Fables originales/Livre V/Fable 05

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Edouard Dentu (p. 121-122).

FABLE V.

Le Paon et le Singe.


Un maître sot, le paon, à l’éclatant plumage,
Un singe sémillant au grisâtre pelage,
Las du calme repos que l’on goûte au logis
Voyageaient en divers pays.

Les étrangers marquaient respect et déférence
À l’oiseau de Junon.
(La plume était pour eux brevet d’intelligence)
Devant le singe, une guenon,
Ils écourtaient leur révérence.
(Des voyageurs si mal vêtus
Doivent avoir l’esprit obtus)
Mais pendant l’entretien, faisant la différence,
L’hôte n’estime plus les gens sur l’apparence,
Il méprise le sot, reconduit chapeau bas,
Voûtant le dos, arquant les bras,
Le singe laid jusqu’à sa porte,
Le priant avant qu’il ne sorte
De revenir
À son loisir
L’honorer d’une autre visite.
Le paon ne reçut pas l’invite.

Si l’accueil est fait à l’habit
L’au revoir s’adresse à l’esprit.