Florence de Rome/Introduction

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Texte établi par Axel Wallensköld (1p. 1-130).

INTRODUCTION

CHAPITRE I. MANUSCRITS
CONTENANT LA CHANSON,
LEUR CLASSIFICATION, CHOIX DES LEÇONS

§ I. — Les manuscrits.

On ne connait que deux manuscrits qui nous donnent plus ou moins intégralement la chanson de Florence de Rome. Un fragment d’un troisième manuscrit nous a conservé en outre, dans un état fort défectueux, deux cent vingt-quatre vers de ce poème. Pour désigner ces trois manuscrits, ainsi que les divers remaniements français et étrangers de la chanson de Florence de Rome, nous adoptons les sigles choisis par M. Rudolf Wenzel en son ouvrage intitulé Die Fassungen der Sage von Florence de Rome und ihr gegenseitiges Verhältnis (Marbourg, 1890).

P. Par cette lettre nous désignons le ms. Nouv. acq. franc. 4192 de la Bibliothèque Nationale. Cette bibliothèque l’a reçu, en 1879, en don de l’un des directeurs de la librairie Hachette, M. Émile Templier [1]. C’est un manuscrit in-4o de la fin du xiiie ou du commencement du xive siècle, contenant 91 feuillets de parchemin, avec 34 vers sur chaque page ; il est mutilé à la fin [2]. M. Léopold Delisle, dans ses Mélanges de paléographie (1880), p. 425, en a publié les quatorze premiers vers, et M. Paul Meyer les trois premières pages dans le Bulletin de la Société des anciens textes français, t. VIII (1882), pp. 66-69. Le copiste du manuscrit était originaire de l’est de la France, comme en témoignent des graphies telles que laiaul, commencie (═ commenciee), aresteiz, moinne (═ meine, maine), etc.

M. Ce manuscrit appartient à M. I.-T. d’Arcy Hutton, Marske Hall, Richmond, Yorkshire (Angleterre). Il a été signalé, en 1882, par M. Paul Meyer dans le Bulletin précité de la Société des anciens textes français (p. 43 et suiv.). C’est un manuscrit en parchemin de 83 feuillets, datant de la seconde moitié du xiiiie siècle. Il contient cinq ouvrages ou fragments d’ouvrages, énumérés par M. Paul Meyer dans l’article cité, et Florence de Rome y occupe la quatrième place, aux feuillets 53-81. La chanson est écrite sur deux colonnes, ordinairement de 47 vers chacune. M. Paul Meyer en a publié (pp. 56-59) les 99 premiers vers et les 18 derniers. Le copiste était originaire d’Angleterre, ainsi que le montrent des graphies comme seignurs, liuere (═ livre), bene (═ bien), estile (═ estoile), unke, la (═ li, pron. pers. régime indirect), etc.

L. Nous désignons par cette lettre le ms. du Musée Britannique, Landsdowne 362. Il a été décrit par M. H.-L.-D. Ward dans le premier volume de son Catalogue of Romances in the Department of Manuscripts in the British Museum (1883), pp. 711-712. C’est un fragment de quatre feuillets de parchemin, petit in-4o, de la fin du xiiie siècle, ayant 32 vers sur chaque page. Il a servi de reliure à un exemplaire du Speculum Contemplationis de Walter Hilton, lequel occupe actuellement les feuillets 2-75 du volume. Viennent ensuite les quatre feuillets de notre fragment, numérotés : 75*, 75**, 76, 77. Ces quatre feuillets, qui ont appartenu au même cahier, se groupent deux à deux, une lacune de plusieurs feuillets existant entre 75** et 76. Ce fragment est fortement endommagé. Les feuillets 75*et 75**ayant été coupés de haut en bas par le relieur, il ne reste que le commencement (au recto du feuillet) ou la fin (au verso) de chaque vers. En outre, toute la dernière page du fragment est complètement illisible ; à d’autres endroits aussi l’écriture est plus ou moins effacée. M. Ward a publié, du mieux qu’il a pu, les restes lisibles des dix premiers vers, le recto du feuillet 76 (moins le dernier vers), ainsi que dix vers du feuillet 77 recto (vers 204-207 et 219-224). Le copiste de ce ms. paraît avoir été anglais, témoin des graphies comme barun, feit, etc.

Outre ces trois mss., il existe quatre remaniements de notre chanson, qui peuvent nous être, à l’occasion, d’un certain secours pour en établir le texte. En voici l’énumération :

D. Par ce sigle nous désignons un remaniement en quatrains monorimes du commencement du xive siècle, intitulé Dit de Flourence de Romme. A. Jubinal l’a publié, en 1839, dans son Nouveau Recueil de Contes, Dits, Fabliaux et autres pièces inédites des xiiie, xive et xve siècles, t. I, pp. 88-117.

Q. Le ms. 24384 (anc. Sorb. 446) du fond français de la Bibliothèque Nationale renferme un remaniement de Florence de Rome, en alexandrins comme le texte original ; mais le texte en est très différent de celui des manuscrits P, M et L. Paulin Paris en a donné, en 1873, une analyse dans l’Histoire littéraire de la France, t. XXVI, pp. 336-348. Le ms., un in-4o en papier de 248 feuillets [3], a été exécuté en 1455-1456, comme l’apprend la notice suivante, qui termine le volume :


« Che Ronmanch d’Octeviien de Ronme et de Flourent, son frere, et apriès de Flourence de Ronme, qui fu fille Otton, ossi d’Esmeret, qui espouzet eult la bielle Flourenche : lequel Ronmans est fais et parfais l’an mil iiiic et lvi, le vie de jullet, s’est appartenans a Jehan, mon Jehan dit le Muyzit, adont demorans en le viesware tenans a le porte Jehan de Haussi, qui fu par le derriere amours, et enconmenchiés environ le mois de septembre l’an mil iiiic et lv. »


Le manuscrit contient en effet le Roman de Florent et Octavien * et à la suite, à partir du fol. 202, le Roman de Florence de Rome. Les vers que voici, qui terminent le Roman de Florent et Octavien (f. 202 ro), forment la transition de l’un à l’autre roman :


« Apriès le mort des prinches dont vous m’oez compter,
Li empererez Ottez, qui Ronme a a ghouvrener,
N’oza partir de Ronme pour le pays tensser
Ne pour le terre prendre ne a lui tourner ;

A Ronme se tenoit, qu’il avoit a garder.
Il avoit une fille de Marie au vis cler,
Qui ot a non Flourenche ; celle ot mon a porter.
Li empererez Garssille, qui ot a ghouvrener
Toutte Constantinoble, chieus volt gherre mener
Pour conquester Flourenche ; mais Esmeret le ber
Ayda si bien Oston sa gherre a demener
Qu’Ostez li fist Flourenche a mouillier espouzer.
Puis trespassa rois Ostes et se fenme ot (?) vyls (?) cler,
Et ot (ms. ottes) bers Esmerez le tierre a (?) ghouvrener ;
Mais ot puis pour sen frere Esmerer (sic) a porter :
On l’apiella Millon. Florenche volt amer
Et volt trahir son frere pour sa fenme espouser,
Enssi que en l’istore vous orez recorder. » [4]


Le copiste de ce ms. était originaire du nord-est du domaine français, comme en témoigne clairement son langage (Flourenche, tierre, etc.).

R. Par ce sigle nous désignons une version anglaise en couplets de douze vers, publiée en 1802 par Joseph Ritson dans ses Ancient English Metrical Romances, t. III, pp. 1-92, et en 1893 par M. Wilhelm Viëtor sous le titre : Le bone Florence of Rome, première partie, d’après un manuscrit de Cambridge, le seul connu [5].

S. Ce sigle désigne une version espagnole en prose, publiée en 1864 par M. Amador de los Rios dans son Historia critica de la literatura española, t. V, pp. 391-468, d’après un manuscrit de la Bibliothèque de l’Escurial [6].

§ 2. — Classification des manuscrits [7].

La classification des trois mss. qui donnent la chanson, ainsi que des quatre remaniements, a déjà été entreprise par deux fois : en 1890, par M. R. Wenzel dans sa dissertation déjà citée ; en 1890, par M. Albert Knobbe dans la deuxième partie de l’ouvrage publié par M. Wilhelm Viëtor sous le titre : Le bone Florence of Rome. Pour les mss. PML et Q, les critiques sont arrivés à la même conclusion, que l’on peut figurer par ce schème [8]:

Orig.
L M P Q

Q n’est, comme nous l’avons dit, qu’un remaniement du poème conservé par les trois autres mss. Mais la question se pose de savoir si l’auteur de ce remaniement ne disposait pas d’un manuscrit représentant un état du texte antérieur à celui que représentent les mss. LMP. Cette hypothèse sera vérifiée, si, en quelque endroit, Q offre une leçon correcte contre LMP fautifs. Comme on le voit par leur arbre généalogique, MM. Wenzel et Knobbe ont cru pouvoir admettre que ce groupement LMP contre Q se produit ; et il y a, en effet, certains passages dans la version de Q où le récit de ce ms. semble plus primitif que celui des trois autres :

1° Selon Q, dans une bataille entre les Romains et les Grecs, Oton, l’empereur de Rome, est sauvé par Milon, le traître principal du roman, mais qui est en même temps un très brave chevalier. L’empereur reconnaissant jure de lui donner pour épouse sa fille Florence. Aussi, l’empereur mort, le conseil de l’empire veut-il que Milon recoive Florence avec l’empire [9]. Au contraire, selon LMP, Oton a été sauvé par le frère de Milon, le bon Esmeré, et l’empereur a exprimé en mourant le désir que sa fille fût donnée à Esmeré. Si, plus tard, Florence se déclare prête à prendre Milon pour époux, c’est qu’elle croit qu’Esmeré a été tué par les Grecs [10]. On peut aisément se représenter que l’original ait prêté cet exploit à Milon pour rendre acceptable sa candidature à la main de Florence et qu’un remanieur ait préféré attribuer ce fait d’armes à Esmeré, qui est le personnage sympathique du roman. On comprendrait moins bien qu’un remanieur eût voulu diminuer les mérites d’Esmeré, en attribuant à Milon un tel exploit [11].

Q raconte que, dans une bataille, Esmeré sauve la vie au chevalier Sanson, qui lui devient par là très attaché [12]. LMP ne parlent pas de cet exploit, mais Sanson y apparaît pourtant comme l’ami dévoué d’Esmeré. Peut-être la source commune de LMP avait-elle omis le passage, qui explique si bien l’attachement de Sanson à Esmeré [13].

Ces deux preuves en faveur de l’originalité (partielle) du récit de Q par rapport au récit des mss. LMP ne peuvent pas être considérées comme absolument concluantes. Mais, comme le fragment L se rattache de très près aux mss. M et P, il n’est nullement nécessaire de borner la comparaison entre Q et les autres manuscrits aux quelques passages donnés par L. Si donc à quelque endroit Q présente une leçon assurée, tandis que MP offrent une leçon altérée, on peut sans hésitation en tirer la conclusion que les mss, LMP forment groupe contre le ms. Q. Or, il y a au moins un passage dans Q où ce manuscrit-semble donner une leçon plus primitive que MP. C’est quand il est raconté, dans Q, que l’héroïne est chargée d’instruire, dans l’art de broder, Béatrice, la fille du bon seigneur Thierri, qui avait recueilli Florence, abandonnée dans la forêt [14]. Ce trait manque dans MP : mais, comme, dans différentes autres versions du conte sur lequel la chanson de Florence de Rome est fondée, l’héroïne est précisément chargée de soigner ou d’instruire l’enfant de son hôte [15], il y a tout lieu de croire que, pour cette donnée, Q est plus près de l’original que (L)MP [16].

Quant au rapport que soutiennent entre eux les trois autres mss., LMP, il n’est pas facile de le fixer d’une fiçon absolument sûre, vu le peu d’étendue du fragment L. M. Wenzel et, après lui, M. Knobbe semblent s’être arrêtés un peu à la légère au groupement MP contre L. Car, parmi les cas cités par MM. Wenzel[17]MM. Knobbe [18]L diffère de MP, il n’y en a pas un pour lequel où puisse affirmer que MP donnent la mauvaise leçon [19]. Il nous semble qu’un groupement LM contre P a beaucoup plus de chances d’être exact. Voici nos preuves en faveur de ce groupement :

1° V. 1784 : L : Atant es uus synagoz, M : A tant estes vus sinagor (hémistiche trop long) — P : Atant ez sinagon.

2° V. 1787 : L : V les .xv. mile, M : O les .xv. mile (hémistiche trop court) — P : O les .iiij. milliers.

3° V. 1800 : L : pleins de grant fierte, M : plein de grant bunte (hémistiche trop court) — P : que tant par ot bonte.

4 ° V. 1828 : L : Et il est venuz, M : E il est uenu (hémistiche trop court) — P : Et il iest (= i est) venuz. Peut-être le copiste du ms. source de LM a-t-il vu dans iest la forme diphtonguée (wallonne) de est [20].

Ces preuves, il va sans dire, ne sont pas absolument sûres, puisqu’il reste toujours possible que P ait corrigé les leçons fautives de la source commune de LMP. Si cependant nous préférons le groupement LM contre P au groupement MP contre L (ces deux groupements étant les seuls admissibles), c’est que P est, en général, un bon manuscrit, tandis que L, si court que soit ce fragment, contient beaucoup de fautes assurées, qui ne se trouvent pas dans les mss. M et P. Nous remplaçons donc le schème de MM. Wenzel et Knobbe (voy. ci-dessus) par le suivant :

Orig,
L M P Q

Nous avons vu plus haut qu’il y a, outre Q, trois remaniements de la chanson de Florence de Rome, dont un français (D) et deux étrangers (R et S). Pour la classification de toutes ces rédactions, MM. Wenzel et Knobbe sont arrivés aux résultats suivants :

Wenzel [21]. Knobbe [22].
Orig. Orig.
L D M P R S Q S L M P R Q
D

Par ces tableaux (simplifiés) on voit que ce n’est que pour D et R que les deux savants diffèrent d’opinion.

Quant à D (le Dit de Flourence de Romme), il nous semble tout à fait impossible de dire s’il dérive de M (Knobbe), ou s’il forme groupe avec M (Wenzel) ou avec LM, ou bien s’il provient séparément de la source commune de LMP. Tout ce qu’on peut affirmer, c’est qu’il ne dérive pas de P, car D contient un épisode, le combat de Milon avec un énorme serpent [23], qui manque dans P, mais que donne M [24] (L fait défaut). C’est même à cause de cet épisode commun que MM. Wenzel[25]MM. Knobbe [26] ont cru devoir rattacher D de près à M. Mais, comme l’épisode est tout à fait dans le style de la chanson, il est fort peu probable que ce soit une interpolation. Le rapport exact de D aux trois mss. L, M et P ne peut pas, d’ailleurs, servir à l’établissement de notre texte, le Dit étant un remaniement de la Chanson trop abrégé et trop libre pour donner le moyen d’apprécier la valeur respective des leçons divergentes des mss (L)MP.

La place de R (la romance anglaise) dans la classification de nos versions est également fort difficile à fixer, cette romance étant rédigée très librement. Il nous semble cependant que la raison qu’a alléguée M. Knobbe [27] en faveur du groupement SLMDP contre R est acceptable. Il s’agit d’une contradiction dans MPS (L fait défaut), qui n’est pas dans R. Selon MPS, Florence, en quittant la maison du méchant Peraut, donne son « bliaut » à sa femme Soplise [28], et pourtant MPS racontent plus tard que le « bliaut » de Florence fut mouillé, quand elle fit naufrage [29]. R ne mentionne le « bliaut » ni au premier endroit [30] ni au second [31] ; mais, tandis que, pour le dernier passage, ce silence pourrait être interprété comme une abréviation du poète anglais, il n’en est pas de même pour le premier : là, Florence donne à l’hôtesse son « palefroi » (dans MPS, c’est Peraut qui reçoit sa « mule »), ce qui semble indiquer que R procède d’une source française différente. On est donc en droit de conjecturer que, dans la source commune de LMPS et de R, il n’était pas encore question, au premier endroit, du « bliaut » de Florence, mais que dans la source de LMPS ce « bliaut » fut introduit, sans que le remanieur se rappelât qu’il devait dès lors supprimer la mention du « bliaut » au second endroit. Toutefois, il va sans dire que la possibilité que R ait corrigé la leçon de la source de LMPSR n’est pas entièrement exclue.

Une autre preuve du groupement LMPS contre R pourrait être tirée du fait que, dans (L)MP [32], ainsi que dans S, il n’est point question des enseignements donnés par Florence dans la maison de Thierri à la fille de son hôte, tandis que R lui conserve encore ce rôle [33].

D’un autre côté, il y a quelques contradictions au groupement LMPS contre R, mais elles nous semblent n’être qu’apparentes. Ce sont les deux cas suivants :

MPR contre S (L manque). En décrivant l’apparition d’Esmeré dans la mêlée, MPR racontent qu’il portait sur son bouclier une « colombe blanche » et un « lion »,[34] tandis que S attribue la « colombe » à Esmeré et le « lion » à Milon [35]. Cette dernière leçon fait, au premier coup d’œil, l’effet d’être la bonne, car non seulement il est singulier que, dans MPR, il ne soit pas question du bouclier de Milon lors de la première apparition des deux frères, mais il faut encore ajouter que dans tous les autres passages où MP parlent des boucliers d’Esmeré et de Milon, c’est Esmeré qui porte la colombe et Milon le lion [36] (R, qui ne mentionne pas le blason de Milon, attribue toujours, avec plus de conséquence, à Esmeré aussi bien la colombe que le lion [37]). Si pourtant nous rejetons le groupement LMPR contre S, c’est que, comme on le verra en détail plus bas, PS forment un groupe très étroit par opposition aux autres rédactions, et que nous croyons pouvoir regarder, avec M. Wenzel [38], la leçon de S comme une correction intentionnelle de la leçon donnée par la source commune de PS. Cela n’empêche d’ailleurs pas que la source commune de LMPS et de R ait pu altérer une leçon primitive analogue à celle de S [39]. Les contradictions qui en sont résultées auraient été écartées par R, tandis qu’elles auraient passé inaperçues dans la source de LMPS.

2° (MP contre RS ou) RS contre MP (L manque). MP racontent qu’à l’âge de dix ans Florence possédait toutes les qualités désirables [40] ; RS fixent cet âge à « quinze » ans [41]. Q donnant à Florence l’âge de « treize » ans [42], il est impossible de dire avec certitude si la source commune de LMPSR a porté « dix » ou « quinze » ans. Dans tous les cas, nous croyons pouvoir admettre, pour un détail si peu important, une rencontre fortuite. Peut-être la source de LMPS et de R donnait-elle « dix » ans, ce que les rédacteurs de R et de S ont cru séparément devoir changer en « quinze » ans, pour rendre ainsi plus vraisemblable le tableau des perfections de la jeune Florence.

Quant à la place de S dans la classification des versions, M. Wenzel n’apporte pas de preuves concluantes en faveur du groupement selon lequel L, MP et S proviendraient séparément de leur source commune. Au contraire, tout ce qu’il dit sur le rapport de S avec les manuscrits français montre que S a sa place tout près de P [43]. De même, M. Knobbe n’apporte pas d’arguments valables en faveur de son groupement, qui est, pour S et les trois manuscrits français, identique à celui de M. Wenzel [44]. Or, il y a, selon nous, des preuves certaines d’un groupement PS contre LM. Voici ces preuves :

PS contre LM. Aux vers 1789-1790 (de notre Texte), où il s’agit de la description d’une bataille, M dit :

La out tant espeie freinte e tant escu troie
Tant hauberc demaille e tant clauon fause.


L, qui a sauté du premier hémistiche du premier vers au second hémistiche du second vers, dit en un seul vers :

La ot tante hanste frainte et tante hauberc fause.


PS, au contraire, ont omis le premier vers [45]. Qu’un vers de cette nature ait été intercalé dans la source commune de LM, c’est chose de soi très improbable, et il nous semble aussi peu probable que P et S, indépendamment l’un de l’autre, l’aient omis.

PS contre M (L manque). M, appuyé par R, raconte qu’Esmeré, avant de partir pour la Grèce à la poursuite du roi Garsire, laisse à son frère Milon « cent chevaliers » [46]. PS ne disent rien de tel, et pourtant il est plus tard, à plusieurs reprises, question de ces cent chevaliers [47],

PS contre M. Le vers 1775 de notre Texte donne le nombre des hommes armés qui ont promis hommage et fidélité à Esmeré après la mort d’Oton. Dans P leur nombre est de « quatre » mille, dans M de « quinze » mille et dans L de « trente » mille. S s’accorde avec P [48]. Que « quinze » soit le nombre original, c’est ce qui ressort d’autres passages où LMS s’accordent à donner ce chiffre, tandis que P persiste à parler de « quatre » mille hommes [49]. Toutes ces divergences s’expliquent facilement, si l’on admet que le copiste de la source commune de PS avait par mégarde écrit .iiij. au lieu de .xv. au v. 1775 et que P a intentionnellement introduit ce même nombre (« quatre ») aux autres endroits du texte.

PS contre M (L manque). L’épisode du serpent, dont il a été question ci-dessus (p. 14), manque également dans S.

PS contre M (L manque). Après le v. 5498 du Texte, P donne le vers :

Nostre seignor pria et marie samere


dans une laisse en -aire. Or, comme le montrent les autres rimes du Texte, l’auteur de la chanson séparait nettement ai de e < a latin. Le vers est donc interpolé. S va avec P : comendóse á Nuestro Señor Ihu Xpo. et á Sancta Maria, su madre [50]. M ne donne pas le vers.

6° PS contre M (L manque). Les vers 5988-5989 de notre Texte, dans lesquels il est question de la présence du traître Macaire dans le couvent de Beau-Repaire, manquent dans P, et de même S ne donne rien qui y corresponde [51]. Le contexte semble cependant les exiger, car la laisse en question doit évidemment contenir une mention des deux traîtres, Milon et Macaire, dont les maladies et le voyage à Beau-Repaire ont été décrits dans les laisses précédentes (vers 5776-5975).

Il y a bien un certain nombre de contradictions au groupement PS contre LM, mais elles nous semblent toutes pouvoir être expliquées par l’hypothèse de rencontres fortuites. D’ailleurs, tout autre groupement amènerait des difficultés insurmontables. Voici les cas où, à première vue, il y a contradiction au groupement PS contre LM :

MP contre LS. Le vers 1827 de notre Texte est donné ainsi par les trois mss. L, M et P :

L : Il mandirent en rome le iustisser (?) symun,
M : Il manderunt en rome la postille par nun,
P : Il manderent a romme la parolle millon.

S s’accorde avec L, en donnant [52] : et enbiaron por el Apostóligo Symeon. Or, une comparaison avec R [53] montre qu’il faut lire au second hémistiche : l’apostoile Simon, et l’on pourrait alors être tenté de croire que les leçons corrompues de M et de P remontent à une source commune où le nom du pape aurait été illisible [54]. Nous croyons cependant pouvoir tout aussi bien admettre des erreurs indépendantes pour ce passage où le pape est nommé pour la première fois, d’autant plus qu’à un endroit postérieur du texte [55] M parle de lapostoille symun, tandis que P donne lapostole millon, visiblement sous l’influence du premier passage [56].

2° MP contre LS. Après les vers 1516-1518 de notre Texte :

Vet ferir un Grifon, que pas nel redota,
Desus la bocle d’or son escu li perça
Et l’aubert de son dous rompt et desmailla,


L donne un vers dont il ne reste que la fin :

.....................n espie passa,


et qui manque dans MP. Or, dans S, ce passage est ainsi rendu : et fuélo ferir que lo non probô nada, et alcançólo por só la broca del escudo, et falsógelo, et la loriga otrosy, de guisa que de la tela del figado et del coraçon le fendió [57], et il paraît bien que la dernière partie de cette phrase de S correspond au vers mutilé de L. Cela étant, on est tenté de croire à une omission d’origine commune dans M et P. Si cependant on tient compte de ce que M abrège beaucoup le texte, surtout quand il s’agit de développements superflus, une coïncidence fortuite dans les omissions de M et de P est admissible :

MP contre LS. Après les vers 1551-1552 de notre Texte :

Quant l’emperere vit Milon, si l’apela,
De son frere Esmeré tantost li demanda,


MP lisent :

M : Mun cors e ma uie vn iur me dona,
P : Qui mon cors et mauie enpres deu me sauua.

Cette transition inattendue de la 3e à la 1re pers. du sing. n’a pas lieu dans L et S. Dans L il y a après le v. 1552 le vers mutilé :

V... li mens druz........................,.........................
après quoi le fragment continue comme P. S dit à cet endroit : et quando vió á Miles, llamóle et preguntóle por su hermano Esmere, et dixole : — ¿ Dó es aquel que mi cuerpo et mi vida saluó á mercet de Dios ? [58] Il est évident que MP ont omis le vers en question. Mais le fait que, dans P, le vers suivant commence par un pronom relatif fait croire à une omission à part dans P, faite par le copiste même de ce ms.

MP contre LS. MP ont omis un vers qui est dans L :

Come griffun le virent sil vnt mult redote [59],


et auquel correspond dans S : Quando esto vieron los griegos [60]. Comme le vers en question n’est pas nécessaire au contexte, il a bien pu être omis séparément dans M et P.

MS contre LP. Le v. 1812 de notre Texte :

Et cil li respondirent : « Trestot a vostre gré ! »


manque dans M, ainsi que dans S [61]. Vu l’insignifiance de ce vers, il est probable que M et S l’ont omis indépendamment l’un de l’autre.

6° MP contre S (L manque) ; = le cas 1°, p.16.

MP contre S (ou RS contre MP) (L manque) ; = le cas 2°, p. 17.

MP contre S (L manque). Dans une laisse en -anz, MP donnent le vers (v. 8 du Texte) :

M : Antioche funda antiochus li francs,
P : Anthioche fondi antiocus li frans,


frans (francs) est évidemment au lieu de granz, forme appuyée par S (Antiocho, el Grande) [62]. Il nous semble très possible que la source commune de LMPS ait déjà eu frans, leçon que l’auteur de la version espagnole a cru devoir corriger.

MP contre S (L manque). Après les vers 3187-3189 de notre Texte :

Mout par a grant paour Garsire li chenuz,
Sinagon en apelle, que mout estoit ses druz ;
Tant bon consoel li est ja de la boche issuz,


les mss. MP donnent immédiatement la réponse de Sinagon :

« En la moie e foi, sire, se g’en iere creüz », etc.


S dit beaucoup mieux : Quando Garsyr esto vió, fieramente fué espantado, et llamó Sinagot, en quien se fiaua mucho, et preguntóle qué le semejaua de aquello ó qué le consejaua y fazer. Yo uos lo diré, dixo él, ssy yo creido fuesse, etc. [63]. Il nous semble très possible que S ait essayé de combler la lacune donnée par la source commune de LMPS.

10° MP contre S (L manque). Après le vers 4193 de notre Texte, que MP donnent en ces termes :

M : Tant lout Miles batue ke el fu tut sanglant,
P : Tant lot milles batue que tote en iert sang


les mss. continuent ainsi :

De la dolor qu’elle a se pame mout sovent,
Et la coleur li mue, mout ot foible samblant [64].

S dit de son côté : la vió tan sangrienta, et tan mal ferida de las feridas que le feziera Miles, que la su faz tornara tal como de muerta, et su brial rroto en muchos logares [65]. Que la fin de ce passage n’est pas de l’invention de l’auteur de S, c’est ce qui ressort du fait que P donne au bas de la même page où les vers cités se lisent [66], sans aucun rapport avec les vers environnants [67], un vers ainsi conçu :

Le bliaut quot uesiu dun uermeil aufriquant,


qui a dû originairement avoir sa place après le v. 4103, mais qu’un copiste, après l’avoir omis par mégarde, a ajouté au bas de la page. [68] On est donc très tenté de croire qu’une source commune de MP aura oublié et ensuite ajouté le vers, et que le scribe de P aura copié machinalement ce vers ajouté, tandis que celui de M, avec plus de jugement, l’aura négligé. L’altération du second hémistiche de MP remonterait donc aussi à une source commune. Malgré tout ce qu’il y a de tentant dans cette hypothèse, il ne nous semble pas impossible, vu les nombreuses omissions de M, que M ait omis séparément le vers en question, et que, par l’omission de ce vers, le second hémistiche du v. 4193 ait pris un aspect à peu près identique dans M et P.

11° MS contre LP. Au v. 1818 de notre Texte, M donne, dans une laisse en -é, comme rime le mot pité, appuyé par S (piadat) [69], tandis que LP présentent bonté. Une coïncidence fortuite nous semble ici tout à fait possible.

Il nous reste enfin à fixer la place du ms. Q dans cette classification, de toutes les rédactions de Florence de Rome, et nous croyons que MM. Wernzel et Knobbe ont eu raison de grouper toutes les autres rédactions contre Q. Comme nous avons démontré ci-dessus que LMP forment groupe contre Q et que LMPS, selon toute probabilité, forment groupe contre R, il reste seulement la question de savoir si R forme groupe avec Q contre LMPS ou bien si LMPSR forment groupe contre Q, et c’est la seconde alternative qui semble la plus probable [70].

Le résultat auquel nous a conduit l’examen précédent peut être figuré schématiquement de la manière suivante :

Orig.
L M D(?) P S R Q
§ 3. — Choix des leçons.

Trois des remaniements de la chanson de Florence de Rome, étant très libres, ne nous sont guère utiles pour le rétablissement de notre texte : ce sont le Dit (D), la romance anglaise (R) et le remaniement français en vers alexandrins (Q). Ce dernier étant encore inédit, nous le publions en appendice à ce volume. Quant à la rédaction en prose espagnole (S), elle a, au contraire, une assez grande valeur pour le rétablissement du texte, vu qu’elle est prochement apparentée au ms. P. Toutes les fois qu’elle s’accorde avec (L)M, elle témoigne donc que P est fautif. Néanmoins, quand des vers de P, non donnés par (L)M, n’ont rien qui leur corresponde dans S, il ne suit pas de là nécessairement que ces vers soient interpolés en P, car il est manifeste que S abrège souvent son modèle français.

Si donc, dans un certain nombre de cas, la classification de nos versions indique la leçon à choisir, il y a, d’autre part, une foule de cas où l’on se trouve en présence de deux versions d’égale valeur généalogique : LM contre P(S), M contre P(S) ou L contre P(S). Dans de tels cas, si la bonne leçon n’est pas indiquée par le sens, la mesure ou la rime, le choix de la leçon ne peut, au fond, être qu’arbitraire. Mais comme chaque manuscrit a nécessairement une valeur générale plus grande ou moindre que celle des autres mss., il est naturellement préférable de prendre pour base du texte rétabli le ms. qui semble être le moins corrompu. Or, de nos trois mss, c’est évidemment P qui est le plus près de la source du groupe LMPS.

Le fragment L, qui ne comprend que les vers 1461-1593 (dans un état très mutilé) et 1739-1838 de notre Texte, ne peut naturellement pas entrer en ligne de compte.

Quant au ms. M, il est celui de nos mss. qui présente les leçons les plus corrompues. Non seulement il y a dans ce ms. des fautes qui peuvent être considérées comme provenant de négligences de copiste ; mais encore le texte est d’un bout à l’autre altéré de telle façon qu’on est obligé d’admettre qu’un copiste a intentionnellement changé le texte qu’il avait devant lui. Mentionnons d’abord que M a omis un nombre considérable de vers, le plus souvent contenant des détails plus ou moins superflus pour la marche du récit [71]. Puis, les vers sont raccourcis d’une manière tout arbitraire, le copiste anglo-normand ayant visiblement, sans aucune intelligence de la nature des vers qu’il copiait, omis les mots qu’il jugeait inutiles [72]. Enfin, le grand nombre de rimes incorrectes montre combien d’altérations a dû subir, dans M, le texte original [73]. Il est donc tout à fait impossible de prendre M pour base de la restitution, et il est clair que la reconstruction des passages du texte qui ne sont donnés que par M [74] ne saurait être que très hypothétique.

