouille 308. — Pour le feuillage : Vert-de-gris 474 et 475.

Motif au point passé (fig. 228). — Les fleurs au point passé sont exécutées, dans cette guirlande, alternativement en rouge moyen et en rouge clair, de même que les feuilles sont en partie vert foncé et vert clair. Les points d’armes au milieu des fleurettes sont formés avec le coton jaune.


fig. 229. Bouquet au point passé droit et au point passé empiétant.
Fournitures : Coton à repriser D.M.C No50. — Couleurs : Pour les myosotis : Bleu-Indigo 312, 322 et 334. — Pour les autres fleurs : Jaune-Rouille 365 et 366 ; Violet-Mauve 376, 316, 377 ; Vert-Pistache 369. — Pour le feuillage : Vert-de-gris 474, 475 ; Vert-Mousse 468, 469, 471 et 472. — Pour les tiges : Brun-Havane 455 et 457.

Bouquet au point passé droit et au point passé empiétant (fig. 229). — Comme nous venons de le dire au commencement de ce chapitre, il n’est pas donné à chacun de produire des broderies nuancées, réellement artistiques. Dans n’importe quel ouvrage de ce genre, de quelque objet qu’il soit composé, les effets de lumière doivent toujours être correctement placés.

Pour copier fidèlement, par exemple, une fleur naturelle, prenez une fleur fraîchement cueillie ou, à son défaut, un ouvrage de botanique colorié et, si possible, une bonne reproduction de fleur en noir.

On choisira les couleurs d’après la fleur, ou d’après la planche coloriée, en ayant soin de prendre 6 à 8 tons que l’on tiendra un peu moins vifs qu’ils ne le sont en nature. Le modèle en noir facilitera la distribution des ombres.

Les couleurs employées pour la broderie des pétales et des feuilles, que l’on commence toujours par le bord extérieur, doivent être combinées de telle façon que le passage d’une nuance à l’autre ne soit pas perceptible, à moins que le dessin ne demande le contraire.

Les étamines et l’intérieur des fleurs se font en dernier, tandis que les nervures des feuilles doivent être exécutées avant le fond de la feuille.


fig. 230. Fleurs brodées à la manière chinoise.
Fleurs brodées à la manière chinoise (fig. 230). — Les ouvrages qui nous arrivent de Chine portent tous un incontestable caractère d’originalité et dénotent une habileté surprenante dans l’emploi judicieux des fils et des couleurs.

Les Chinois excellent surtout dans la représentation des personnages, des fleurs et des animaux ; cependant ils suivent une autre méthode que les Européens ; ainsi par exemple, au lieu de fondre les couleurs les unes dans les autres, comme dans le point passé, les Chinois les placent côte à côte, sans aucune transition ; ou bien, ils se servent exclusivement du point d’armes pour exécuter un dessin tout entier. Dans ce cas, les petits nœuds que forme ce dernier point sont ordinairement sertis de fil d’or.

Souvent aussi, au lieu de juxtaposer les couleurs, comme on l’a toujours fait en Europe, les Chinois commencent par former le fond d’une feuille au moyen de longs points, par-dessus lesquels ils construisent les nervures des pétales et des feuilles, au moyen de points tranchant sur les autres, soit par leur direction, soit par leur couleur.

Même dans les intérieurs des fleurs, la nuance du fond est entièrement achevée et des points d’armes très délicats, semés de distance en distance, dessinent sur ce fond les graines ou les étamines.


fig. 231. Point empiétant chinois.
Fournitures : Cordonnet 6 fils D.M.C nos20 à 50 ou Chiné d’or D.M.C. — Couleurs : Pour le coton : Jaune-Rouille 363, 308, 366. Pour le Chiné d’or D.M.C : Rouge et or fin, Bleu et or fin et Vert et or fin.

Point empiétant chinois (fig. 231). — Nous devons encore à l’Empire céleste un autre mode de broderie, celui du point empiétant.

La branche représentée dans notre gravure, prise d’un grand dessin, est exécutée dans trois nuances jaunâtres ressemblant à celles de la série de Jaune-Rouille de la carte D.M.C.[1]

Les points chevauchent l’un sur l’autre comme on le voit dans le détail, au bas de la gravure, et les trois nuances alternent d’une manière régulière.

