Encyclopédie méthodique/Physique/ASTRONOMIE

La bibliothèque libre.

ASTRONOMIE. On donne ce nom à la ſcience qui a pour objet la connoiſſance des phénomènes céleſtes, c’eſt-à-dire des mouvemens, des grandeurs, des ſituations, des diſtances, en un mot de tout ce qui a rapport aux corps céleſtes. L’aſtronomie, dit d’Alembert, eſt une ſcience dont l’étude, après celle de nous-même, eſt la plus digne de notre application, par le ſpectacle magnifique qu’elle nous préſente ; joignant l’obſervation au calcul, & les éclairant l’une par l’autre, cette ſcience détermine avec exactitude digne d’admiration, les diſtances & les mouvemens les plus compliqués des corps céleſtes ; elle aſſigne juſqu’aux forces mêmes par leſquelles ces mouvemens ſont produits ou altérés. Auſſi peut-on la regarder à juſte titre comme l’application la plus ſublime & la plus ſûre de la géométrie & de la mécanique réunies, & ſes progrès, comme le monument le plus inconteſtable du ſuccès auquel l’eſprit humain peut s’élèver par ſes efforts.

L’origine de l’aſtronomie ſe perd dans la nuit des temps ; mais il eſt très-probable, ainſi que pluſieurs ſavans l’ont remarqué, qu’elle a été inventée dès le commencement du monde. Joſeph raconte dans ſes antiquités judaïques, livre premier, que les deſcendans de Seth, pour conſerver la mémoire des obſervations céleſtes qu’ils avoient faites avant le déluge, gravèrent les principales ſur deux colonnes, l’une de pierre & l’autre de brique ; celle de pierre réſiſta aux eaux du déluge, & de ſon temps même, dit-il, on en voyoit encore des veſtiges dans la Syrie. Quoi qu’il en ſoit de cette narration qui indique néanmoins une tradition fort ancienne ſur le goût des patriarches pour l’aſtronomie, on ne peut douter, dit M. de Caſſini, que l’aſtronomie n’ait été inventée dès le commencement du monde : « comme il n’y a rien de plus ſurprenant que la régularité du mouvement de ces grands corps lumineux, qui tournent inceſſamment autour de la terre, il eſt aiſé de juger qu’une des premières curioſités des hommes, a été de conſidérer leur cours, & d’en obſerver les périodes. » La néceſſité, encore plus que la curioſité, dut auſſi les y obliger ; car ſi l’on n’obſerve les ſaiſons qui ſe diſtinguent par le mouvement du ſoleil, il eſt impoſſible de réuſſir dans l’agriculture, ni d’établir aucun ordre dans la ſociété.

Afin de mettre quelque ordre dans les recherches qui ont été faites ſur l’origine de cette ſcience, il eſt néceſſaire de diſtinguer les époques, la mythologie, qui remonte tout au plus à 2 300 ans avant l’ère chrétienne, temps auquel on a coutume de ſuppoſer le déluge ; les obſervations chaldéennes, qui ne vont guère qu’à 720 ans avant J. C. & les recherches de détail qui n’ont commencé que 400 ans avant l’ère chrétienne.

Origine fabuleuſe de l’aſtronomie. Diodore de Sicile parlant des Atlantes, dit que ce peuple, le plus policé de l’Afrique, dont le pays étoit riche & rempli de grandes villes, prétendoit qu’Uranus, leur premier roi, qui raſſembla les hommes en ſociété, étoit ſoigneux obſervateur des aſtres, qu’il détermina pluſieurs circonſtances de leurs révolutions, meſura l’année par le cours du ſoleil, & les mois par celui de la lune, & déſigna le commencement & la fin des ſaiſons. Les prédictions d’Uranus le firent mettre au rang des dieux après ſa mort, & on donna ſon nom à la partie ſupérieure de l’univers. Uranus eut, dit-on, quarante-cinq enfans de pluſieurs femmes ; les dix-huit qu’il eut de Titœla, furent appelés Titans : il fut auſſi père d’Atlas & de Saturne. Atlas excella dans l’aſtrologie, & repréſenta l’univers par une ſphère ; c’est pour cette raiſon qu’on a prétendu qu’Atlas portoit le monde ſur ſes épaules.

Heſper, un des enfans d’Atlas, recommandable par ſa piété & ſa juſtice, fut auſſi obſervateur des aſtres ; on lui décerna encore les honneurs divins, & on donna ſon nom d’Heſper au plus brillant des aſtres, à Vénus. Hercule tranſmit enſuite aux Grecs, les connoiſſances aſtronomiques qu’il avoit reçues d’Atlas, & il paſſa dans la ſuite pour l’inventeur de l’aſtronomie. Aux fables d’Uranus, d’Atlas & d’Hercule, on doit ajouter celles de tous les hommes illuſtres qui s’étoient diſtingués dans l’aſtronomie, & qui paſſèrent pour en être les inventeurs. Lucien, dans ſon petit ouvrage ſur l’aſtrologie, explique par là les fables d’Orphée, de Tiréſias, Atrée, Thieſte, Bellerophon, Phryxus, Dœdale, Paſiphaé, Endymion, Phaéton, Muſœus, Linus, Caſſiopée, Céphée, Prométhée qui tous, au jugement des anciens, durent leur célébrité à leurs connoiſſances dans l’aſtronomie.