Reste le ms. P, qui apparaît comme devant nécessairement servir de base à la restitution du texte. En effet, P est un bon ms., qui donne en général des alexandrins corrects, qu’on peut garder tels quels. Il est donc tout indiqué de le prendre pour base dans les cas où le classement des versions le permet et où le texte même de P ne s’y oppose pas. Cependant, nous devons avouer qu’il ne nous semble pas improbable que le texte de P ne représente pas, dans un état en somme intact, le texte original de notre chanson, mais bien une version légèrement remaniée par un scribe consciencieux, qui aura voulu, avant tout, donner un texte intelligible et des vers corrects. Cette impression, nous la devons non pas tant au fait que les vers de P fourmillent de chevilles, de mots insignifiants destinés uniquement à remplir le vers (car de tels vers peuvent remonter à l’original commun de LMPS), qu’à certaines rimes incorrectes dans des vers d’ailleurs bien bâtis, telles que retraire 2088 et braire 2093 : -oivre, ou esclaire 4282 : -oire ; nous recevons en outre cette impression du fait que des fautes contre la déclinaison à deux cas se rencontrent souvent dans des vers qui manquent dans M et qu’on pourrait, par conséquent, regarder comme interpolés. Le scribe de notre manuscrit, ou bien d’un manuscrit antérieur, mais postérieur à la source commune de LMPS, aura donc, sans tenir un compte suffisant de la langue originale de la chanson, corrigé et amplifié le texte qu’il avait devant lui, texte peut-être fortement altéré. Nous avons cependant jugé plus prudent de ne rejeter, en général, que celles des leçons de P qui sont, par leur contenu, inadmissibles ou qui sont en contradiction évidente avec la langue originale, telle qu’elle sera décrite dans le chapitre v de cette Introduction.

Si donc nous avons en général, dans notre texte critique, gardé les leçons du ms. P, nous avons, d’autre part, admis dans notre texte un certain nombre de vers qui manquent dans P, mais qui sont donnés par M (ou LM). Cela est naturellement arrivé, outre pour les deux laisses déjà mentionnées et pour la fin de la chanson, toutes les fois que les vers de (L)M sont appuyés par la version S. Mais nous avons en outre jugé prudent d’admettre dans notre texte tout vers de (L)M qui nous a semblé admissible en lui-même, préférant ainsi donner plutôt trop que trop peu.

Terminons ce chapitre en disant que, dans plusieurs cas, il nous a fallu corriger des leçons communes aux mss. (L)MP, ce qui prouve que la source directe de LMPS était déjà un manuscrit plus ou moins fautif.


CHAPITRE II — ANALYSE DE LA CHANSON

Après avoir rappelé [75] l’ancienne gloire de Rome et son illustre origine troyenne, l’auteur annonce qu’il contera un « romant » du roi Oton de Rome et de Florence, sa fille [76], qui fut la cause d’une guerre sanglante. (Laisse I) — La naissance de Florence avait été accompagnée de prodiges terribles, présages de cette guerre. Sa mère étant morte peu de jours après, Florence avait grandi auprès de son père, qui la chérissait tendrement ; elle était renommée pour sa beauté et son savoir. (L. II) — Or, à Constantinople régnait le vieux roi Garsire [77], qui, ayant ouï parler de la belle Florence, résolut de la prendre pour femme. À cet effet, il envoya à Rome quarante messagers sous la conduite d’Aquarie : si le roi de Rome lui refuse sa fille, il aura la guerre. [78] (L. II-IV) — Voyage d’Aquarie et de ses compagnons. Arrivés devant Oton et sa fille, ils font leur message. Après avoir demandé conseil à ses barons et consulté Florence, Oton donne une réponse négative. Les messagers, alors, déclarent que leur maître viendra conquérir l’empire de Rome ; après quoi ils s’en retournent en Grèce. Le roi Oton fait convoquer tous ses hommes. (L. V-XV, v. 395) — Les messagers de Garsire, revenus de Rome, donnent à leur maître une description enthousiaste des splendeurs de Rome et de la beauté de Florence, mais lui annoncent en même temps l’insuccès de leur mission. Furieux, Garsire fait convoquer une armée formidable, et on s’embarque pour Rome. Après avoir subi une violente tempête, la flotte grecque aborde non loin de Rome. Les Romains apprennent l’arrivée des Grecs. (L. XV, v. 396-XXIV) — En ce temps vivaient, à la cour du roi d’Esclavonie, deux jeunes chevaliers, Milon et Esmeré, fils du roi de Hongrie, Philippe. Après la mort de celui-ci, leur mère avait épousé Justamont de Syrie, et, comme celui-ci avait voulu faire périr ses beaux-fils, leur gouverneur les avait enlevés de nuit, emmenés au loin et élevés comme il convenait à leur rang. Ils avaient trouvé asile chez le roi d’Esclavonie, qui les avait armés chevaliers. Esmeré, le cadet, était loyal et bon ; l’aîné, Milon, au contraire, faux et mauvais. [79] (L. XXV-XXVI, v. 698) — Or, un jour que les deux frères s’exerçaient à manier la lance et l’épée, un pèlerin, qui revenait de Rome, leur apprit la guerre entre Garsire et Oton. Aussitôt les deux jeunes gens décident d’offrir leur service au roi de Rome. Accompagnés de vingt chevaliers et de trente écuyers, que leur avait donnés le roi d’Esclavonie, Milon et Esmeré arrivent à Rome et se logent chez un riche bourgeois. Le lendemain, avec leurs vingt chevaliers, ils prennent part à un combat et taillent en pièce quarante ennemis, sortis des rangs à leur rencontre. Oton et sa fille, du haut de leur palais, ont vu ces prouesses et voudraient savoir quels sont les chevaliers inconnus. Florence a surtout distingué Esmeré. (L. XXVI, v. 699-XXVII) — Trois cents Grecs s’étant avancés pour venger leurs compagnons, une mêlée terrible s’engage. Le roi Oton envoie, à la rescousse des chevaliers inconnus, sept cents Romains sous la conduite des deux frères Agravain et Sanson. Défaite des Grecs. Retour de Milon et d’Esmeré chez leur hôte, auquel ils font présent de dix chevaux conquis ; après quoi ils se rendent au palais du roi. Oton adresse des exhortations à ses hommes. (L. XXVIII-XXXI) — Comme le roi et ses barons sont à table, Milon, Esmeré et leurs vingt compagnons se présentent à la cour. Milon dit qui ils sont et pourquoi ils viennent. Ils sont priés de prendre place à table. Florence, assise à côté d’Esmeré, s’éprend tout de suite de lui. (L. XXXII-XXXIV, v. 988) — Garsire, campé au bord du Tibre, est furieux de son échec. Sans écouter les conseils des siens, il ordonne l’attaque immédiate de Rome, Un espion romain va raconter à Oton la résolution de Garsire, Sur l’avis d’Esmeré, les Romains iront à la rencontre des Grecs. (L. XXXIV, v. 989-XXXV) — En voyant approcher la bataille décisive, Florence, pensant qu’elle pourra empêcher le carnage, s’offre à épouser Garsire. Mais Oton n’y consent pas et exhorte ses hommes au combat. Esmeré obtient la première joute. Énumération des forces d’Oton. Cependant, les Grecs sont deux fois aussi nombreux que les Romains. Le roi Oton promet sa fille avec la ville de Rome à celui qui se distinguera le plus. La bataille s’engage. (L. XXXVI-XLVIII) — Esmeré tue un seigneur grec, Brucabaut. Oton et Garsire se rencontrent dans la mêlée et échangent de vigoureux coups d’épée. Comme les Grecs viennent au secours de Garsire, Oton aurait été perdu, si Esmeré n’était venu le sauver. Ensuite Esmeré sauve aussi son frère Milon, mais est lui-même violemment assailli. Alors l’indigne Milon l’abandonne à son sort et va raconter Oton qu’Esmeré a passé à l’ennemi. Mais Oton reconnaît bientôt l’imposture de Milon et secourt lui-même Esmeré. Celui-ci fait des prouesses merveilleuses ; pourtant, pressés par le nombre, les Romains sont forcés de reculer. (L. XLVIII-LVI) — Florence, du haut d’une tour, suit la bataille. Quand Esmeré s’approche, elle lui fait connaître son amour, et Esmeré promet de le mériter par ses exploits. Les Grecs commencent à reculer ; Oton fait alors sonner la retraite. Malheureusement le roi de Rome est tué d’un coup de flèche à la tête, au moment où il ôtait son heaume. Avant de mourir, il exprime, son désir qu’Esmeré obtienne Florence et l’empire. Jalousie de Milon. (L. LVII-LXI) — La bataille continue. Esmeré, après des prodiges de bravoure, est fait prisonnier par le Grec Sinagon et conduit devant Garsire. Pendant ce temps, Milon fait transporter le corps d’Oton à Rome. Florence est accablée de douleur, et tout le monde regrette le bon roi. (L. LXII-LXIX, v. 1986) — La nouvelle de la mort d’Oton étant parvenue à Garsire, celui-ci ordonne une nouvelle attaque contre Rome. Mais les Romains se défendent vaillamment durant tout un mois, jusqu’à ce que les vivres commencent à leur manquer. Florence songe alors à prendre pour mari quelque brave chevalier qui puisse vaincre les Grecs. Sa suivante Audegon a vu, en observant le cours des étoiles, que l’un des deux princes hongrois sera l’élu. Florence voudrait bien avoir Esmeré, mais il a disparu dans le dernier combat. Elle se résout alors à prendre Milon. (L. LXIX, v. 1987-LXXI) — Un jour que Garsire était à table, dans son camp établi près du Tibre, Sinagon lui amène Esmeré prisonnier. Ayant appris qui il est, Garsire, sur le conseil de Sinagon, lui rend la liberté, en souvenir d’un grand service que le père d’Esmeré lui avait autrefois rendu. (L. LXXII-LXXVI, v. 2156) — Sur ces entrefaites, Florence mande auprès d’elle Milon et lui déclare qu’elle veut le prendre pour mari afin de sauver l’empire. Comme Milon, en son orgueil, demande à réfléchir, Florence courroucée le renvoie. Pendant que Milon se repent de sa sottise, Esmeré rentre dans Rome au milieu de la joie populaire, Florence le fait appeler et lui fait la même proposition qu’à Milon. Esmeré consent tout de suite ; on fait prêter serment de fidélité aux barons, Esmeré épouse Florence et est couronné empereur de Rome, tandis que Milon prépare sa vengeance. Florence déclare ne pas vouloir appartenir pleinement à son mari, tant qu’il n’aura pas vaincu Garsire ; Esmeré a bon courage de le faire. (L. LXXVI, v. 2137-LXXXVIII, v. 2429) — Lorsque Garsire apprend ce qui est arrivé à Rome, il se repent de sa générosité envers Esmeré. Mais celui-ci ordonne immédiatement à ses hommes de s’armer pour une bataille décisive. La bataille s’engage terrible et finit par la fuite des Grecs. Esmeré sauve le Grec Sinagon d’entre les mains de Milon. Garsire et ses hommes s’embarquent en hâte pour Constantinople. Esmeré, furieux que Garsire lui échappe, déclare vouloir le poursuivre par mer. Il charge Milon de se rendre à Rome, avec Agravain, Sanson et cent chevaliers, pour garder l’empire et protéger la reine en son absence, (L. LXXXVIII, v. 2430-XCVI) — Pendant qu’Esmeré et ses hommes vont à la poursuite de Garsire, Milon médite une trahison. En faisant route vers Rome, il réussit à corrompre les cent chevaliers laissés sous sa garde ; il leur fait promettre de dire, à Rome, qu’Esmeré a été tué et qu’en mourant il a laissé à Milon l’empire et sa femme. Seul, le courageux Sanson s’oppose à cette trahison, mais il est vite tué, et son frère Agravain se voit forcé de jurer de faire ce que veut Milon. Pour accréditer l’imposture, on fera passer le corps de Sanson pour celui d’Esmeré. À Rome, tout se passe comme il était convenu, mais Florence refuse énergiquement d’épouser Milon. Celui-ci la fait. alors garder par ses hommes. Cependant, Agravain, pris de remords, va tout confesser au pape, qui l’absout et fait arrêter les traîtres. Ils sont jetés en prison ; Milon est enfermé dans une tour à part. (L. XCVII-CVIL, v. 3057) — Cependant Esmeré poursuit Garsire jusqu’à Constantinople, où une bataille s’engage. À la fin Garsire se rend, et Esmeré est couronné roi de Grèce. Immédiatement après, il retourne à Rome, emmenant avec lui le vieux Garsire, (L. CVIL, v. 3058-CXXI) — Par un messager Florence apprend l’arrivée d’Esmeré au port de Gaëte. Dans sa joie, elle fait relâcher Milon et lui dit d’aller à la rencontre de son frère. Milon, cependant, ne s’est pas repenti ; il médite une nouvelle trahison. Arrivé devant Esmeré, il accuse Florence d’adultère avec Agravain. Au même moment arrive Agravain avec soixante chevaliers. Milon, pour éviter toute explication, se jette sur lui pour le tuer. Esmeré fait séparer les combattants et, ayant appris de la bouche d’Agravain et des soixante chevaliers la conduite félonne de Milon, veut tuer celui-ci, Sur les prières des barons et de Garsire, il se contente de le chasser de son empire. (L. CXXII-CXXVIII) — Milon, cependant, ne perd pas courage. Il retourne vite à Rome, monte chez Florence et lui annonce le désir d’Esmeré de la voir venir à sa rencontre en grande pompe. Florence se hâte de faire selon le désir de son mari. En route, Milon, accompagnant Florence, réussit à la séparer de sa suite, et Florence comprend enfin que Milon l’a trompée. (L. CXXIX-CXKXI) — Éperdue, Florence veut prendre la fuite, mais Milon l’en empêche et la rudoie. Ils continuent donc à chevaucher toute la nuit, tant qu’ils sortent du territoire de l’empire. Arrivés près d’une fontaine, ils descendent de cheval. Après que Milon s’est vu forcé de combattre un lion et deux singes, ils se remettent en route et arrivent chez un vieil ermite, qui leur donne à manger. Comme l’ermite, ayant appris de Florence son histoire, blâme la conduite de Milon, celui-ci l’enferme dans sa chapelle et y met le feu. Pendant la nuit, Milon est assailli par un énorme serpent et réussit avec peine à le tuer. Le jour venu, ils continuent leur route, et Milon force Florence à jurer de ne révéler à personne qui elle est. Une broche miraculeuse protège Florence contre les entreprises amoureuses de Milon [80]. Furieux de ses vains efforts, Milon frappe sa victime et la pend enfin par ses tresses à un arbre. (I. CXXXII-CXLVIII, v. 4143) — Or, dans la forêt il y avait un château, appelé Château-Perdu, où demeurait le seigneur Thierri avec sa femme Églantine et sa fille Béatrice. Thierri chassait près de l’endroit où Florence était pendue. À l’approche des chiens de Thierri, Milon abandonne sa victime, et Florence est détachée par le châtelain et conduite au château. Là, bien qu’elle ne dise pas qui elle est, elle est soignée et traitée avec bonté, Elle couche dans le même lit que Béatrice dans la chambre de Thierri. (L. CXLVIII, v.4144-CLV) — Cependant Milon a trouvé un refuge chez Guillaume de Dol [81] et commence à se repentir de sa mauvaise action, (L. CLVI, vers 4379-4410) — À Château-Perdu il y avait un chevalier, nommé Macaire [82], qui s’était épris d’amour pour Florence. Comme toutes ses tentatives pour vaincre la résistance de la belle inconnue sont restées vaines, il imagine une vengeance infâme. Un soir, il se cache dans la chambre à coucher de Thierri ; quand tout le monde est endormi, il tue Béatrice d’un coup de couteau et place ensuite le couteau ensanglanté dans la main de Florence, qui dormait toujours [83]. Florence est surprise dans cette position par Thierri et jugée coupable du meurtre. Elle doit être brûlée vive, mais au dernier moment Thierri a pitié d’elle et la laisse s’en aller avec ce qui lui appartenait. (L. CLVI, v. 4411-CLXX) — Au sortir d’une grande forêt, Florence se trouve dans une plaine près de la mer, où l’on est en train de pendre un larron. Prise de compassion, elle rachète le malfaiteur, qui lui promet fidélité. Mais le larron, qui s’appelle Clarembaut [84], est un traître. Il conduit Florence chez un autre bandit, Peraut, et ce n’est que la femme de celui-ci, la bonne Soplise, qui garde Florence d’être complètement dévalisée et peut-être tnée. Mais les deux brigands trouvent un autre moyen de s’enrichir aux dépens de Florence. Comme celle-ci veut aller en Terre-Sainte, elle charge Clarembaut de trouver un navire où elle puisse s’embarquer. Mais le bandit s’adresse à un capitaine du nom d’Escot et offre de lui vendre une belle esclave. Escot accepte le marché, Florence est conduite sur le navire, sans savoir à quoi elle est destinée, et le navire quitte le port. Ajoutons que le capitaine a été plus fin que les deux truands, car il leur a donné, en paiement de l’esclave, du cuivre et du plomb au lieu d’or. (L. CLXXI-CLXXIX) — Une fois en pleine mer, Escot veut prendre possession de sa belle esclave, mais Florence lui résiste et réclame le secours de Dieu. Alors une tempête éclate, qui brise le navire, de sorte que tous sont noyés, excepté Florence et Escot, qui sont sauvés chacun de son côté. Florence, soutenue par un sac de farine qui surnage, arrive à un rocher. (L. CLXXX-CLXXXIII) — Du haut du rocher, Florence aperçoit une abbaye, Beau-Repaire, où elle se rend. [85] Comme les cloches, sonnant d’elles-mêmes [86], annoncent l’arrivée d’une sainte personne, Florence est reçue en grande solennité par les religieuses. Elle veut se faire nonne. (L. CLXXXIV-CLXXXVI) — Tandis que Florence entrait en religion à Beau-Repaire, voici ce qui était arrivé à Escot. Il avait été recueilli par un navire et déposé au premier port. Mais les privations l’avaient rendu malade ; le visage enflé, muet et à moitié aveugle, il logeait dans une cabane hors de la ville. (L. CLXXXVII, v. 5584-5615) — Esmeré aussi était malade : dans une guerre contre le roi de Pouille, il avait été blessé à la tête par une flèche, et le médecin n’avait pu retirer la pointe enfoncée dans son crâne. (L. CLXXXVII, v. 5616-CLXXXVIII, v. 5643) — À Beau-Repaire, Florence avait, par ses prières, guéri une jeune nonne malade. Le bruit de cette cure miraculeuse attire à Beau-Repaire une foule de malades, qui sont tous guéris par la pieuse femme. (L. CLXXXVIII, v. 5644-CXCI) — Milon, qui, chez Guillaume de Dol, avait, par sa bravoure, conquis l’estime de tout le monde, était devenu lépreux en punition de son crime envers son frère et sa belle-sœur. Ayant entendu parler de la sainte femme de Beau-Repaire qui guérissait tous les maux, il obtient de son maître qu’on l’y conduise. (L. CXCII) — Macaire, l’assassin de Béatrice, était également malade : il avait le corps enflé et les jambes percluses, Apprenant ce qui se passait à Beau-Repaire, il veut s’y rendre. Thierri et Églantine accompagnent leur serviteur. (L. CXCIII-CXCVII) — Il y avait donc déjà à Beau-Repaire Milon et Macaire, ce dernier accompagné de Thierri et de sa femme. Mais Escot y vient, lui aussi. À force de prières, il avait obtenu une place dans un navire, et ce navire était, par hasard, arrivé justement à l’endroit où Escot espérait être guéri. Pareillement Clarembaut, devenu paralytique, arrive par mer à Beau-Repaire pour y chercher guérison, Enfin, Esmeré y vient à son tour et est solennellement reçu par l’abbesse. (L. CXCVIII-CC) — L’abbesse annonce à Florence que le roi de Rome s’est rendu à Beau-Repaire pour être guéri par elle. Florence, toute saisie, comprend que ses malheurs seront bientôt finis. Le lendemain, Esmeré, Thierri et Églantine viennent voir la sainte nonne, qui apparaît la tête couverte d’un voile qui lui cache le visage. Esmeré dit pourquoi il est venu. Alors Florence fait appeler tous les malades : viennent Milon, Macaire, Clarembaut et Escot. Elle les exhorte à confesser publiquement leurs péchés : alors ils seront guéris. Chacun raconte alors le rôle qu’il a joué dans l’histoire de Florence. Elle entend ainsi successivement les récits de Milon, de Thierri, de Macaire, de Clarembaut et d’Escot. (L. CCI-CCVIII, v. 6365) — Florence, après avoir entendu leurs récits, les guérit, et ils retournent contents chacun chez soi. Puis elle guérit Esmeré et se fait reconnaître par lui. Esmeré et Florence retournent à Rome, où il leur naît un fils, Oton de Spolète. (L. CCVII, v. 6366-CCVIII) [87].

CHAPITRE III — CARACTÈRE DE LA CHANSON

On a pu voir par l’analyse qui précède que la chanson de Florence de Rome comprend deux parties distinctes : 1° la guerre entre les Romains et les Grecs, jusqu’au mariage d’Esmeré et de Florence ; 2° les aventures de Florence, jusqu’à la fin de la chanson. L’intérêt principal du lecteur se porte naturellement sur la seconde partie, où Florence est vraiment l’héroïne du récit, et la première partie ne devrait être là que pour servir d’introduction à la seconde. Mais, chose curieuse, cette première partie a pris, entre les mains de notre auteur, un tel développement qu’elle comprend presque la moitié de la chanson [88]. C’est que le poète, tout en prenant pour sujet un conte d’origine orientale, qu’il tenait on ne sait d’où [89], a évidemment voulu composer une véritable chanson de geste. Pour lui, l’essentiel était donc ce qui constitue l’élément principal des chansons de geste : l’apparat guerrier avec tout ce qui s’ensuit. De là cette complaisance avec laquelle il s’étend sur tout ce qui touche à la guerre et aux exploits de ses personnages, tandis que les aventures de la pauvre impératrice, à part quelques épisodes où reparaît le goût de l’auteur pour les scènes de violence, sont traitées avec beaucoup moins d’intérêt personnel [90].

En tant que chanson de geste, notre poème n’est qu’une imitation peu originale d’œuvres semblables, On y rencontre tous les traits connus : les grandes batailles, les combats singuliers, les vaillants exploits individuels, les descriptions détaillées d’édifices, d’armures, etc., les répétitions abrégées, au commencement des laisses, du récit précédent, et ainsi de suite, et, si ces épisodes guerriers sont peu originaux, les héros de ces aventures ne le sont pas davantage, car l’auteur est tout à fait dépourvu de la faculté de nuancer psychologiquement les caractères. D’un côté, il y a les personnages sympathiques : Florence, Oton, Esmeré, Sanson, Agravain, Thierri, Églantine, Soplise, etc. ; de l’autre, les personnages antipathiques, les ennemis et les traîtres : Garsire, Milon, Macaire, Clarembaut, Peraut, Escot. Seul, le Grec Sinagon, bien qu’il appartienne à la catégorie des ennemis, est peint sous un jour favorable. Même la générosité de Garsire, lorsqu’il donne la liberté à Esmeré en raison des services que le père d’Esmeré lui a rendus, doit plutôt être envisagée comme une preuve de son arrogance stupide [91]. Mais ce qui ne manque à aucun chevalier, même au plus antipathique, c’est la bravoure, les qualités du guerrier intrépide. Bref, pour un lecteur moderne toute la première partie, avec son continuel cliquetis d’armes, ne présente guère d’intérêt spécial, tandis que la seconde partie, le récit des aventures de Florence, si monotones qu’elles deviennent à la fin, ne manque pas d’un certain agrément naïf, pareil à celui que nous procurent les contes populaires.

Dans la plupart des chansons de geste, l’élément religieux joue un rôle important. On s’adresse toujours à Dieu dans les circonstances périlleuses, et souvent Dieu lui-même vient plus ou moins directement réconforter et secourir ses fidèles. Les noms de Dieu et des saints sont continuellement sur les lèvres des croyants, et tout personnage sympathique à l’auteur est par là même un bon chrétien. C’est que les chansons de geste reflètent fidèlement l’esprit du moyen âge, et cet esprit était empreint d’une religiosité forte et naïve. La chanson de Florence de Rome ne diffère pas, en cela, des autres chansons de geste.

D’abord, l’élément religieux apparaît dans les miracles qui trouvent place dans l’histoire aventureuse de l’impératrice de Rome. Tels sont l’apparition des bêtes sauvages qui viennent l’une après l’autre attaquer Milon dans la forêt (vers 3777-3780, 3803-3810, 3976-4002), la manière dont Florence est sauvée du naufrage et son arrivée à Beau-Repaire (vers 5425-5509), ainsi que sa faculté de guérir, par ses prières, les malades de toute sorte (à partir du v. 5658). En outre, toute la description de la vie monastique à Beau-Repaire (à partir du v. 5500) prouve l’intérêt que prenait l’auteur aux choses religieuses. Mais cet esprit religieux se montre surtout dans la manière dont l’auteur présente les hommes dans leurs rapports avec Dieu. Ils s’adressent constamment à lui en des invocations plus ou moins longues, aussitôt qu’ils sont sous le coup d’une émotion. Et, quand ils sont en détresse, c’est par des prières ferventes qu’ils implorent son secours. Souvent alors Dieu les sauve au moyen d’événements en soi naturels [92]. Ces prières et ces invocations sont, comme il arrive en général dans les chansons de geste, de curieux résumés de l’histoire biblique. Elles consistent principalement en des énumérations plus ou moins longues des grands actes de Dieu, de ses miracles connus, ou bien rappellent des événements de l’histoire sainte. Nous apprenons ainsi par elles à connaître les événements et les personnages bibliques qui ont dû le plus occuper la pensée de notre auteur et, probablement, celle de ses contemporains [93]. Et dans les invocations apparaissent en outre toute une foule de noms de saints, variant d’après les besoins de la rime [94].

La chanson de Florence de Rome étant le développement d’un thème entièrement fictif, il est assez naturel que tout le milieu historique dans lequel l’action se passe soit également de pure invention. L’empereur de Rome, Oton, le roi de Grèce, Garsire, le roi de Hongrie, Philippe, et tous les autres princes et seigneurs sont de simples figures de roman, empruntées parfois à la tradition littéraire du moyen âge [95]. Aussi n’y a-t-il pas lieu de s’arrêter aux données pseudo-historiques de notre chanson, Ce qui mérite plus d’attention, ce sont les faits mentionnés en passant par notre auteur et qui, surtout par leur caractère apocryphe, nous donnent une idée curieuse de la représentation qu’il se faisait du passé. On trouvera ces faits mentionnés et commentés dans la Table des noms de personnes et des noms géographiques au chapitre suivant.

Quant aux noms de lieux qui se rencontrent dans notre chanson, ils ne nous donnent guère une haute opinion du savoir géographique de l’auteur. Cela se comprend d’ailleurs facilement ; l’auteur ne connaissait certes pas, pour les avoir visitées, l’Italie et la Grèce. Et, ainsi que dans la plupart des chansons de geste, l’élément oriental joue aussi dans la chanson de Florence de Rome un rôle considérable pour indiquer l’origine des différentes parties de l’armure, etc. Tous ces éléments géographiques seront mentionnés dans la Table des noms de personnes et des noms géographiques. Mais il y a quelques faits qui sont peut-être mieux à leur place dans cet aperçu.

Ainsi, le trajet de Constantinople à Rome est décrit trois fois. La première, il s’agit des messagers de Garsire qui viennent demander pour leur seigneur la main de la belle Florence : ils abordent la terre italienne à Otrante, en Pouille (v. 157), traversent la Pouille (v. 168), passent par Bénévent et la Campagne romaine (v. 170, Champagne : -aigne), et arrivent en « Romaigne » après quinze jours de marche (v. 171). La seconde fois, Garsire avec toute son armée, après avoir côtoyé la ville d’Odierne (v. 584), ville difficile à identifier, contourne la péninsule : il laisse à droite Salerne (v. 585, : -erne [96]), passe près de Gaëte (v. 629) et aborde au port de Lolifant, port fantastique situé à une distance de « six » lieues de Rome (vers 631-632, : -ant). La troisième fois enfin, quand Esmeré et Garsire retournent ensemble de Constantinople, ils abordent au port de Gaëte, d’où ils n’ont que quatre jours de marche pour arriver à Rome (vers 3351-3352, 3366),

Puis, il y a la question de savoir où l’auteur a voulu placer le couvent imaginaire de Beau-Repaire, si tant est qu’il ait eu là-dessus quelque idée nette. Récapitulons les faits. Milon se rend de chez Guillaume de Dol à Beau-Repaire par terre ; la route est longue et fatigante (vers 5815-5825). Macaire y vient en une demi-journée, aussi par terre (vers 5919-5920, 5959-5971). Escot fait un voyage de mer de quatre jours et demi, en partant de Satelie, c’est-à-dire peut-être Satalièh ou Adalia (l’anc. Attalia), port de la Turquie d’Asie sur la Méditerranée (vers 5590, 6007-6008). Clarembaut vient par mer d’Aguilée, et en quittant Beau-Repaire le navire va à Bénévent (vers 6025, 6034-6038, 6040). Esmeré voyage par terre de Rome à Beau-Repaire, et le voyage dure cinq jours et demi (vers 6094-6097). Enfin, Esmeré et Florence retournent à Rome par terre (v. 6398 ; d’après la version de M, appuyée par celle de S ; Le ms P nous fait ici défaut). — Ces faits nous mènent évidemment à localiser le couvent de Beau-Repaire en quelque endroit de la côte orientale de l’Italie centrale.

CHAPITRE IV — TABLE DES NOMS. DE PERSONNES ET DES NOMS GÉOGRAPHIQUES [97]

Aaliaume, chevalier romain 1319. Cf. Aliaume.

Aaron, frère de Moïse ; Dieu fait fleurir sa verge 5770 (cf. Nombr. XVII).

Abraham, le patriarche ; reçoit l’ordre de sacrifier Isaac 4055 ; est en enfer, quand le Sauveur y descend 5716.

Adam, Adan, Adam ; sa création 3290, 5410, 5935 ; Éve tirée de sa chair 63 ; mange de la pomme 3304 ; est en enfer, quand le Sauveur y descend 5716.

Afriquant, aufriquant, africain ; bon drap a. 208 ; vermeil a. 4194. Cf. Aufriquanz, Aufrique.

Agabalon, compagnon de Ménélas dans la guerre de Troie 5048, var. P, = Agamemnon ?

Agenois, Agenais, l’ancien pays de France, dans la province de Guyenne ; le duc d’A., chevalier romain 1389.

Aglentine, Aglantine ; voy. Eglentine.

Agravain, Agrevain — Agravainz, Agrauvains, chevalier romain, frère de Sanson 379, 389, 827, 1236, 1320, 1384, 1943, 2190, 2252, 2352, 2368, 2516, 2556, 2676, 2697, 2704, 2710, 2738, 2765, 2784, 2787, 2791, 2799, 2807, 2811, 2820, 2830, 2940, 2945, 2063, 2966, 2968, 3010, 3019, 3418, 3433, 3450, 3455, 3464, 3483, 3516, 3540, 4770, 6077, 6087, 6092, 6137, 6155, 6157.

Aladiant, constructeur de la belle chambre de Florence (peutêtre par réminiscence de l’Aladin des Mille et une Nuits) 1972.

Alemaigne, Allemagne ; un borgois d’A. est chargé de garder le navire des messagers du roi Garsire 166. Cf. 1210, var. M.

Alesandre, localité située à la source du Tibre (peut-être Alessandria della Paglia en Piémont, fondée en 1168 ; l’auteur aurait confondu le Tibre avec le Pô) 449.

Alexandrin, venant d’Alexandrie en Égypte ; or a. 2792, Cf. drap de Alisandre 3636, var. M.

Aliaume — Aliaumes, chevalier romain 1387, 2328 (P : liaumes), 2357 (P : liaume), Cf. Aaliaume.

Alisandre, Alexandre le Grand ; conquiert Babylone et toute la terre jusqu’à la mer Betee 507.

Anastace (sainte), Anastasie, vierge née à Rome, assiste à la naissance du Sauveur ; miracle qui lui rend ses deux mains 5704. Sur cette légende, voy. P. Meyer, Romania, XIV, 497-8 ; XVI, 71-2.

Anconois, Anconnois, habitants d’Ancône, tributaires de Rome (1208, P : auconois, M : acomeis) ; la terre d’A., le territoire d’Ancône 2016.

Andre, l’île d’Andros dans l’archipel grec ; cendaus d’A. 451. Cf. C.-Th. Müller, Zur Geogr. der älteren chansons de geste (Göttingen 1885), p. 25.

Angers ; fondé par Eneus 8, var. M.

Angrie ; voy. Hongrie.

Anthioche, Antioche ; fondée par Antiocus li Granz 8.

Antiaumes (suj.), nom d’homme 4983.

Antiocus li Granz, Antiochus III, roi de Syrie (223-187 avant J.-C.) ; fonde Antioche 8. L’on sait qu’Antioche fut fondée, vers 300 avant J.-C., par Séleucus ier, dit Nicator, fondateur de la dynastie des Séleucides en Syrie ; Antiochus III, le Grand, ne fut que le sixième roi séleucide.

