Esprit des lois (1777)/L7/C15

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CHAPITRE XV.

Des dots & des avantages nuptiaux dans les diverses constitutions.


Les dots doivent être considérables dans les monarchies, afin que les maris puissent soutenir leur rang & le luxe établi. Elles doivent être médiocres dans les républiques, où le luxe ne doit pas régner[1]. Elles doivent être à peu près nulles dans les états despotiques, où les femmes sont en quelque façon esclaves.

La communauté des biens introduite par les lois Françoises entre le mari & la femme, est très-convenable dans le gouvernement monarchique ; parce qu’elle intéresse les femmes aux affaires domestiques, & les rappelle comme malgré elles au soin de leur maison. Elle l’est moins dans la république, où les femmes ont plus de vertu. Elle seroit absurde dans les états despotiques, où presque toujours les femmes sont elles-mêmes une partie de la propriété du maître.

Comme les femmes, par leur état, sont assez portées au mariage, les gains que la loi leur donne sur les biens de leur mari sont inutiles. Mais ils seroient très-pernicieux dans une république, parce que leurs richesses particulieres produisent le luxe. Dans les états despotiques, les gains de noces doivent être leur subsistance, & rien de plus.


  1. Marseille fut la plus sage des républiques de son temps ; les dots ne pouvoient passer cent écus en argent, & cinq en habits, dit Strabon, liv. IV.