Tout ce qu’on vient de voir juſqu’ici, n’eſt qu’une tradition obſcure & fabuleuſe ; mais vers le temps de l’expédition des Argonautes, 1 300 ou 1 400 ans avant Jésus-Chriſt, l’aſtronomie fit quelques progrès. Le Centaure Chiron, Theſſalien, que d’autres ont dit être fils de Saturne, apprit aux hommes les figures du ciel, ſuivant l’auteur de Ia Titanomachie. L’expédition fameuſe des Argonautes, paroît liée avec l’établiſſement des conſtellations dans la Grèce, comme l’obſerve M. Newton, dans ſa chronologie. On voyoit ſur la ſphère de Muſœus, le bélier d’or, qui étoit le pavillon du navire dans lequel Phryxus ſe ſauva dans la Colchide ; le taureau aux pieds d’airain, dompté par Jaſon ; les gémeaux, Castor & Pollux, deux des Argonautes ; le Cigne de Léda leur mère ; le Navire Argos, l’Hydre, ce dragon ſi vigilant ; la coupe de Médée, &c. &c ; le cancer, le lion ; enfin la lyre d’Orphée, qui étoit auſſi l’un des Argonautes. Tout cela ſemble prouver que ces noms furent donnés par les Grecs aux conſtellations peu-après le temps du voyage des Argonautes.

De l’aſtronomie des Chaldéens. Lorſque les enfans de Noé eurent quitté les rochers de la Gordienne, & commencé à former un peuple nombreux dans les grandes plaines de Sennaar, où fut bâtie la ville de Babylone, ils portèrent plus particulièrement leur attention vers le ciel, où tout concouroit à ſixer leurs regards. La garde des troupeaux faiſoit leur principale occupation ; mais la chaleur du jour les déterminoit à choiſir le temps de la nuit pour leurs travaux, leurs exercices & leurs voyages. Les Chaldéens firent donc des progrès diſtingués dans l’aſtronomie. L’aſtrologie des Babyloniens eſt citée dans divers endroits de l’écriture. Pluſieurs auteurs ont regardé Abraham comme un aſtronome Chaldéen, qui avoit appris l’arithmétique & l’aſtronomie aux Égyptiens. Il eſt parlé de pluſieurs conſtellations dans le livre de Job, & Job étoit Arabe & voiſin de la Babylonie. On trouve, dès le temps d’Achaz, 750 ans avant J. C. l’uſage des cadrans ſolaires à Jéruſalem, & il paroît qu’on les avoit reçus des Babyloniens, à qui Hérodote en attribue l’invention. Les Chaldéens prétendoient avoir des obſervations ou annales de 470 mille ans ; mais Diogène-Laërce réduit ce nombre à 48 863 ans avant Alexandre. Cicéron regardoit ces prétentions d’ancienneté comme une folie ou une impoſture. On croit communément que les anciens avoient compté leurs mois pour des années.

La plus ancienne obſervation eſt une éclipſe de lune, faite à Babylone 720 ans avant J. C. Ptolomée, dans ſon Almageſte, le plus ancien ouvrage d’aſtronomie que nous ayons, l’emploie Tout ce qui a précédé cette obſervation n’eſt qu’un commencement groſſier de connoiſſance aſtronomique, qui ſe réduit à l’obſervation du zodiaque, des temps du lever & du coucher héliaque, des conſtellations, & autour des phaſes de la lune.

Parmi les Chaldéens, Jupiter Bélus paſſoit pour avoir été le principal inventeur de l’aſtronomie, en même-temps qu’il avoit été le fondateur de Babylone. L’époque de Bélus eſt placée à l’an 1320 avant J. C. Le temple de Jupiter Bélus, que Sémiramis avoit fait bâtir à Babylone, renfermoit une tour immenſe qui, ſuivant Hérodote, avoit une ſtade de hauteur (environ 100 toiſes), & autant de largeur, bâtie avec des briques & de l’aſphalte, au-deſſus de laquelle il y avoit encore ſept grandes tours les unes ſur les autres ; elles ſubſiſtoient même du temps d’Hérodote, 440 ans avant J. C. Il eſt donc vrai que plus de 800 ans avant l’ère chrétienne, les Babyloniens examinoient attentivement les mouvemens céleſtes. Mais leur aſtronomie ſe réduiſoit alors preſqu’à l’invention du zodiaque, & à la diviſion du ciel en conſtellations. Selon Sextus Empiricus, auteur du ſecond ſiècle, les premiers Chaldéens ſe ſervirent de la méthode ſuivante, pour diviſer le zodiaque. Ayant remarqué une des plus brillantes étoiles du zodiaque, ils remplirent d’eau un grand vaſe percé d’une petite ouverture ; du moment où l’étoile ſe levoit, ils laiſſèrent couler l’eau dans un autre vaſe juſqu’au lendemain au lever de la même étoile. Partageant enſuite cette eau en douze portions égales, ils remarquèrent le temps qu’il falloit à chacune pour s’écouler, & obſervèrent les étoiles qui ſe levoient à chaque douzième.

Les Chaldéens, ſelon quelques auteurs, étoient parvenus à connoître à-peu-près la grandeur de la terre ; ils avoient une idée du mouvement des comètes, qu’ils regardoient comme des planètes, dont la révolution ſe faiſoit dans des orbites très-excentriques ; &, ſuivant Appollonius le Mindien, ils en prédiſoient les retours. Hérodote dit expreſſément que les Grecs avoient appris des Babyloniens l’uſage du pôle, du gnomon & de la diviſion du jour en douze parties. Phérécide, vers l’an 540, fit un cadran ſolaire dans l’île de Scyros, l’une des Cyclades ; mais Anaximandre, mort 547 ans avant J. C., en avoit fait un à Lacédémone, & l’horloge d’Achaz paroît devoir faire remonter cette découverte juſqu’à l’an 727 au moins ; & il ne ſeroit pas étonnant qu’elle eût paſſé des Babyloniens aux Syriens, & de Damas à la Judée.