Aquarie — Aquaries, seigneur grec 127, 196 (P : aquarres), 261, 400 (P : aquarres), 445, 458. M : acharie, achare.

Aquilee, Aquilée sur le golfe Adriatique 6025.

Aragonne ; voy. Arragonne.

Arcedeclin (saint), l’époux des noces de Cana 2796. Ce nom, du latin architriclinus, « maître-d’hôtel », provient d’une confusion entre le chef du festin et l’époux (qui n’est pas nommé dans l’Év. selon saint Jean, II, 1-11). Cf. Jehan (saint).

Argonne, ancien pays de France (Argonensis pagus) ; cil d’A., alliés des Romains 1480 (M : cil de cessoigne, Saxonie).

Arrabe, Arabie ; l’or d’A. 2272. Cf. Arrabiz.

Arrabiz (suj.), Arabe 3003 ; arcabi — arrabiz, arabe : destrier a. 479, 3850, 4021, 4633 ; mul a. 6285 ; orsa. 2304. Cf. Arrabe.

Arragon, aragonais ; destrier a. 1141. Cf. Arragonne.

Arragonne, Arragone, Aragonne, Aragon en Espagne ; destrier d’A. 881, 1479 ; frain d’A. 3282. Cf. Arragon.

Astarot, Astaroth ou Astarté, déesse adorée chez les peuples sémitiques ; le regné Astarot, le royaume du Diable (5447, P : raine estraigot). Cf. « Astarot ot non li deables », Roman de Thèbes, éd. Constans, II, p. 9 (v. 2851).

Audegon, Audegons — Audegons, principale suivante de Florence 1639, 1656, 1661, 1666, 1702, 1822, 1888, 1892, 2051, 2069, 2079, 2219, 2223, 2848, 2870, 3665.

Aufriquanz (suj.), nom du roi qui fonda la cité d’Aufrique 12. Cf. Afriquant. Godefroy regarde ce mot comme un adj. ; voy. au mot Aufrican.

Aufrique, Afrique ; la cité d’A., fondée par le roi Aufriquant 12 ; la terre d’A., pays d’origine du cheval Bondifer 1110.

Augalie, Agadir, port du Maroc ; de si en A., indication d’une contrée très éloignée 1199.

Aumarie, Almeria, ville d’Espagne ; dras d’A, 131, 728 ; soie d’A. 1436 ; poelle d’A, 3437.

Auquine, Aquino, ville de l’Italie méridionale ; destrier d’A. 4226.

Auquitaigne, Aquitaine ; li dus d’A., vassal romain 1393.

Avalon, Avallon, ville de France, dép. de l’Yonne ; le moutier saint Pere d’A., chapelle Saint-Pierre, à Avallon, jusqu’au XIVe siècle église paroissiale 4973.

Babiloine, Babylone ; fondée par Babilonus 11 (par un reis babilonans 8, var. M) ; conquise par Alexandre le Grand 508 ; babiloigne sur mer fait partie de l’empire romain 3289, var. M.

Babilonus (suj.), Babylon, roi asiatique imaginaire ; fonde Babylone, qu’il peuple d’enfants 10.

Badas, Bagdad, désigne probablement Le Caire ; Savaris de B., vassal romain 3158.

Baiart (le), nom de cheval 1386.

Basquaire, Biaiquaire, endroit où est situé le couvent de Bel Repaire 5919 (M : bel repeire) ; l’eue de B. 5501 (M : bulgarie).

Belleant, Beleant, Bethléem ; le Sauveur y est né 660, 6315.

Bel Repaire, Biau Repaire, Biau Repere, Biau Repare, couvent de femmes, situé sur l’eue de Basquaire, bâti par Jules César 5500, 5532, 5563, 5599, 5645, 5742, 5754, 5759, 5823, 5856, 5875, 5909, 5939, 5969, 5971, 5977, 5994, 6008, 6014, 6022, 6031, 6038, 6071, 6080, 6097, 6189.

Berart, chevalier romain 1236, (1385, P : beraut, M : bernard).

Berengier, écuyer romain 2231.

Berriz (le roi), grand-père maternel de Florence 4716 (M : la reine betriz).

Besanson, Besançon ; désignation pour une grande richesse 1153.

Betee (la mer), la grande mer inconnue dont l’eau était comme figée ; desqu’an, jusqu’a, jusqu’an la mer B., indication d’une contrée très éloignée 509, 3255 (opposée à Oriant), 5756. Cf. C. Hofmann, Sitzungsber. der k. bayer, Akad. der Wiss., Philos.-philol. Cl., 1865, II, mém. I, pp. 1-19 (« Ueber das Lebermeer ») ; R. Much, Anz. f. deutsches Alt. XXIV (1898), 321-3 (« Mare mortuum »).

Betiz (li roiz), défenseur de Gaza (Gadres) en Palestine contre Alexandre le Grand (5345, P : betriz). Cf. P. Meyer, Alexandre le Grand dans la litt. du moyen âge, II, 155 ; dans Quinte-Curce (IV, 6, éd. Lemaire, Paris 1822-4, I, 245) un Betis figure comme préfet de Gaza.

Biaiquaire ; voy. Basquaire.

Biautriz, Biautris, Biautrix, Biatris, Biatrix, fille du châtelain Thierri 4150, 4233, 4252, 4259, 4343, 4430, 4514, 4543, 4556, 4561, 4582, 4606, 4614, 4664, 4681, 4813, 4878, 5833, 5896, 5958, 6291, 6325, 6320.

Bisterne, Biterne, probablement Viterbe en Italie (voy. Zs. F. rom. Philol., XXVI, 718 ; Romania, XXXII, 7 ; J. Bédier, Les Légendes épiques, II (1908), p. 218, note 1) ; soie de B. 595 : poille de B. 2842 ; Sances de B., chevalier romain 1392.

Blancheflor, suivante de Florence 1641, 2849.

Bondifer — Bondifers, cheval du roi Oton 1076, 1108, 1381, 1434, 1471, 1487, 1584, 1597, (1736), 1738, 1921, 2450, 2499, 2513, 2542, 2641, 3125.

Bonivent, Bénévent, ville d’Italie 170, 6040 (on y arrive par mer).

Bordelle, Bordeaux ; entreci a B., indication d’une contrée très éloignée 1936.

Bottentrot, vallée située en Cappadoce ; Judas y est né 5445. Cf., sur cette tradition, P. Meyer, Romania, VII, 437.

Brandiz, Brindisi, ville de l’Italie méridionale ; l’empire romain s’étend au sud jusqu’à B. sur mer 393 ; la reine de Hongrie donne B. à son second mari 2114.

Brez Saint Jorge (le), Bras Saint-Georges, le détroit formé par les Dardanelles, la mer de Marmara et le Bosphore 3112. Cf. Ville-Hardouin, Conquête de Constantinople, éd. Wailly, 2e éd. (1874), Table : Bras de Saint Georges.

Brice (saint), évêque de Tours (Ve siècle) ; invoqué 2347.

Brubent, Brubant, Bruban, vassal romain, seigneur de Venise 1220, 1390, 2348 (P : brienz).

Brucabauz (suj.), Turc vassal de Garsire, seigneur d’Épire et de Morée 1350, 1362. M : bruban, burban.

Brunfort, nom de cheval 1391.

Burelande, grande ville marchande dans le royaume de Garsire 3215. La définition de B. comme « ville marchande », qui est dans M seul, pourrait bien être une glose de copiste ; le nom semble plutôt indiquer un pays germanique (land, pays). M : beuerlande.

Cartage, Quartage, Carthagène, ville d’Espagne ; poipres de Q. 151 ; l’oneur de C., désignation pour une grande puissance 4575.

Castelle, Castille, contrée d’Espagne ; destriers de C. 1933.

Champagne, Champaigne, la Campagne de Rome 170, 1879.

Chatel Perdu, Chestel Perdu, demeure du seigneur Thierri 4148, 4202, 4256, 4411, 4680.

Chatemelie, probablement Cap de Malio, à la pointe sud du Péloponèse (cf. Ville-Hardouin, Conq. de Const., éd. Wailly, 2e éd. [1874], Table : Cap de Malio) ; lieu de naissance du chevalier grec Aquarie 128. M : catomelie.

Clamador, Clamadour, chevalier romain 1237, 1319, 1385, 1931, 2328, 2357, 2555.

Clarembaut, Clarenbaut — Clarembaus, Clarenbaus, larron, l’un des persécuteurs de Florence 4954, 4958, 4983, 4989, 4994, 4997, 5000, 5014, 5035, 5050, 5053, 5055, 5062, 5090, 5112, 5121, 5147, 5156, 5165, 5189, 5210, 5222, 5237, 5241, 5252, 5270, 5305, 5316, 5347, 6024, 6039, 6041, 6053, 6210, 6339.

Coloigne, Cologne ; fondée par Coloneus 8, var. M.

Coloneus li grans, fondateur de Coloigne 8, var. M.

Cornoaille, Cornouailles, comté d’Angieterre ; destrier de C. 3834 ; de si en C., indication d’une contrée très éloignée 1352,

Cornumaranz (suj.), roi des Turcs, père de Corbadas, selon la tradition épique (voy. La Chanson d’Antioche, éd. P. Paris, II, 323, s. v.) ; fonde Jérusalem 9.

Costentinnoble, Coutentinnoble, Coutentinoble, Contentinoble, capitale de l’empire de Garsire 70, 120, 204, 511, 774, 804, 2020, 2425, 2631, 3066, 3071, 3076, 3085, 3113, 3152, 3185, 3271, 3341, 3364.

Damedeu — Damedeus, le Seigneur Dieu 336, 656, 1783, etc. ; est né de la sainte Vierge 5681 ; souffre la passion 3601, 4415 ; invoqué 198, 1544, etc. Cf. Deu.

Daniel, le prophète ; sauvé par Dieu de la fosse aux lions 3035, 4052, 5724.

David — Daviz, le roi-prophète ; protégé par Dieu contre Goliath 4060 ; règne à Jérusalem 5351.

Dé ; voy. Deu.

Dejon (la cité de), Dijon ; désigne une grande puissance 4981.

Denise (saint), saint Denis, évêque et apôtre de Paris ; invoqué 4839, 5081.

Dessier, Didier, roi des Lombards ; dès le tens D., indication d’un temps très reculé 5249 (: -ier).

Deu, Dé (: -é 763, 2052, 3483, 3794, 5805, 6390) — Deus, Dieu 22, 25, 37, 365, 376, 409, 464, 612, 959, 966, etc. ; chasse du ciel le Diable avec les anges rebelles 3941 ; crée le monde 29, 646, 3298, 5934 (cf. 3875) ; crée les premiers hommes 63, 3298, 5934, 6148 (cf. 5410) ; place Adam dans le Paradis terrestre 3298 ; ordonne à Abraham d’offrir en holocauste son fils Isaac 4051 ; fonde Israël 4051 ; protège David contre Goliath 4051 ; enlève au ciel le prophète Élie 4057 ; (protège les trois jeunes Hébreux jetés dans la fournaise 5721-2) ; sauve le prophète Daniel de la fosse aux lions 3033, 4051 (cf. 5724) ; protège le prophète Jonas dans le ventre de « la baleine » 3746 (cf. 5725) ; commande à la Vierge d’épouser saint Joseph 4051 ; s’incarne dans le sein de la Vierge 1281, 3033 ; naît à Bethléem 659, 6314 (cf. 4701, 5698) ; est élevé à Jérusalem 5330 ; vit sur la terre comme un homme 3298 ; change l’eau en vin aux noces de Cana 5857 (cf. 2795-6) ; pardonne à Marie-Madeleine ses péchés 3746 ; ressuscite Lazare 249, 1144, 2915, 3033 ; est vendu aux Juifs par Judas 5005, 5894 (cf. 4706, 5118-09, 5445-6, 5709-10) ; souffre la passion (à Jérusalem) 257, 482, 972, 1333, 2371, 2915, 3053, 3537, 3588, 3746, 5143, 5256, 6187 (cf. 2936, 3753, 4694-6, 4730, 4875-6) ; pardonne à Longin 3033 (cf. 4992) ; descend en enfer pour en délivrer ses fidèles 5552 (cf. 4698, 5713-20) ; ressuscite et se montre aux apôtres 2418 (cf. 4697, 5271-3) ; institue saint Pierre évêque de Rome 3033 ; fait grand honneur à l’apôtre saint Paul 3033 ; invoqué 138, 202, 312, 318, 450, 458, 718, 763, 798, 800, etc. ; le fiz Deu, le fils de Dieu 5657. Cf. Damedeu, Jesu, Jesucris,

Dol, Doel ; voy. Guillaume de Dol.

Domas, Damas, ville de Syrie ; elme de D. 3166 ; la cité de D. désigne une grande puissance 3178.

Edinel (le val d’), localité imaginaire où demeure Abraham, quand il reçoit l’ordre de sacrifier son fils Isaac 4053.

Egite, Égypte ; la sainte Vierge y emporte l’enfant Jésus 4705.

Eglentine, Eglantine, Aglentine, Aglantine, femme de Thierri 4232, 4840, 5936, 5978, 6171, 6351.

Elaine, Hélène, femme de Ménélas ; exemple de beauté 5048.

Elies (rég.), le prophète Élie ; enlevé au ciel dans un char de feu, laisse son manteau à son disciple 4053.

Eneus, fondateur d’Angers 8, var. M.

Engleter, Angleterre 5830, var. M.

Eperiz (sainz) ; voy. Espir (saint).

Epire, contrée de l’ancienne Grèce ; la terre d’E. appartient à Brucabaut, vassal de Garsire (1351, P : desire, M : de sulie).

Ermin ; voy. Hermins.

Esclavon, esclavon ; selle e-ne, 1484 ; mule e-ne 3281. Cf. au Glossaire (t. II) : Esclavon.

Esclavonie, Slavonie, province de l’Illyrie ; le roi d’E. donne asile aux fils du roi Felipe 697, 945.

Escot — Escoz, Escos, capitaine d’un navire, l’un des persécuteurs de Florence 5042, 5184, 5195, 5230, 5239, 5281, 5286, 5294, 5310, 5328, 5337, 5348, 5360, 5368, 5383, 5398, 5440, 5462, 5587, 5990, 5998, 6002, 6011, 6051, 6211, 6361.

Esglante, suivante de Florence 1640 (M : Aiglentine).

Esmeré, Esmerei, Ameré — Esmerez, Esmereiz, fils du roi Felipe de Hongrie, mari de Florence de Romme 685, 702, 748, 778, 804, 811, 814, 2392, 2705, 3058, etc.

Espaigne, Espagne ; cheval en destre d’E. 169. Cf. Espenois.

Espenois, espenais, espagnol ; destrier e, 1217, 2009. Cf. Espaigne.

Espir (saint) — Esperiz, Eperiz (sainz), le Saint-Esprit ; invoqué 895 (: -ir), 4712, 5363.

Evain, Eve, Ève ; Dieu la crée (de la chair d’Adam) 63, 3299, 5410, 6148 ; elle mange du fruit défendu, ce qui la mène en enfer 5716.

Farisie (la gent), les Pharisiens ; Judas leur vend Jésus-Christ 5119.

Favel (le), rom de cheval 1385.

Felipe, Philipe, Felipon — Felipes, roi de Hongrie, père de Milon et d’Esmeré 669, 694, 935, 937, 1149, 2106, 2119.

Fere ; voy. Guillaume de F.

Ferrent, nom de cheval 1385.

Fineposterne, le Finistère, partie occidentale de la Bretagne ; le constructeur du navire de Garsire en est originaire (587, P : fine poeste).

Florence (de Romme}, fille d’Oton, empereur de Rome 23, 35, 37, 111, 136, 193, 213, 225, 238, 274, etc.

Foquaut (la porte), porte de la ville maritime d’où Florence veut partir pour la Terre Sainte 5049 (M : feralt). Cf. Parisse (la porte).

Forneus, fondateur du Mans 8, var. M.

Frairin (le pont) 5868 (P).

France, France 5830 ; la terre de F. désigne un grand pouvoir 1167 ; de si en F., indication d’une contrée très éloignée 264.

Frise, Frisse, Phrygie ; la terre de F. désigne un grand pouvoir 1167 (P : pisse) ; bliaut de F. 4845, 5059. M : les pors de f. 5065. Cf. au Glossaire (t. II) : Orfrois,

Gadres, la ville de Gaza en Palestine, défendue contre Alexandre le Grand par le roi Betiz (voy. ce mot) ; l’or de G., désignation pour une grande richesse (5345, P : chartres).

Gaiette, Gaaite, Gaëte, ville maritime sur la côte ouest de l’Italie 629, 3351 (P : gaite), 3366.

Galerans (suj.), chevalier romain 1391.

Galilie, Galilée en Palestine ; fait partie du royaume de Garsire 124.

Garnerot, chevalier grec 3080 (M : ganort).

Garsire — Garsire, Garsires, Garcire, roi de Grèce, demeurant à Constantinople 16, 67 ; 122, 127, 143, 159, 161, 172, 288, 722, etc. M : Garsie, Grasie,

Gascon, gascon ; destrier g. 1255, 1833.

Gaudin, chevalier grec 3080.

Gaudin de la Valee, chevalier romain 2556 ; appelé seulement Gaudin 1237, 1388.

Gaudine, suivante de Florence 1641.

Gautier d’Ipolice, chevalier romain 2340.

Genevois, habitants de Gênes ; tributaires de Rome 1207.

Gervais (saint), saint Gervais, martyr à Milan sous Néron : invoqué 2208 (M : eloei).

Gessemanie, Gethsémani ; Judas y trahit le Christ 5118.

Ginon, nom d’homme 4983.

Golias, Goliath, le géant philistin ; Dieu protège David contre lui 4060.

Gondree, suivante de Florence 1639, 2848, 5665.

Gracien, chevalier grec 3080.

Gregoire (saint), probablement le pape Grégoire Ier, le Grand, mort en 604 ; dès le tens saint G., désigne une époque lointaine 4287.

Gregois, Grec, habitant de l’empire grec 512, 1720 ; feu g., feu grégeois 2022 ; en g., en langue grecque 2015. Cf. Greu, Grifon,

Grellains, Grelainz (suj.), écuyer du châtelain Thierri 4783, 4853, 4855.

Greu — Greus, Grieus, Griés, Grec, habitant de l’empire grec 125, 531, 558, 861, 1083. Cf. Gregois, Grifon.

Grice, Grece, l’empire grec, avec Constantinople comme capitale 513 ; un riche roi de G., vassal de Garsire 1000, 1022 ; toz les sainz de G., invoqués 2341 (: -ice).

Griffonnaille ; voy. au Glossaire, t. II.

Grifon — Grifons, Grec, habitant de l’empire grec 86, 97, 128, 250, 368, 381, 520, 532, 541, 547, etc. ; Grifonne, Grecque 1476 ; grifon, grec 248 ; chiere grifonne, visage rébarbatif 3273 (cf. au Glossaire, t. II : Grifaigne). Cf. Gregois, Greu.

Guillaume (— Guillaumes) de Dol ou Doel, seigneur chez qui Milon trouve un refuge 4381, 5783, 5804, 5815, 6271 ; nommé seulement Guillaumes (suj.) 5785, 5818, 5821. Cf., sur ce personnage, ci-dessus p. 37, note 2.

Guillaume de Fere, chevalier romain 1867.

Guion de Pisart, chevalier romain 1237 (M : geneueis de poillart).

Hennaut, Hainaut ; desqu’au mont de H., désigne une contrée lointaine 5051 (M : munt herlaut).

Hermins — Hermine, Ermin, Arméniens, faisant partie de l’armée de Garsire 989, 1720, 1951 (: -ine), 2898. Voy. aussi au Glossaire (t. II) : Hermin, Hermine.

Herminois, Arméniens 2026. Cf. Hermins.

Hongres, Hongrois, faisant partie de l’armée de Garsire 125 (M : hongrieus).

Hongrie, Ongrie, Angrie, Hongrie, patrie de Milon et d’Esmeré 2105, 3687, 5029 ; Felipe, roi de H. 670, 694, 936, 1467, 1833, 2119, 3566, 6234 ; Milon de H. 1394, 1491, 1529, 5983, 6213 ; Esmeré de H. 1193, 2431, 3404, 5123, 5581, 6107 ; la cité d’O. : li rois d’Esclavonie y tient sa cour 700 ; un paumier dou regne de H. 712 ; escu fait en H. 703 ; tot l’orde H. désigne une grande richesse 3561.

Ilaire, Ylaire (saint), saint Hilaire, évêque de Poitiers, mort en 366 ; invoqué 5901 ; le moutier s. I., couvent à Bel Repaire 5522.

Ipolice, Ipoliz, Spolète ; tributaire de Rome 1209 (M : calabre) ; Oton d’I., fils d’Esmeré et de Florence 6408 (M seul : Otes de police) ; Gautier d’I., chevalier romain 2349 (: -ice ; M : de police) ; saint Pou, Poul d’I. (: -iz), saint Paul de Spolète, saint inconnu (peut-être Pou est-il une corruption de Pon, cas-sujet Ponz < Pontium, pour Pontianum ; or, un Pontien de Spolète est mort martyr sous Marc-Aurèle, et il faut ajouter qu’une partie de ses ossements a été transportée, en 966, de Spolète à Utrecht ; cf. les Acta SS., Jan. I [éd. 1643], 932-5) : invoqué 3025 (M manque), 4013 (M : denisz), 5357 (M : seint pere et seint denis).

Isaut, Iseut, l’amie de Tristan ; exemple de beauté 5047.

Isnel, nom de cheval 1384 (M : ignal), 1388, 1389.

Israel, Israël, le royaume judaïque ; créé par Dieu 4051.

Jehan (saint), Jean, cousin de Jésus ; l’époux des noces de Cana 5858. Le passage est en contradiction avec le v. 2796 (voy. Arcedeclin).

Jerusalem, Jherusalem, Jérusalem ; fondé par le roi Cornumarant (voy. ce mot) 9 ; en la possession du roi David 5352 ; Jésus-Christ y souffre la passion 5143 ; pris par l’empereur Vespasien et son fils Titus 5009, 5451 (cet événement, avec le carnage qui s’ensuivit, est une punition de Dieu pour la trahison de Judas et la conduite des Juifs ; les détails de la prise, comme histoire des trente Juifs vendus pour un denier [vers 5012-3], sont racontés dans le poème intitulé : La Destruction de Jérusalem [voy. Hist. litt. de la France, XXII, 412-3], dont la source est l’Évangile apocryphe intitulé : Vindicta Salvatoris ; cf., sur cette source et ses dérivés modernes, À. Graf, Roma nella memoria e nelle immaginazioni del medio evo [1882-1883], I, 362-415).

Jesu, Jhesu — Jesus, Jhesus, Jésus 2886, 3264, 3954, 4793, 5530 ; invoqué 382, 619, 822, 1466, 1984, 2483, 2598, 2670, 3738, 4515, 4752.

Jesucris (suj.), Jésus-Christ ; souffre la passion 5083. Cf. Deu.

Joffrois de Pise (li quens, rég.), chevalier romain 2349.

Johan (saint), saint Jean-Baptiste ; baptise le Christ dans le Jourdain 5932. |

Jonas, le prophète ; protégé par Dieu dans le ventre de « la baleine » 3747 ; sort de la baleine, au neuvième jour (d’après Jonas II, 1, il y reste « trois » jours), au port de Ninive, où il va prêcher la loi divine 5725.

Jonas, chevalier romain 1391.

Jordain, le fleuve Jourdain ; saint Jean-Baptiste y baptise le Christ 5931.

Jorge (saint), saint Georges, martyr sous Dioclétien ; représenté sur un gonfenon 2025. Cf. Brez Saint Jorge (le).

Josel (saint), saint Joseph ; la sainte Vierge reçoit de Dieu l’ordre de l’épouser 4062 ( : -el).

Josie, sénéchal du roi Garsire 1450.

Josué, chevalier romain 1320 :

Judas, l’apôtre Judas ; enlève au Christ un poisson 3039 (cette légende a pu naître de cette parole du Christ : « Celui qui a mis la main dans le plat avec moi, celui-là me trahira » Matth. XXVI, 23) ; vend son Maître aux Juifs 4706 (se pend ensuite), 5005, 5118 (à Gethsémani), 5445 (il est né à Bottentrot), 5709, 5894.

Juis — Juif, Juifs ; Judas leur vend Jésus-Christ 5005, 5710 ; ils font souffrir la passion au Sauveur 3041, 4695 ; ils sont punis par Vespasien et Titus 5011, 5710 ; on en vend trente. pour un denier 5012.

Juliez Sesaire (rois), Jules César ; a fondé le couvent de Bel Repaire 5502.

Justamont de Sulie, second mari de la mère de Milon et d’Esmeré 695, 939, 2122.

Lazaron, Lasaron (saint), saint Lazare, frère de Marthe et de Marie ; ressuscité par Le Christ 250, 1145, 2916, 3034 ; invoqué 853,

Leoncel, nom de cheval 1395.

Liennart (saint), saint Léonard, compagnon de Clovis ; invoqué 1241.

Lolifant, port imaginaire situé à une distance de six lieues de Rome 631.

Lombardie, partie de l’Italie septentrionale 723 (M : normundie), 1189, 2017, 3289, var. M, 4318 (M : almarie) ; désigne plutôt l’Italie entière 139.

Lombart, Lombards ; tributaires de Rome (L. de Lombardie) 1189.

Longis (rég.), Longin, le soldat romain qui perça le côté du Christ avec sa lance ; Jésus lui pardonne 3044, 4992. Sur cette légende, voy. les Acta SS., Martii, t. II, 376-090 (éd. Anty. 1668) ; cf. C. Kröner, Die Longinuslegende, ihre Entstehung und Ausbreitung in der franz. Lit. (1899).

Lucois, habitants de Lucques ; tributaires de Rome 1209 (P : ceus de lutais).

Lutiz, ville sur la côte nord de l’Allemagne (sur le peuple slave des Lutici, voy. G. Paris, Romania, II, 331-332 ; nom de lieu dans la Chanson d’Antioche, éd. P. Pris, 1848, II, 126 : Vait ferir Corbarel qui sire est de Lutis : -is = -iz, et dans Li Romans d’Alixandre, éd. H. Michelant, Stuttgart 1846, p. 69, v. 28 : le regne de Libe et de Lutis : -is = -iz, et p. 525, v. 10 : puis le mer de Sidone dusc’as pors de Lutis) ; tresqu’au port de L., désigne une contrée très éloignée 5327 (M : latriz).

Macaire, Makaire, Macare — Macaires, Makaires, chevalier au service du châtelain Thierri, l’un des persécuteurs de Florence 4413, 4438, 4451, 4453, 4463, 4474, 4486, 4488, 4495, 4524, 4533, 4542, 4562, 4616, 4623, 4646, 4886, 5838, 5844, 5849, 5874, 5889, 5898, 5923, 5928, 5950, 5961, 5974, 5988, 6052, 6212, 6300, 6302, 6305, 6313, 6335.

Mahaut la senee, suivante de Florence 1641, 2849.

Makaire (la porte), porte de la ville où se trouve le couvent de Bel Repaire 5508. Voy. aussi Macaire.

Marin (saint), saint Mesmin (Maximinus), abbé de Mici, près d’Orléans, mort vers 520 ; la Saint M., fête commémorative de sa mort (15 déc.) 5873.

Manduz (suj.), chevalier romain 1386,

Mans (li), le Mans ; fondé par Forneus 8, var. M.

Marcel (saint), saint Marcel, évêque de Paris au V* siècle ; invoqué 4964.

Margot, marin qui recueille Escot après son naufrage 5461 (M : mangot).

Margueree, Margarie, suivante de Florence 1640, 2849.

Marie, Mariain (:-ain 5682), la sainte Vierge 5097 ; Dieu s’incarne dans son sein 1282 ; naît d’elle 5682 ; invoquée 1748, 1871, 1956, 3720, 4033 ; 4069, 4129, 5443 ; Deu, le fil (sainte) M., invoqué 138, 1430, 2120, 3418, 3551, 3699, 4310, 6115. Cf. Josel, Nazarel, Virge (la).

Marie Madalainne, sainte Marie-Madeleine ; le Christ lui pardonne ses péchés 3748.

Marmonde (la belle), suivante de Florence 1642.

Martin (le provoire), le nom d’un prêtre 5870.

Melant, Milan ; tributaire de Rome 1190.

Menelaut — Menelaus, Ménélas, roi de Sparte ; mari de la belle Hélène 5048 (:-aut) ; brûle Troie 2005.

Menesier, cousin de Macaire 5963.

Milon, Millon, Mille — Milles, Miles, Mille, Mile, Milon, fils du roi Felipe de Hongrie, l’un des persécuteurs de Florence 689, 732, 778, 809, 1131, 1394, 1491, 1834, 2157, 2251, etc.

Mirabel, nom de cheval 1394.

Mon Cenis, le Mont Cenis ; de si a M., indique un endroit éloigné 6164.

Monjeu, le Grand Saint-Bernard ; l’empire romain s’étend au nord jusqu’aux mons de M. 393.

Monpellier, Montpellier ; de ci a M., indique un endroit éloigné 5211, 5937.

Moraille, Morée ; Brucabaut, vassal de Garsire, est seigneur de la terre de M. 1357,

Morel, nom de cheval 1387,

Morise, Morisse (saint), saint Maurice, martyr sous Dioclétien ; invoqué 4841, 5072 (M : denise). Cf. morisse 5068, var. P.

Nazarel, Nazareth ; la sainte Vierge y est née 4061 (: -el).

Nicholais (saint), saint Nicolas, persécuté sous Dioclétien ; sa fête (6 déc.) 3157 (: -as).

Ninivee, Ninive ; Jonas est sauvé du ventre de la baleine au port soz N. et y prêche ensuite la loi de Dieu 5726.

Noiron, Néron ; Noiron Pré 62, 745, 2650, 2887, 3481, 4498 ou Pré Noiron 2921, 3037, 3521, 6188, l’emplacement du Vatican et de ses environs, où étaient autrefois les fameux jardins de Néron ; le Christ y place (comme évêque de Rome) l’apôtre Pierre 3037 ; invocation de l’apôtre qu’on y vénère 2650, 2887, 2921, 3481, 4498.

Nubie, Nubie ; elme de N. 1419.

Odierne, ville orientale, que Garsire côtoie en se rendant par mer de Constantinople à Rome 584 (M : hodierne). Cf. E. Langlois, Table des noms propres compris dans les chansons de geste (1904), aux mots Canebaut et Esmeré d’Odierne, ainsi que J. Runeberg, Études sur la Geste Rainouart (Helsingfors, 1905), p. 159, n. 1.

Oliferne, ville d’Orient, peut-être Alep en Syrie ; poille d’O. 593.

Ongrie ; voy. Hongrie.

Oriant, l’Orient 5696 ; dès, de si qu’a O., indication d’une contrée très éloignée 3255 (opposée à la mer Betee), 6017.

Orquanie, Orquenie, l’Hyrcanie des anciens ; pays tributaire de Garsire 2129 (M : troie) ; destrier d’O. 702, 3122.

Orsaire (la roche), roche près de laquelle est situé le couvent de Bel Repaire 5916. Cf. Viel Orsaire,

Oton, Ote — Otes, empereur de Rome, père de Florence 22, (33), 104, 154, 199, 224, 283, 292, 304, 312, etc.

Oton d’Ipolice (roi), fils d’Esmeré et de Florence 6408.

Otrente, Otrante 157 ; poelles d’O. 2743.

Paris, Paris ; l’enneur de P. désigne une grande richesse 6182 (M : tut lor seint denis).

Paris, Pâris, fils de Priam ; enlève Hélène à Ménélas 5048, var. P.

Parisse (la porte), porte de la ville maritime d’où Florence veut partir pour la Terre Sainte 5063 (: -ise). Cf. Foquaut (la porte).

Pavie, Pavie ; tributaire de Rome 1190 ; elme de P. 1443, 1456 ; tot l’or de P. désigne une grande richesse 6123 (M : nubie).

Penice, peut-être la Phénicie des anciens ; hiaumes de P. 2344.

Peraut, l’hôte malhonnête, ami de Clarembaut 5050, 5064, 5089, 5105, 5147, 5175, 5242, 5260, 5517. M : peralt, parlat, parlard, pechaut.

Pere ; voy. Piere.

Perin (saint), invoqué 5863, var. M.

Persiz, Perse ; l’amiraut de P., l’émir de Perse (type de monarque riche) 5333.

Pharaon (le grant roi}, Pharaon ; son trésor 4999 (P : li rois oton). Cf., sur ce trésor, Fr. Michel, Recherches sur le commerce, la fabrication et l’usage des étoffes... pendant le moyen âge, II (1854), 459.

Philipe ; voy. Felipe.

