Exégèse des Lieux Communs/091

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Mercure de France (p. 163-164).

XCI

S’ensevelir dans le cloître.


Ce Lieu Commun fait partie du petit nombre de tropes qu’on a retenu de l’éducation plus ou moins chrétienne qui se donnait encore, il y a une quarantaine d’années. Généralement, on « s’ensevelit dans le cloître », après avoir « bu le calice jusqu’à la lie », « porté une lourde croix », « gravi son calvaire ». J’ai connu des hommes reluisants qui étaient assez régulièrement « crucifiés ». Mais l’ensevelissement dans le cloître est le dernier coup. On s’y détermine spécialement quand on a des crimes à expier. C’est proverbial.

L’idée que quelqu’un se précipiterait à la vie religieuse comme dans un gouffre de joie est aussi étrangère à l’époux de la Bourgeoise que le calcul de la vessie à une momie qui a trois mille ans. Les crimes effroyables des Bénédictines, et les remords déchirants des Capucins font, d’ailleurs, le plus heureux repoussoir à l’intégrité de conscience de tel ou tel député ou magistrat — ce qui rend inexplicable, disons-le en passant, l’idiote rage actuelle de les abolir.

Mais j’y pense, n’y aurait-il pas, analogiquement à ce qui précède, une sorte de cloître insoupçonné pour l’ensevelissement des bonshommes qui n’ont rien à se reprocher, et l’Inconnu qui exige des martyrs n’exigerait-il pas aussi des moines ? Il y a bien des signes et le Bourgeois devrait trembler. On ne m’ôtera pas de l’esprit qu’il est indispensable de choisir entre les deux monastères, celui des canailles qui est naturellement dévolu aux Trappistes et aux Chartreux, et celui des Honnêtes Gens dont le Démon jettera la clef dans l’Abîme, au Dernier Jour.