Aſtronomie des Égyptiens. Les Égyptiens s’attribuoient hautement l’invention de l’aſtronomie ; ils ſont cités conjointement avec les Chaldéens par le plus grand nombre des auteurs Grecs ; mais on peut leur conteſter cette gloire à cauſe des obſervations anciennes que Ptolomée & Hipparque trouvèrent à Babylone, & qu’ils ne trouvèrent point en Égypte. Selon Lucien, c’eſt des Éthiopiens que les Égyptiens leurs voiſins, reçurent les premières connoiſſances en aſtronomie. Les Égyptiens ſe vantoient d’avoir envoyé des colonies par toute la terre ; ſelon eux, Bélus en avoit conduit une dans la Babylonie ; il y avoit inſtitué les prêtres nommés Chaldéens, qui s’adonnèrent à l’étude des aſtres. Suivant Hérodote, les Égyptiens faiſoient remonter leurs annales à 11 340 ans ; mais on ne ſait pas quelles eſpèces d’années.

Diogène-Laërce attribue beaucoup de connoiſſances aux Égyptiens ; mais il paroît que ce n’eſt environ qu’à l’an 400 avant J. C. qu’il faut rapporter ce qu’il en dit ſur les éclipſes & ſur l’inégalité du mouvement des planètes. On a cru que les Égyptiens prédiſoient les éclipses, & que d’après eux, Thalès prédit celle qui termina la guerre des Lydiens & des Mèdes. On rapporte encore aux Égyptiens les premières idées du mouvement de la terre ou du ſystème de Copernic, dont Philolaüs & Ariſtarque parlèrent enſuite dans la Grèce. Ils eurent la première idée de la pluralité des mondes ; Orphée la répandit parmi les Grecs. Orphée & Pythagore avoient été en Égypte. Le lever & le coucher des étoiles en divers temps de l’année, fut un des premiers objets de l’attention des Égyptiens, qui en dreſsèrent des tables. C’eſt encore une choſe remarquable & digne de l’exactitude aſtronomique des Égyptiens, que la ſituation des pyramides d’Égypte. M. de Chazelles a remarqué que les pyramides qui ſubſiſtoient encore, étoient orientées de manière que leurs quatre côtés regardoient préciſément les quatre parties du monde ; mais au temps d’Auguſte & de Strabon, qui voyagea en Égypte, on ne trouvoit preſque plus de vestiges de l’aſtronomie parmi les prêtres de cette contrée.

De l’aſtronomie des Phéniciens. Homère, Pline & pluſieurs autres anciens parlent des Phéniciens, comme ayant été très-ſavans dans l’aſtronomie & la navigation ; ces peuples étoient une colonie des Édomites, & ils ont probablement appris des Babyloniens & des Égyptiens, tout ce qu’ils ſavoient d’aſtronomie. On ne peut guère leur attribuer autre choſe que l’uſage de l’obſervation des étoiles boréales pour le progrès de la navigation, ſur-tout de celle de la grande & de la petite ourſe, & de l’étoile polaire.

L’uſage de naviguer, par le moyen des étoiles, a eu auſſi lieu parmi les Grecs, vers le temps du siége de Troie ; Homère, en parlant de la navigation d’Ulyſſe, le repréſente comme obſervant les pleïades, le bouvier, orion, l’ourſe. C’eſt la connoiſſance des étoiles circonpolaires qui rendit les navigations des Grecs plus hardies & plus heureuſes. Avant que Thalès de Milet, inſtruit à l’école des Phéniciens, eût communiqué aux Grecs, environ 600 ans avant J. C., l’uſage des étoiles boréales, ceux-ci n’avoient qu’un commerce borné, & une navigation timide & ſans s’écarter des côtes. Combien, dit Pluche dans le ſpectacle de la nature, tome IV page 335, ne fallut-il pas de délibérations & de préparatifs aux héros de la Grèce, pour traverſer la mer Égée ? Quel bruit ne fit pas, avant le ſiége de Troye, l’expédition des Argonautes, c’est-à-dire, le trajet de la propontide, (aujourd’hui la mer de Marmara, entre le détroit des Dardanelles & celui de Conſtantinople) & du pont Euxin (actuellement la mer noire) : on regarda ce voyage comme un exploit merveilleux, dont la hardieſſe étonna les dieux mêmes : auſſi plaça-t-on dans le ciel ce vaiſſeau qui avoit pu paſſer d’Iolchos à l’embouchure du phaſe. Cependant les barques Turques font aujourd’hui ce voyage.