Les fleurs, les papillons, les oiseaux, un dessin même tout entier, sont exécutés parfois avec les mêmes couleurs et le même point.

Le même genre de broderie peut être reproduit sur les étoffes à fils comptés et à l’aide de tous les cotons et du Chiné d’or D.M.C pour la broderie, No30[1]. Il est même possible de l’employer pour la copie des modèles pour point de croix et ses dérivés.


fig. 232. Broderie en relief.
Travail préparatoire.
Broderie en relief (fig. 232, 233). — Les broderies en relief, en couleur, doivent être préalablement rembourrées comme la broderie de blanc, fig. 191.

Lorsqu’on sertit le dessin d’une ganse, celle-ci doit être posée en premier sur les contours au moyen de petits points invisibles sur l’endroit.

Pour arriver à cacher ces points, on doit détordre légèrement la ganse avant d’y faire passer le brin et le cacher entre les cordons de la ganse.

On se sert de Coton à repriser D.M.C No25 pour le rembourrage des pleins. Ces cotons se font dans toutes les couleurs de la carte D.M.C et sont les fils les plus avantageux pour ce premier ouvrage.

Pour la première couche de coton, on réunit de 3 à 6 fils de coton et on en fixe autant que possible au moyen de points d’arrêt, tels qu’ils sont représentés dans la troisième feuille de la fig. 232.


fig. 233. Broderie en relief.
Ouvrage terminé.
Ce travail préparatoire terminé, on prend un brin de la couleur adoptée et l’on fait des points en travers, sur la première couche de points, afin de faire disparaître les creux produits par la pose des gros fils.

Pour ces points transversaux, on pourra encore se servir de Coton à broder D.M.C.

C’est sur cette surface unie que l’on exécute alors les points au passé, en les rapprochant de telle façon que la partie brodée ait l’apparence d’un tissu de satin.


fig. 234. Broderie genre turc.
Travail préparatoire.
Broderie genre turc (fig. 234, 235). — C’est encore un genre de broderie qui ne ressemble en rien à notre manière de broder habituelle. Les dessins pleins et en relief sont d’abord recouverts de gros coton tout ordinaire, par dessus lequel on tend les fils d’or, d’argent ou de soie, seuls ou réunis en une mèche.

Contrairement à ce que nous trouvons dans les ouvrages exécutés en Turquie, le travail préparatoire que montre notre gravure est fait avec soin, au moyen de la réunion de plusieurs fils de Coton à repriser D.M.C.[1]

On couche à plat une mèche composée de 5 fils, et on la fait aller de droite à gauche et de gauche à droite, dans le sens de la largeur du dessin.

Lorsqu’on a posé la mèche vers la droite, on fait sortir l’aiguille à une légère distance en avant de l’espace qu’occuperont les 5 fils, et on la fait rentrer de nouveau un peu plus loin pour la ramener par dessous l’étoffe au point de sortie indiqué par la flèche.


fig. 235. Broderie genre turc.
Ouvrage terminé.
Le point qui arrête la mèche doit être de longueur suffisante pour lui laisser un peu de jeu, afin que les 5 fils restent bien parallèles sur toute la largeur du dessin.

Sitôt que l’aiguille est retirée sur le côté opposé et plus haut que le premier point, on replie la mèche et on la fixe de la même manière.

Ce genre de broderie peut être appliqué sur des tissus de laine ou de coton et exécuté avec la plupart des cotons D.M.C ou le Chiné d’or D.M.C[1].

On obtient des effets très heureux en combinant trois tons de Rouge-Cardinal Nos 346, 347 et 304 avec du Chiné d’or D.M.C, Or et Bleu-Indigo ou trois nuances claires Bleu-Indigo avec le Chiné d’or D.M.C, Or et rouge.

Ce genre de broderie sert de transition entre la broderie au passé et la broderie d’or.

La broderie d’or. — Cet art assez difficile n’a été exercé depuis le xviiie siècle que par les personnes qui en avaient fait leur profession.