Piere, Pere (saint), l’apôtre Pierre 1371 ; invoqué 3132, 4780 ; s. P. de Romme 713, 1452, 2927 (invoqué), 3037 (institué évêque de Rome) ; le moutier des. P., l’église Saint-Pierre, à Rome 2381 ; le moutier s. P. d’Avalon, voy. Avalon. Cf. Noiron.

Pierrelee, lieu de naissance de Marmonde 1642.

Pisans, habitants de Pise (voy. ce mot) ; tributaires de Rome 1207.

Pisart, peut-être Pesaro, ville d’Italie sur l’Adriatique ; voy. Guion de P.

Pise, Pise ; la cité de P. désigne un grand pouvoir 1166 ; l’or de P., espèce de monnaie (5069 ; P : frisse, M : peise) ; li quens Joffrois de P., vassal romain 2349 (P : de pire).

Plançonel, nom de cheval 1393.

Plesance, Plesence, Plasance, Plaisance ; tributaire de Rome 271, 1190, 4318 ; l’eue c’on apeloit P. 5848 est probablement une désignation géographique de pure fantaisie.

Poitevin, poitevin ; acier p. 2810.

Poitevinal, poitevenal, poitevin ; acier p. 1674, 2605, 2970.

Potrel, nom de cheval 1392.

Pou (saint), saint Paul, l’apôtre ; Dieu lui fait grand honneur 3038.

Pou, Poul d’Ipoliz (saint) ; voy. sous Ipolice.

Pré Noiron ; voy. Noiron,

Priaut, le roi Priam ; gouverne Troie 5048, var. P.

Puillais, Puilaiz, habitants de la Puille (voy. ce mot) ; tributaires de Rome 1210 (: -ois), 1377 (M : polieus), 5622 (M : poillanz).

Puille, Pouille 168 ; li rois que tenoit P. fait la guerre avec l’empereur de Rome 5617.

Quartage ; voy. Cartage.

Rafael, l’archange Raphaël ; Dieu l’envoie pour empêcher le sacrifice d’Isaac (Gen. XXII, l’ange n’est pas nommé ; Raphaël ne figure que dans le livre apocryphe de Tobie) 4059.

Remi (saint), saint Remy, évêque de Reims, mort vers 532 ; invoqué 6288.

Richier (saint), saint Riquier, fondateur et abbé de Centule en Ponthieu, VIIe siècle ; invoqué 5927 (M : omer).

Rin (le), le Rhin ; Dieu fait courir l’eue del R. 5871.

Rocheflor, colline ou montagne au-dessous de laquelle est situé le couvent de Bel Repaire 5533.

Romaigne, Romaine, territoire de la ville de Rome 171 ; peut-être l’empire de Rome 1877 (M : romenie).

Romains, Romainz — Romain, habitants de l’empire de Rome 369, 580, 622, 1054, 1313, 1341, 1480, 1549, 1585, 1718, etc.

Rome ; voy. Romme,

Romenaille, peut-être l’Asie Mineure ; tot l’or de R. désigne une grande richesse 3840 (P : cornoaille). Cf. Romenie.

Romenie, Rommenie, l’empire romain 1447, 3558, 3915 : peut-être l’Asie Mineure (cf. La Chanson d’Antioche, éd. P. Paris [1848], II, 367, Gloss. s. v.) : l’or de R. 132.

Romme, Rome, Rome, capitale de l’empire romain 15, 18, 62, 129, 270, 321, 328, 595, 398, 401, etc. ; fondée par Romulus 13 ; Oton, empereur de R. 22, 33, 104, etc. ; Florence, impératrice de R. 1696, 2245, 2277, etc. ; Esmeré ; empereur de R. 3403, 5409, 6060, etc. ; l’apostoile de R. (Simon) 3015, 3653, 3667, 4769 ; Oton d’Ipolice, seigneur de R. 6407 ; sainte Anastace (voy. ce mot) y est née 5704. Voy. aussi Piere (saint).

Romulus, fondateur de Rome 13.

Rossie, Russie ; état vassal dans l’empire grec 125 (P : hongrie) ; tot l’or de R. désigne une grande richesse 3429 (P : surie).

Sainte Terre (la), la Terre Sainte 5256.

Saint Ilaire (le moutier) ; voy.. Ilaire (saint).

Saint Jorge (le Brez) ; voy. Brez Saint Jorge (le).

Saintliz, Senlis, ville de France ; l’avoir de S. désigne une grande richesse 3026 (M : tut lor de brandiz).

Saint Mamin (la) ; voy. Mamin (saint).

Saint Pere (le moutier de) ; voy. sous Piere (saint).

Saint Pere d’Avalon (le moutier) ; voy. Avalon.

Saint Sauvaor (le port), port où est situé le couvent de Bel Repaire 5531.

Salatree (la belle), suivante de Florence 1640.

Salemon — Salemons, Salomon, roi d’Israël ; l’avoir S. désigne une grande richesse 4998, 5352 (S., fils de David) ; de l’uevre S., désigne un objet très précieux 232.

Salerne, Salerne 585 (P : aufalerne) ; le capitaine du navire de Garsire y est né 597.

Sances (suj.) de Biterne, chevalier romain 1392.

Sane, Sienne ; tributaire de Rome 1209 (M : puille).

Sanson, chevalier romain, frère d’Agravain 827, 1148, 1320, 1386, 2190, 2252, 2355, 2517, 2556, 2676, 2696, 2704, 2710, 2738, 2761, 2775, 2783, 2786, 2790, 2802, 2841, 2872, 3011, 3017, 3030, 3518.

Sanson (saint), probablement saint Sanson, évêque de Dol en Bretagne, mort en 568 ; une pierre dou tresor s. S. 244 (M : sainfagon).

Sardaine, Sardaigne ; samit de S. 1878.

Sarrazin — Sarrazins, Sarrasin ; dans un sens péjoratif 2803 ; le vassal romain Brubent de Venice est un S. 1222 ; sarrazin, sarrasin : mulle s-e 4225.

Sarrazinois, sarrasinais, sarrasin ; frains s. 1215 ; murs s. 2010.

Sartaigne, l’ancien comté de Cerdagne dans les Pyrénées ; besans de S. 165 (la leçon de M : samiz de sartaigne vise évidemment la Sardaigne). Cf., sur Sartaigne, Schultz-Gora, Zeitschr. f. roman. Philol., XXIII, 334-6.

Satelie, Satalieh ou Adalia, l’ancien Attalia, ville de la Turquie d’Asie sur la Méditerranée (cf., pour ce nom, J. Runeberg, Études sur la Geste Rainouart, Helsingfors, 1905, p. 93 et suiv.) ; Escot y trouve un asile après son naufrage 5590.

Savaris (suj.) de Badas, vassal romain 3158.

Senegaille, Senecalie, Sinigaglia, ville d’Italie sur l’Adriatique ; tributaire de Rome 1208 (P : senelie), 1377.

Sepucre (le), le saint sépulcre 4910, 5160.

Simon (l’apostoile), pape, résidant à Rome 1827, 3528 (P : millon). Cf. sous Romme.

Simon (saint), probablement l’apôtre Simon (le Cananéen) ; invoqué 4980, 4997.

Sinagon — Sinagons, premier connétable du roi Garsire 610, 616, 1784, 1809, 2015, 2023, 2100, 2126, 2128, 2156, 2575, 2583, 2580, 2594, 2598, 2630, 3188, 3199, 3206, 3210, 3219, 3231. M : sinagor.

Siquaire (saint), saint Sicaire, évêque de Lyon, mort vers 425 ; invoqué 5906.

Soplise, Soplisse, Soplice, femme de Peraut 5064 (P : parisse), 5076, 5099, 5138, 5244.

Soreil, nom de cheval 1386 ( : -el).

Sulie, Syrie ; mules de S, 133 ; mul de S. 2138 ; cheval en destre de S. 169 ; destriers de S. 3436 ; Justamont de S., le second mari de la mère de Milon et d’Esmeré 695, 939, 2122 (P : hongrie).

Susaine, Suzanne, femme juive, célèbre pour sa chasteté ; Dieu la sauve du crime d’adultère dont elle était faussement accusée 5725.

Tabarie, l’ancienne Tibériade en Palestine ; tot l’or de T. : désigne une grande richesse 733.

Taivre (le), le Tibre 790, 1415, 1909, 2089, 2095 ( :-oivre) ; la source en est à Alesandre 449 (voy. Alesandre).

Thiebaut (saint), saint Thibaud, prêtre et ermite, mort près de Vicence en 1066 ; invoqué 5030.

Thierri, Tierri — Thierris, Thieris, Thierriz, Tierris, Tierriz, seigneur de Chatel Perdu 4149, 4151, 4167, 4177 ; 4188, 4197, 4292, 4666, 4864, 5959, etc.

Titus, l’empereur romain Titus ; son père Vespasien et lui prennent Jérusalem 5008, 5450. Cf. Jerusalem.

Tomas (saint), saint Thomas, l’apôtre ; invoqué 3162, 5877.

Toscan, habitants de la Toscane ; tributaires de Rome 1209.

Tracel, nom de cheval 1391.

Trenchequarel, nom de cheval 1390.

Troie, la Troie des anciens ; gouvernée par le roi Priam 5048, var. P ; sa grandeur et Sa destruction (elle brûle sept ans) 2 ; détruite par Ménélas 2005.

Tudelle, Tudèle en Espagne ; le chevalier romain Clamador y est né 1931 ; poile de T. 1938.

Turnus, fondateur de Turs 8, var. M.

Turquois, turquoiz, turc ; penonciaus t. 1214 ; javeloz t. 2029.

Turs, Tours ; fondé par Turnus 8, var. M.

Vaspassianus, Vaspacianus, Vespasien, empereur de Rome ; son fils Titus et lui prennent Jérusalem 5007, 5449. Cf. Jerusalem.

Venisse, Venice, Venise ; desqu’au (tresqu’au) port de V., désigne une grande distance 4844, 5058 (: -ise) ; le roi Brubent, un Sarrasin, seigneur de V., vassal romain 1221 ; 1390, 2348 (: -ice).

Viel Orsaire, .e Bel Repaire 5507 : Cf. Orsaire.

Viennois, de Vienne, ville de France ; espiés v. 2028.

Virge (la), la sainte Vierge 5700, 5701 ; enfante Jésus 660, 4036, 5682. Cf. Marie.

Volterre (la cit de), Volterre, ville d’Italie ; la reine de Hongrie donne V. à son second mari (2114, P : uaterne).

Ylaire (saint) ; voy. Ilaire (saint).


CHAPITRE V — LANGUE

§1 — Table des rimes

-a : laisses XXXIII (vers 926-964), LIII (1507-1566), XCVII (2701-2734), CXXXVIII (3889-3003), CXLII (3989-4007), CXLVI (4108-4123), CLXVIII (4789-4823), CLXX (4855-4912), CLXXXVII (5584-5636) ;

-able : LXXIII (2096-2110) ;

-age : V (143-160), CXX (3313-3328), CLXI (4562-4576) ;

-aigne : VI (161-171), LXV (1877-1889) ; cf. -aine ;

-aille : XLVIII (1348-1382), CXXXVI (3831-3842) ;

-ain : CLXXXIX (5671-5683), CCII (6133-6155) ;

-aine : CXXXIII (3743-3758) ; cf. -aigne ;

-ans : CLXVII (4758-4788) ;

-aire : CLXXXIV (5492-5524), CXCVI (5898- 5920) ;

-ais : LXXVIII (2205-2220) ;

-al : XI (304-321), LVIII (1668-1694), XCIV (2601-2613), CIV (2967-2995) ;

-ance : IX (259-274), CXCIII (5828-5848) ;

-ande : CXIV (3201-3218) ;

-andre : XVI (445-457) ;

-ant : VII (172-223), XXIV (624-666), XLIII (1220-1233), LXIX (1965-2005), LXXXIII (2323-2340), CXLVIII (4140-4208), CLXXVII (5144-5196), CXCIX (6014-6043), CCVI (6304-6338) ;

-anz : I (1-25), CXXXIX (3904-3032) ;

-art : XLIV (1234-1251) ;

-as : CXII (3151-3178), CXCV (5874-5897) ;

-asse : CLXIV (4636-4677) ;

-aut : CLXXIV (5035-5053) ;

-é : II (26-65), XIII (348-376), XXVII (734-803), XXXIV (965-1008), XLVII (1310-1347), LIV (1567-1607), LXII (1770-1825), LXXI (2031-2087), LXXXI (2263-2304), XC (2472-2521), XCV (2614-2661), CI (2853-2908), CX (3110-3130), CXXII (3345-3374), CXXVI (3475-3515), CXXXV (3792-3830), CLI (4255-4281), CLVIII (4474-4519), CLXII (4577-4619), CXCII (5776-5827), CCVIII (6375-6410) ;

-ee : XIX (502-530), LVII (1634-1667), XCII (2552-2568), C (2811-2852), CXI (3131-3150), CXVI (3241-3256), CXXX (3620-3685), CXXXII (3708-3742), CXLI (3962-3988), CXLV (4066-4107), CLV (4346-4378), CLX (4532-4561), CLXXI (4913-4961), CXC (5684-5758) ;

-el : XLIX (1383-1413), CXLIV (4038-4065) ;

-elle : LXVII (1925-1947) ;

-er : X (275-303, XV (391-444), XXV (667-693), LX (1715-1745), LXXX (2249-2262), LXXXVIII (2423-2453), XCVI (2662-2700), CXV (3219-3240), CXIX (3285-3312), CLIV (4319-4345), CLVII (4425-4473), CLXXXII (5385-5437) ;

-ere : LXIV (1864-1876) ;

-erent : XX (531-551) ;

-erne : XXII (583-598) ;

-erre : LXXIV (2111-2117) ;

-ez : III (66-118), XXXV (1009-1058), LXXVI (2147-2188), LXXXV (2352-2300), XCI (2522-2551), XCVIIT (2735-2789), CIII (2926-2966), CXXIX (3571-3619), CLVI (4379-4424), CLXXIII (5000-5034), CLXXXVIII (5637-5670), CC (6044-6105) ;

- ; CLXXIX (5250-5309} ;

-iee : XL (1176-1188) ;

-ier : XII (322-347), XXX (855-872), XXXVI (1059-1080), XLVI (1285-1309), LV (1608-1619), LXVI (1890-1924), LXXIX (2221-2248), CIX (3083-3109), CXXI (3329-3344), CXXV (3438-3474), CLXXXVIII (5197-5249), CXCVII (5921-5975) ;

-iere : LVI (1620-1633), CXLIX (4209-4219) ;

-iez : XXXVII (1081-1124), CCVII (6339-6374) ;

-i : XVII (458-483), CXXXVII (3843-3888), CLXIII (4620-4655), CCV (6232-6303) ;

-ice : LXXXIV (2341-2351) ;

-ie : IV (119-142), XXVI (694-733), XLI (1189-1206), L (1414-1467), LXXV (2118-2146), CXXIV (3398-3437), CXXVIII (3546-3570), CXXXI (3686-3707), CLIII (4290-4318), CLXXVI (5088-5143), CCI (6106-6132) ;

-in : XCIX (2790-2810), CXCIV (5849-5873) ;

-ine : LXVIII (1948-1964), CL (4220-4254), CXCI (5759-5775) ;

-ir : XXXI (873-904), CLIX (4520-4531) ;

-ire : XIV (377-390), CVII (3047-3070) ;

-is : LXXXVII (2406-2422), CLXVI (4723-4757), CCIII (6156-6182) ;

-ise : XXXIX (1155-1175), CLXIX (4824-4854), CLXXV (5054-5087) ;

-iz : LXXXVI (2391-2405), CV (2996-3028), CXLIII (4008-4037), CLXV (4678-4722), CLXXX (5310-5375) ;

-oi : LII (1486-1506) ;

-oir : CXVII (3257-3269) ;

-oire : CLII (4282-4289) ;

-ois : XLII (1207-1219), LXX (2006-2030) ;

-oit : LXXXII (2305-2322), CXCVIII (5976-6013) ;

-oivre : LXXII (2088-2095) ;

-on : VIII (224-258), XXIX (827-854), XXXVIII (1125-1154), XLV (1252-1284), LXIII (1826-1863), LXXVII (2189-2204), CII (2909-2925), CVI (3029-3046), CXXVII (3516-3545), CLXXII (4962-4999), CCIV (6183-6231) ;

-onne : LI (1468-1485), CXVIII (3270-3284) ;

-ons : LXXXIX (2454-2471) ;

-ont : XXI (552-582) ;

-or : XXXII (905-925), CXXIII (3375-3397), CLXXXV (5525-5558) ;

-ort : CVIII (3071-3082) ; cf, -ot ;

-ot : CLXXXIII (5438-5491) ; cf. -ort ;

-u : XXIII (599-623), XXVIII (804-826), XCIII (2569-2600), CXL (3933-3061) ;

-ue : LXI (1746-1769), CXLVII (4124-4130), CLXXXVI (5559-5583) ;

-ur : CLXXXI (5376-5384) ;

-ure : XVIII (484-501) ;

-uz : LIX (1695-1714), CXIII (3179-3200), CXXXIV (3759-3791).

§ 2 — LANGUE DE L’AUTEUR

La langue de la chanson de Florence de Rome, telle qu’elle est transcrite dans chacun des mss. L, M et P, ne représente pas le dialecte original. On a vu plus haut (pp. 2 et 3) que le ms. P a été écrit par un scribe originaire de l’est de la France, que le copiste de M était un Anglo-normand, et que la langue du fragment L présente des traits anglo-normands. Or, l’étude des rimes de notre chanson nous montre, d’une façon évidente, que l’auteur de Florence de Rome se servait du dialecte du centre de la France, du francien. En voici les preuves.

1. ẽnv, ĭnv latins > ain. Riment en -aigne (-aine) < -ana, -anya : ensegne, enseigne [98] 162, 1881, 1888 ; maigne, moinne (mĭnat) 168, 3751 ; Sardaine 1878 ; saigne (*sĭgnat) 1885 ; estraine (strẽna) 3744 ; demaine (de-mĭnat) 3745 ; peine, paine 3746, 3753 ; baulaine (balæna) 3747 ; Madalainne 3748 ; alainne, alaïne (subst. postv. de *alẽnare [99]) 3749, 3757 ; plaine (plẽna) 3752 ; raine (rẽgnum, mot mi-savant) 3756 ; — en -ains < -anus : cerainz (serẽnus) 4759 ; plainz 4761 ; rainz (rẽnes) 4773 ; frainz 4784 ; mainz (mĭnus) 4778 ; — en -ain <-anum : sain (sĭnum) 5679 ; cerain 5680. La transition de ei à ai devant nasale se voit surtout dans les dialectes picards [100] et champenois [101], mais se rencontre aussi, à partir du milieu du xiie siècle, en normand et en francien [102].

2. enc et ĭnc latins > an. Les laisses en -ance, -ande, -andre, -ant et -anz fournissent de nombreux exemples de ce fait : Florence 274 ; entende 3211 ; mendre (mĭnor) 447 ; gent 222 ; genz 6 ; etc. Ce trait exclut nettement le picard [103] et le normand [104].

3. ĕ + yod latins > i. Les laisses en -i, -ice, -ire, -is, -ise et -iz attestent ce développement ; exemples : demi 475, 6247 ; Grice 2341 [105] ; lire 388, 3054 ; pris (prĕtium) 2413, 4741 ; Venisse 4844, 5058 ; liz (lĕctus) 3018. Ce trait appartient aux dialectes francien, champenois et picard (avec l’est du territoire normand) [106],

4. ŏ + yod latins > ui. Dans la rime en -ie on voit apuie (*adpŏdiat) 3430 [107]. Ce trait est caractéristique pour le centre et le nord du domaine français [108].

5. -ie diffère de -iee. Le fait que -iee ne s’est pas réduit en -ie dans la langue de notre auteur exclut le picard et le lorrain [109].

6. oi < ĕ, ĭ latins : oi < o + yod latins (dans des mots mi-savants) ? Les laisses en -oi, -oir, -ois, -oit et -oivre ne présentent que des mots où oi provient d’un ĕ (ĭ) latin. Mais la laisse en -oire (CLII atteste peut-être l’identité phonétique des deux oi. Voici d’abord les rimes correctes : estoire 4283 [110] ; memoire 4284 [111] ; mandegloire (mandragŏras, influencé par gloire ?) 4286 ; Gregoire 4287 ; ivoire 4288 ; gloire 4289. Reste v. 4285 avec escolle dans P et memorie dans M, ainsi que v. 4282 avec esclaire P, arbroie M. Au premier endroit il faut sans doute lire estoire, avec le sens d’« extraction » (memoire est dans le vers précédent) ; mais la correction du v. 4282 est plus difficile. Nous nous sommes pourtant décidé à introduire le mot tonoire (tonĭtrum), qui convient parfaitement pour le sens [112], Si cette correction est juste, elle montre que l’auteur rimait oi < ĭ avec oi < o + yod, ce qui exclut le normand [113].

7. -ce-tia, -cia diffère de -che-ca. Dans les ses en -ance, c n’a pas dû avoir la valeur du ch picardnormand, puisque -ance ne provient jamais de -anca [114].

8. il⁰ > i. Les rimes en -is et -iz présentent les mots gentis 2410, 4749 ; fiz (fĭlius) 5352 ; gresiz 5326, 5370 ; ce qui exclut le picard [115].

9. -s diffère de -z. Les laisses en -ains, -ais, -as, -is, -ois et-ons d’un côté, et celles en -anz, -ez, -iez, -iz et -uz de l’autre prouvent que l’auteur prononçait encore z (= ts) différemment de s, donc qu’il n’était pas un Picard [116]. Il y a cependant dans les rimes quelques mots qui demandent un examen spécial [117]. Aussi bien à la rime en -is qu’à celle en -iz se trouvent les mots : fis 6166, 6181 — fiz 2402, 5322 ; marsis 6169 — massiz, marsiz 3002, 5318, 5349 ; enperreris 6174 — emperreriz 2393, 4015, 4690, 5324 ; resurrexis 2419 — resurrexiz 4697. Ces contradictions ne sont cependant pas d’une grande importance. Le mot fis est le part. passé latin fĭsum, tandis que fiz vient de fĭdus. Pour massis (rég. plur.), au lieu de massiz < *massicios, il faut probablement admettre une substitution de sufixe, peut-être déjà -if pour -iz. La forme toute savante resurrexi a très bien pu concuremment adopter la terminaison participiale -is. Reste donc la forme enperreris, donnée par les deux mss. MP. Comme la désinence latine -ĭcem est devenue régulièrement -iz dans genitriz 4033, 4703 ; pecheriz 4713 ; raïz 3008 ; Biautriz 468, nous regardons la leçon enperreris comme une simple faute de copiste, d’ailleurs facile à corriger.

10. -ot < -abat. Dans la laisse CLXXXIII il y a vingt-trois imparfaits en -ot, tandis que les laisses en -oit ne nous présentent que dix cas où un verbe de la 1re conjugaison latine soit muni de la terminaison analogique -oit : amoit 2306 ; crevoit 5985 ; desirroit 5979 ; estoit 5977, 5980, 5983, 5994, 6000, 6008 ; resembloit 5987 ; et encore faut-il peut-être regarder estoit, non comme provenant de stabat, mais comme une formation analogique du verbe estre. La terminaison de l’imparfait -ot, qu’on considère en général comme un trait spécialement normand, se rencontre un peu partout, excepté dans l’est de la France [118].

Résumons les faits acquis : le picard est exclu par les cas 2, 5, 7, 8 et 9, le normand par les cas 2, 3, 4, 6 (?)vet 7, le lorrain par les cas 1, 3, 4, 5 et 10. Reste donc le francien, peut-être, à cause du cas 1, le francien parlé dans la Champagne occidentale [119].

Il n’y a qu’une seule rime : avonne (avĕna) 3284 : -onne qui soit en contradiction absolue avec le parler francien-champenois de notre auteur. Deux explications nous paraissent possibles : ou bien il y a là une leçon fautive ou une interpolation de la part du copiste lorrain de P [120] (le vers manque dans les mss. M et L), ou bien le mot est un emprunt dialectal, venu peut-être de l’est de la France avec le produit même. Suivant le principe de donner plutôt trop que trop peu, nous gardons le vers de P tel quel.

Les rimes de notre chanson, ainsi que, jusqu’à un certain point, la mesure des vers, peuvent aussi nous indiquer l’époque approximative où a été composée la chanson de Florence de Rome, telle que nous la donnent les mss. LMP. Ces mss. ayant été écrits dans la seconde moitié du xiiie siècle, nous avons là a priori un terminus ad quem. Or, la langue de notre auteur semble nous permettre de placer la composition de son œuvre à la fin du xiie siècle ou dans la première moitié du xiiie.

Voici quelques traits parlant, en quelque sorte, en faveur du xiie siècle :

1. ó libre : ó entravé. Dans une laisse en -or (XXXII), nous trouvons, à côté des mots en -or < -orem etc., les mots ator (rad. torn-) 917 et jor 923. L’o libre n’était donc pas encore devenu eu, du moins devant r [121].

2. Conservation du cas-sujet sing. sans -s des mots pere, sire, ber, etc. On trouve à la rime : sire 377, 3051, 3068, 3070 ; hom (: -on) 1842, 2913, 3530, 4968, 4976, 4991, 6195 ; [122] ber 283, 391, 2662, 3219, 3285, 4335. Pour les mots en -e, les cas d’élision dans le corps du vers fournissent aussi des preuves. Ainsi l’e final est élidé devant une voyelle dans : frere 1834, 2725, 3685 ; vostre 6195 ; sire 452, 757, 1221, 1503, 3551, 4939, 5254, 6333 ; emperere 3012, 6076, 6156, 6236.

3. Conservation de la 1re pers. sing. du prés. de l’ind. des verbes en -er (-ier) sans -e analogique. Les rimes nous présentent les exemples : coment (commendo) 1984 ; pri 3845. Il y a cependant baaille (*bataculo) 3842 [123].

4. Conservation du présent du subj. des verbes en -er (-ier) sans -e analogique. Les rimes donnent : cont 567 ; otroit 2321, 5984 ; son (pour sont) 6216 ; aut (de aler) 5040 ; cravent 6024. Dans le corps du vers on trouve : aut 904, 2133, 5750 ; hurt 1354 ; gart 3362 ; mervaut (de merveillier) 4865 ; commenç 6219 ; etc. D’autre part, il y a la forme connue aille : -aille 1357, 3831, ainsi que peut-être les formations analogiques : maigne (de mener) : -aigne 168 [124] et, dans Le corps du vers, aïde 1308 [125].

5. Conservation de la terminaison de l’imparf. -ot ; voy. ci-dessus, p. 77

Si donc ces traits semblent indiquer le xiie siècle, il y en a d’autre part plusieurs autres qui nous amènent à placer la composition de notre chanson plutôt dans la première moitié du xiiie siècle. Tels sont les traits suivants :

1. oi < o + yod : oi < ĕ, ĭ ; voy. ci-dessus, p. 75. Ce trait conjectural est naturellement de peu de valeur.

2. Amuïssement de l’s devant une consonne sourde. À la rime en -ot on a tot (tostum) 5452 [126].

3. Confusion dans la déclinaison à deux cas des noms du type mur. Les rimes des laisses en -ains, -anz, -ez, -iez, -iz et -uz, comparées avec celles des laisses en -ain, -ant, -é, -, -i et -u, fournissent, certes, des preuves fort nombreuses de l’observation générale de la déclinaison à deux cas. Mais il y a pourtant un certain : nombre d’exceptions à la règle, de cas où le cas-régime (sing. ou plur.) fonctionne comme cas-sujet, et où il serait téméraire de voir chaque fois (dans vingt-quatre cas contre le témoignage concordant de MP [127]) des fautes de copiste. C’est surtout le cas quand un nom propre se trouve à la rime (comme aux vers 2231, 4983, 5963, 6137, 6155, 6277, 6297) ou que le cas-sujet est un vocatif (2231, 6297, 6328) [128]. Dans le reste des cas, le mot en question est toujours employé comme attribut (les participes passés des temps composés et du passif inclus), jamais comme sujet de la proposition. Nous avons donc jugé prudent de garder la plupart de ces leçons [129], tout en admettant la possibilité que l’original ait eu des formes correctes [130], Une place à part appartient à certains noms où le radical se termine par un -e et qui ont sans doute été assimilés aux noms du type pere.

Les rimes nous présentent les cas-sujets suivants : Sesaire (Cæsarius pour Cæsar ?) 5502 ; letuaire (*flectuarius pour electarium) 5904 ; essanplaire (*exemplarius) 5908 [131]. Dans le corps du vers, avec l’élision de l’e final, il y a en outre [132] : Garsire (Garsirius ?) 1198, 2881 ; Macaire (Macarius) 4486, 5844 ; malaide (male-habitus) 6162 ; serorge (sororius) 5983 [133]. — Il y a bien aussi quelques cas isolés du cas-sujet employé pour le cas-régime, appuyés par les deux mss. P et M ; mais nous avons cru devoir les regarder comme des fautes de copiste [134].

4. Confusion dans la déclinaison des noms à accentuation mobile. Nous avons d’abord à mentionner quelques cas où le cas-régime occupe la place du cas-sujet : le féminin nonain 5918 (devant la césure) [135] et les masculins enfant 1052 (devant la césure ; corrigé, d’après M, en enfanz [136] = et larron 6210 (: -on) [137]. D’autre part, il y a de nombreux exemples de la transformation du casr-égime d’après le cas-sujet. D’abord il y a les mots des yypes Eve-Evain, Otes-Oton. On trouve Eve (demandé par la mesure) 5410, Ote (Otes) 134, 407, 427, 496, 572, 998, 1482, 1584 (toutes les fois devant la césure), Mille 3458 (devant la césure), Philipe, Felipe (devant la césure) 669, 2106, à côté de Evain 63 (devant la césure), 6148 (: -ain) [138], nonnain 5672 (: -ain), les pluriels nonainz 4762 et antains 4782 (: -ains) [139], Oton 224, 1143, etc. (: -on), Milon 1126, 1834, etc. (: -on), Felipon 1149 (: -on), Lazaron, Lasaron (: -on) 250, 853, 1145, 2916, 3034 Toutes ces formes en -e peuvent être regardées comme de nouveaux cas-régimes, formés analogiquement d’après les cas-sujets. Mais dans certains autres cas, c’est plutôt le cas-sujet lui-même qui a pris la place du cas-régime. Tels sont : emperere (: -ere) 1875 [140], traïtre (traïte) 2989 (cés.), ber 1241, quens 2349 [141] et le féminin maire (: -aire) 5523 [142].

Parmi les faits linguistiques ci-dessus analysés, il en est qui nous portent à faire remonter jusqu’au xiie siècle la date de notre chanson, tandis que d’autres indiquent plutôt le xiiie siècle. Or, comme il n’y a guère de difficulté à admettre que l’auteur, suivant une tradition littéraire, s’est servi, en partie, d’une langue qui n’était plus tout à fait la sienne, il est fort probable, à en juger d’après la langue, que la chanson de Florence de Rome ne date que de la première moitié du xiiie siècle.

Voici encore quelques traits linguistiques de notre chanson qui nous semblent pouvoir offrir de l’intérêt pour l’étude du dialecte de l’Île-de-France dans la première moitié du xiiie siècle [143].

Il y a d’abord quelques cas concernant la phonologie.

Dans la laisse en -ere (LXIV) il y a les mots matere 1868 [144] et banere 1870 (cf. matire : -ire 3050 ; matiere : -iere 1627 ; baniere : -iere 1624). Pour un mot savant comme matiere, la forme en -ere n’a rien de surprenant ; mais la forme banere est assez suspecte, d’autant plus que le vers en question ne se trouve que dans un ms. (P) [145].

La diphtongue ui rime avec i : cui (*cŭgito) 3859 : lui 4646 ; apuie 3430.

À la rime en -ois se voient les mots dais (dĭscum) 2020 ; frois (germ. frisk) 2024 ; marais 1219.

Les laisses en -on, -onne nous montrent l’ŏ libre non-diphtongué devant une nasale : hom 1842, 2913, etc. ; son (sonum) 239 ; sonne 1481 ; bonne 3277 ; etc. [146],

Que l’n mouillée ait perdu plus ou moins son élément palatal à la fin des mots, c’est ce que prouvent les rimes poig 841 (: -on) et lin (*lineum) 2790 (:-in). Au contraire, les laisses en -aigne témoignent d’une, certaine palatalisation de n après aia latin. Ainsi riment en -aigne < -anya, -enya les mots suivants des laisses VI et LXV : maigne (de mener) 168 ; plaigne (plana) 164, 1880 ; hataigne (altana) 1884. Mais, comme la laisse CXXXIII ne contient que des mots en -aineé< -ana, -ena, ainsi que le mot mi-savant raine (regnum) 3756 [147], l’identité phonétique de -aigne (<-anea) et -aine (< -ana) ne paraît pas avoir été complète dans la langue de notre auteur.