Mais tandis que les Grecs étoient ſi peu inſtruits dans la ſcience des aſtres, les Phéniciens avoient formé, ſur les côtes de Syrie, un état opulent de cette liſière de la Syrie, très-peu étendu en longueur & preſque ſans largeur. On retrouve des veſtiges de leurs colonies, & des noms propres tirés de leur langue, ſur les trois côtes de la Sicile, dans les principales îles de la Méditerranée, le long des côtes de Barbarie, en Eſpagne, & ſur-tout dans la Bettique, ou Andalouſie. Dans la ſuite, ces hardis navigateurs paſſèrent le détroit de Gibraltar, & allèrent juſqu’à Gadir (Cadix). D’un autre côté, ils établirent leur commerce ſur les côtes d’Afrique & d’Aſie, par le golfe arabique, ou mer rouge. Ce furent les pilotes d’Hiram, roi de Tyr, continue Pluche, qui, environ mille ans avant J. C., & lorſque les Grecs étoient encore novices dans la navigation, l’enſeignèrent avec ſuccès aux Hébreux, & ſervirent de guides aux flottes que Salomon avoit établies dans les ports d’Élaks & d’Eſiongaber, ſur la mer rouge. Les Hébreux & les Tyriens alloient enſemble en Ophir, (aujourd’hui la côte de Sofala) ; ils allèrent enſuite à Tarcis en Eſpagne ; mais ils employèrent trois ans à faire ce voyage ; car on ſait qu’ils firent le tour de l’Afrique, vers l’an 160 avant J. C., par ordre du roi d’Égypte, & doublèrent le cap de Bonne-Espérance, qui fut enſuite oublié pendant 2 000 ans.

Aſtronomie des Grecs. L’aſtronomie chez les Grecs fut peu de chose ; & c’eſt aux étrangers qu’ils durent leurs premières connoiſſances. Thalés de Milet, que pluſieurs auteurs ont dit être phénicien, parut dans un temps où les Grecs n’avoient encore aucune aſtronomie planétaire, environ 600 ans avant J. C. il détermina la courſe du ſoleil d’un ſolſtice à l’autre, qui régla la diviſion de l’année. Thalés fut le premier qui apprit aux Grecs la cauſe des éclipſes ; il connoiſſoit la rondeur de la terre, & diſtinguoit les zones de notre globe par le moyen des tropiques & des cercles polaires ; il parloit du cercle oblique ou zodiaque, du méridien & de la grandeur du diamètre apparent du ſoleil. Hérodote & Pline aſſurent que Thalès avoit prédit aux Ioniens une éclipſe totale du ſoleil, qui arriva pendant la guerre des Lydiens & des Medes, probablement par la période générale de 18 ans & 11 jours, dont il avoit eu ſans doute connoiſſance par les Égyptiens, chez qui il avoit voyagé.

Les Grecs ne connoiſſoient pas encore le mouvement des cinq planètes, lorſqu’Eudoxe en rapporta d’Égypte la première connoiſſance, 380 ans avant J. C. Anaximandre qui fut un des plus grands philoſophes de l’école d’Ionie, que la célébrité de Thalès avoit formée, naquit 610 ans avant J. C. ; Diogène-Laërce nous apprend qu’il établit à Lacédémone un cadran ſolaire & un gnomon, dont l’ombre ſervoit à marquer les équinoxes & les ſolſtices ; il fit le premier la deſcription de la terre & de la mer, & des cartes géographiques, de même qu’une ſphère artificielle. Il meſura avec plus de ſoins qu’on ne l’avoit encore fait, l’obliquité du zodiaque. Il apprit à rapporter les aſtres ſur l’écliptique, au lieu de les rapporter ſur l’équateur ; il enſeigna le mouvement de la terre autour du centre du monde, & de plus, que le ſoleil n’étoit pas moindre que la terre ; il ſoutint l’infinité des mondes ou ſimultanés ou ſucceſſifs. Après Anaximandre, Anaximènes & enſuite Anaxagore, diſciple de ce dernier, ſe diſtinguèrent par leurs connoiſſànces pour l’aſtronomie. Anaxagore qui enſcignoit la philoſophie à Athènes, vers l’an 480 avant J. C., prédit auſſi la grande éclipſe de ſoleil dont parle Thucidide, arrivée la première année de Ia guerre du Peloponèſe, l’an 431 ; mais il ne put le faire que par le moyen de la période de 18 ans 11 jours 7 heures 42 minutes 15 secondes.

Un des Grecs les plus célèbres dans l’aſtronomie, fut Pythagore, qui naquit environ 540 ans avant Jéſus-Chriſt ; on croit qu’il fut le premier qui parla de l’obliquité de l’écliptique & de ſon angle avec l’équateur ; il plaça le ſoleil au centre du ſyſtème planétaire, & fit tourner la terre & les autres planètes autour de lui ; il enſeignoit auſſi que chaque étoile étoit le centre d’un ſyſtème. Démocrite qui ſuccéda à Anaxagore, naquit vers l’an 470 avant Jéſus-Chriſt ; il ſoutint qu’il y avoit des montagnes dans la lune comme ſur la terre ; que la voie lactée étoit un amas immenſe d’étoiles ; qu’il devoit y avoir une infinité de mondes dans un eſpace infini. Philolaüs de Crotone, diſciple de Pythagore & d’Archytas de Tarente, établit le mouvement de la terre d’une manière plus préciſe qu’aucun autre pythagoricien ; il vivoit 450 ans avant J. C. Nicétas de Syracuſe ſoutint ſpécialement la rotation diurne de la terre autour de ſon axe, qu’admit auſſi Ariſtarque de Samos. On compte, ſur-tout parmi les aſtronomes pythagoriciens, Eudoxe de Cnide, ami de Platon, né en 421 avant J. C. & mort l’an 368. Sénèque dit qu’Eudoxe rapporta le premier de l’Égypte la connoiſſance des mouvemens planétaires. Mais ces différentes connoiſſances firent peu de progrès dans la Grèce, 400 ans avant J. C., car Hérodote se moquoit à cette époque de ceux qui donnoient à la terre & à l’océan une figure ronde. Juſqu’alors l’aſtronomie avoit fait des progrès ſi lents, on doit principalement l’attribuer à la difficulté des calculs ; car les opérations arithmétiques ne s’exécutoient que par le moyen de petites pierres qu’on arrangeoit ſur une table, ou de nœuds que l’on faiſoit à une corde.