On s’y livrait rarement dans les maisons particulières, car chacun appréhendait de faire des essais dans un genre qui exigeait, selon les opinions d’autrefois, un apprentissage de neuf ans pour arriver à la perfection.

Mais, comme depuis un certain temps, on emploie volontiers dans un même ouvrage simultanément différents genres de broderie, et que, même dans les ouvrages artistiques, l’or est utilisé à l’instar des autres fournitures, on arrive tout naturellement à s’intéresser davantage à la broderie d’or et cela même dans les cercles où les ouvrages de dames sont une récréation.

Nous espérons que, grâce à nos gravures et à nos explications, nos lectrices pourront se dispenser de suivre un cours de cinq années, qu’exigent encore aujourd’hui les corps de métiers de certains pays.

Outils et fournitures. — Le premier appareil, et le plus indispensable pour la broderie d’or, est un métier très solide. Il faut en outre une broche, un couteau-serpette, deux lissoirs, dont un plat et l’autre convexe, un poinçon de très petit calibre et un casier pour fournitures.


fig. 236. Ouvrage monté sur le métier à broder.

Métier à broder (fig. 236). — Le modèle du métier représenté ici ne peut servir que pour de petites broderies ; pour de grands objets, exigeant l’enroulage de l’étoffe, il faut des rouleaux ronds afin que les arêtes du bois ne marquent pas dans le tissu.

Quel que soit le genre de broderie d’or que l’on exécute, on coud d’abord une toile solide dans le cadre.

On soutient toujours les coulisses tandis que l’on tend fortement l’étoffe. Sur les bords, du côté des lattes, on fixe bien solidement une grosse ficelle par des points d’arrêt, distants de 3 à 4 cm.

Puis on monte le métier et on trélisse l’étoffe en faisant passer, comme l’indique la figure, une forte ficelle par celle au moyen de laquelle on vient de galonner les deux bords et par-dessus les lattes.

C’est sur ce fond bien tendu qu’on applique l’étoffe que l’on veut broder ; après l’avoir placée à fil droit, on la coud avec des points d’ourlet sur la doublure, en ayant soin de donner à l’étoffe supérieure une tension plus forte qu’à l’autre, afin d’empêcher celle-là de gondoler sur celle-ci, une fois la broderie démontée. On calque ensuite le dessin sur le tissu à l’aide de la poudre à calque.

Avant de découdre l’ouvrage terminé, on enduit légèrement l’envers de la broderie d’une colle, dont on trouvera la recette au dernier chapitre, et on ne détache l’ouvrage que lorsque la colle est parfaitement sèche.


fig. 237. La broche. Grandeur réduite.

La broche (fig. 237). — La broche est un instrument en bois dur, de 20 cm de long, qui sert à enrouler les fils d’or.

On recouvre d’abord la tige et une partie de la fourche d’un fil double de Coton à broder D.M.C No16 ou de Cordonnet D.M.C No25 jaune. On termine cette garniture par une boucle à laquelle on attache le fil d’or que l’on enroule sur la tige.

Les lissoirs (fig. 238, 239). — Les deux outils appelés lissoirs se composent tous deux d’une planchette rectangulaire, munie d’un manche adapté au milieu.


fig. 238. Lissoir convexe pour presser l’étoffe sur l’envers.

L’un des lissoirs, de forme convexe, fig. 238, devra avoir 15 cm de longueur sur 9 cm de largeur ; l’autre, entièrement plat, fig. 239, devra avoir 32 cm de longueur sur 20 cm de largeur.


fig. 239. Lissoir plat pour appliquer les dessins sur la surface.

Lorsque le patron du dessin est découpé, on le met sur une planche que l’on a recouverte d’abord d’une légère couche de colle, on laisse reposer le carton sur cette colle le temps voulu, pour qu’il s’en imprègne, puis on l’enlève soigneusement et on le pose, le côté enduit de colle, sur le tissu, exactement à la place que le dessin doit occuper d’après le calque.