Dans les laisses en -as, -asse et -ot se trouvent plusieurs mots avec un r précédant s ou t, ce qui montre que la consonne roulée avait une prononciation très faible : espars 3152, 5880 ; ars (arsum) 3160, 5897 ; mars (germ. mark) 3175 ; chars (carros) 5882 ; esparse 4656 ; arce 4677 ; bort 5438 ; mort 5439, 5491 ; tort, 5453, 5487 ; aport (subst. postverbal) 5455 ; fort 5456, 5470, 5479 ; regort 5471. Ce trait est bien connu, et il y a donc lieu de s’étonner, non pas tant que l’auteur donne une laisse pure en -art (XLIV), car il n’y a pas beaucoup de mots en -at, mais qu’il écrive une laisse en -ort (CVIII, 12 vers) où il n’y a qu’un seul mot en -ot, un nom propre imaginaire Garnerot 3080, qui est peut-être défiguré [148].

Les laisses en -a, -é, -, -i, -oi et -u, à côté de celles en -aut, -oit et -ot, montrent que l’auteur ne prononçait pas un t final non-appuyé, y compris le -t des terminaisons latines verbales -ӗdit ; -uit, -iit (respondié 5270 ; gié [ego] 5267 ; fu 600 ; Jhesu 619 ; menti [mentiit] 458 ; autresi 463 ; etc.) [149].

La mesure des vers nous montre que l’h germanique n’existait plus dans les mots connus haubert et heaume, témoin les élisions l’aubert (l’abert) 971, 1365, 1477, etc. et l’elme 1443, 1456 [150]. Dans Hongrie, l’amuïssement de l’h paraît avoir été facultatif : d’Ongrie 700, 936, 1833, mais de Hongrie 694, 712, 1193, 2105, etc.

À l’intérieur des mots, une voyelle en hiatus n’a pas encore disparu, excepté, semble-t-il, dans les cas suivants : vez 3065 (à côté de veez 4974, 5231, 5679, 6163) [151] ; bordir 880 (à côté de behorder 430, 701) ; ruser (refusare) 1596, 1626, 1635 ; chanon (pour chaenon) 1257 [152].

L’hiatus entre deux mots se trouve, comme d’ordinaire, après les mots monosyllabiques li (art.), si, que, ne, je, se, ce. Nous avons cru devoir corriger les hiatus d’une autre nature que présente notre ms. P [153].

Quelques cas spéciaux d’élision sont à noter : qu’ pour qui (cas-sujet du pron. rel.) 1866, 2292, 2665, 2717, 3504, 3777, 3946, 4920, 5699, 5908, 5994 ; [154] (pron. indéf.) 317 ; qu’ pour quoi (pron. interr.) 1024, 4963 (cf. 380, 998) ; c’ (s’) pour ce (comme régime ou après une prép.) 1922, 2762 ; l’ pour li (outre devant en) 1579.

Concernant la morphologie il y a à observer les faits suivants.

Les noms féminins de la 3e déclinaison latine présentent au cas-sujet sing. tantôt la désinence -s, tantôt la forme du cas-régime. Il y a à la rime, d’un côté : fainz (fames) 4777, aparanz 13, apendanz 3915, avenans, avenanz 23, 3907, granz 2, 18, 25, 3004, 3913, pesanz 24, sachanz 4 [155], vivanz 3911, crestientez 5653 [156], desleautez, desloiautez 3572, 4406, mortalitez 2533, 5010, pitez 5666, plentez 2527, veritez 105, 2158, 2958, 3571, 4379, 4418, 6076, destrutions 2467, nois (nivem + -s) 1213 ; de l’autre : fain 6150, Isaut 5047, apendent 6323, gent 1222, moilier 5210, chançon 240, destruction 1283, maison 4970, 6209, color 3378, folor 5550, tabor 905. Il résulte clairement de ces exemples que l’auteur se servait indifféremment des deux formes, de la primitive avec -s, et de l’analogique [157].

Le féminin des adjectifs de la 3e déclinaison latine n’a pas, en général, pris l’-e analogique. On trouve cependant à la rime : grande 3208, 3210 ; avenande 3218 ; ferrande 3201 ; marcheande 3216 [158], et dans le corps du vers : grande 1176, 3517 ; telle 600, 782, 1537.

Un exemple d’un adjectif au masculin ayant adopté la forme féminine est fourni par soutaigne (*solitaneum) : -aigne 3743 [159].

La 1re pers. du plur. a deux terminaisons : -on (voy. les laisses VIII, XXIX, XLV, LXIII, CXXVII, CLXXII, CCIV) et -ons (voy. la laisse LXXXIX). En outre il y a dans le corps des vers, outre somes 205, 2600, 2645, etc., un cas isolé de -omes : irommes 6086 [160].

La 2e pers. du plur. du prés. du subj. des verbes en -er a adopté la terminaison analogique -ez (pour eiz < -ӗtis) : aresteiz : -ez 1011.

La mesure et la rime montrent que les terminaisons des 1re et 2e pers. du plur. de l’imparfait et du conditionnel sont dissyllabiques (-ion, -iez) : dormion (: -on) 4972 ; aviez ( : -ez) 2176 ; devriez 2300 ; etc.

La terminaison de la 2e pers. du plur. du futur est -ez : direz 2771, desdirez 1056, crerez 3612 : -ez.

La 3e pers. du sing. du parfait des verbes en -dre se termine tantôt en -dié (: -’) : atendié 5286 ; descendié 5271 ; estendié 5297 ; pendié 5280 ; rendié 5291 ; respondié 5270 ; — tantôt en -di (: -i) : descendi 6260 ; pendi 6261 ; perdi 6294 ; rendi 6293.

Dans la laisse en -asse (CLXIV) on rencontre à la rime neuf fois la 1re pers. du sing. de l’imparf. du subj. des verbes en -er (afolasse, etc.).

Voici enfin quelques observations concernant la syntaxe de notre auteur.

Emplois spéciaux du cas-sujet [161] : après plus de : Nos cerons… plus de set cent millier (: -ier) 333 ; Sus la targe le fierent plus de quarante troi (: -oi) 1496 ; — avec eslire a : a emperere esliz (hém.) 3012 [162] ; à côté de : Quant a empereor fu Esmereiz esliz 2392 ; — avec sembler : mout semblez gentis hom (: -on) 4976 ; à côté de : bien samble chevalier (: -ier) 3335 ; Moi semble grant pechié (: -) 5274 ; etc ; — avec soi faire : m’en fis mout liez (: -iez) 6362 ; à côté de : Puis a dit a Makaire : Faites vos baut et fier (: -ier) 5923 ; — avec avoir nom : Li ainznez ot nom Mile (hém.) 689 [163]. C’est sans doute sous l’influence de telles constructions alternatives que le verbe devenir s’est construit avec un cas-régime : li ciez devint oscur (: -ur) 5376, [164] à côté de : deviens laians hom (: -on) 4991 ; etc.

Juxtaposition d’adjectifs [165] : Onques.. ne vi si bel armé 803 ; Li visaiges devant, ainx bel enluminez 6065 ; — Mout fu grande la guerre et fierre commencie 1176 ; — el ot... le vis frois coloré 59-60 ; — Le poil dou chief a bloi, menu recercelé 969 ; sarmadans mout menu detrenchiez : 109.

Les conjonctions comparatives comme et que fonctionnant comme prépositions avec un cas-régime [166] : Les iaus vars en la teste comme facon(s) mué (: -é) 968, 2286 ; Gentement la salue con chevalier sené (: -é) 2274 ; Ez un estorbillon, bruant comme sangler (: -er) 5390 ; [167] — miaus vaut un prodome que plain val d’or comblé (: -é) 367 ; Si a veü Florence, plus blanche que cristal (: -al) 1681. D’autre part la construction non-prépositionnelle est fréquente : sailli en la selle con chevaliers prisiez (: -iez) 1123 ; etc.

Le verbe au sing. avec le sujet au pluriel [168] : Encontre le soloel cil elme reflambie (: -ie) 1417 ; Asez lor a dit chozes qui pas ne lor agree (: -ee) 2815 ; De la biauté de lé reluist li parleor (: -or) 5537 ; Cent mille en fu destruit (hém. ; M : m. furent d.) 5711.

Construction après ezecce : à côté d’une foule d’exemples où il y a le cas-régime, nous avons une fois le cas-sujet : A tant ez vos venu li chatelain Thierris (: -is) 6170.

Le prédicatif au sens neutre [169] : à côté de nombreux exempies de la conservation du neutre des adjectifs (et participes) en position prédicative, il y a un certain nombre de cas où l’emploi de la forme infléchie est attesté par la rime : Ne doit estre celez 5654, puis fu chier comparez 5006, s’il ne fust destornez 6049, ja ne vos iert veez 2747 : -ez ; qu’il lor fu contrediz 3005, de plusorz est oïz 53253 : -iz ; mal nos est avenuz 3192, vos estera randuz 3568 : -uz.

Omission de la proposition principale après une proposition relative à sens conditionnel [170] : Que les verret aus armes sus les chevaus monter Et devant le palez chescun jor behorder, Crupieres et ensegnes ondaier et venter, De cendauz et de poille contre vent venteler ! 4239-32 ; Que veïst celle estoire, quant dou port s’en tornerent ! 546 ; Que donc veïst abatre et paveillons et trez Et chevaus estraiers et Grifons craventeiz ! 2529-30 ; Qui li veïst s’espee fors dou fuerre sachier, Le manteil sus la teste le bon branc enpoignier ! 3456-7 ; Que lor veïst plovoir et ses nues muer Et la pluve et le vent tot ensemble torner Et l’air a espoisier ef li cieus a toner, L’une onde par sus l’autre desur la nef entrer ! 5386-90.

Proposition relative sans verbe [171] : mout fera que desvez 1012 ; mout a dit que cortois 2007 ; De ce fist il que sage 2247 ; etc.

L’indicatif dans une préposition temporelle commençant par une proposition indiquant la priorité [172] : Ja ainçois ne verrez cest premier an paser Dou reaume son pere le ferai coroner 3291-2 ; Le matin i serons, ansoiz que l’aube esclaire 5920, à côté de : il li toudra sa robe, ainsois qu’elle s’en aut (: -aut) 5040 ; etc.

L’infinitif prohibitif [173] : Ne ce celer tu mie ! 1425 ; nel me celer tu mie ! 2118, 3413 ; ne t’esmaier (: -ier) 5197.

Constructions ἀπὸ χοινοῦ [174] : un riche roi Philipe, que se fist coronner En la terre d’Angrie par tot sire clamer 669-70 ; Qui donc ot bon cheval l’alevot por sentir Sa meniere conoistre de poindre et de guenchir 875-6 ; Pere, dist la pucelle, car me festes baillier Au riche roi Garsire donner et envoier 1067-8 ; il vint au tref et vit le roi en grande D’asalir la cité a ses homes comande 3208-9 ; Sire, quant vos nasquistes, toz li mons fu empliz De joie et de clarté revestuz et garniz 4701-2 [175].

Autres anacoluthes [176] : Florence, qui la char avoit blanche et alisse, La face enluminee et la coleur esprisse, Mamilettes li poignent par desoz la chemise, Por la bone parolle c’est la pucelle rise 1169-72 (Le sujet Florence est repris par la pucelle) ; Il n’en i a un seul, s’il pensoit se bien non Ne que il s’en fuist por paor de Grifon, Seignor, li estantdart aporte tel reson Que sempres li corroient sure li compaignon 1272-5 (La proposition relative est remplacée par une proposition d’intensité) ; La fille au roi Oton, Florence la senee, En la plus mestre tor est la belle montee 1637-8 (Le sujet La fille au roi Oton est repris par la belle) ; Copasse li la teste a m’espee forbie : Plus de trente glotons orent en lor espie, De totes pars me pristrent 3421-3 (Après la première proposition, il faudrait Quant plus de trente glotons qu’il orent... me pristrent) ; Si alerent mengier, car li queus l’apresta 5608 (Le régime l’ remplace un substantif sous-entendu, le mangier, tiré de la première proposition) ; Il n’a soz ciel contrait, tant plain de palazin, Poacreus, langoreus ne ladre ne tapin Que la voist par creance et par verai destin Que il ne s’en reveignent tot sain et anterin 5861-4 (Passage du sing. au plur. [177]) ; Une piece dou dart li estoit enbevrez Dedenz l’os de la teste, si n’en puet estre outez 6062-53 (Les deux participes s’accordent avec dart, pas avec piece) [178].

§ 3 — Orthographe adoptée pour le texte critique

Les recherches du paragraphe précédent ayant démontré que l’auteur de Florence de Rome était probablement originaire de l’Île-de-France ou de la Champagne occidentale, et qu’il a sans doute vécu dans la première moitié du xiiie siècle, on pourrait être tenté de publier notre texte en employant l’orthographe usitée dans l’Île-de-France pendant la bonne époque de l’ancienne littérature française. Si cependant nous avons conservé l’orthographe, fortement empreinte de traits lorrains, du ms. P, c’est que notre texte critique n’est à l’ordinaire, comme on sait, qu’une reproduction fidèle de ce manuscrit. Dès lors, il nous a semblé préférable de ne pas entreprendre une reconstitution de la vraie orthographe de l’auteur, tentative toujours plus ou moins hasardeuse. Mais toutes les fois que nous n’avons pu, pour une raison ou une autre, adopter une leçon de P, et toutes les fois que nous avons introduit dans le texte un passage omis par ce manuscrit, nous avons préféré donner l’orthographe normale de l’Île-de-France à l’époque en question.

Le texte du ms. P, et par conséquent du texte critique de cette édition, offre l’aspect très fréquent des textes français du moyen âge, écrits par un copiste parlant un autre dialecte que l’auteur de l’œuvre en question, c’est-à-dire qu’il mélange des formes provenant de dialectes différents. Souvent la langue primitive paraît avoir été conservée dans notre manuscrit, peut-être sous une forme quelque peu modernisée (provenant de l’amuïssement de certains sons, etc.) ; mais, à côté de ces formes de l’Île-de-France, il y a un grand nombre de graphies qui, par leur caractère essentiellement lorrain, attestent l’influence du copiste lorrain de la fin du xiiie siècle. Nous indiquerons ci-dessous brièvement les principaux traits qui semblent caractériser spécialement le langage de notre copiste, par opposition à celui de l’auteur, tel que nous avons appris à le connaître [179].

Voyelles

L’a de l’Île-de-France est souvent rendu par ai : drais 451, faice 463, vaillet 1140, les mots en -aige 130, 143, 144, 150, 313, 324. Il y a au dans Aufrique 12, Aufriquanz 12, creauture 500 ; devant l : poitraul 180, enperiaul 1676, laiaul 1678. Devant s (rs) il y a quelquefois e : espesse pour esparse 4656 (corr.), messe 4657 (corr.), amesse 4659 (corr.), chesse 4660 (corr.), menest 5330. En position protonique il y asouvent e (surtout devant une nasale) : ahenez 107, gemès 116, menieres 411, menaie 499, espenois 1217, memelle 1941, clemai 3170 ; chevellerie 142, chescun 430, chergiez 132. Il y a o seulement dans ovec 114, 310 [180].

Pour la voyelle nasale an on trouve quelquefois en : demendez 102, bendez 231, estrenge 486, enz 1201, mende 3213. Pour en, em il y a très souvent an, am : duremant 99, tramble 109, resplant 193, manton 228. Devant une palatale on voit quelquefois ain pour an : estrainge 504, maingera 1525, maingié 5105.

L’e de l’Île-de-France < a latin est quelquefois représenté par ei : maugrei 696, freire 3380, seit 5161, teil 5779, getei 6180, morteil 6238. Aussi pour l’ee bref latin il y a quelquefois ei devant l : oiseil 43, hastereil 78, bordeil 5596, couteil 5953, En syllabe fermée cet e est représenté par la diphtongue ie seulement dans iestes 390, 1071, 1323 [181], En syllabe protonique en hiatus se rencontre souvent a pour e : emperaor 21, craanz 22, conraez 86, saeler 391, vaer (= veoir) 1228, coraors 3436 ; rarement o : voïsiez 1629, moïs 3037 (corr.), ou ai : saiant 220. Devant une liquide il y a aussi a : varez 3598. Le groupe protonique es est quelquefois rendu par a : Qu’Amerez 2431 (corr.), qu’Ameré 2705, 3063, trapacer (= trespasser) 2575, tamoignon 3541 ; cf., au contraire, es pour a : espostoile 2960, esvespree 3741.

L’o de l’Île-de-France < o fermé libre du latin vulg. est quelquefois représenté par ou : orguillous 128, ou eu : covoiteus 17, orguelleus 324, corageus 466, seul 219. Quelquefois, surtout devant ch ou s, il y a oi : boiche 3655, 3886, 3957 ; coisins 5964 ; poipres (= porpres) 151, soimes 1168 (corr.). Pour oau latin on trouve souvent ou : clous 243, oust (< *auset) 387. En syllabe protonique il y a souvent ou (< u bref, o et au latins) : redoutez 72, acoudez 94, douter 396 : coutez 115 ; repousez 113. En hiatus se rencontre a : paoir 85, devant nasale e : premise 1158, ou rarement u : pumiaus 3088.

L’u de l’Île-de-France est quelquefois rendu par ui : connuit 2968, 3250.

Diphtongues

Pour ai il y a souvent, comme il est naturel, e, aussi devant nasale : bessa 18, plest 26, mestre 54, esselles 79 ; huimès 19, treste (= traite) 27, portret 89, fere 136, palès 193 ; avré 317 ; ençois (= ainçois) 415, mentenant 657 ; plene 50. D’autre part, il y a souvent a : basiez 112, reparier 142, a (= ait) 192 (corr.), vars 227, rason 445, ada (= aida) 5097. Rarement on trouve ei : eisil 150, excepté devant un l mouillé : traveilliez 108. Devant une nasale il y a souvent ’ : moi(n)ne 182, 427, 3751, point 478, ainsi que dans poille (poile, poelle) < pallium 87, 183, 208, 432, 1257, 1262.

L’au de l’Île-de-France est simplifié en a : savage 152, jusqu’a 231 (corr.), savacion 249, hiames 310, chevachier 339, mavestié 464, habert 477, mabailli 481, chevaz 540.

L’ei de l’île-de-France devant un l mouillé est remplacé par oi : vermoil 230, mervoille 2045, consoil 2698, ou oe : vermoelle 1160, consoel 2757 (cf. ci-dessus poelle). En syllabe protonique il y a i devant l et n mouillés : orguillous 128, mervilloz 185, aparillier 1302, mervillier 1303 ; signor 1, engignier 343.

Pour la diphtongue de l’île-de-France oie fermé libre du lat. vulg. ou < e fermé ou ouvert + yod en syllabe protonique, il y a quelquefois ai : airre (< ïter) 167, Taivre 449 ; laial 313, ondaier 431 ; naier 5954, rarement oe : voelle 521. Pour oi on trouve aussi la simple voyelle e, le plus souvent à la terminaison de l’imparf. et du condit. : estet 18, verret 429, poet 437, feret 1042 ; vaer (= veoir) 1228 ; ivere 1248, apreme (= aproisme) 3014 ; moins souvent il y a o : crostre 3602, avor 5114, ardor 5847 (corr.) ; chosiez 2747, glore 3601.

La diphtongue de l’île-de-France ou (< o fermé ou ouvert + l) est souvent réduite à o : docement 53, vodrai 136, coper 299, todra 363. Rarement il y a oi pour o ouvert + u : vois : (*volsi) 100 (corr.), 6322 (corr.), ou au : vausist 181.

La diphtongue ie est le plus souvent réduite à i dans la terminaison -iee : chargie 148, 154, afichiemant 189, croisies 630, toutes les rimes de la laisse XL, etc. Rarement il y a e après une palatale : drecerent 155.

Pour la diphtongue ue il y a quelquefois la notation étymologique o : ovres 19, forres 548 ; quelquefois oi : coloivre 647, boin 1261, 2065.

La diphitongue ui est assez souvent réduite à u : cude 160, tut 173, 428, destrure 327, pusons 383, du 2506, fu 3765.

La triphtongue de l’Île-de-France ieu (< e ou o ouverts + l) est le plus souvent rendue par fiau : viauz, viaus (< vetulus) 210, 294, 488, miaus 367 ; iaus 60, 227 ; de même viaut (*volet) 289, 334, 414, 427, 441 (cf. vuet 265), diaut 5635. Quelquefois, il y a ui (< e ouvert + u à travers iu) : luies 632, 1267, 1311, 3758 ; voy. aussi suige (« siège ») 2035, 2060, consuit (< *consequit) 2544, 2608.

Consonnes

La lettre c n’avait que la valeur d’une simple sibilante ; on a donc souvent s pour c : de si 124, 264, se 212, 214, chasier 347, commensa 379, sainture 489 ; dessandre 450.

Le d épenthétique entre l, n d’un côté, et r, de l’autre, manque souvent : venra 217, voroit 404.

Pour l il y a r dans mur (mulum) 350, murs 164.

L’l mouillé est souvent noté par l et li aussi après d’autres voyelles que i : vuel 112, 296, 338, 342, viel 258, 301, vuele 290, vielle 27, fuelles 231, mervellent 248.

Devant une explosive labiale l’orthographe donne souvent n pour m : senblanz 19, enperere 36, enplie 126, atrenpees 240, enpire 386, enperiaul 1676.

L’n mouillé final est noté par g : soig 344.

L’r devant une voyelle se place quelquefois, par métathèse, après cette voyelle : mosterroie 2337, descoverra 2709, porcession [182] 4964, 5514.

L’s sourde (écrite ss entre voyelles) est souvent rendue par c : ci (= si) 47, ces (= ses) 55, cerons 333, pencez 335 ; pacent 170, faucer 436. Pour ss il y a aussi très souvent une s simple : isirent 4, poisanz 10, asez 70, 76, 131, asamblez 84, mesaiges 130, 144, poison 150, 226, pasage 156, garise 202 ; plus rarement x : laxa (= laissa) 3673, eüxent 813, otroia(i)xe 2953, 2959. Pour l’s finale la consonne z se rencontre fréquemment, même dans une syllabe posttonique : mervilloz 185, mez (= mais) 274, palez 349, 416, 420, cendauz 432 ; apostoillez 2957 (corr.). Enfin, l’s a disparu devant une consonne et même quelquefois en position finale devant la consonne initiale du mot suivant : chacuns 7, naqui 37, 253, coutez 115, Coutentinoble 120, 204, detatoner 297 ; fette (= faites) fere 1859 (corr.), feste (= faites) crier 2453 (corr.), certe gemès 2466 (corr.), souvent au pour aus. — L’s sonore est assez souvent représentée par ss : sessi 464, sesson 1150, chassement 1223, juisse 4829, 4836, 4837, plus rarement par z : choze 99, 293, roze 463, asazer 3303, oze 4471.

Le t final appuyé manque quelquefois : main (= maint) 208 (corr.), vien 316 (corr.), don (dom) 193, 485, quan que 52, 315, fier 1734 (corr.), por 2061 (corr.), tin 3823 (corr.), ier 4136 (corr.).

Pour z, comme il est naturel, on rencontre souvent s : fors 12, avenans 23, cuvers 178, viaus (vetulus) 294, 488, miaus 367, iaus (oculos) 60, 227.

Morphologie

Le cas-régime des noms et pronoms masculins est constamment employé pour le cas-sujet : chainsil 76, vessel 163, chacun 188, mon 330, son 334, vasal 390, un sol home (devant la césure) 394, juglaor 5246 ; au plur. les mulez 178, ses homes 215, seignors 14, 47, 98, 119, 221, 335, 359. On trouve moins souvent le cas-sujet pour le cas-régime : nez (natus) 128 (corr.), emperere (corr.) 197, 205, 6143, trestuit cil 200 (corr.), prodon 692 (corr.), li .xx. damoisel 794 (corr.), acesmez (: -é) 1569 (corr.), traïtre 3792 (corr).

Le cas-sujet des noms féminins de la 3e déclinaison latine est souvent sans -s : flor 59, chanson 119. D’autre part, la forme du cas-sujet est quelquefois employée comme cas-régime : citez (rég. sing.) 446.

Le cas-sujet des noms et pronoms masculins qui, en latin, n’avaient pas d’-s, ale plus souvent adopté cette désinence : sires 40, 198, 212, 316, empereres 84, 98 210, 304, nostres 198, vostres 316.

Le pronom personnel de la 3e pers. sing. fém.a , comme forme accentuée, [183] : 45, 112, 222, rarement lui : 4079 (corr.).

Le cas-sujet des pronoms relatif et interrogatif est très souvent que [184] : 82, 168, 195, 206, 209, 226, 458, 823. Pour cui il y a qui : 198, 263, 376.

La 1re pers. sing. du prés. de l’ind. a quelquefois une -s analogique : clains 321, doins 362, criens 4982.

Le subjonctif de prendre et venir présenté les formes praigne 302, vienge 1005.

La 3e pers. plur. du parfait des verbes metre, prendre et asseoir est : mistrent 151, pristrent 544, asistrent 2429 [185].

CHAPITRE VI — DATE DE LA CHANSON

On a vu au chapitre précédent que la langue de la chanson, autant qu’on peut la déterminer par les rimes et la mesure des vers, nous conduit à placer la composition de Florence de Rome dans la première moitié du xiiie siècle. Il y a cependant des faits d’un autre ordre qui permettent d’en fixer la date d’une manière plus précise,

Dans l’Analyse de la chanson, donnée au chap. ii, il a été raconté (pp. 37 et 40) comment Milon, après avoir abandonné Florence dans la forêt, se rend chez Guillaume de Dol (Doel), qu’il sert fidèlement et qui le fait ensuite transporter à Beau-Repaire [186]. Or, comme ce Guillaume de Dol n’est autre que le héros fictif du Roman de la Rose ou de Guillaume de Dole, et que cette œuvre a été composée, selon toute probabilité, vers 1200 [187], la chanson de Florence de Rome, pour avoir pu emprunter le nom de Guillaume de Dol au roman en question, a dû être composée après l’année 1200.

D’autre part, « Florence de Rome » est mentionnée dans le Roman de la Violette, composé par Gerbert de Montreuil entre les années 1225 et 1230 [188]. Voici le passage d’après l’édition de Fr. Michel (1834) :

Les .ij. pucieles Oriaut
Ont pris maintenant .j. bliaut ;
Lor damoisiele ont esvillie,
Si l’ont molt bien apparillie
D’un bliaut ynde crusillié [189]
A merveilles bien entaillié ;
A son col ont mise une afice
(Ensi com li contes m’afice
Les pieres valoient Plaisenche).
Che fu la roïne Flourenche
Qui empereres fu de Romme.
Qui l’a au col, chou est la somme,
Jà par homme n’ert vergondée.
Lonc tans ot l’afiche gardée.
Une soie ante Margerie,
Qui roïne fu de Hongrie,
L’avoit envoiée.....

(Pp. 42-43, vers 810-826).

Nous avons dans les vers en italiques (816 et 819-822) une allusion évidente aux vers 3641-3653 de notre texte critique, où il est question de la « noche » miraculeuse donnée à Florence par le pape Simon [190]. Il est fort probable que c’est précisément sous l’influence de la scène entre Florence et Macaire (vers 4438-4553) que Gerbert de Montreuil a imaginé la scène analogue de son roman entre Euriaut et Meliatir (éd. Michel, vers 3956-4038) [191].

Il y a, dans les ouvrages du xiiie siècle, encore d’autres allusions à la chanson de Florence de Rome, mais qui ne peuvent servir à fixer la date de celle-ci d’une manière plus précise que l’allusion contenue dans le Roman de la Violette.

Ainsi, une allusion directe à la chanson de Florence de Rome est faite dans le poème de Wistasse le Moine, dont la composition se place entre les années 1223 et 1284, mais probablement plus près de la première que de la seconde de ces deux dates [192]. À la question de « l’estrumel » : Ses tu ore nule chançon ? Wistasse le Moine, déguisé en ménétrier, répond :

O je, d’Agoullant et d’Aimon ;
Je sai de Blanchandin la somme,
Si sai de Flourenche de Romme.
Il n’a el mont nule chançon
Dont n’aie oï ou note ou son.

(Éd. Foerster-Trost, vers 2203-2207).

Enfin, dans le célèbre fableau Des Deux Bordeors Ribauz, dont la composition appartient aussi au xiiie siècle [193], l’un des jongleurs se vante de connaître notre chanson :

Si sai de Florance de Rome.

(Éd. Montaiglon, Rec. gén. et complet des Fabliaux, t. I [1872], P. 12, vers 318)

Outre ces allusions à la chanson de Florence de Rome dans des œuvres du xiiie siècle, il faut encore mentionner qu’une chanson de geste de la seconde moitié de ce même siècle, Yde et Olive [194], contient des imitations évidentes de la chanson de Florence de Rome, ou plutôt de la source commune de notre chanson et du remaniement représenté par le ms. Q [195].

Si donc la mention de « Guillaume de Dole » dans Florence de Rome prouve que cette chanson n’est pas antérieure à l’année 1200, et si d’autre part la mention de notre héroïne dans le Roman de la Violette démontre que le roman de Florence de Rome ne peut guère être postérieur au premier quart du xiiie siècle, c’est avec un certain étonnement qu’on trouve une allusion à l’histoire légendaire de Florence de Rome dans une œuvre qui date probablement de la fin du xiie siècle, La Naissance du Chevalier au Cygne ou les Enfants changés en cygnes, publiée en 1889 par M. H.-A. Todd [196]. Il est raconté dans ce poème comment le roi Lothaire, fils de Philippe et possesseur d’un royaume « par defors Hungerie » (v. 15), fêta ses enfants retrouvés en leur donnant à chacun une épée :

3098Il a doné .v. brans de le forge galant ;
Li doi furent jadis le roi Octeviant,
3100La les orent pieç’a aportés Troïant,
Quant Miles espousa Florence le vaillant ;
Se li dona Florence qui bien le vit aidant
Et encontre Garfile fierement conbatant ;
Et Miles dona l’autre a .i. sien connisçant.
3105Puis furent il emblé par Gautier le truant,
Et cil en est fuïs de la fort païsant,
S’en est venus au pere le roi Lotaire errant ;
A celui le dona, et il en fist presant.
Li rois les esgarda, bien les a a talant,
3110S’a Gautier done fief et fait rice et manant.
Les autres trois avoit en son tresor gisant ;
..............................
3121Ces .v. espees a li rois cascun enfant
Çainte au senestre les u bien seent li brant [197].

Cette allusion à Florence de Rome est curieuse en ce qu’elle donne Milon pour époux à notre héroïne [198]. Ce fait aamené M. H. Pigeonneau, qui ne connaissait que le remaniement (Q) de Florence de Rome, à supposer que l’auteur de la Naissance du Chevalier au Cygne fondait sa connaissance de Florence de Rome sur une version primitive selon laquelle Milon devenait en effet l’époux de Florence [199]. Dans l’état actuel de nos connaissances concernant les différentes versions de Florence de Rome, cette supposition nous paraît tout à fait invraisemblable [200], et il ne reste qu’à conclure que l’auteur de la Naissance du Chevalier au Cygne a commis une erreur de mémoire [201].

Quant à la question de savoir comment l’auteur de la Naissance du Chevalier au Cygne pouvait avoir connu la chanson de Florence de Rome, ou en avoir entendu parler, il semble qu’il y ait deux solutions. Ou bien le poème de la Naissance du Chevalier au Cygne ne date que du commencement du xiiie siècle [202], ou bien, ce qui nous semble plus probable, l’auteur de ce poème a connu, non pas la source commune directe des versions LMPS ou un de ses dérivés, mais un texte antérieur, source du groupe formé par les versions LMPS et aussi par la romance anglaise (R) et le remaniement français (Q). Cette version primitive de la chanson de Florence de Rome, écrite probablement dans la seconde moitié du xiie siècle, n’aurait donc pas encore mentionné Guillaume de Dole, et, comme dans le remaniement du xive siècle et dans le passage cité de la Naissance du Chevalier au Cygne, le roi grec y aurait peut-être porté le nom de Garsile [203].