Pythéus vécut au ſiécle d’Alexandre le grand ; ſon obſervation du ſolſtice d’été, à Marſeille, le rendit célèbre. Il trouva, ſuivant Hipparque, cité par Strabon, que la hauteur du gnomon étoit à la longueur de l’ombre comme 600 à 209. Ariſtote n’a preſque fait faire aucun pas à l’aſtronomie.

Révolution arrivée dans l’aſtronomie 300 ans avant J. C. Ptolémée Philadelphe qui ſuccéda à Ptolémée fils de Lagus, vers l’an 283 avant J. C., prince inſtruit dans tout genre de ſciences, attira dans ſa capitale des ſavans, tant de la Grèce que d’ailleurs ; il les logea dans ſon palais, & leur fournit tous les moyens propres à travailler avec ſuccès dans les ſciences. Le Muſeum ou collége d’Alexandrie eſt célèbre dans Strabon. L’émulation qui s’éleva pour lors en Égypte, duroit encore au temps de l’invaſion des Sarraſins, l’an 634 de J. C. C’eſt ſous le règne de Ptolémée Philadelphe qu’il faut placer l’époque où commence la véritable aſtronomie, puiſque c’eſt alors qu’on ſe livra à des ſuites de recherches, d’obſervations, de combinaiſons & de calcul. Les premiers Grecs qui cultivèrent l’aſtronomie à Alexandrie furent timocharès & aristille. Hipparque a employé pluſieurs de leurs obſervations. Aratus, célèbre par son poème Grec des phénomènes, vivoit à-peu-près 270 ans avant J.-C. à la cour d’Antigone Gonatas, roi de Macédoine. Dans cet ouvrage, il décrit les figures des conſtellations, leurs ſituations dans la ſphère, le lever & le coucher des étoiles, d’après les livres d’Eudoxe, &c.

Ariſtarque de Samos, qui vivoit environ 264 ans avant J. C., eſt cité par Archimède & par Stobée, comme un des premiers défenſeurs du ſentiment de Philolaüs, ſur le mouvement de la terre. Ptolomée rapporte une obſervation du ſolſtice, faite par lui. Nous n’avons qu’un livre de lui ſur les diſtances & les grandeurs du ſoleil & de la lune, conſervé par Papus ; il fut un des premiers qui appliquèrent la géométrie à l’aſtronomie. Eratoſthène, né à Cyrène, 276 ans avant J. C., fut appelé d’Athènes à Alexandrie par Ptolomée Évergète, & il engagea celui-ci à faire élever, dans le portique d’Alexandrie, une armille de bronze ou grand cercle évidé, propre à obſerver les paſſages du ſoleil dans l’équateur. Ce fut Eratoſthène qui fit auſſi les premières obſervations pour la mesure de la terre. Hipparque parut enfin à Alexandrie vers l’an 160 avant J. C. Il naquit à Nicée en Bithynie, & fit des obſervations à l’île de Rhodes, & fut le plus intelligent & le plus laborieux aſtronome dont on nous ait conſervé la mémoire : |a véritable aſtronomie ne commence même qu’à lui. Hipparque raſſembla les anciennes obſervations, & fit un recueil des éclipſes de ſoleil & de lune, obſervées par les Chaldéens. Ptolomée paroît y avoir puiſé tout ce qui eſt rapporté dans ſon almageſte ſur les anciennes éclipſes. Hipparque obſerva le premier que les orbes des planètes étoient excentriques & leurs mouvemens inégaux. Non-ſeulement il reconnut l’inégalité de la lune appelée équation de l’orbite, ſuivant laquelle cette planète va plus vite dans ſon périgée, & plus lentement dans ſon apogée, mais il trouva encore le mouvement des nœuds de la lune. Il forma des hypothèſes & des tables qui repréſentoient les mouvemens du ſoleil & de la lune. Il forma auſſi un catalogue général des étoiles fixes, qui a été heureuſement conſervé dans l’almageſte de Ptolomée. On y trouve les longitudes de 1 022 étoiles, avec leur grandeur apparente. Il découvrit le mouvement propre des étoiles qui paroiſſent avancer lentement d’occident en orient, par rapport aux points équinoxiaux ; c’eſt ce que l’on appelle préceſſion des équinoxes ; il corrigea la longueur de l’année, réputée alors de 365 jours i , & en retrancha 4 minutes 48 ſecondes.

Poſſidonius, aſtronome grec & ſtoïcien, jouiſſoit de la plus grande réputation environ 80 ans avant J. C. ; il étoit d’Apanée en Syrie ; il fit des obſervations à Rhodes. Geminus écrivit vers l’an 76 avant J. C. le premier livre qui nous ſoit parvenu ſur les élémens d’aſtronomie. Cléomèdes écrivit vers le commencement de l’ère chrétienne, un ouvrage grec, intitulé, Cyclico-Theoria, où il traite de la ſphère, des périodes des planètes, de leurs diſtances, de leurs grandeurs, de leurs éclipſes.