On saisit ensuite le grand lissoir de la main droite et on l’applique sur le dessin collé, puis, le petit lissoir dans la main gauche, on en frotte le tissu à l’envers, bois sur bois, jusqu’à ce que la colle du carton se soit bien communiquée à toutes les parties de l’étoffe.

Ce travail terminé, on laisse sécher complètement la colle, puis seulement on commence à broder.


fig. 240. Le couteau-serpette. Grandeur réduite.
Le couteau-serpette (fig. 240). — Dans la plupart des cas on prépare d’abord le dessin sur un carton assez épais.

Pour des dessins très délicats, on colle d’abord sur le carton de la peau de chevreau.

On reporte le dessin sur la surface du papier ou de la peau, suivant les procédés indiqués au dernier chapitre, puis on le découpe avec le couteau-serpette.

On ne peut faire que de courtes entailles avec cet outil ; on les fait en le tirant à soi, la pointe en dehors, le côté rond vers le corps.

La lame devra être très tranchante, afin que le carton et la peau soient toujours coupés d’une manière entièrement nette.


fig. 241. Casier à fournitures.

Casier à fournitures (fig. 241). — On taille dans une planchette ou dans un carton très épais autant de compartiments que l’on compte employer de sortes de fournitures, car on se sert non seulement de fils d’or simples et frisés mais encore de perles de différentes formes, de paillettes de grandeur variée et de cannetille mate ou brillante.

La cannetille, à elle toute seule, exige souvent plusieurs compartiments ; on la coupe en différentes longueurs selon le dessin, ainsi qu’on le voit dans la fig. 243 ; les bouts de même longueur sont placés dans un même compartiment. La partie supérieure du casier, confectionnée en carton ou en bois, est appliquée sur du gros drap non foulé ; sur ce fond pelucheux, les fournitures restent immobiles, elles ne jouent pas, de sorte que l’aiguille, pouvant y pénétrer, les relève plus facilement que sur un fond plus résistant.


fig. 242. Emploi de la broche.

Emploi de la broche (fig. 242). — Outre le collage du carton, on peut encore recourir, pour affermir les pointes des feuilles, à des points d’arrêt, tels qu’ils se trouvent indiqués dans la fig. 242.

Le fil d’or pour la broderie doit être monté double sur la broche. On fait aller et revenir le fil d’or comme dans la broderie expliquée par la fig. 234. Chaque fois que le fil d’or est ramené, on l’arrête au moyen de deux points, qui seront faits avec de la soie perlée D.M.C.

On prépare un passage à l’aiguille au moyen du poinçon que l’on fait pénétrer à l’endroit où le point doit entrer et sortir.

On peut se dispenser de préparer le trou à l’aiguille dans des matières très souples ; mais dans les tissus brochés, dans la peluche, dans la peau et dans les cuirs, où chaque point défectueux laisse une trace déparant l’ouvrage, il est indispensable de marquer au préalable l’endroit où doit être placé le point.

Certains fils d’or, sont raides et difficiles à travailler. Lorsqu’on emploie de ces fils, on met le fuseau monté d’or dans un endroit bien chaud, par exemple dans un four de cuisine ; le métal devient plus souple et plus maniable.


fig. 243. Broderie à la cannetille d’or.

Broderie à la cannetille d’or (fig. 243). — Dans l’art de la broderie d’or, on fait bien de commencer par la broderie au bouillon, appelé aussi cannetille ou lamelles. On appelle bouillon des petits fils d’or ou d’argent tournés en spirale et cannetille de petites lames très fines d’or ou d’argent tortillé. On fait monter sur l’aiguille, comme des perles, les petits morceaux coupés et on en recouvre le patron en carton, en les serrant le plus près possible, sans toutefois les faire chevaucher.

On obtient des effets charmants en employant du bouillon mat et du bouillon brillant ou frisé dans une broderie ; le premier servira pour les parties ombrées, le second pour les parties éclairées.


fig. 244. Broderie au point diamanté.
Broderie au point diamanté (fig. 244). — Un nouveau genre d’emploi du bouillon se présente dans le point diamanté.

On monte sur l’aiguille, que l’on fait sortir et rentrer par la même voie, de petits bouts de cannetille, longs tout au plus de un millimètre et demi.

