Explication du Sermon sur la Montagne/Chapitre XI. Les sept don du Saint-Esprit, les sept demandes du Pater et les sept béatitudes.

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Œuvres complètes de Saint Augustin
Texte établi par Raulx, L. Guérin & Cie (p. 299-300).
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CHAPITRE XI.[modifier]

LES SEPT DONS DU SAINT-ESPRIT, LES SEPT DEMANDES DU PATER, ET LES SEPT BÉATITUDES.[modifier]

38. Le nombre sept, que nous retrouvons dans ces demandes, me parait aussi concorder avec le nombre sept, par où a commencé tout ce sermon. Si en effet c’est la crainte de Dieu qui rend heureux les pauvres d’esprit, parce que le royaume des cieux est à eux ; demandons que le nom de Dieu soit sanctifié dans les hommes, par la chaste crainte qui subsiste dans les siècles des siècles[1]. Si c’est la piété qui rend heureux ceux qui ont le cœur doux, parce qu’ils posséderont la terre en héritage ; demandons que le règne de Dieu arrive, soit en nous-mêmes pour que nous devenions doux et ne résistions plus à sa voix, soit du ciel en terre par le glorieux avènement du Seigneur, alors que nous nous réjouirons et nous féliciterons, quand il dira : « Venez, bénis de mon Père, prenez possession du royaume préparé pour vous depuis le commencement du monde[2]. – Mon âme, dit le prophète, se glorifiera dans le Seigneur ; que ceux qui ont le cœur doux m’entendent et partagent mon allégresse[3]. » Si c’est la science qui rend heureux ceux qui pleurent, parce qu’ils seront consolés ; demandons que la volonté de Dieu se fasse sur la terre comme au ciel, parce qu’une fois que le corps comme terre sera soumis à l’esprit comme ciel, dans une paix pleine et parfaite, nous ne pleurerons plus ; car la seule raison pour laquelle nous pleurons ici-bas, c’est ce combat intérieur qui nous force à dire : « Je vois dans mes membres une autre loi qui combat la loi de mon esprit » puis à exprimer notre tristesse par ce cri lamentable : « Malheureux homme que je suis, qui me délivrera du corps de cette mort[4] ? » Si c’est la force qui rend heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, parce qu’ils seront rassasiés ; prions pour qu’on nous donne aujourd’hui notre pain quotidien, qui nous soutienne et nous fortifie, afin de pouvoir parvenir au parfait rassasiement. Si c’est le conseil qui rend heureux les miséricordieux, parce qu’ils obtiendront miséricorde ; remettons toute dette à nos débiteurs et prions pour que les nôtres nous soient remises. Si c’est l’entendement qui rend heureux ceux qui ont le cœur pur, parce qu’ils verront Dieu ; prions pour n’être point induits aux tentations, de peur d’avoir le cœur double en poursuivant les biens temporels et terrestres, au lieu de ne rechercher que le bien simple et de lui rapporter toutes nos actions. En effet les tentations, provenant de ce qui semble aux hommes pénibles et désastreux, n’ont de prise sur nous qu’autant qu’en ont les choses qui flattent et qui passent chez les hommes pour bonnes et heureuses. Si c’est la sagesse qui rend heureux les pacifiques, parce qu’ils seront appelés enfants de Dieu[5] ; prions pour être délivrés du mal, car c’est cette délivrance qui nous rendra libres, c’est-à-dire enfants de Dieu, en sorte que nous crions, par l’esprit d’adoption : « Abba, Père[6]. »

  1. Psa. 18, 10
  2. Mat. 25, 34
  3. Psa. 33, 2
  4. Rom. 7, 23, 24
  5. Mt. 5, 3, 9
  6. Rom. 8, 16 ; Gal. 4, 6