Ptolomée eſt le ſeul de tous les anciens aſtronomes dont il nous ſoit reſté un ouvrage important ; il naquit à Peluſe en Égypte. Cet aſtronome parle d’une éclipſe de lune qu’il avoit obſervée la neuvième année d’Adrien, l’an 125 de J. C. ; & il nous apprend ailleurs qu’il avoit fait la plupart de ſes obſervations ſur les étoiles fixes, la ſeconde année du règne d’Antonin le Pieux, l’an 139 de J. C. Son grand ouvrage eſt l’Almageſte, magna conſtructio, qui eſt diviſé en 13 livres. Il a encore compoſé les Apparences, le Liber Quadripartitus, &c. &c. Les aſtronomes ſont perſuadés que Ptolomée n’étoit point obſervateur, qu’il a tiré d’Hipparque & des autres qui l’ont précédé, tout ce qu’il y a de bon dans ſon ouvrage, mais cet ouvrage eſt le ſeul qui ait perpétué l’aſtronomie, depuis Ptolomée juſqu’au temps de Copernic, c’eſt-à-dire, pendant quatorze ſiècles d’ignorance. Théon d’Alexandrie a commenté l’Almageſte ; il obſerva une éclipſe de ſoleil à Alexandrie, l’an 365. Mais ſous Omar, ſecond calife, Alexandrie fut priſe, & la fameuſe bibliothèque fut brûlée l’an 641 : ce fut là le terme du progrès des ſciences en Égypte ; car les princes arabes n’eurent d’abord ni le goût ni le loiſir de s’en occuper.

Des aſtronomes Arabes. Depuis l’an 800 juſqu’à l’année 1300, l’Europe étant plongée dans les ténèbres de la plus profonde ignorance, il n’y eut de bons ouvrages & de gens habiles, que parmi les Arabes, & ſur-tout à Bagdad, qui est à-peu-près au même endroit que l’ancienne Babylone. Les aſtronomes les plus habiles que cette nation ait produits, ſont, Almanon, Albategnius, Alfragan, Albazen, & Ulug-beg, prince tartare. Le principal ouvrage de ce dernier eſt ſon catalogue d’étoiles, dreſſé à Samarkande, l’an de l’hégyre 841 ou 1437 de J. C.

Aſtronomie des Chinois. Si les Chinois ſont une colonie Égyptienne, ainsi que le penſent pluſieurs érudits, c’eſt des Égyptiens qu’ils ont emprunté toutes leurs connoiſſances aſtronomiques : or, ce ſentiment eſt ce qu’il y a de plus probable ; car on eſt fort revenu de la prévention ſingulière qu’on avoit eue ſur l’antiquité des Chinois, de leurs ſciences & de leur aſtronomie. Le règne de Fo-hi, ou la fondation de l’empire chinois, ne remonte, ſuivant M. Freret, qu’à 2639 ans avant J. C., & l’on ne trouve rien de bien avéré avant le règne de Hang-ti, 2455 avant J. C. ou même avant Yao, qui vivoit 2325 ans avant J. C. Dans les premiers ſiècles de l’hiſtoire de la Chine, & juſqu’à l’an 1122, il n’eſt fait mention que d’une ſeule éclipſe, encore c’eſt d’une manière ſi vague, qu’elle ne peut rien déterminer pour la chronologie. Depuis cette dernière époque, l’an 1122 avant J. C. juſqu’à l’an 721, il n’y a de même qu’une ſeule éclipſe dont il ſoit parlé ; elle arriva le 6 ſeptembre, 776 ans avant J. C. La ſuite des 36 éclipſes, rapportée par Confuſius (né 483 ans avant J. C.) dans le Tchun-Tſieou, ne commence qu’à l’an 721, & va juſqu’à l’an 480 ; mais les Chaldéens obſervoient alors avec aſſiduité & préciſion, en ſorte qu’on ſeroit tenté de croire que les Chinois avoient emprunté des Chaldéens les obſervations dont ils ont enrichi leur hiſtoire : on y trouve d’ailleurs de fauſſes éclipſes. On voit ſeulement que 2600 ans avant J. C. les Chinois ont connu l’année de 365 jours . L’aſtronomie fut très-négligée chez eux vers l’an 480 avant J. C. On ne ſe mettoit plus en peine d’obſerver les éclipſes. L’empereur Tſin chi-hoand, vers l’an 246 avant J. C., fit brûler les livres d’hiſtoire, les livres claſſiques & ceux d’aſtronomie. L’an 66 avant J. C., Lieou-hin écrivit un cours entier d’aſtronomie ; il ſuppoſoit l’obliquité de l’écliptique de 23 degrés 39 minutes 18 ſecondes ; il ignoroit le mouvement propre des étoiles auſſi bien que toutes les équations ou inégalités de la lune, du ſoleil & des planètes ; il rapportoit à l’équateur les ſituations de tous les aſtres ; d’où il réſulte que l’aſtronomie étoit moins avancée à la Chine qu’à Alexandrie, où Hipparque venoit de découvrir la préceſſion des équinoxes.

Lieou-hong & Tſay-yong, en 206, parlèrent les premiers des inégalités de la lune, qu’ils faiſoient de 5 degrés chinois. En 284, Kiang-ki donna une méthode pour le calcul des éclipſes, & détermina le mouvement des nœuds de la lune. En 550, Tchang-tſe-ſin donna des règles pour calculer la parallaxe de la lune, & trouver le commencement & la fin d’une éclipſe ; il dreſſa des tables pour calculer les lieux des planètes. En 822, Su-gang expliqua la parallaxe de longitude. En 1022, l’empereur Gin-tſong fit des dépenſes conſidérables pour des inſtrumens. Co-cheou-king fit conſtruire à Pékin un gnomon de 40 pieds de hauteur, dont il meſura l’ombre en divers temps de l’année, ſur-tout en 1278 & 1279. L’empereur Houpilié, mort en 1294, fit compoſer une aſtronomie, où l’on trouve beaucoup d’obſervations. Malgré les efforts de Hong-vou, en 1385, & de ſes ſucceſſeurs, l’aſtronomie ne fit plus que décheoir, juſqu’en 1573, que Hing-yun-lou, aſtronome, s’appliqua à perfectionner cette ſcience. C’eſt vers ce temps là, que les miſſionnaires-jéſuites (dans le ſeptième ſiècle, d’autres miſſionnaires y étoient venus) portèrent dans la Chine le goût des ſciences européennes, & ſur-tout les plus belles connoiſſances de l’aſtronomie, qui plûrent beaucoup aux Chinois.