Ces points, ressemblant au point d’armes, produisent de petits nœuds excessivement brillants, pareils à la semence de diamants, surtout lorsqu’ils sont faits avec de la cannetille d’argent.

Les points devront être placés en différents sens et rapprochés de telle sorte que le tissu en soit entièrement couvert, car plus les petites perles de bouillon sont nombreuses et rapprochées, plus la broderie produit d’effet.


fig. 245. Motif de broderie chinoise. Première partie.

Deuxième partie de la fig. 245.

Motif de broderie chinoise (fig. 245). — Nous recommandons comme une véritable distraction l’imitation des broderies d’or chinoises.

Ce travail consiste à fixer un fil d’or, au moyen de points d’arrêt, sur un dessin finement contouré. On peut exécuter ces imitations sur les tissus ordinaires et sur les tissus les plus précieux aussi bien que sur des étoffes sujettes à être lavées. Dans ce cas, on se servira de l’Or fin D.M.C pour la broderie No20, 30 ou 40[1], qui supporte parfaitement la lessive, ce qui permet d’utiliser ces broderies pour les objets destinés à la toilette et à l’ameublement.

L’emploi simultané d’or uni et de Chiné d’or contribue singulièrement à relever l’éclat de ces broderies. Ainsi, pour exécuter le dessin de la fig. 245, on a employé pour les arbres, leur feuillage et les fleurs, l’or uni ; pour les herbes, le chiné or et vert ; pour les papillons, le chiné or et rouge ; pour les deux oiseaux, le chiné or et noir et le chiné or et bleu.

Le fil d’or est pris double et arrêté par de petits points de surjet très réguliers, pour lesquels on prendra de préférence la Soie de coton D.M.C nos40 et 100[1] de la couleur du chiné d’or. Lorsque les lignes deviennent très fines et très délicates, on sépare ces deux fils et on continue à travailler avec un seul.

La gravure fait voir quelles sont les parties à exécuter avec un seul fil d’or.


fig. 246. Autre motif de broderie chinoise. Première partie.

Deuxième partie de la fig. 246.

Autre motif de broderie chinoise (fig. 246). — Le second modèle de broderie chinoise est analogue au modèle précédent quant à la distribution des fournitures, et le mode d’exécution.

Le dessin lui-même, cependant, diffère de celui de la fig. 238. Les animaux de fantaisie, les coquillages qui y sont représentés, peuvent être reproduits comme petits sujets détachés ; si l’on n’aime mieux faire de l’ensemble du dessin l’objet d’une bande.


fig. 246. Bande avec différents genres de broderie d’or.

Bande avec différents genres de broderie d’or (fig. 247). — Jusqu’à présent nous n’avons utilisé qu’un seul genre de broderie pour chaque ouvrage.

Nous donnons ici un exemple de l’application de différents genres de fil d’or et de divers points de broderie dans un même ouvrage.

L’emploi du carton est limité dans ce dessin à la partie renversée des pétales ; il est recouvert de fil d’or uni et serti de fil d’or frisé ; les autres parties des pétales sont exécutées au point de reprise avec du fil d’or uni. On revient toujours, sous l’étoffe, au point de départ du premier fil.

Le fil pour cet ouvrage ne devra pas être monté sur le fuseau ; on l’enfilera dans l’aiguille.

À cette occasion nous faisons observer à nos lectrices que lorsqu’on enfile du fil d’or, on dépouille le fil de la lame métallique sur une longueur de 4 à 5 cm, puis on fixe le brin sans or au chas de l’aiguille par le nœud expliqué par la fig. 1. On économise ainsi beaucoup de fil d’or ; de plus, la lame ne s’éraille pas aussi vite que lorsque le fil entier est enfilé, cas où la partie repliée sur le chas de l’aiguille est toujours perdue.

Les points de reprise sont également sertis d’or frisé et garnis en outre, à l’extérieur, de picots formés par de la cannetille brillante. Les autres parties du dessin sont toutes brodées en fil d’or double, les tiges en or mat, les feuilles en or frisé.


fig. 248. Broderie d’or sur fond de cordes.
Broderie d’or sur fond de cordes (fig. 248). — Dans les anciennes broderies d’églises, surtout dans celles qui sont enrichies de figures de saints, nous trouvons souvent, au lieu d’un dessous de carton, un dessous en grosse ficelle.