CHAPITRE VII — HISTOIRE DU CONTE

DE LA FEMME CHASTE

CONVOITÉE PAR SON BEAU-FRÈRE

Nous avons dit plus haut, au chapitre iii (p. 42), que le sujet fondamental de la chanson de Florence de Rome, les aventures variées de la pauvre impératrice, n’a pas été inventé par l’auteur de notre poème, mais qu’il l’a tiré d’un conte d’origine orientale par l’intermédiaire de quelque version qu’il est difficile de désigner avec précision. En effet, Florence de Rome n’est qu’une des nombreuses versions d’un conte que nous appelons le conte de la femme chaste convoitée par son beau-frère [204], lequel se distingue de tous les autres contes de femmes persécutées et à la fin réhabilitées (Geneviève de Brabant, Berthe, Sebile, la Belle Hélène, la Manekine, etc.) par ces deux traits caractéristiques : 1o le premier (et, dans quelques versions, le seul) prétendant rebuté est le frère du mari, et 2o les persécuteurs de l’héroïne, châtiés par des maladies, sont guéris par leur victime elle-même, après qu’ils ont confessé leurs méfaits.

Le conte de la femme chaste convoitée par son beau-frère a depuis longtemps attiré l’attention des savants. Le premier qui ait essayé de dresser une liste des différentes versions fut J.-G.-Th. Grässe dans son ouvrage intitulé Die grossen Sagenkreise des Mittelalters (1842) [205]. Mais ni lui ni ses successeurs immédiats, P.-O. Bäckström [206], F.-H. von der Hagen [207], Sv. Grundtvig [208] et H.-F. Massmann [209], ne parvinrent à grouper ces versions d’une manière satisfaisante, et Grundivig, qui considérait notre conte comme une variante du conte vaguement défini de la « femme innocente persécutée », dont la ballade danoise Ravengaard og Memering lui semblait représenter le type le plus ancien, n’a fait que proposer une hypothèse insuffisamment motivée. Ce fut le regretté savant autrichien Adolphe Mussafia qui en 1865, dans un beau mémoire intitulé Über eine italienische metrische Darstellung der Crescentiasage [210], entreprit le premier un classement systématique des différentes versions. Mais ce classement ne pouvait être considéré comme définitif, car ce n’est pas l’observation des diverses phases de développement du conte qui en a fourni le principe à Mussafia, mais un caractère arbitrairement choisi, savoir le nombre des personnes malades et guéries par l’héroïne. En 1907, nous avons repris l’étude de ce conte dans notre mémoire intitulé Le Conte de la femme chaste convoitée par son beau-frère [211]. Les pages qui suivent ne sont, à part quelques détails, qu’un résumé de cet ouvrage.

L’origine du conte doit sans aucun doute être cherchée en Orient, probablement dans l’Inde, puisqu’il se retrouve dans plusieurs collections de contes orientales, entres autres dans le Touti-Nameh de Nakhchabi, du premier tiers du xive siècle, qui n’est qu’un remaniement d’un Touti-Nameh antérieur perdu, traduction plus ou moins altérée (probablement du xiie siècle) d’un recueil de contes sanscrit perdu dont le Soukasaptati (ou Les soixante-dix contes d’un Perroquet) actuel est le descendant appauvri. Il semble fort peu probable, comme le voulait Grundivig [212], que les versions orientales de notre conte soient d’importation occidentale : tous leurs caractères contredisent cette hypothèse. Quant à la théorie de Mussafia [213], selon laquelle le conte, d’origine orientale, aurait été introduit en Occident d’abord sous une forme simplifiée et ensuite sous une forme apparentée de près aux versions orientales conservées, elle est inadmissible, vu que toutes les versions occidentales présentent un trait qui manque dans les versions orientales et qui n’a guère pu être inventé à deux reprises : le beau-frère, à la suite de ses premiers efforts pour séduire l’héroïne, est enfermé dans un lieu solitaire, d’où il ne sortira qu’au retour de son frère. Si donc les versions occidentales se divisent en deux groupes, dont l’un raconte la fable avec beaucoup d’omissions, il faut croire que celui-ci se fonde sur une tradition orale simplifiée, tandis que l’autre groupe représente la tradition littéraire de la version occidentale primitive.

La version indienne, source supposée de toutes les versions du conte, n’ayant pu être retrouvée jusqu’à présent, il est impossible de dire quelle a été exactement la forme primitive de notre conte. Une comparaison des différentes versions orientales entre elles nous conduit cependant à une source commune qui n’a pas dû être très éloignée de l’original. Partant du principe, d’ailleurs tout théorique, que cette version primitive a été simple et logique dans ses détails, nons nous la représentons à peu près sous la farme suivante :

Un homme, voulant entreprendre un voyage, confie sa femme à la garde de son frère. Celui-ci devient amoureux de sa belle-sœur, et, comme elle repousse ses propositions déshonnêtes, il l’accuse d’adultère devant le juge du pays. Accusée par de faux témoins soudoyés par son beau-frère, la femme est condamnée à être lapidée. Laissée à moitié morte sur le lieu du supplice, elle est recueillie par un passant miséricordieux, qui la conduit dans sa maison et lui confie son fils enfant à garder, Or, un esclave de la maison tombe amoureux de l’héroïne ; rebuté par elle, il médite de se venger. Une nuit, il s’introduit dans la chambre où dormait l’enfant de son maître et le tue, puis il entre dans la chambre de sa gardienne, tache ses habits de sang et cache près d’elle le couteau ensanglanté. Le lendemain, le meurtre ayant été découvert, l’esclave attire les soupçons sur l’étrangère. L’hôte et sa femme ne peuvent cependant pas se convaincre pleinement de sa culpabilité ; ils se contentent de la renvoyer, et l’hôte compatissant lui donne même une somme d’argent pour son voyage. Avec cet argent elle rachète un jeune homme qu’on allait pendre pour dettes. Par reconnaissance, le jeune homme l’accompagne, mais devient amoureux d’elle. Repoussé, il la vend comme esclave au capitaine d’un navire. Celui-ci la mène à bord de son vaisseau et veut lui faire violence. Mais, sur les prières de son esclave, une violente tempête s’élève, qui brise le navire. L’héroïne et le capitaine échappent à la mort. La femme trouve un refuge dans un couvent, où, grâce à sa sainteté, elle guérit toutes sortes de maladies. Pendant ce temps, ses quatre persécuteurs avaient été frappés de maladies diverses, et son mari, revenu, avait appris par son frère sa coupable conduite. Le renom de la sainte femme qui guérissait tous les maux arrive jusqu’aux oreilles du mari ; il se met en route avec son frère malade pour chercher auprès d’elle la guérison de celui-ci. En chemin, se joignent à eux successivement le bon hôte avec son esclave malade, le jeune homme racheté et le capitaine. Arrivés à destination, ils sont admis auprès de la femme, qui, couverte d’un voile, leur ordonne de raconter fidèlement ce qu’ils ont sur leurs consciences. Ils racontent alors l’un après l’autre (le mari parlant le premier) ce qui se rapporte à leurs relations avec l’héroïne. Celle-ci se fait connaître, pardonne aux criminels et les guérit, après quoi elle retourne avec son mari dans leur pays, où ils vivent heureux.

Les versions orientales conservées du conte peuvent être divisées en trois groupes : celui du Touti-Nameh, celui des Mille et une Nuits et celui des Mille et un Jours.

Le groupe du Touti-Nameh, représenté par le conte déjà mentionné de Nakhchabi [214] et par une version turque du xve siècle [215], se distingue par les traits suivants : l’héroïne ne fait pas naufrage ; le capitaine ne figure pas parmi les malades, quoique la logique du récit demande nécessairement que les personnes qui ont eu directement à faire avec l’héroïne se retrouvent toutes à la scène finale ; les criminels seuls racontent comment ils se sont comportés envers la femme.

Le groupe des Mille et une Nuits, qui est représenté par trois versions de cette célèbre collection de contes arabes [216], par un conte du Maase-Buch, recueil de contes juifs du dernier tiers du xvie siècle [217], et par un conte tatare fort défiguré [218], diffère en son ensemble de la version primitive par l’altération de l’épisode du meurtre : dans deux des versions arabes [219], ainsi que dans la version juive, l’enfant est tué par mégarde (ou, du moins, sans préméditation), lorsque l’amoureux veut tuer la femme ; dans la troisième version arabe, ainsi que dans la version tatare, il n’y a pas de meurtre. Ajoutons que l’épisode du voyage en mer ne subsiste que dans l’une des versions arabes [220], ainsi que dans les versions juive et tatare, et que dans une autre des versions arabes [221], ainsi que dans la version tatare, la femme, arrivée au bout de ses malheurs, devient reine et reçoit comme telle les confessions de ses persécuteurs.

Le groupe des Mille et un Jours, qui est représenté par un conte du recueil persan intitulé Al Farag Ba’da Alsidda (La joie après l’affliction) [222] et un conte du célèbre recueil des Mille et un Jours de Pétis de la Croix [223], ainsi que, secondairement, par une « pastorale » basque [224] et un conte grec [225], se rattache, par le fait que l’héroïne devient reine, à la dernière des versions arabes. Le trait particulièrement caractéristique de ce groupe de versions orientales, c’est une introduction qui précède le voyage du mari et qui tend à mettre en lumière la grande chasteté de l’héroïne. Notons aussi que le beau-frère fait introduire un faux amant dans la chambre de sa belle-sœur.

En somme, les différentes versions orientales, parmi lesquelles il faut naturellement ranger aussi les versions juive, basque et grecque, mentionnées ci-dessus, peuvent facilement, malgré toutes leurs divergences partielles, être ramenées à une source commune orientale, qui était peut-être précisément un conte du Soukasaptati perdu.

Nous avons dit plus haut (p. 107) que toutes les versions occidentales, c’est-à-dire toutes celles dont nous n’avons pas parlé jusqu’ici, présentent un trait commun, l’emprisonnement du beau-frère, ce qui prouve que ces versions proviennent d’une source commune, laquelle était une version orientale quelconque. Un autre trait de moindre importance, c’est que le mari est toujours un très haut personnage, empereur ou roi. C’est avec ces deux traits supplémentaires que notre conte à été introduit en Europe, et le fait qu’on le rencontre dès le milieu du xiie siècle, sous une forme très abrégée [226], fait supposer que son apparition en Occident ne peut guère être postérieure à la fin du xie siècle,

La branche occidentale du conte de la femme chaste convoitée par son beau-frère peut se diviser en deux sous-branches : d’un côté, les versions des Gesta Romanorum et de Florence de Rome, représentant probablement la tradition littéraire de la version occidentale primitive, de l’autre, les versions abrégées du Miracle de la Vierge, de Crescentia et de Hildegarde, produits de la tradition orale de ce même conte.

Le groupe des Gesta Romanorum, représenté par deux sous-groupes : d’un côté, une version latine, rédigée en Angleterre, [227] avec ses traductions moyen-anglaises [228] et le remaniement en vers du poète Thomas Hoccleve (environ 1368-1450) [229], de l’autre, une version latine continentale [230] avec deux traductions allemandes [231], se distingue par les traits suivants de la version orientale primitive :

Le mari, qui est empereur de Rome, laisse, en partant pour la Terre Sainte, le gouvernement à sa femme. Celle-ci, obsédée des déclarations d’amour du beau-frère, le fait jeter en prison. À la nouvelle du retour de l’empereur, l’impératrice, accompagnée du beau-frère remis en liberté et d’une nombreuse suite, se rend à sa rencontre. En route, comme les personnages de la suite courent un cerf, le beau-frère veut faire violence à l’impératrice. Ne parvenant pas à ses fins, il l’abandonne dans la forêt, attachée par les cheveux à un arbre, et va raconter à son frère que l’impératrice lui a été enlevée par une troupe d’hommes armés, — Celui qui sauve l’impératrice est un grand seigneur, et c’est sa fille qu’il lui confie. — L’assassin, qui est un sénéchal au service du seigneur, place le couteau ensanglanté dans la main de l’impératrice, dormant à côté de la fille. — C’est la femme du seigneur qui accuse l’impératrice du meurtre et veut la faire tuer. — Il n’est pas question d’argent pour le voyage de l’héroïne. — L’homme racheté, qui est un malfaiteur, devient le serviteur de l’impératrice et ne tombe pas amoureux d’elle. C’est le capitaine qui, ayant vu l’impératrice, corrompt le serviteur. L’impératrice est enlevée au moment où elle va acheter des marchandises sur le navire. — Les voyageurs, parmi lesquels ne se trouve pas le maître de l’assassin, ne se rencontrent qu’au couvent. — Le beau-frère ne confesse son crime qu’après une seconde sommation.

L’on voit que la version des Gesta Romanorum, à part l’emprisonnement du beau-frère et la condition sociale du mari, ne diffère de la version primitive, quant au fond du récit, que par la façon dont se venge le beau-frère, par l’attitude de l’homme racheté et par l’absence du maître de l’assassin à la scène de reconnaissance au couvent. :

Par notre analyse de la chanson de Florence de Rome, on a déjà pu voir en quoi la rédaction représentée par les mss. P, M et L diffère de la version primitive de notre conte, ainsi que de la version des Gesta Romanorum. Mais, comme l’a montré notre classement des différentes rédactions de Florence de Rome, la rédaction de PML n’est nullement identique à la version primitive de Florence de Rome, telle qu’elle a dû exister dans la seconde moitié du xiie siècle [232]. Cette version primitive du groupe de Florence de Rome, représentée aujourd’hui d’un côté 1o par la chanson du premier quart du xiiie siècle que nous avons publiée dans le second tome de cet ouvrage, avec sa traduction en prose espagnole (S), 2o par le Dit de Flourence de Romme, du commencement du xive siècle (D), et 3o par la romance anglaise (R), de l’autre, par le remaniement français en vers alexandrins de la première moitié du xive siècle (Q), a dû différer par les traits suivants (détails superflus omis) de la version primitive orientale :

Longue introduction racontant comment le mari devient empereur de Rome. Pendant une absence du mari, occasionnée par une guerre, le beau-frère veut épouser l’héroïne, prétendant que son frère est mort. Convaincu de trahison, il est jeté dans une tour, mais, à la nouvelle du retour de l’empereur, l’impératrice le fait mettre en liberté et va à la rencontre de son mari, accompagnée du beau-frère et d’une nombreuse suite. En route, le beau-frère parvient à séparer l’impératrice de sa suite, mais, grâce à une broche magique, la vertu de l’héroïne est préservée contre les entreprises du beau-frère. Celui-ci attache alors l’impératrice à un arbre et la maltraite. C’est à ce moment qu’apparaît le sauveur, un châtelain du voisinage. — L’enfant confié aux soins de l’héroïne est une jeune fille, qui couche à côté d’elle. — L’assassin, un chevalier au service du châtelain, place le couteau ensanglanté dans la main de l’impératrice endormie. — Celle-ci va être brûlée, mais est graciée au dernier moment. Le châtelain lui rend sa mule et ses riches habits. — L’homme racheté, un malfaiteur, devient le serviteur de l’impératrice ; il ne tombe pas amoureux d’elle, — Parmi les malades, qui ne se rencontrent qu’au couvent, se trouve aussi le mari. — Les criminels sont brûlés vifs,

En comparant les versions primitives des Gesta Romanorum et de Florence de Rome, on voit que leur source commune, version occidentale ancienne, n’avait altéré la version orientale primitive que pour les traits que voici :

Le mari est un empereur de Rome. L’impératrice, convaincue de la trahison du beau-frère, le fait mettre en prison. À la nouvelle du retour de l’empereur, elle va à sa rencontre, accompagné du beau-frère, qu’elle a relâché, et d’une nombreuse suite. En route, l’héroïne et son beau-frère ayant été séparés de la suite, celui-ci veut abuser de sa belle-sœur, mais, ne parvenant pas à ses fins, il abandonne dans la forêt, attachée à un arbre, et va raconter à l’empereur que sa femme lui a été enlevée. — Le sauveur de la malheureuse, un grand seigneur, confie sa fille aux soins de l’inconnue. — L’assassin, chevalier au service du seigneur, place le couteau ensanglanté dans la main de l’impératrice, dormant à côté de la fille de son hôte. — L’héroïne ne reçoit pas d’argent en s’en allant. — L’homme racheté, qui est un malfaiteur, devient le serviteur de l’héroïne et ne tombe pas amoureux d’elle ; c’est par cupidité qu’il la vend au capitaine, — Les quatre criminels avec leurs compagnons ne se rencontrent qu’au couvent.

Dans les versions dont nous avons parlé jusqu’à présent il n’a pas été question d’une intervention divine directe pour sauver l’héroïne. Or, dans le groupe de versions auquel nous arrivons maintenant et que nous désignons par le nom de miracle de la Vierge, c’est la Vierge elle-même qui se montre à l’héroïne endormie sur un rocher au milieu de la mer et lui indique un remède contre la lèpre. Un autre trait caractéristique de ce groupe de versions, c’est qu’il n’y a jamais plus de deux criminels, le beau-frère et l’assassin, l’épisode du capitaine survivant toutefois dans un voyage en mer et aboutissant à l’exposition de l’héroïne sur le rocher. Comme dans ces versions le beau-frère accuse l’héroïne d’adultère, ce qui est un trait primitif qui ne se trouvait pas dans la source commune des Gesta Romanorum et de Florence de Rome, il est vraisemblable que le miracle de la Vierge, qui apparaît déjà dans un ms. du xiie siècle [233], remonte à une version occidentale antérieure à la source commune des Gesta Romanorum et de Florence de Rome. Cette supposition est corroborée par le fait que, dans le miracle de la Vierge, l’enfant assassiné est, comme dans la version primitive, un garçon.

La version du miracle de la Vierge, telle qu’elle se rencontre dans les collections de miracles de la Vierge rédigées en latin [234], diffère par les traits que voici de la version orientale primitive :

Le mari, qui est empereur de Rome, laisse, en partant pour la Terre Sainte, l’empire et son jeune frère aux soins de sa femme. Fatiguée des poursuites du beau-frère, l’impératrice feint de vouloir céder à ses prières. Elle fait donc disposer une tour spéciale pour leurs rendez-vous, mais, aussitôt le beau-frère entré, elle l’y enferme et le tient prisonnier pendant cinq ans. À la nouvelle du retour de l’empereur, l’impératrice, pleine de joie, fait relâcher le beau-frère. Celui-ci se hâte d’aller à la rencontre de son frère, qui s’étonne de la pâleur de son visage ; il raconte que l’impératrice a voulu le séduire et que, pour se soustraire à ses tentatives, il s’est enfermé dans une tour. L’empereur le croit et, quand sa femme vient à sa rencontre, il la frappe au visage et donne à deux valets l’ordre de la conduire dans une forêt pour l’y décapiter. C’est au moment où les valets veulent violer leur victime qu’apparaît le sauveur, un noble seigneur. — L’assassin, qui est le jeune frère du seigneur, place le couteau ensanglanté dans la main de l’impératrice, dormant à côté du petit garçon. C’est par ses cris d’effroi, à la découverte du meurtre, que l’héroïne éveille le seigneur et sa femme. — L’épisode du débiteur racheté manque entièrement, l’impératrice étant condamnée par le seigneur à être déportée sur un navire dans un autre pays. Dans ce voyage en mer, le rôle du capitaine amoureux est rempli par des marins, qui, l’impératrice leur ayant résisté, la déposent sur un rocher au milieu de la mer. Là, la Vierge lui indique, dans un songe, une herbe qui croît sous sa tête et grâce à laquelle elle pourra guérir les lépreux. L’impératrice, réveillée, cueille de cette herbe, et peu après un navire passant dans ces parages la conduit à la terre ferme. Sortie du navire, l’impératrice guérit un lépreux et ensuite beaucoup d’autres. — Il n’est pas question de couvent. — L’assassin, devenu lépreux et ayant entendu parler des cures merveilleuses de la sainte femme, la fait appeler. — L’impératrice, ayant refusé d’épouser l’assassin guéri, qui ne la reconnaît pas, continue sa route vers Rome. Là elle est mandée auprès du frère de l’empereur, devenu également lépreux. L’impératrice le guérit en présence de son mari, du pape et du Sénat ; après quoi, s’étant fait connaître, elle entre dans un couvent.

Cette version a été très répandue au moyen âge. Nous la retrouvons d’abord en latin dans le Speculum historiale de Vincent de Beauvais (mort en 1264) [235], dans le Liber de septem donis d’Étienne de Bourbon (mort vers 1267) [236], dans le Liber de abundantia exemplorum de Humbert de Romans (mort en 1277) [237], dans l’Alphabetum narrationum, longtemps attribué à tort à Étienne de Besançon (mort en 1294) [238], dans le poème intitulé Stella maris de Miraculis Beate Marie Virginis de Jean de Garlande (composé vers 1248) [239], dans la Scala celi de Johannes Junior (1re moitié du xive siècle) [240], dans le Promptuarium de miraculis beate Marie Virginis (vers 1435-1440) de Johannes Herold [241], dans les Sermones tam quadragesimales quam de sanctis de Gabriel Bareleta (mort probablement après 1480) [242] et dans le Speculum exemplorum (1re éd. de 1481) [243]. Dans tous ces ouvrages notre version du miracle de la Vierge apparaît avec très peu de variations

Parmi les versions en langues modernes, au contraire, il y en a plusieurs où le récit a subi des altérations remarquables.

En français le miracle de la Vierge se rencontre à peu près intact dans les Miracles de Notre-Dame de Gautier de Coinci (composés vers 1218-1222) [244], dans quelques collections de miracles anonymes, conservées dans des manuscrits des xiiie-xve siècles [245], et dans les Miracles de Nostre Dame de Jean Miélot (milieu du xve siècle) [246]. Une version abrégée, où l’épisode du meurtre manque et l’impératrice est déposée sur le rocher par l’ordre de l’empereur, est donnée par la Vie des Pères (milieu du xiiie siècle) [247], et sur cette version est fondée un « mystère » français de la fin du xive ou du commencement du xve siècle [248], ainsi qu’un roman insipide de Mlle Laroche Guilhen (morte en 1710) [249].

En italien, notre miracle se lit sous sa forme primitive dans les Miracoli della gloriosa Vergine Maria nostra Signora de Silvano Razzi (xvie siècle) [250] et, avec des altérations en somme peu importantes, dans des rédactions en « ottava rima » de Felice Passero [251] et de Giovanni Briccio (mort en 1646) [252]. Par contre, une version en prose où l’héroïne porte le nom de Guglielma (xive siècle) a supprimé l’emprisonnement dans la tour et les tentatives amoureuses des marins, mais a, d’autre part, ajouté une introduction étrangère au thème primitif du miracle [253]. Sur cette version se fonde un drame sacré d’Antonia Pulci (fin du xve siècle), où l’épisode du meurtre manque [254]. Ajoutons encore que le miracle latin doit être la source d’un conte abruzzien, où l’épisode du meurtre a été supprimé et où une fée a pris la place de la Vierge [255], ainsi que d’une version vénitienne en « ottava rima » fort altérée, du xve ou du xvie siècle, qui n’est que le remaniement d’un roman français perdu [256], et d’un conte populaire encore plus altéré où les deux premiers épisodes, celui du beau-frère et celui de l’assassin, ont été combinés de telle façon que c’est le beau-frère qui tue l’enfant de l’héroïne [257].

Dans la Péninsule ibérique une traduction galicienne perdue de la version de Gautier de Coïnci [258] a probablement servi de base à l’une des Cántigas de Santa Maria d’Alphonse X, le Sage [259], et il est possible que la même version galicienne ait aussi fourni le sujet d’une romance portugaise de Balthasar Dias (xvie siècle), laquelle, pour le fond du récit, diffère assez peu du miracle latin [260]. En espagnol, le miracle latin survit, en outre, dans deux versions indépendantes l’une de l’autre et assez altérées : celle de Juan Timoneda (xvie siècle), contenue dans son Patrañuelo [261], qui a, entre autres, ceci de curieux que la trouvaille de l’herbe miraculeuse est expliquée d’une manière naturelle, sans l’intervention de la Vierge, et celle de Juan Miguèl del Fuego (xvie siècle) [262], qui a omis l’épisode du meurtre et introduit un lion protecteur.

En allemand, notre miracle se rencontre sous une forme intacte dans le livré religieux intitulé Der Seelen Trost, de la fin du xive ou du commencement du xve siècle, dont la rédaction primitive était probablement bas-allemande [263], et dont il existe aussi des rédactions en haut-allemand, en hollandais, en danois et en suédois. Une « comédie » de Hans Sachs, de l’année 1551 [264], est aussi assez voisine du miracle latin, ainsi qu’un poème de Hans Rosenblüt (milieu du xve siècle) [265], qui présente ceci de curieux que l’empereur y porte le même nom, Octavianus, que dans la version continentale des Gesta Romanorum. Sur la version de Rosenblüt se fonde un poème strophique du Meistersänger Albrecht Baumholtz (xvie siècle) [266]. Enfin, le célèbre écrivain religieux Martinus von Cochem (mort en 1712) raconte le miracle, d’après Vincent de Beauvais, dans son Auszerlesenes History-Buch [267].

Si nous ajoutons que notre miracle se retrouve dans des recueils de miracles hollandais [268] et islandais [269], nous aurons indiqué toutes les versions importantes de cette branche du conte de la femme chaste convoitée par son beau-frère.

Nous avons dit plus haut (p. 112) qu’une version de notre conte se rencontre déjà dans la Kaiserchronik, qui date du milieu du xiie siècle. En effet, c’est la version de Crescentia, qui n’est, selon toute probabilité, qu’une variante du miracle de la Vierge qu’on a fait entrer dans le célèbre recueil de contes pseudo-historiques sur les empereurs romains [270]. Cette version, dont le nom a souvent servi à désigner notre conte en général, diffère par les traits suivants du miracle de la Vierge :


Introduction dans laquelle il est raconté comment deux jeunes princes jumeaux, du nom de Dietrich, aspirent à la main de Crescentia, fille d’un roi d’Afrique, et comment celle-ci choisit celui qui était laid, lequel, par ce mariage, devient empereur de Rome. L’empereur part pour une guerre et laisse sa femme sous la garde du frère. Par suite de l’accusation du beau-frère, Crescentia est jetée dans le Tibre, d’où elle est sauvée par un pêcheur, Elle vient ensuite dans la maison d’un duc, dont le sénéchal remplit le rôle de l’assassin. — L’enfant tué est placé entre les bras de Crescentia endormie. — Celle-ci est jetée pour la seconde fois dans le Tibre, d’où la retire cette fois saint Pierre, qui lui confère aussi la faculté de guérir tous ceux qui confessent publiquement leurs fautes (L’épisode du voyage en mer fait donc défaut). — Crescentia se rend d’abord chez le duc, qu’elle guérit de la lèpre, ainsi que le sénéchal. Celui-ci ayant été jeté dans le Tibre en punition de son crime, Crescentia va à Rome, accompagnée du duc. Là, elle guérit son mari et le beau-frère, également atteints de la lèpre. Elle est reconnue à une marque qu’elle a sur le corps. Après avoir vécu ensemble quelque temps, l’empereur et l’impératrice abandonnent l’empire au beau-frère et entrent au couvent,

Outre des remaniements en prose de la Kaiserchronik [271], la version de Crescentia se retrouve dans des manuscrits du xive siècle [272] sous la forme d’une chanson à part, qui est peut-être un extrait de la Kaiserchronik. En outre, elle est donnée par deux livres populaires [273], dans lesquels c’est ou bien un ange ou bien la sainte Vierge elle-même qui remplit le rôle de saint Pierre, ainsi que par un poème de l’Autrichien Heinrich der Teichner (2e moitié du xive siècle) [274].

Jusqu’à présent nous n’avons vu notre conte rattaché qu’à des personnages fictifs ou vaguement définis. Il nous reste maintenant à parler d’un groupe de versions où l’héroïne est une personne historique, Hildegarde, deuxième (ou troisième) femme de Charlemagne. Ce fut fort probablement un certain maître d’école de Kempten en Bavière, Johannes Birck, qui, en 1484 ou 1485, introduisit dans une chronique sur l’abbaye de Kempten une variante de son invention du miracle de la Vierge, où il attribua le rôle de l’héroïne à la patronne de l’abbaye, la reine Hildegarde. Cette version Hildegarde [275], qui, il va sans dire, manque de toute base historique, diffère par les traits suivants du miracle latin :

Charlemagne, partant en 765 pour une guerre contre les infidèles, confie Hildegarde et ses enfants à son jeune frère consanguin, Taland [276]. Celui-ci construit un palais qui a trois portes, l’une derrière l’autre, pour les rendez-vous. — À Charlemagne Taland raconte qu’Hildegarde l’avait enfermé. Charlemagne ordonne à ses valets de noyer sa femme, mais elle échappe à la mort, ayant promis à la Sainte Vierge de bâtir un couvent, et parvient à une maison princière, où elle est bien traitée. Un jour qu’elle se tenait à une fenêtre du château, elle est découverte par Taland et Charlemagne, qui passaient près de là. Charlemagne ordonne cette fois à ses valets de la conduire dans une forêt et de lui arracher les yeux. — Le sauveur, certain chevalier de Freydenberg [277], au service de la sœur d’Hildegarde, Adelinde, laisse les valets, qui n’ont pas voulu violer leur victime, prendre les yeux de son chien pour les remettre à Charlemagne en signe de leur obéissance. — Les épisodes du meurtre et du voyage en mer manquent entièrement. — En compagnie d’une demoiselle, nommée Rosina de Bodmann [277], Hildegarde s’expatrie et se met à étudier les qualités curatives des plantes et des pierres précieuses, de sorte qu’elle arrive à guérir toutes espèces de maladies, surtout la cécité. Sa réputation devient si grande qu’elle est appelée par le pape Léon à Rome, où elle continue, inconnue, d’exercer son métier de médecin. — Devenu lépreux et aveugle, Taland se rend à Rome avec son frère pour consulter la célèbre femme. Arrivé à la maison d’Hildegarde, il reçoit, par la demoiselle amie, l’ordre d’aller d’abord se confesser. Comme il tait son crime envers Hildegarde, il est renvoyé se confesser. — Étonnés de la guérison de Taland, le pape et Charlemagne veulent savoir qui elle est. Elle apparaît à l’église Saint-Pierre et se fait connaître, après quoi Taland est exilé, Pour tenir sa promesse, Hildegarde fait bâtir le couvent de Kempten et le dote de riches domaines.

Le récit mensonger de Birck fut cru et adopté par un historiographe du xvie siècle, Caspar Brusch, qui l’inséra dans son ouvrage intitulé Monasteriorum praecipuorum ac maxime illustrium Chronologia (1551) [278], d’où il passa ensuite dans un grand nombre d’ouvrages des xvie et xviie siècles [279], toutefois le plus souvent à titre de tradition douteuse ou fabuleuse. Même un historien de la première moitié du xixe siècle, J.-B, Haggenmüller, raconte encore notre légende [280].

Mais la version d’Hildegarde ne se rencontre pas seulement dans des ouvrages d’histoire, où les auteurs tâchent plus ou moins sérieusement de ne raconter que des faits authentiques ; nous la retrouvons aussi dans des ouvrages d’un caractère moins sérieux, des recueils d’anecdotes et d’histoires édifiantes. Ainsi, elle se trouve, en somme intacte, dans les ouvrages anecdotiques de H.-W. Kirchhof (1563) [281], de G. Stengel (mort en 1651) [282], de F. Hüber (1670) [283], de A.-W. Ertl (1685) [284], de E.-W. Happel (1690) [285], de M. von Cochem (mort en 1712) [286], de Abraham à Sancta Clara (mort en 1709) [287] et du pseudonyme Jasander (1720) [288]. Et le célèbre philologue et poète Nicodemus Frischlin en fit, en 1578, une « comédie » latine en cinq actes, Hildegardis magna [289].

Il reste à mentionner les pérégrinations de notre légende comme conte populaire. Sous cette forme elle présente deux versions principales, dont l’une est apparentée de très près à la version de Birck. La source de ces versions populaires est sans doute quelque sermon de prédicateur, où la légende, empruntée à l’un des ouvrages historiques mentionnés ci-dessus, aura été intercalée comme « exemple » instructif. Le fait que la plupart de ces contes populaires sont des contes rhénans prouve que ce n’est pas la version locale de Birck qui en est la source directe.

Celle des deux versions du conte populaire qui est le moins éloigné de la version primitive a dû exister au moins dès le milieu du xviie siècle, car elle se rencontre en Suède comme « livre populaire » à partir de 1689 [290]. En Allemagne, elle n’apparaît que dans les recueils de contes populaires publiés au commencement du xixe siècle par A.-W. Schreiber (1816) [291], N. Vogt (1817) [292] et les frères Grimm (1818) [293]. Sur cette version se fondent les romances ou ballades de Fr. Laun (1818) [294], K. Geib (1828) [295] et G. Pfarrius (1838) [296], dont la dernière a omis la seconde condamnation d’Hildegarde.

