Encyclopédie méthodique/Physique/AVALANCHES

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AVALANCHES de neige. On donne ce nom à des maſſes prodigieuſes de neige, qui, après avoir été amoncelées ſur les rochers eſcarpés des hautes montagnes, s’en détachent quelquefois tout-à-coup ; & ſe précipitant avec fracas, renverſent tout ce qu’elles rencontrent dans leur route, comblent les vallées, cauſent des inondations en ſuſpendant le cours des torrens. Plus d’une fois on a vu ces terribles avalanches enſevelir ſous des tas énormes de neige des hameaux entiers, ou de malheureux voyageurs qui s’exposent, à travers les gorges de ces montagnes dans un temps auſſi critique que l’eſt le paſſage de l’hiver à l’été, où la chaleur faiſant fondre la neige, & l’eau s’écoulant par-deſſous, détruit l’adhérence de la neige ſur la terre ; une nouvelle neige tombant ſur la première, & augmentant ſon poids, peut encore déterminer la chûte des avalanches. Il en eſt de même des vents qui ſont bien capables de détacher ces maſſes ſuſpendues. Il eſt même des circonſtances où le poids de ces maſſes étant prêt à l’emporter ſur l’adhérence, le moindre bruit ſuffit pour produire leur chûte. Les habitans des Alpes ſont ſi convaincus que le ſon des ſonnettes de leurs mulets peut déterminer cette chûte de neige, que, dans les passages dangereux, ils ôtent toujours ces ſonnettes au printemps ; & que, lorſque les avalanches ont trop tardé de ſe faire en des endroits où elles ſe font annuellement, ils cherchent à les accélérer en tirant des coups de fuſil dans les environs. Ces avalanches peuvent même former des ouragans. Pendant l’hiver de 1769 à 1770, il tomba tellement de neige, que ſa maſſe ne put plus ſe ſoutenir, qu’elle s’écroula tout-à-coup, & fondit ſur les pâturages des communes qui eſt ſur la montagne de Sixt dans les Alpes, qu’elle le couvrit, & que ſon extrémité gagna la pente qui eſt au-deſſous. L’effet de l’air, preſſé par la chûte de cette maſſe, fut ſi terrible, que l’ouragan ſe fraya un paſſage au travers d’une forêt de hêtres & de ſapins qui couvre cette pente, & ne laiſſa pas un arbre ſur pied dans ſa route, ainſi que le rapporte M. de Luc, qui a été ſur les lieux mêmes quelque temps après ce terrible accident. Cet ouragan produit par l’avalanche, ſuſpendit le cours du Gipre qui coule dans la vallée, & renverſa du côté oppoſé un grand nombre d’arbres, & des granges bien plus ſolides que celles qui reſtèrent couvertes & écraſées par l’avalanche dans le pâturage des communes. Ce pâturage des communes eſt ſurmonté par des pentes très-roides, formées des débris des rochers ſupérieurs ; ces pentes, avec les rochers qui les dominent, forment une hauteur verticale de plus de 3 000 pieds dans une vaſte étendue. Preſque toute cette ſurface ſe couvre de neige, qui s’y accumule par différentes cauſes, ainſi qu’on vient de le dire.