Dans les gravures qui suivent, nous avons copié fidèlement le mode d’exécution de la surface des originaux, mais nous avons remplacé, pour le dessous, la grosse ficelle par le Cordonnet 6 fils D.M.C No1, lequel étant livré en blanc et en jaune, est bien plus avantageux pour rembourrer que la ficelle grisâtre.

On fait autant de couches de cordonnet qu’il en faut pour donner au dessin un relief suffisant, en diminuant dans les dernières couches leur nombre de fils et leur longueur. Lorsque ce dessous est terminé, on le borde d’une assez forte ganse d’or, puis on commence le point formant dessin.

Ces points peuvent être variés à l’infini ; nous n’en citons et n’en décrivons ici que quatre.

Le dessin représenté dans la fig. 248 exige l’emploi de fines lames d’or ou d’argent, que l’on coupe en leur donnant une longueur suffisante pour former, aux deux bouts, un petit repli par lequel on fait passer le fil pour affermir la lame. Puis on recouvre la lame de petits bouts de cannetille ayant à peu près deux fois la largeur de la lame, disposés par-dessus celle-ci à distance bien régulière et alternant dans les rangs avec ceux des rangs précédents.


fig. 249. Point tressé avec cannetille sur fond de cordes.
Point tressé avec cannetille sur fond de cordes (fig. 249). On maintient la même distribution de points adoptée pour la figure précédente, avec cette différence cependant que l’on passe d’abord une longue cannetille au lieu d’un bout de lame et qu’on recouvre cette cannetille de petits bouts de fil d’or de la même espèce. Tous ces points peuvent se faire en fil d’or et en fil d’argent ou avec l’un ou l’autre seulement.


fig. 250. Broderie-écaille avec fil d’or et cannetille sur fond de cordes.
Broderie-écaille avec fil d’or et cannetille sur fond de cordes (fig. 250). — On commence par recouvrir de fil d’or ou d’argent toute la surface rembourrée, puis on prend du bouillon de longueur suffisante pour recouvrir de 6 à 8 des premiers fils et on coud ces petits morceaux à petite distance les uns des autres, tel qu’on peut le voir dans la gravure.

Ces points de bouillon en or mat sont à entourer de cannetille brillante ou frisée.

On fait sortir l’aiguille à gauche du bouillon posé en premier lieu, on l’enfile et on fait rentrer l’aiguille à droite et ressortir de nouveau au haut du petit trait pour y fixer la cannetille frisée, par un point presqu’imperceptible.


fig. 251. Fleur de fantaisie exécutée sur fond de cordes.
Fournitures : Pour bourrer le fond : Cordonnet 6 fils D.M.C No1, 2 ou 3.
Pour la broderie : Fil à dentelle D.M.C nos50 à 70[1].

Fleur de fantaisie exécutée sur fond de cordes (fig. 251). — Le dessin d’autre part, représentant un ouvrage à demi achevé, nous fait connaître outre un quatrième point, l’emploi des trois points précédents.

Les parties terminées sont exécutées d’après la fig. 243 avec de la cannetille d’or et de la cannetille d’argent. Le cœur du dessin représente des fils tendus transversalement sur le premier rembourrage. Un double fil d’or est lancé par dessus deux cordes transversales et retenu par un point entre les deux cordes. Dans le rang suivant, le point d’arrêt se fait entre les cordes par dessus lesquelles les premiers fils d’or ont passé.

Plus le dessin est massif, plus il sera nécessaire de combler, de bourrer les pleins, et on utilisera à cet effet des cordonnets plus gros qu’ils ne sont représentés dans la gravure.

La valeur d’une broderie augmente beaucoup par la disposition judicieuse des effets d’ombre et de lumière.



  1. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l, m et n Voir, à la fin de ce volume, les tableaux des grosseurs et des couleurs des articles de Coton, Soie, Laine, Lin et Ramie portant la marque D.M.C.