Esprit des lois (1777)/L30/C1
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Théorie des Lois féodales chez les Francs, dans le rapport qu’elles ont avec l’établissement de la Monarchie.
Des Lois féodales.
Je croirois qu’il y auroit une imperfection dans mon ouvrage, si je passois sous silence un événement arrivé une fois dans le monde, & qui n’arrivera peut-être jamais ; si je ne parlois de ces lois qu’on vit paroître en un moment dans toute l’Europe, sans qu’elles tinssent à celles qu’on avoit jusqu’alors connues ; de ces lois qui ont fait des biens & des maux infinis ; qui ont laissé des droits quand on a cédé le domaine ; qui, en donnant à plusieurs personnes divers genres de seigneurie sur la même chose, ou sur les mêmes personnes, ont diminué le poids de la seigneurie entiere ; qui ont posé diverses limites dans des empires trop étendus ; qui ont produit la regle avec une inclinaison à l’anarchie, & l’anarchie avec une tendance à l’ordre & à l’harmonie.
Ceci demanderoit un ouvrage exprès ; mais, vu la nature de celui-ci, on y trouvera plutôt ces lois comme je les ai envisagées, que comme je les ai traitées.
C’est un beau spectacle que celui des lois féodales. Un chêne antique[1] s’eleve ; l’œil en voit de loin des feuillages, il approche, il en voit la tige ; mais il n’en apperçoit point les racines : il faut percer la terre pour les trouver.
- ↑ … Quantùm vertice ad oras
Æthereas, tantùm adice ad tartara tendit.
Virgile.