À côté de cette version du conte populaire il y a une autre où l’épisode de la première condamnation manque et où les bourreaux sont mis en fuite par l’amie de la reine, qui, cachée dans un arbre, les effraie en les menaçant de la colère de Dieu. Cette version secondaire apparaît pour la première fois en 1837 dans les Rheinlands Sagen, Geschichten und Legenden de A. Reumont [297] et transmigre aussi en Suède [298]. Sous une forme quelque peu changée elle se retrouve encore dans l’œuvre de P.-J. Kiefer (1845) [299].

Ayant ainsi passé en revue les différentes versions que nous connaissons, nous représenterons graphiquement de la façon que voici le classement des cinq branches principales du conte de la femme chaste convoitée Par son beau-frère : Page:Anonyme - Florence de Rome, tome 1.djvu/136

  1. Voy. Romania, t. VIII (1879), p. 475.
  2. Voy, la description donnée par M. L. Delisle, Mélanges de paléographie (1880), p. 425.
  3. Et non 267 feuillets, comme le dit P. Paris (p. 334).
  4. Dans les mss. Paris, Bibl. nat., f. fr. 1452 (xve s.) et 12564 (datant de 1461), qui contiennent Florent et Octavien, mais non Florence de Rome, il y a à la fin des allusions analogues au Roman de Florence de Rome :

    I. Ms. Paris, Bibl. nat., f. fr. 1452, fol. 221 ro :

    « Et Othon fut a Rome, qu’il (l)ot a gouvrener.
    Une fille engendra en Police au viz cler,
    Qui ot a nom Florence et ot moult a porter,
    Car par force la voult et prendre et espouser
    L’empereur Garsille, qui ot a gouvrener
    Toute Costantinoble, s’en voult guerre mener
    Pour Florence la belle, mès Esmeré le ber
    Aida au roy Othon au fer et a l’acier,
    Tant qu’il fit ses nuysans desoubz luy encliner,
    Et espousa Florence, qui molt ot a porter
    Par le frere Esmeré, Millon ou cueur amer,
    Qui voult traïr so[n] frere pour sa femme espouser,
    Ainsi que le romant le veult bien deviser.
    Maiz de Florent veul cy le livre deffiner,
    D’Othovien son frere, qui moru oultre mer.
    Dieu veulle par sa grace leur pechiés pardonner,

    Et ceulx qui l’ont ouy veulle Dieu honourer !
    Amen Deo gracias. »

    II. Ms. Paris, Bibl. nat., f. fr. 12564, fol. 248 rovo :

    « Othez fu empererez, Romme ot a gouvrener, 27
    Polisse sa moullier vaut forment enamer.
    Enchainte fu le dame dont vos m’oés parler,
    En le premiere anee vault elle delivrer
    D’unne mout bielle fille, qui puis ot a porter.
    Florence fu nommee, depuis vaut espouser
    Le gentil Esmeré, qui Puille ot a garder.
    Par son frere Milon vault maint mal endurer,
    Et oussy fist la bielle Florence o le vis cler,
    Ensy qu’en autre ystore l’avez oÿ conter.
    Or vorai desormais me canchon definer,
    De Florent le vassal vos lairai le parler,
    D’Oteviien son frere, qui moru outre mer ;
    Les Sarazins greverent, tant qu’il porent durer.
    Jesus voielle leurs ames en se glore hosteler
    Et pardoinst a tous ciaux c’ont volu escouter
    Et nous doinst pais et joie, tant que porons durer.
    Signeur, alons ent boire, le rommant faut finer ;
    D’un autre vous diray, qui vora escouter.
    Dieu et se douce Mere nous voielle sy mener
    Que droit em Paradis il nous voielle hosteler !
    Amen. »

    (Suivent onze vers qui concernent la composition du roman).

  5. C’est le manuscrit Ff. II. 38, University Library, du xve siècle. Le bone Florence of Rome, dont les 183 couplets sont dans la forme aabccbddbeeb, y occupe les feuillets 225c-240b. La romance a probablement été composée vers la fin du xive ou au commencement du xve siècle (voy. W. Viëtor, ouvr. cité, 2e partie [par M. Albert Knobbe], p. 12. — En citant cette version, nous suivrons l’édition diplomatique de M. Viëtor.
  6. C’est le manuscrit h. j. 12, intitulé Flos Sanctorum, écrit vers la fin du xive ou au commencement du xve siècle. Notre roman, divisé en 57 chapitres, y commence au feuillet 48 sous le titre : Cuento muy fermoso del enperador Ottas de Roma, et de la infante Florencia su fija, et del buen cauallero Esmere. Voy. F. Wolf, Studien zur Geschichte der spanischer und portugiesischen Nationalliteratur (1859), p. 741 (add. à la p. 498, note 1) ; Amador de los Rios, ouvr. cité, t. V, pp. 53 (note 2), 54 et 591.
  7. 2. Il n’est peut-être pas superflu de faire connaître par qui et quand mes copies des mss. PML, ainsi que celle du ms. Q, ont été exécutées. Le ms. Q fut copié, pendant l’été de 1896, à Paris par ma femme ; ma sœur, Mlle Wallensköld, copia à la même époque le ms. P. J’ai collationné ces deux copies. Quant au ms. M, M. Wilhelm Viëtor, le savant professeur de Marbourg, eut l’extrême obligeance de m’en faire parvenir à Helsingfors, en 1898, une copie, prise par lui-même en 1888. Cette copie fut recopiée par ma femme, et je collationnai cette seconde copie, vers la fin de l’année 1898, avec l’original, que son propriétaire, M. D’Arcy Hutton, avait eu la très grande amabilité de mettre à ma disposition pour quelques semaines au Musée Britannique de Londres. Le ms. L, enfin, fut copié par moi, à Londres, vers la fin de l’année 1898.

    Je n’ai pas trouvé nécessaire d’indiquer les petites différences qui existent entre mes copies et celles de MM. Paul Meyer et Ward. Il va sans dire que là où elles diffèrent mon contrôle a été des plus rigoureux.

  8. Voy. R. Wenzel, ouvr. cité, pp. 32-37 et 59-62 ; W. Viëtor, ouvr. cité, deuxième partie, pp. 1-3.
  9. Voy., pour cette rédaction, l’Appendice de ce tome, vers 959-981, 1084-1091, 1213-1288.
  10. Voy., pour cette rédaction, le Texte critique, t. II, vers 1468-1487, 1759-1765, 2050-2087 (le fragment L ne contient pas le dernier passage).
  11. Cf. R. Wenzel, ouvr. cité, p. 30.
  12. Voy. l’Appendice de ce tome, Vers 982-1012.
  13. Cf. R. Wenzel, ouvr. cité, p. 30, où il est dit qu’Esmeré, dans Q, acquiert également la reconnaissance du chevalier Agrevain en sauvant sa vie. Le fait est qu’Esmeré et Milon retirent ensemble Agrevain de la mêlée ; ce qu’Esmeré fait de plus, c’est qu’il donne à Agrevain un cheval (voy. l’App. de ce tome, vers 910-923 ; cf. R. Wenzel, ouvr. cité, p. 29), mais c’est Milon qu’Agrevain considère comme son véritable sauveur (voy. l’App., vers 1222-1224).
  14. Voy. l’App. de ce tome, vers 2854-2849, 5360-3362,
  15. Voy., sur ces versions, le chap. vii de cette Introduction.
  16. Tout en constatant que ce trait se retrouve dans la version de notre légende que donne la Kaiserchronik, M. Wenzel (ouvr. cité, pp. 49-50) ne semble pas être fixé sur sa présence dans la source commune de Q et LMP (« on ne saurait décider, dit-il, si la source première présentait ce trait »). M. Wenzel croit-il donc que Q l’ait spontanément introduit ? Mais alors il ne devrait pas parler de « réminiscence de Crescentia ». — Voici encore quelques traits allégués par M. Wenzel (ouvr. cité, pp. 39, 47, 53) en faveur de la priorité de la version de Q, mais que nous ne pouvons pas regarder comme des preuves concluantes :

    1° Dans Q, c’est à la suite d’une trahison de Milon qu’Esmeré est fait prisonnier par les Grecs (voy. l’App., vers 1626-1682), tandis que MP parlent d’une première trahison avortée de Milon (celui-ci abandonne Esmeré a milieu de la mêlée et l’accuse ensuite d’avoir déserté) et ne laissent Esmeré tomber que plus tard entre les mains des Grecs (voy. le Texte, t. II, vers 1538-1607, 1792-1814). Il nous semble fort possible que Q ait altéré les passages en question, comme tant d’autres.

    2° Dans Q, l’épisode de l’enlèvement de Florence par Milon est très simple : Milon enlève sa belle-sœur lorsqu’ils se rendent à la rencontre d’Esmeré (voy. l’App., vers 2365-2484) ; dans MP, Milon se rend d’abord seul à la rencontre d’Esmeré et accuse Florence d’infidélité ; convaincu de mensonge et chassé de l’empire, il retourne à Rome et persuade à Florence d’aller avec lui à la rencontre de l’empereur, après quoi l’enlèvement a lieu (voy. le Texte, t. I, vers 3398-3742). Si l’on suppose que la version de Q est ici la version primitive, pourquoi Milon, après avoir été forcé d’abandonner Florence dans la forêt, n’ose-t-il pas retourner auprès de son frère, puisque celui-ci est censé ignorer sa trahison et qu’il serait facile à Milon d’expliquer par quelque mensonge la disparition de Florence ?

    3° L’épisode, dans MP, du méchant hôte Peraut et de sa femme, la bonne Soplise (voy. le Texte au t. II, vers 5049-5153), qui ne se retrouve dans aucune des autres versions de notre conte, manque également dans Q. Il nous semble fort possible que Q l’ait omis, l’ayant jugé superflu pour la marche du récit.

  17. Ouvr. cité, pp. 35-36. Il s’agit des vers 1740, 1752, 1797, 1801-1804 et 1835 de notre Texte (t. II).
  18. Ouvr. cité, pp. 2-3 (vers 1838 du Texte).
  19. Le seul passage (v. 1752) où M. Wenzel considère décidément la leçon de L comme meilleure n’est pas à retenir, parce qu’en fait P ne donne pas la leçon fautive de M (En poi de ure auom grant perte receue), mais une leçon acceptable : En pou dore auons ore grant perde receue. Dans sa copie du ms. P, M. Wenzel avait omis le mot ore. Cela étant, il n’y a aucune raison de chercher à établir la bonne leçon sur la base de la leçon corrompue de L : En mult poi de terme auoms grant perte eue. — De même, le nouvel argument apporté en faveur du groupement MP contre L par M. Knobbe est à rejeter, parce qu’en fait les mss. MP donnent la même leçon que L (L : eseu aleun, M : escu a leon, P : escu au leon).
  20. On pourrait à la rigueur ajouter le cas suivant : V. 1830 : LM : la seinte comuniun (hémistiche trop long) — P : le saint communion, attendu que communion se rencontre comme masculin (voy. Die afr. Prosaübersetzung von Brendans Meerfahrt, éd. C. Wahlund [1901], p. LII, note 1). Il nous semble cependant plus probable que l’original ait eu sainte communion, d’où, par corruption, la sainte communion dans la source commune de LMP, leçon que P a corrigée en le saint communion.
  21. Ouvr. cité, p. 62. On peut se demander si M. Wenzel a vraiment voulu dire que les quatre versions : L, la source de DMP, R et S sont issues séparément de leur source commune. Ce qu’il dit à propos de R et S (p. 61) semble prouver que telle est bien sa pensée : « Et comme il n’y a pas de raison suffisante pour faire remonter R et S à une source commune, quoiqu’une telle hypothèse ne soit pas exclue, nous préférons placer l’original français de R......., sur la même ligne que LMPS ».
  22. Ouvr. cité, p. 3.
  23. Voy. l’éd. de Jubinal, pp. 100-101.
  24. Voy. les deux laisses CXLI-CXLII (vers 3962 4007) de notre Texte.
  25. Ouvr. cité, p. 46.
  26. Ouvr. cité, p. 3.
  27. Ouvr. cité, pp. 1-2.
  28. Voy., pour MP, notre Texte, v. 5268 :

    Mès ains vos vuel doner cest bliaut entaillié.

    S donne (ouvr. cité, p. 454) : mas ante uos quiero dar este mi manto.

  29. Voy., pour MP, notre Texte, v. 5484 :

    Ses bliaus fu moilliez, que forment li pesot.

    S donne (ouvr. cité, p. 456) : et retorçió su brial, que era todo lleno de agua, et muy pesado.

  30. Voy. l’éd. Viëtor, vers 1801-1802.
  31. Couplets 157-158.
  32. Voy. ci-dessus p. 10.
  33. Vers 1564-1565 :

    To Florence they can hur (Betres) kenne
    To lerne hur to be haue hur among men.

  34. Voy., pour MP, le Texte, vers 705-711. Par suite de l’omission, dans M, des vers 701-704, ce blason y paraît être celui du roi d’Esclavonie. Pour la leçon de R, voy. les vers 421-429 :

    Syr Emere bare in hys schylde
    A whyte dowve who so be helde
    A blakk lyon be syde
    The whyte dowve sygnyfyed
    That he was full of knyght hedd
    And mekenes at that tyde
    The lyon that he was ferse and felle
    Amonge lys enmyes for to dwelle
    And durste beste in batell byde,

  35. Voy. p. 400 : et vno de ellos traya el escudo pintado de marauillosa pintura : el canpo de oro, et un palonbo blanco ; et este era Esmere, et esto daua à entender que seria cortés et omildoso contra sus amigos ; et Miles traya un leon, que daua á, entender que sera buen cauallero darmas.
  36. Voy., pour Esmeré, le Texte, vers 801-802 (au lieu de colombel, M donne leoncel, et non pas leon, comme le dit à tort M. Knobbe, ouvr. cité, p. 2), 826, 1396, 1588-1589, 1657-1658, (M. Knobbe cite P, v. 855 [= Texte, v. 8421] : leon, mais ce passage n’a rien à faire ici, car c’est Esmeré qui est comparé à un lion) ; pour Milon, voy. le Texte, vers 1838. Cf. les passages correspondants dans S, pp. 401, 402, 409, 412, 413 et 415. Il n’y a qu’un seul passage où il soit dit qu’Esmeré porte un « lion », et là les deux frères ont le même blason (vers 1134-1135). S dit seulement (p. 406) : ambos yuan armados de armas de sus señales.
  37. Voy. les vers 484-487 :

    Fondur ys a nobull knyght
    That styrryth hym styfly in the fyght
    Be holde and ye may see
    Wyth the whyte dowve and the blak lyon ;

    758-760 :

    Jn the felde beste doyth he
    Wyth the whyte dowve in hys schylde
    And ther to the black lyon.

  38. Ouvr. cité, pp. 23-24.
  39. Dans Q, le blason d’Esmeré est décrit une seule fois et alors comme ayant deux lions (voy. l’App., v. 1002).
  40. Voy., dans notre Texte, les vers 48-52.
  41. Voy., pour R, les vers 58-63 :

    He set to scole that damysell
    Tyll sche cowde of the boke telle
    And all thynge dyscrye
    Be that she was XV yere olde
    Wel she cowde as men me tolde
    Of harpe and sawtrye ;

    pour S, p. 392 : mas esta Florencia, de quien uos fablo, de muy

    grant bondat, quando llegó á hedat de quinze años, fué tan

    bella et tan cortés, et tan bien enseñada, que en todo el mundo non le sabian par, etc.

  42. Voy. l’App., vers 144-146.
  43. Ouvr. cité, p. 27 : « Puisque S concorde d’ordinaire presque textuellement avec P... » ; p. 61 : « La version en prose espagnole concorde presque textuellement avec P ». M. E, Freymond, dans le Literaturblatt für germanische und romanische Philologie, t. XIII (1892), col. 267, avait déjà signalé cette contradiction entre les dires de M. Wenzel et son « arbregénéalogique ».
  44. Ouvr. cité, p. 2.
  45. Le second vers est, dans P :

    Tant habert desmaillie et tant chauain fauce.

    S donne (p. 414) : ally veriades tanta blanca loriga desmallada

    et falsada en muchos logares.

  46. M dit (v. 2655 du Texte) :

    Cent cheualer fetes o nus returner.

    Dans R (v. 1060), on lit :

    Take an hundurd men of Armes bryzt.

  47. Voy. notre Texte, vers 2705 (M manque) :

    Et les cent compaignons qu’Ameré li bailla.

    S, p. 426 : los çient conpañeros que Esmere le diera con él ;

    2708 :

    Car des cent chevaliers les vint mellors seyra,

    S, p. 426 : de los cient caualleros llamó los veynte à parte de los mejores ;

    2736 :

    Des cent chevaliers a les vint mellors sevrez ;

    2952 :

    De bien cent traïtors est cest plais agraez,

    S, p. 429 : et ya le han fecho o menage bien cient traydores.

  48. Voy. p. 414 : Esmere aguyjó por el torneo et traya en st conpaña bien cuatro mill de cauallo que cada uno le prometia de Le non fallecer á su grado.
  49. Voy. les vers 1787 et 1815 de notre Texte ; S, p.414 : ciento vezes mill grifones, que se juntaron con quinze mill de los rromanos ; p. 415 : los quinze mill que se ante tenian muy juntos ef bien regidos por Esmere.
  50. Voy. p. 457.
  51. Voy. p. 462. Au contraire, aux deux vers précédents de notre Texte (5986-5987), qui manquent également dans P et dans lesquels il est question de la maladie de Milon, correspond dans S le passage suivant : et todo lleno de lepra et de podraga. Et era tan gafo que morrer cuydaua.
  52. Voy. p. 415.
  53. Voy. v. 775 : They sende aftur the pope symonde.
  54. Cf. R. Wenzel, ouvr. cité, p. 33.
  55. V. 3528.
  56. L manque ; S a aussi pour ce passage (voy. p. 436) : Apostéligo Symeon.
  57. Voy. p. 411.
  58. Voy. p. 411.
  59. V. 1796 de notre Texte.
  60. Voy. p. 415.
  61. Voy. p. 415.
  62. Voy. p. 391.
  63. Voy. p. 431.
  64. M présente quelques variantes pour ces deux vers.
  65. Voy. p. 442.
  66. C’est fol. 60 vo,
  67. Les vers 4205 et 4206 de notre Texte.
  68. Ce copiste n’a pas été celui de P, puisque le vers ajouté ne peut pas être la suite du v. 4193, tel qu’il est dans P. D’ailleurs il n’y a pas, dans P, de signe spécial indiquant une correction de la part du scribe.
  69. Voy. p. 415 : De oy mas mantenga Dios Rroma por su piadat.
  70. R s’accorde avec LMP contre Q pour deux des passages (vor. ci-dessus pp. 8-9) où il s’agit du choix d’Esmeré comme époux de Florence ; voy. les vers 703-704 (Esmeré sauve Oton) et 886-897 (Florence, croyant Esmeré tué, se déclare prête à épouser Milon). Pour les trois cas, cités ci-dessus (p. 10, note 3), où LMP nous semblent donner la bonne leçon (contre l’avis de MM. Wenzel et Knobbe), R va aussi avec eux contre Q ; voy. les vers 718-741 et 784-789 (1er cas), 1288-1434 (2e cas), 1744-1827 (3e cas).
  71. M compte 5382 vers ; P, qui a pourtant sauté deux laisses (voy. ci-dessus p. 14, n. 2) et perdu à la fin au moins cinquante vers (à partir du v. 6366), en compte 6240. Que ce soit M qui ait, en général, omis des vers, et non pas P qui en ait ajouté, c’est ce qui ressort surtout du fait que M donne quelquefois des laisses tellement courtes qu’elles n’ont certainement pas pu appartenir comme telles à l’original de LMPS. Telles sont les laisses XVI (vers 445-457 ; 9 vers manquent dans M), LXIV (vers 1864-1876 ; 8 vers manquent dans M) et CXXXIII (vers 3743-3758 ; 8 vers manquent dans M).
  72. Le fait que M donne quelquefois des vers de dix syllabes a conduit M. E, Freymond (Literaturblatt für germ. und roman. Philol., t. XIII (1892), col. 267) à supposer que M a pu dans sa versification conserver des traces d’une chanson perdue sur Florence de Rome en vers décasyllabiques. Mais, outre que notre classification démontre l’impossibilité d’une telle hypothèse, tout le caractère de la version de M indique suffisamment que les vers de dix syllabes qui s’y rencontrent sont des altérations postérieures. Une foule de vers métriquement impossibles prouvent que notre copiste n’a pas dû avoir une idée bien nette des règles de la versification française de son temps. Comme exemples de ces altérations nous donnerons quelques vers de la première laisse de notre chanson :
    v. 8 (4e vers. suppl.) : Turnus fist turs sur lewe | en vn pendans ;
    v. 10 : E rei babilonus | ke mut fu puissans ;
    v. 13 : E romulus fist rome | ke bene fu pansans ;
    v. 14 : Seignurs ia fu vn tens | tesmoigne ices clers lisans ;
    v. 17 : E fels e coluers | e fers e encusans ;
    v. 20 : De ueire estorie | issu est li romans ;
    v. 21 : Dun riche empereur | ke mut fu uaillans.
  73. Voici un exemple caractéristique : laisse en -aire (CLXXXIV, vers 5492-5524 du Texte) : retreire, de boneire, escleire, rocherie, glorie, contreire, repeire, bulgarie, cesarie, gramarie, mie, remue, macharie, coreie, plenteie, heire, seintuaire, almare, uestiare, lunimare, glorie, uictorie, derere, lumer, pleire, ylarie, maire, retreire.
  74. Nous pensons avant tout aux vers 3962-4007 du Texte et à la fin de la chanson (vers 6366-6410).
  75. Ce sommaire est fait d’après le Texte critique, publié dans le t. II, lequel est fondé sur les mss. LMP.
  76. L’héroïne de la chanson anglaise Octouian Imperator (éd. H. Weber, Metrical Romances, t. III [1810], pp. 157-239) porte aussi le nom de « Florence ». Il est possible qu’ y ait là une influence de la part de notre Chanson ; cf. P. Streve, Die Octavian-Sage (1884), p. 27.
  77. Le ms. M l’appelle Garsie. Dans la chanson d’Otinel (milieu du xiiie siècle) il y a un roi païen Garsie (Garsile, Garsilie). Cf., sur Garsie-Garsilie, F. Bangert, Zs. f. rom. Ph., V, 582-3 ; P. Rajna, Romania, XVIII, 38, note 1, et 43, note 1).
  78. Sur ce trait dans d’autres chansons de geste françaises, cf. E. Schulenburg, Die Spuren des Brautraubes, Brautkaufes und ähnlicher Verhältnisse in den frz. Epen des Mittelalters (1894), p. 12, note 2.
  79. Milon est un nom de traître connu ; voy. E. Sauerland, Ganelon und sein Geschlecht im afr. Epos (1886), pp. 39-41.
  80. On retrouve, dans d’autres chansons de geste, ce trait d’un bijou qui protège la pudeur des femmes ; voy. Aye d’Avignon (éd. F. Guessard et P. Meyer, 1861), p. 62 :

    Fame qui l’ait o soi n’iert ja desvirginée
    Par nul home qui soit, si bien ne li agrée,

    et Charles le Chauve, v. 10620 et suiv. (R. Wenzel, Die Fassungen der Sage von Florence de Rome [1890], p. 14, note 2) :

    Un anel ou il ot piere de tel renon
    Que dame qui le porte desus li, ce seit on,
    N’ara garde pour home, et fust de son baron.

    Ailleurs, il s’agit d’une ceinture (Boeve de Haumtone, éd. A. Stimming [1899], vers 999-1007), d’une herbe (Orson de Beauvais, éd. G. Paris [1899], vers 578-610) ou d’une boisson (Cligés, éd. W. Foerster [1884], vers 3196-3370). Cf. Cr. Nyrop, Storia dell’ epopea francese nel medio evo (trad. Eg. Gorra, 1886), p. 76 ; note 1 ; Boeve de Haumtone, éd. Stimming, p. cxc, note 3. Pour la mention de la broche de Florence de Rome dans le Roman de la Violette, voy. ci-dessous au chap. vi.

  81. Ce personnage secondaire est évidemment emprunté au Roman de la Rose ou de Guillaume de Dole (éd. G. Servois, 1893), dont il est le héros. Seulement, il est singulier que la forme Dol (Doel) de notre chanson ne corresponde pas tout à fait à celle du Roman de la Rose (Dole : -ole).
  82. Sur ce nom de traître, cf. F.-H. von der Hagen, Gesammtabenteuer, t. I (1850), pp. cvii-cviii ; Macaire, éd. F. Guessard (1866), p. 1, note 1 : E. Sauerland, Ganelon etc. (1886), pp. 36-38. Notre texte dit (vers 5898-5899) :

    Thierris en apella son chevalier Makaire ;
    Onques hom n’ot cel non que ne fu de put aire.

  83. Pour un épisode analogue dans le Roman de la Violette par Gerbert de Montreuil, voy. ci-dessous au chap. vi.
  84. Dans Aiol, chanson de geste du commencement du xiiie siècle, « Clarembaut de Valbrune » est le nom d’un brigand (voy. l’éd. de J. Normand et G. Raynaud [1877], vers 6670 et p. 345). Que dans notre chanson le nom ait été choisi exprès pour désigner le caractère du personnage, c’est ce qui ressort des vers 4988-4990 du texte :

     « Amis », ce dist Florence, « comment avez vos non ?
    Clarembaut », dist li leres, « par foi m’apelle l’on.
    Par foi », ce dist Florence, « tu ais non de larron ».

  85. Amador de los Rios (Hist. crit. de la lit. esp., t. V, p. 74, note) fait observer qu’il y a une ville de Belrepaire, « situada como el monasterio del Cuento de don Ottas [c’est la version S], en una pintoresca playa », dans « el famoso Libro de Perceval » (voy. Perceval le Galloys, éd. Paris, 1530, impr. par Jehan Sainct-Denys et Jehan Longis, fol. x vo b et suiv.). Pour un nom si facilement inventé, il n’y a pas lieu d’admettre un emprunt de part ou d’autre.
  86. 2. Ce trait, qui sert ici à rehausser la sainteté de l’héroïne, se rencontre souvent dans la littérature hagiographique du moyen âge ; voy. les miracles cités par E.-C. Brewer (A Dictionary of Miracles [1884], pp. 369-370) et S. Baring-Gould (The Lives of the Saints [1897-1898], tomes III, 211, V. 149, X, 52 ; XI, 67 ; XII, 575-6 ; XIII, 62, 68, 154). Dans les rédactions de la Vie de saint Alexis, autres que celle du xie siècle, les cloches sonnent également d’elles-mêmes au moment de la mort du saint ; voy. l’éd. de G. Paris et L. Pannier, pp. 250 (vers 1003-1008), 310 (vers 1047-1050), 379 (coupl. 157d-158a). Dans le roman moyen néerlandais Seghelijn van Jherusalem (éd. Verdam, 1878), il y a des épisodes analogues (voy. Sitzungsberichte der phil.-hist. Cl. der Kais. Ak. der Wiss., Vienne, t. CXXVI [1892], mém. I, pp. 53 et 55). Rappelons aussi la cloche miraculeuse de Villilla, village d’Aragon, qui se faisait entendre toutes les fois que la religion était menacée de quelque danger, et qui a servi de sujet à l’opuscule de Don Juan de Quinones (Discurso de la campana de Villilla, Madrid, 1635, in-4o) ; cf. Le Violier des Histoires romaines, par G. Brunet (1858), p. 212, note (à propos de saint Grégoire). Mentionnons enfin le conte intitulé The son who heard voices dans W. Webster, Basque Legends (1877), pp. 137-140. Il est curieux de lire l’explication « naturelle » de ces miracles dans l’ouvrage cité de Brewer (p. 369). La corde de la cloche aurait souvent été portée dans une cabane près du clocher, dans laquelle se tenait le sonneur, de sorte qu’on ne voyait pas celui-ci. Quelquefois même le sonneur tirait une autre corde attachée à la corde de la cloche. De là tout le miracle !
  87. Les vers 6366-6410, qui ne se trouvent que dans le ms. M, sont tellement plats et incohérents qu’on est en droit de les regarder comme un replâtrage postérieur, fondé sur certaines réminiscences de la fin originale de la chanson, représentée par la version en prose espagnole (S). Que le scribe de M nait pas simplement tiré cette fin de sa propre imagination, mais l’ait basée sur des données apprises, c’est ce qui ressort du fait qu’il mentionne (v. 6408) Le fils d’Esmeré et de Florence, Otes de Police, tout comme S (p. 468 : Ottas d’Espoliça) et même R (v. 2165 : syr Otes).
  88. Notre rédaction comprend 6410 vers (208 laisses). Or, le mariage d’Esmeré et de Florence est décrit dans la laisse LXXXVI. On peut même dire que la seconde partie ne commence vraiment qu’avec le départ d’Esmeré pour la Grèce (laisse XCVI), et que toute l’expédition en Grèce (laisses CVII, v. 3058-CXXI), avec ses batailles et ses conquêtes, n’est qu’un épisode de transition entre les deux parties du poème.
  89. Voy., pour l’histoire de ce conte, ci-dessous le chapitre vii.
  90. Vers la fin de la chanson, la marche du récit devient de plus en plus précipitée, comme si l’auteur avait hâte d’en finir.
  91. Voy., pour cet épisode, les laisses LXXIII-LXXVI, v. 2156. Le v. 2147 :

    Mout fu li rois Garsires durement asoutez

    est surtout caractéristique.

  92. Ainsi, quand Florence est sauvée du naufrage, l’auteur s’écrie (vers 5490-5491) :

    Seignors, bien poez dire que Damedeu l’amot,
    Quant il de tel peril la delivra de mort.

  93. Dans sa dissertation intitulée Die Erziehung des Ritters in der altfranzösischen Epik (1888), M. Ernst Rust énumère (pp. 1215) les sujets bibliques les plus communs que mentionnent les prières des chansons de geste.
  94. Ainsi, à la rime en -as, on trouve saint Tomas (vers 3162, 5877) ; à celle en -ise, saint Denise (vers 4839, 5081) ; etc.
  95. Ainsi, le traître Macaire et Guillaume de Dol (cf. encore, pour ce dernier, ci-dessous au chap. vi).
  96. D’après M (et S) ; P dit : la cité daufalerne. C’est une faute de copiste évidente, Aufalerne devant être quelque part en Espagne ; cf, C.-Th. Müller, Zur Geographie der älteren Chansons de geste (1885), p. 32.
  97. Les chiffres entre parenthèses indiquent que la leçon est conjecturale.
  98. Nous donnons partout l’orthographe du texte critique, qui n’est que celle du ms. P. Voy. § 3 de ce chapitre.
  99. Cf., sur cette étymologie, G. Lené, Les subst. postverbaux dans la langue franç. (1899), p. 27.
  100. Cf. Chansons de Conon de Béthune, éd. A. Wallensköld (1891), : p. 146.
  101. Cf. Cligés von Christian von Troyes, éd. W. Foerster (1884), pp. LXI-LXII (§ 14).
  102. Cf. H. Suchier, Les voyelles toniques du vieux français, trad. Ch. Guerlin de Guer (1906), pp. 134-135 (§ 45, b-c). Nous avons eu tort de dire, dans notre ouvrage précité, que -aine < -ena serait « impossible en francien ».
  103. Cf. Chansons de Conon de Béthune, pp. 140-141.
  104. Cf. H. Suchier, Les voyelles ton., pp. 127-130 (§ 40).
  105. Grice est cependant peut-être une forme mi-savante ; cf. A. Horning dans Literaturblatt f. germ. u. rom. Phil., XXI, 289.
  106. Cf. E. Schwan, Grammatik des Altfranzösischen, neu bearbeitet von D. Behrens, 6e éd. (1903}, p. 42 (§ 50, Anm. 1).
  107. Le ms. M (L manque) donne : se plie.
  108. Cf. Schwan-Behrens, Grammatik, p. 48 (§ 62, Anm.).
  109. Cf. Chansons de Conon de Béthune, p. 145.
  110. Le ms. M (L manque) donne : seie (sĕta),
  111. Le ms. M omet le vers ; L manque.
  112. Les mss. donnent :

    P : Ce fu el tens deste quil ploet et esclaire ;
    M : Ceo fu en mai tens deste quant uente larbroie.

    Cf. S (p. 443) : Esto era en el tienpo del estio. Nous avons reconstruit le vers de la manière suivante :

    Ce fu el tens d’esté qu’il ploet et fait tonoire.