État de l’aſtronomie en Europe depuis 1230. Vers ce temps, l’empereur Frédéric II ſe déclara le protecteur des lettres, & fit traduire l’Almageſte de Ptolomée, qui forma la première époque du renouvellement de l’aſtronomie en Europe. Vers le milieu du treizième ſiècle, Sacro-Boſco acquit de la célébrité par ſon ouvrage d’aſtronomie ſphérique & théorique, compoſé d’après les ouvrages de Ptolomée & des Arabes, ſur-tout d’Alfragan. Cet ouvrage mit preſque à la mode l’aſtronomie, & pendant 300 ans, on n’en connut point d’autre dans les écoles. Il mourut à Paris en 1256.

C’eſt à Alphonse X, roi de Caſtille, qu’on doit la correction des tables de Ptolomée. Les travaux des aſtronomes chrétiens, maures ou juifs, qu’il attira à Tolède, procurèrent enfin les tables Alphonſines l’an 1252. Vitellio écrivit, l’an 1270, dix livres ſur l’optique & les réfractions, à l’exemple d’Alhazen ; Kepler y a fait un ſupplément. Purbach, né en 1423, conſtruiſit pluſieurs globes & autres inſtrumens d’aſtronomie, raſſembla & dreſſa pluſieurs tables du premier mobile ; compoſa des tables de Sinus de dix en dix minutes, ſur un rayon de 6 000 000 de parties, que Regio Montanus donna enſuite de minute en minute ; il réforma les tables des planètes, &c. Regio Montanus, né en 1436, diſciple de Purbach, fit pluſieurs obſervations, & conſtruiſit, avec Walther, pluſieurs inſtrumens ; il compoſa de bonnes éphémérides, qui furent reçues avec un empreſſement extraordinaire de toutes les nations.

Copernic, né à Thorn, dans la Prusse royale, le 19 janvier 1472, eut de bonne heure le goût de l’aſtronomie ; il profeſſa les mathématiques à Rome, & y fit quelques obſervations vers l’an 1500. Il voulut connoître & étudier les livres de tous les anciens aſtronomes, pour choiſir entre leurs ſyſtêmes ; & bientôt en imagina un plus conforme aux obſervations, en plaçant le ſoleil au centre, & donnant à la terre un mouvement diurne de rotation ſur ſon axe, & un mouvement annuel autour du ſoleil : tous les phénomènes, dans cette hypothèſe, rentrèrent alors dans l’ordre le plus ſimple. Par le moyen de nouveaux inſtrumens & par beaucoup d’obſervations, il parvint à conſtruire de nouvelles tables des planètes, & finit, vers l’an 1530, ſon grand ouvrage de Revolutionibus orbium Celeſtium, qu’il ne publia cependant que 13 ans après. Ce n’eſt qu’avec peine qu’il ſe détermina à faire imprimer ſon ouvrage ſur le ſyſtême du monde ; l’édition en fut achevée par les ſoins de Rheticus, à Nuremberg, le 24 mai 1543 ; mais peu de jours après avoir reçu le premier exemplaire de cet immortel ouvrage, Copernic mourut d’un flux de ſang.

Wermer, né à Nuremberg en 1468, obſerva la comète de 1500, compoſa pluſieurs ouvrages, fit voir, par des obſervations faites en 1514, que la préceſſion des équinoxes, en 100 ans, étoit de 1 degré 10 minutes, & non pas 1 degré ſeulement. Schoner, né en 1477, fit des obſervations aſtronomiques. Stœffler, Appian, Reinhold, Oroncé Finé, Gemma Friſius, Fernel, Cardan, furent connus ſucceſſivement par des travaux relatifs à l’aſtronomie. Dantes, dominicain, né à Perouſe en Italie ; il fit, en 1576, une meridienne à Saint-Pétrone de Bologne. Guillaume IV, Landgrave de Heſſe, né en 1532, occupe un rang diſtingué parmi les reſtaurateurs de l’aſtronomie ; il fit bâtir à Caſſel un obſervatoire, où il raſſembla toutes les eſpèces d’inſtrumens, connues de son temps ; ſes obſervations ſont les meilleures qui aient été faites avant Tycho avec qui il fut en correſpondance.

