Essai de psychologie/Chapitre 23

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Chapitre 23

De la méchanique des idées du goût.


L’organe du goût a tant de rapport avec celui du toucher que décrire l’un c’est presque décrire l’autre. Comme la peau la langue a ses mammelons, mais plus saillans, plus épanouis, plus sensibles.

Les saveurs sont l’objet du goût. Les sels fixes, les souffres, les huiles dissous & atténués par quelque liquide, principalement par la salive, sont la cause matérielle des saveurs.

Les sels par leurs pointes aigues sont très-propres à émouvoir, à irriter les fibres délicates des papilles. Les souffres & les huiles, par leurs parties onctueuses & balsamiques, sont propres à y produire des effets contraires.

Mais comme les sels n’ont pas tous la même figure essentielle, les mêmes qualités ils n’agissent pas tous sur les fibres de la même maniere. Les uns les picotent ; les uns les rongent ; les autres les brûlent ; d’autres les crêpent ; d’autres les contractent ; d’autres les distendent ; d’autres les secouent ; d’autres y font des impressions qui semblent tenir le milieu entre deux impressions plus déterminées.

À ces différens effets des saveurs sur l’organe répondent différentes sensations. à un certain degré d’intensité dans le mouvement des fibres répond un certain degré de vivacité dans la sensation.

Ainsi, le goût, non plus que le toucher, ne nous offre rien qui exige que chaque sensation ait sa fibre particuliere.