Thycho-Brahé, le plus grand obſervateur qu’il y ait eu, fut le premier qui, par l’exactitude & le nombre de ſes obſervations, donna lieu au renouvellement de l’aſtronomie. Toutes les théories, les tables & les découvertes de Kepler, ſont fondées ſur ſes obſervations, & leur nom à la ſuite d’Hipparque & de Copernic, doivent aller à l’immortalité. Tycho naquit le 13 décembre 1546 à Knudſturp, en Scanie, & eut de bonne heure le goût de l’aſtronomie, reconnut bientôt que les tables d’Alphonſe & Copernic s’écartoient ſouvent beaucoup de l’obſervation. Il obſerva à Leipſick, à Wirtemberg, à Auſbourg, & dans ſa patrie. Frédéric I lui donna enſuite l’île d’Huenne, ſituée vis-à-vis Copenhague, y fit conſtruire le château d’Uranibourg, & le meubla des inſtrumens d’aſtronomie les plus grands & les plus parfaits, au nombre de 28. Tycho, par ces puiſſans ſecours, & aidé de pluſieurs obſervateurs qu’il avoit formés, dans l’eſpace de 15 ans, vint à bout d’établir les fondemens de toute l’aſtronomie. Il détermina les lieux de 777 étoiles fixes, chacune par pluſieurs obſervations : le ſoleil, les planètes, les comètes, les parallaxes, les diamètres, les réfractions, tout fut conſtaté d’une manière auſſi exacte que nouvelle. Il fut le premier qui tint compte des réfractions dans ſes calculs. Tant de gloire & de mérite lui firent des envieux, après la mort du roi, on fit révoquer les penſions dont il jouiſſoit ; on le força de quitter l’île d’Huenne ; on ne lui permit pas d’obſerver même à Copenhague, & il fut obligé d’abandonner pour toujours ſon ingrate patrie en 1597. L’empereur Rudolphe II l’attira enſuite après de lui, & lui donna un obſervatoire, où Kepler & deux autres aſtronomes, qui l’avoient ſuivi, le ſecondèrent. Il reprenoit ſes travaux avec une vigueur nouvelle, lorſqu’il fut enlevé par une maladie aiguë, le 24 octobre 1601, à l’âge de 55 ans.

Kepler eſt auſſi célèbre dans l’aſtronomie par les conſéquences qu’il tira des obſervations de Tycho, que celui-ci par les matériaux immenſes qu’il lui avoit préparés. Il naquit le 27 décembre 1571 à Wiel, dans le duché de Wirtemberg. Il compoſa, en 1595, le livre intitulé Miſterium Coſmographicum, qui excita l’admiration des connoiſſeurs ; il compoſa enſuite ſon fameux ouvrage de Stella Martis, où il démontra la figure elliptique des planètes. En 1626, il alla faire imprimer à Ulm ſes tables Rudolphines, ouvrage qui fait époque dans l’aſtronomie, & fut le fondement de tous les calculs aſtronomiques pendant un ſiècle. Il mourut le 15 novembre 1631, à l’âge de 59 ans.

Neper, l’inventeur des Logarithmes ; Lansberg, auteurs des tables aſtronomiques ; Briggs, qui calcula de grandes tables de Logarithmes ; de Peyrèſe, Horroccius & Galilée, qui découvrit les ſatellites de Jupiter, les lois de l’accélération & la libration de la lune ; Longomentanus ; Descartes ; Petau, le plus habile chronologiſte qu’il y ait eu, & le plus grand calculateur en matière d’aſtronomie ancienne ; Gaſſendi, Tacquel, Auzout, inventeur du micromètre à curſeur ou à fil mobile, & qui partage avec M. Picard le mérite d’avoir ſu appliquer les lunettes au quart de cercle ; Campani qui obſervoit à Rome, & travailla d’excellens verres de lunettes dès l’an 1664 ; Pierre & Alphonse Borelli ; Mouton, aſtronome de Lyon, célèbre par de bonnes obſervations ; Riccioli & Grimaldi ;

Jacques Caſſini, ( fils de J. Dominique Caſſini.) naquit à Paris en 1677, & mourut en 1756. On a de lui un grand nombre d’obſervations, il a donné pluſieurs mémoires & des élémens d’aſtronomie, il eſt le père de M. Caſſini de Thuſi dont le fils eſt actuellement directeur de l’obſervatoire royal de Paris.

M. Bouguer a donné un traité de la figure de la terre, & pluſieurs mémoires très-curieux qui l’ont mis au rang des plus grands aſtronomes qu’il y ait eu. M. Maupertuis eſt célèbre par le voyage en Laponie, par ſon aſtronomie nautique, par ſon diſcours de la figure des aſtres. M. Godin fit avec M. Bouguer & de la Condamine, un voyage au Pérou pour la figure de la terre. M. Mayer s’eſt rendu célèbre par les meilleures tables de la lune que l’on ait faites.

L’abbé de la Caille, né à Rumigny, près de Laon, le 15 mars 1713, a été le plus laborieux de tous les aſtronomes de ce ſiècle-ci, & le plus utile à l’aſtronomie. Ses éphémérides, ſes tables du ſoleil, ſes catalogues d’étoiles, ſes travaux ſur la parallaxe, les réfractions & la figure de la terre en France & au Cap, ſur les comètes, ſur les éclipſes, &c. ſont tels, dit M. de Lalande, (dans ſa grande aſtronomie en 4 vol. in-4°. dont nous abrégeons tout ce qui eſt dans cet article ſur l’hiſtoire de l’aſtronomie) qu’il me paroît avoir fait lui ſeul plus d’obſervations & de calculs, que tous les aſtronomes de l’Europe qui ont vécu de ſon temps, pris enſemble. Cet homme unique eſt mort à Paris le 21 mars 1762.

Bradley eſt célèbre par la découverte de la cauſe de l’aberration & de la nutation. Il eſt mort le 13 juillet 1762, à l’age de 70 ans, Joſeph-Nicolas de l’Isle, né à Paris le 4 avril 1688, eſt mort le 11 ſeptembre 1768, à l’age de 80 ans. Perſonne n’a plus travaillé que lui ſur l’hiſtoire de l’aſtronomie, n’a plus contribué à ſes progrès par ſes recherches & ſa correſpondance, par les obſervations qu’il a faites, & par les élèves qu’il a formés.