  113. Cf. Schwan-Behrens, Gramm., p. 121 (§ 225, Anm.).
  114. Pour la rime -anche < -anca et < -ancia, -antia, cf. Li Dis dou Vrai Aniel, éd. A. Tobler, 2e éd, (1884), pp. xx-xxii.
  115. Cf. Aucassin et Nicolette, éd, H. Suchier, 6e éd., trad. A. Counson (1966), p. 69 (§ 6).
  116. Cf. Chansons de Coron de Béthune, p. 141.
  117. La rime frans (germ. frank) : -anz 8 (mss. MP, L manque) est évidemment une faute de copiste pour granz ; voy. ci-dessus p. 24.
  118. Voy. Auberee, éd. G. Ebeling (1895), Intr., pp. 133-135.
  119. Il y a un fait de tout autre nature qui parle en quelque sorte en faveur de la Champagne. V. 4073, il est fait mention de l’église saint Pere d’Avalon à propos d’un événement fictif (le larron Clarembaut y aurait été capturé). Or, dans la ville d’Avallon (dép. de l’Yonne) il existe encore aujourd’hui une chapelle Saint-Pierre, autrefois (jusqu’au xive siècle) église paroissiale. Si l’auteur de Florence de Rome a pensé à cette localité, il est fort probable qu’il a demeuré non loin de là, donc plutôt en Champagne que dans l’Île-de-France.
  120. L’on sait qu’en lorrain moderne e libre devant nasale est devenu uo, o après les consonnes labiales ; voy. W. Meyer-Lübke, Gramm. des langues romanes, I, 113 (§ 92).
  121. Cf. sur ce trait, H. Suchier, Les voyelles ton., pp. 53-55 (§ 19, b).
  122. Cf. aussi la formation analogique prodom, preudon : -on 1131, 3540.
  123. Nous avons corrigé ce vers, qui manque dans L et M.
  124. Il est possible que l’auteur, à cause de la rime, se soit permis d’employer l’ind. au lieu du subj. (n’i a cel que ne maigne Riche cheval en destre). Pour cet emploi de l’ind. dans des propositions relatives, cf. Der anglonorm. Boeve de Haumtone, éd. À, Stimming (1899), p. 134 (v. 419).
  125. Le ms. P (le seul) donne : Or li aide deus (hém.). Il faut probablement lire : Ore li aiut (ou : aït) Deus (voy. t. II, p. 379) ; cf. Si m’aïst Deus, amis 1679.
  126. D’après P ; M donne une leçon fautive ; L manque. — Cf. pour ce trait, Schwan-Behrens, Gramm., p. 138 (§ 280).
  127. Voy. les vers 357, 472, 2000, 2587, 2891, 2049, 3374, 3761, 5009, 5031, 5167, 5171, 6047, 6056, 6069, 6137, 6155, 6257, 6277, 6297, 6302, 6328, 6330, 6338. Cf. aussi v. 4193.
  128. Les rimes des vers 2231 (Berengier) et 6297 (Tierri) remplissent l’une et l’autre condition. — Pour la question de la flexion du vocatif, cf. A. Beyer dans la Zeitschr. f. rom. Phil., VII, 23-39.
  129. Nous n’avons corrigé que quelques cas où la bonne leçon nous a paru tout indiquée (p. ex. les vers 2000, 4193, 6056 parmi. les cas cités ci-dessus, note 1).
  130. Cf. ce que nous avons dit ci-dessus, p. 30, sur les fautes de déclinaison données par P seul.
  131. Il va sans dire que le cas-sujet masc. deputaire, mieux écrit de put aire : -aire 5899, 5907, ne prend pas d’-s ; cf. Li Chev. as devs espees, éd. W. Foerster, p. 383 (rem. au v. 26).
  132. Nous avons cru devoir corriger l’hémistiche v. 2967 : Quant li apostolle ot (P) en Quant l’apostolles ot.
  133. À ces mots on peut ajouter Mille 5791 et 5983 (nous avons corrigé le v. 2777), si c’est avec raison qu’il faut regarder Milles (sans élision 926, 2572, etc.) comme la forme originale du cas-sujet (< *Milus).
  134. V. 6059 : dirons desmerez : -ez ; v. 6068 : li baron (la gent) dou rennez : -ez.
  135. Le ms. P donne encore l’hémistiche Nonain est beneoite 5941, que nous avons gardé pour éviter un hiatus douteux (Nonne | est).
  136. Il est possible que l’original ait eu : Adonques fu li enfes au lieu de Adons fu li enfanz.
  137. Nous regardons comme interpolé le v. 2190 suppl. (P), où Milon (: -on) est employé comme cas-sujet. La forme baron 2793 dans le ms. P est probablement dû à un copiste, le ms. M donnant vassal, c’est-à-dire vassaus. Quant à la forme du cas-sujet Sanson (sans -s) 1386, 2517, 2696, 2761, 2775, 2783, 2786, à côté de Sances 1392 (toutes les fois dans le corps d’un hémistiche), elle est sans doute primitive (Sansons) ; Sances est donc formé d’après le type Otes-Oton.
  138. Deux autres fois nous avons introduit la forme Evain : v. 3299 (qui manque dans P et où M donne eue en hiatus) et v. 5716 (d’après M ; P a eue).
  139. Comme exemple du type féminin il y a encore Mariain 5682 (: -ain), qui est sans doute une formation analogique postérieure, à côté de laquelle se rencontre souvent la forme Marie (: -ie).
  140. Dans le ms. P, les deux vers 1875 et 1876 se terminent par le cas-régime l’emperere. Il est invraisemblable que l’auteur se soit permis une telle répétition. Ou bien l’un des vers est interpolé, ou bien l’emperere de l’un des vers est une faute de copiste. Nous avons jugé prudent d’adopter cette dernière alternative en lisant v. 1876 : le bon pere.
  141. Nous avons corrigé sire 1745 (dans P seul) et traïtre 5051, 6334 (d’après M). Le cas-régime fel (1336) s’emploie de bonne heure comme adjectif.
  142. V. 381, on lit bien encore dans P : onques genz ne vi pire (: -ire), mais comme le ms. M a fu pour vi, on a le droit de regarder la leçon de P comme une faute de copiste (voy. aussi la forme genz).
  143. On verra au chap. suivant que des raisons autres que les raisons linguistiques nous permettent de fixer la composition de notre chanson au premier quart du xiiie siècle.
  144. Le ms. (P) écrit matiere,
  145. Le v. 1870 ne saurait guère être regardé comme interpolé, puisque la version espagnole le donne (P. 416 : et de mañana salgamos todos nuestras azes paradas).
  146. Pour la forme singulière avonne 3284, voy. ci-dessus, p. 77.
  147. Soutaigne 3743 (compl. attr. du masc. val) pourrait cependant provenir d’un solitaneus, et non de *solitanus, comme l’admet Körting, Lat.-rom. Wôrterbuch³, n° 8853.
  148. M donne même (avec une syllabe de moins) Ganort. Dans S (voy. p. 450) le nom manque.
  149. À la rime en -i il y a de même le mot cui (1re pers. sing. du prés. du verbe cuidier) 3859, où un t appuyé a disparu, il est difficile de dire pourquoi ; cf. Le Bestiaire de Philippe de Thaün, éd. E. Walberg (1900), p. lix.
  150. Pour le dernier mot, voy. cependant l’hémistiche (mout par li avint bel) Et le hiame et les pierres 1398 (P), où nous croyons devoir lire (avec construction personnelle du verbe avenir) : Et l’iaumes et les pierres. — De même, au v. 1297, Le hiaume représente le cas-sujet Li hiaumes.
  151. Aux vers 2363 et 2656 il y a dans P : Vez ici, tandis que M donne Veez ci, ce qui est probablement la leçon originale. Le seul cas contracté (3065), qui n’est que dans P, est donc suspect.
  152. L’original a peut-être eu l’hémistiche : desoz le chaenon. — Au v. 5727, P donne l’hémistiche : La precha il la loi ; mais, comme il manque dans M, l’original a probablement eu : La preecha la loi.
  153. Voy. les vers 15, 514, 519, 1368, 1799, 2274, 2851, 3813, 4646, 5640, 5736, 6091, 6278. Comme exception nous avons admis, v. 3810, l’hémistiche : dyables (= dyable) et mafé, à cause du groupe de consonnes bl précédant l’-e.
  154. Le copiste écrit presque toujours que pour qui, trait essentiellement lorraïn, Il nous semble tout à fait improbable de considérer, avec M. A. Tobler (Verm. Beïtr., I², 123, note), ce que comme l’adv. rel. que. Selon nous, il y a ou bien dévéloppement de qui en que en syllabe atone non-initiale (effet de phonétique syntaxique), ou bien influence analogique du cas-régime.
  155. Cas incertain ; il y a là peut-être un fém. plur. (Une genz en isirent qui mout furent sachanz).
  156. Cas conjectural. Le ms. (P) donne : lor de la crestiente (: -ez), que nous avons corrigé en : l’or qu’a la crestientez.
  157. On sait d’ailleurs que les opinions diffèrent sur la priorité de la forme avec -s ; cf. W. Meyer-Lübke, Gramm. des langues rom. II, 32 (§ 21).
  158. Ces trois derniers adjectifs sont évidemment calqués sur grande.
  159. Pour l’étymologie de ce mot, voy. ci-dessus p. 84, note 1. Soutaigne est ici complément de val, qui était aussi du genre féminin.
  160. L’original a peut-être eu nos i irons (les mss. PM : nos irommes).
  161. Cf. W. Meyer-Lübke, Gramm., II, § 36.
  162. On pourrait, à la rigueur, regarder emperere comme un cas-régime analogique ; voy. ci-dessus p. 82.
  163. Mile peut, d’ailleurs, être la forme analogique duc cas-régime ; voy. ci-dessus p. 82.
  164. Il y a, d’ailleurs, là peut-être un cas-sujet analogique ; cf. ci-dessus p. 80.
  165. Cf. W. Meyer-Lübke, Gramm., III, § 130.
  166. Cf. W. Meyer-Lübke, Gramm., III, § 58 ; Le Bestiaire de Phil. de Thaün, éd. E. Walberg, p. 125 (v. 443).
  167. Dans le dernier exemple, sangler peut être du pluriel.
  168. Cf. W. Meyer-Lübke, Gramm., III, § 344 ; A. Tobler, Verm. Beitr., I², 232-237.
  169. CF. W. Meyer-Lübke, Gramm., III, § 401.
  170. Cf. G. Paris, Extraits de la Chanson de Roland, 9e éd. (1907), p. 82, note 42.
  171. Cf. W. Meyer-Lübke, Gramm., III, § 662 ; A. Tobler, Verm. Beitr., I², p. 12.
  172. Cf. O. Matschke, Die Nebensätze der Zeit im Altfranz. (1887), pp. 39, 40, 47 et 48.
  173. Cf. W. Meyer-Lübke, Gramm., III, § 704.
  174. Cf. À. Tobler, Verm. Beitr., I², pp. 137-140 ; Le Best. de Ph. de Thaün, éd, E. Walberg, pp. 123-124.
  175. Nous avons rejeté une construction ἀπὸ χοινοῦ douteuse qui ne se trouve que dans l’un des deux mss. (v. 516).
  176. Cf. A. Tobler, Verm. Beitr., I², p. 247.
  177. Il y a bien reueigne dans P (M : deuenge), mais anterin : -in exige le pluriel.
  178. Nous avons corrigé une anacoluthe (v. 2046) donnée par les deux mss. P et A, mais où une erreur de copiste nous semble probable (Un pour Dun).
  179. Nous n’avons donné que quelques exemples pour chaque point spécial, pris surtout dans le commencement du poème.
  180. Influence de od, o (< apud) ?
  181. Influence analogique de ies (< es) ?
  182. Dans ce mot il y a peut-être substitution de préfixe : por au lieu de pro.
  183. L’auteur, au contraire, disait li (: -i 465, 3868).
  184. Il y a peut-être là un trait d’ordre purement phonétique : e pour i dans une syllabe protonique. Cf. ci-dessus p. 86, note 1.
  185. En comparant les traits mentionnés avec ceux qui caractérisent le langage du copiste lorrain (fin du xiiie siècle) du ms. de Cheltenham, qui contient la chanson d’Orson de Beauvais, publiée par G. Paris en 1899, l’on voit que notre ms. P ne présente pas certains traits lorrains donnés par le ms. de Cheltenham. Ainsi, on ne rencontre pas dans le ms. P : eu pour ui ; a pour un e fermé entravé et pour e ouvert dans le suffixe -ele ; i pour e devant une palatale (à l’exception de l et de n mouillés) ; i pour ie (à l’exception de -ie < -iee) ; oi pour i atone en hiatus ; ou pour o atone devant une nasale : au, eu pour eau, iau < -ellum ; eaul, iaul pour el ; x pour s finale ; g pour gu ; chute de l’r devant s et à la fin des mots ; la graphie fane (< femina) ; intercalation d’un n devant un g ou un j ; les 1re pers. plur. en -iens (voy., pour ces faits plus ou moins caractéristiques du dialecte lorrain, Orson de Beauvais, éd. G. Paris, pp. vii-xviii). Il semble donc que le copiste du ms. P n’ait pas été d’un pays aussi oriental que celui du ms. de Cheltenham. Peut-être notre copiste habitait-il près des limites du dialecte champenois.
  186. Voy. les vers 4379-4391 et 5776-5827 du texte critique.
  187. Voy. l’éd. de M. Servois (1893), pp. xlix-l, lxi-lxii, lxxxv-lxxxvi et ciii (à ce dernier endroit, c’est Gaston Paris qui, dans une étude spéciale sur les Chansons du roman, approuve les conclusions de M. Servois, rectifiant ainsi son ancienne opinion, exprimée dans son ouvrage La Littérature française au moyen âge, 2e éd. [1890], p. 83, selon laquelle le Roman de Guillaume de Dole aurait été écrit vers 1210). Cf. la 3e édition (1905) de la Litt. franç. de G. Paris, p. 88.
  188. Voy., pour cette date, Fr. Kraus, Über Girbert de Montreuil und seine Werke (1897), p. 5. G. Paris, La Littérature franç., 3e éd, (1905), pp. 88 et 277, dit : vers 1225.
  189. Éd. crusilliée.
  190. L’éditeur du Roman de la Violette (ouvr. cité, p. 43, note 2), qui ne connaissait pas encore l’existence de notre chanson de geste sur Florence de Rome, croyait que Gerbert de Montreuil faisait allusion au Dit de Flourence de Romme, qui n’est que du commencement du xive siècle (voy. ci-dessus p. 3). D’ailleurs, dans ce Dit il n’est point question de la broche miraculeuse, ce qu’a déjà fait observer A. Mussafia dans son mémoire intitulé Über eine italienische metrische Darstellung der Crescentiasage (Wiener Sitzungsber., philos.-hist. Cl., t. LI [1866], p. 676, note 1).
  191. C’est d’autant plus probable que dans le Comte de Poitiers, source directe du Roman de la Violette, la scène du meurtre ne se trouve pas.
  192. Voy., pour la date, l’édition de W. Foerster et J. Trost (1891), p. vii.
  193. Cf. Gui de Bourgogne, éd. Guessard-Michelant (1859), p. ix.
  194. Pour la date d’Yde et Olive, voy. L. Gautier, Les Épopées françaises, t. III² (1880), p. 742.
  195. Voy. R. Wenzel, Die Fassungen der Sage von Florence de Rome (1890), pp. 15, 25-26, 30-31, 50-51 et 60.
  196. Voy., pour la date du poème, G. Paris, Rom., XIX, pp. 320 et 332. Comme la date n’a pu être rigoureusement fixée, il est encore possible de placer la composition de la Naissance du Chevalier au Cygne dans le premier quart du xiiie siècle.
  197. Les vers cités demandent quelques corrections : v. 3098 : Galant (il s’agit du célèbre forgeron mythique) ; point à la fin du v. 3100 et virgule à lafin du v. 3101 ; v. 3106 : forpaïsant ; v. 3110 : doné pour done ; il y a peut-être une lacune après le v. 3099, car La ne va pas bien avec ce qui précède. Cf. G. Paris, Rom., XIX, pp. 329 et 333, note 4.
  198. Garfile peut être une faute de copiste pour Garsire, ou plutôt Garsile, comme le roi grec est appelé dans le remaniement Q.
  199. H. Pigeonneau, Le Cycle de la Croisade et de la famille de Bouillon (1877), p. 170, note 1. Cf. Cr. Nyrop, Sioria dell’epopea francese nel medio evo, trad. Eg. Gorra (1886), p. 210, note 1.
  200. Nous ne voudrions pas admettre avec G. Paris (Rom., XIX, p. 333, note 5), même à titre de simple possibilité, l’hypothèse qu’il aurait existé une version de notre roman où Milon devenait l’époux de Florence.
  201. Cf. R. Wenzel, Die Fassungen, etc., pp. 38, note 1, et 60.
  202. Cf. ci-dessus p. 102, note 4.
  203. Dans la Naissance du Chevalier au Cygne il y a Garfile (voy. ci-dessus p. 103, note 2). Le nom de Garsile se rencontre également dans la chanson d’Otinel (milieu du xiiie siècle) ; cf. ci-dessus p. 31, note 3.
  204. Dans le monde des folkloristes, ce conte a longtemps été désigné sous le nom de conte de Crescentia, nom qui nous a paru peu approprié, parce que ce n’est que dans une faible partie des versions du conte que l’héroïne porte le nom de « Crescentia ».
  205. P. 286 s. (« Florentia von Rom »).
  206. Svenska Folkböcker, t. I (1845), p. 264 ss. ; t. II(1848), p. 6 s. (« Hildegardis och Talandus »).
  207. Gesammtabenteuer, t. I (1850), p. Cs.(« Crescentia »).
  208. Danmarks gamle Folkeviser, t. I (1853), p. 195 ss. et 203 ; cf. t. III (1862), p. 782, et t. IV (1885), p. 730 (« Ravengaard og Memering »).
  209. Éd. de la Kaiserchronik, t. III (1854), p. 896 ss. et 910 (« Narcissus oder Crescentia »).
  210. Dans les Sifzungsberichte der phil.-hist. Classe der Kais. Akad. der Wiss. (Vienne), t. LI, p. 589 ss.
  211. Acta Societatis Scientiarum Fennicæ, t. XXXIV, no 1,
  212. Ouvr. cité, t. I, p. 203 ; t. III, p. 782,
  213. Ouvr. cité, p. 680 s.
  214. Voy. Zs. der Deuischen morg. Ges., t. XXI (1867), pp. 536-538 (« Geschichte von der Chôrschîd und dem Utârid »).
  215. Voy. G. Rosen, Tuti-Nameh, t. I (1858), pp. 89-108 (« Geschichte der Merhûma ») ; M. Wickerhauser, Die Papageimärchen (1858), pp. 50-56 (« Die keusche Merhuma ») ; X. Marmier, Contes populaires de différents pays. Deux, série (1888), pp. 165-177 (« La Vertu d’une femme »).
  216. Voy., pour I (version Montague), l’édition princeps de J. Scott dans ses Arabian Nights Entertainments, t. VI (1811), pp 396-408 (« Adventures of the Cauzee, his Wife etc. ») ; Éd. Gautier, Mille et une Nuits, t. VI (1823), pp. 406-418 (« Aventures d’un Cadi et de sa femme ») ; pour II (version Boulac), A.-E. Zinserling, Der Tausend und Einen Nacht noch nicht übersetzte Mährchen, Erzählungen und Anekdoten, t. I (1823), pp. 268-270 (« Die tugendhafte Israelitin ») ; G.-S. Trébutien, Contes inédits des Mille et une Nuits, t. III (1828), pp. 422-424 (« La Vertueuse Israélite ») ; pour III (version Breslau), J. Payne, Tales from the Arabic, t. II (1884), pp. 5-16 (« Story of the Pious Woman accused of Lewdness »).
  217. Voy. pour cette version, apparentée à la version arabe Boulac, l’édition de Wilmersdorf (sans date), chap. 203, etla traduction française dans notre étude sur le Conte de la femme chaste, etc., pp. 97-99.
  218. Voy. W. Radloff, Proben der Volkslitteratur der Türkischen Stämme Süd-Sibiriens, t. IV (1872), pp. 141-145 (« Das Weib als Fürst »). La version tatare est apparentée de près à la version arabe Breslau.
  219. Versions Montague et Boulac.
  220. Version Montague.
  221. Version Breslau.
  222. Voy. notre traduction dans l’ouvr. cité, pp. 99-111. (« Histoire de l’Arabe, de sa femme Ouriya et de son frère »). L’original se lit dans le ms. Londres, Brit. Mus. Or. 237, fol, 117 b. Il en existe également une traduction turque manuscrite (Londres, Brit. Mus. Add. 7883, fol. 194 a).
  223. Voy. l’édition de 1729, t. V, pp. 241-295 (« Histoire de Repsima »). Outre des réimpressions et des traductions anglaises et allemandes des Mille et un Jours, il faut mentionner des « livres populaires » suédois sur la belle Repsima et un drame en trois actes, basé sur l’épisode du meurtre, publié à Lausanne en 1767, sans nom d’auteur (l’auteur en était Mlle Bouillé, morte en 1816 à Lausanne), sous le titre de Repsima, essai d’une tragédie domestique.
  224. Voy. l’analyse qu’en donne J. Vinson, Le Folk-lore du pays basque (1883}, pp. 344-345 (« La princesse de Cazmira »}. Cette pastorale est probablement fondée directement sur le conte de Pétis de la Croix.
  225. Voy. J.-G. von Hahn, Griechische und Albanesische Märchen (1864), t. I, pp. 140-148 (« Von der Frau, die Gutes thut und Undank erfährt »).
  226. Dans la Kaiserchronik.
  227. Voy, notre ouvr. cité, pp. 111-116. Cette version a été racontée en anglais par Fr. Douce, Dissertation on the Gesta Romanorum (Illustrations of Shakspeare, etc., 1807, t. II, pp. 416-420).
  228. Voy. l’édition des Gesta Romanorum de Wynkyn de Worde (vers 1510-1515), n° 40 (le seul exemplaire connu de cette édition se trouve à St. John’s College, Cambridge), et Ch. Swan, Gesta Rom. (1824), t. X, pp. cxiv-cxxxii, ainsi que Sir F. Madden, The old English version of the Gesta Romanorum (1838), pp. 251-260 (« Merelaus the Emperour »).
  229. Voy. F.-J, Furnivall, Hoccleve’s Works, t. I (1892), pp. 140-173 (« Fabula de quadam Imperatrice Romana »).
  230. Voy. l’édition des Gesta Romanorum par H, Œsterley (1872), pp. 648-653 (« De Octaviano qui super omnia uxorem dilexit », etc.).
  231. Voy., pour I, Fabeln aus den Zeïten der Minnesinger (1757), pp. 262-271, et H.-F. Massmann, éd, de la Kaiserchronik, t. III (1854), pp. 913-916 (« Von Octaviano dem chaiser » etc.) ; pour II, l’édition des Gesta Romanorum par J.-G.-Th, Grässe (1842), t. II, pp. 152-159 (« Vom Kaiser Octavianus »).
  232. Voy. ci-dessus, p. 104.
  233. Ms. Paris, Bibl. nat., f. lat, 14463, fol. 36 ro a.
  234. Voy. les rédactions données dans notre ouvrage, cité ci-dessus, pp. 116-128. Les rubriques du miracle varient ; celle du ms. Bibl. nat., f. lat. 14463 est : De pudicitia et tolerantia cuiusdam imperatricis. À ces rédactions se rattache également, avec certaines modifications de détail, une version publiée par M. Louis Karl (Karl Lajos) dans la revue hongroise Ethnographia, année 1908, à la fin d’un article intitulé Arpádháqi Szent Erzsébet és az üldözätt ártatlan nö mondája (Sainte Élisabeth, de la Maison d’Arpad, et la légende de la femme innocente persécutée). La version imprimée, qui s’arrête avec la guérison du premier lépreux, est tirée du ms. Cambridge Univ. Libr. Mm. 6. 15, fol. 149 a, et porte la rubrique : De Ysabella imperatrice qualiter Beata Virgo Maria post multas tribulationes ei apparuit in insula. « Ysabella », c’est probablement sainte Élisabeth de Hongrie (1207-1231), qui aura été identifiée avec notre héroïne à cause de sa piété, de sa compassion envers les lépreux et à cause des malheurs qu’elle endura après la mort de son mari ; Louis de Hesse, landgrave de Thuringe.
  235. Lib. VII, cap. XC-XCII (dans les plus anciennes éditions, où il y a un livre de plus au commencement, c’est le huitième livre). Voy. aussi la traduction néerlandaise (Spiegel Historiael) de
  236. Voy. A. Lecoy de la Marche, Anecdotes historiques, légendes et apologues tirés du recueil inédit d’Étienne de Bourbon (1877), pp. 1115-117.
  237. Voy. l’unique édition sans date (probablement de l’année 1480) ni pagination (c’est le fol. 59 ro).
  238. Voy. notre ouvr. cité, pp. 149-150. Sur la valeur de l’attribution de l’ouvrage à Étienne de Besançon, voy. l’article de J.-A. Herbert dans The Library, 1905, janv. : The Authorship of the « Alphabetum Narrationum ». Il existe aussi des traductions anglaise (Early English Text Society, Orig. Series 126 et 127 [1904-1905], pp. 447-450 [n° 672] et catalane (Recull de eximplis etc., Barcelone, t. II [1888?], pp. 201-206) de la version de l’Alphabetum narrationum.
  239. Voy. notre ouvr. cité, pp. 150-151.
  240. Voy. sous Castitas, n° 6.
  241. Premier miracle. Dans la réimpression de Bonaventura Elers, intitulée Discipulus redivivus (1728), c’est le no 635.
  242. Placée parmi les Sermones quadragesimales « in secundo Sabbato quadragesime » sous la rubrique générale : « Quod Maria est aduocata nostra ».
  243. Troisième exemple de la « distinctio quarta ». Voy. aussi la refonte du Spec. exempl. par Johannes Major (mort en 1608), intitulée Magnum Speculum Exemplorum.
  244. Voy M. Méon, Nouveau recueil de fabliaux et contes inédits, t. II (1823), pp. 1-128. Une traduction espagnole en prose du xive siècle a été publiée par A. Mussafa dans les Sitzungsberichte der philos.-hist. Classe der kais. Akad, der Wissenschaften (Vienne), t. LIII (année 1866), pp. 508-562.
  245. Voy. notre ouvr. cité, pp. 129-149.
  246. No XXIX (éd. G.-F. Warner, 1885).
  247. Voy. notre ouvr. cité, pp. 151-161. Cette version a été racontée en prose par P.-J.-B. Le Grand dans ses Fabliaux ou Contes du XIIe et du XIIe siècle, t. V (éd. de 1781), pp. 164-169.
  248. Voy. Monmerqué-Michel, Théâtre Français au Moyen Âge (1839), pp. 365-416 ; Paris-Robert, Miracles de Nostre Dame par personnages (1879), t. IV, pp. 237-313. :
  249. Adeleide Reyne de Hongrie (Dernières Œuvres, contenant plusieurs Histoires galantes, Amsterdam 1708, pp. 66-102).
  250. Livre II ; miracle 1er.
  251. L’Urania overo La Costante Donna (Naples 1616).
  252. La historia di Flavia Imperatrice (nombreuses éditions à partir de 1624). Il y en a une dramatisation de Francesco Beverini : La Flavia Imperatrice (Palerme 1669), et peut-être une autre de Carlo Musarra : Santa Flavia (Venise 1652), signalée par Allacci (Dramm., éd. de 1755, col. 361, 4).
  253. Voy. Scelta di curiosità letterarie inedite o rare dal secolo XIII al XVII in Appendice alla Collezione di Opere inedite o rare, n° 159, pp. 1-67, et l’analyse donnée par Michele Caffi, Dell’Abbazia di Chiaravalle in Lombardia (1842), pp. 110-111. IT est probable que l’Historia della Serenissima Regina di Polonia (xvie siècle), signalée par Gamba, Delle novelle italiane in prosa Bibliografia (2e éd., 1835, p. 143), est une variante de cette même version de Guglielma.
  254. Voy. Al. d’Ancona. Sacre Rappresentazioni, t. III (1872), pp. 208-234. Il existe des reproductions postérieures et un remaniement en prose (« L’Innocenza svelata in Santa Guglielma », Venise 1720) du drame sacré d’Antonia Pulci.
  255. Voy. A. de Nino, Usi e costumi abruzzesi, t. III (1883), pp. 153-156 (« Favola gentile »).
  256. Voy. Sitzungsber. der philos.-hist, Classe der Kais. Akad. der Wiss. (Vienne), t. LI (année 1865), pp. 589-692 (« Del ducha d’Angiò et de Costansa so mojer »).
  257. Voy. Scelta di curiosità letterarie inedite o rare dal secolo XIII al XLX, t. I (1867), pp. 31-79.
  258. Cette version galicienne a été la source immédiate de la version espagnole mentionnée ci-dessus, p. 120, note 1.
  259. Voy. l’éd. de l’Académie Royale d’Espagne, t. II (1889), pp. 7-12.
  260. Voy. Th. Braga, Floresta de varios Romances (1869), pp. 104-149 (« Historia da Imperatriz Porcina »).
  261. Patraña 21 (voy. B.-C. Aribau, Biblioteca de autores españoles, t. III [1849], pp. 162-164).
  262. Voy. B.-C Aribau, Biblioteca de autores españoles, t. XVI (1851), pp. 260-264 (« La peregrina dotora »).
  263. Éd. de 1474 (Cologne), fol. 85 vo.
  264. Voy. l’éd. de A. Keller, t. VIII (1874), pp. 131-160 (« Die unschuldig keyserin von Rom »).
  265. Voy. A. Keller, Fastnachtspiele aus dem fünfzehnten Jahrhundert, t. III (1853), pp. 1139-1149 (« Ein liepleich history von groszer schone, gedult und kuscheit einer edeln keyseryn »). Une traduction bas-allemande de la version de Rosenblüt a été imprimée à Magdebourg en 1500 (voy. G. Milchsack dans Arch. f. Litteraturgesch., XI, 169).
  266. Voy. notre ouvr. cité, pp. 161-169 (« Die keiserin von Rom »).
  267. Voy. t. I (éd. de 1687), pp. 213-223 (« Wie die Mutter Gottes einer Keyserin in ihren grossen Noethen zu Hülff kommen »).
  268. Voy. Die miraculen van onse lieue vrouwe, ouvrage imprimé à Leyde en 1503, fol. p II ro.
  269. Voy. C.-R. Unger, Mariu Saga (1871), pp. 421-438 et 1104-1116.
  270. Voy. l’édition de Edw. Schröder (1892), pp. 289-314 (vers 11352-12812). Une reconstruction strophique en dialecte bas-rhénan de cette partie de la Kaiserchronik a été tentée par O. Schade, Crescentia, Ein niderrheinisches Gedicht aus dem zwölften Jahrhundert (1853), pp. 69-110.
  271. Voy. A. v. Daniels, Land-und Lehenrechtbuch, t. I, fasc. V (1860), pp. CL-CLI ; Mon. Germ. hist., Deutsche Chroniken, t. II (1837), pr. 139-143 ; Haupt-Hoffmann, Altdeutsche Blätter, t. I (1836), pp. 300-308.
  272. Voy. Mailáth-Köffinger, Koloczaer Codex altdeutscher Gedichte (1817), pp. 245-274 ; F.-H. von der Hagen, Gesammtabenteuer, t. I (1850), pp. 135-164.
  273. Voy. O.-F.-H, Schönhuth, Historie von der geduldigen Königin Crescentia (Reutlingen, s. d.), et Ein schone und wahrwafftige hystori von einer Kayserin zu Rom, genandt Crescentia (Landshut, s. d.).
  274. Voy. notre ouvr. cité, pp. 169-172.
  275. Voy. K. Reiser, Sagen, Gebräuche & Sprichwörter des Allgäus, t. I (1897), pp. 442-448 (« Hildegard und Taland »).
  276. Personnage apocryphe.
  277. a et b Nom introduit pour rehausser l’éclat d’une famille souabe connue.
  278. Voy. l’éd. de 1682, pp. 93-97.
  279. Martin Crusius, dans ses Annales Suevici (1595), pp. 316-318, paraît avoir utilisé aussi la chronique de Birck.
  280. Voy. sa Geschichte der Stadt und der gefürsteten Grafschaft Kempten, t. I (1840), pp. 20-21.
  281. Wend-Unmuth, éd, Œsterley (1869), t. II, pp. 47-52 (livre II, n° 23).
  282. Opus de Iudiciis Divinis, pars tertia, cap. XLIX, n° IX, dont il existe une traduction allemande de 1712.
  283. Vnsterbliche Gedächtnvs Der vortrefflichen Geschichten etc., pp. 184-194 (livre II, partie II).
  284. Relationes curiosæ Bavaricæ, pp. 103-106 (rel. cur. 63 : « Siegprangende Unschuld Hildegardis »).
  285. Grösseste Denkwürdigkeiten der Welt, t. V, 1re partie, pp. 161-162.
  286. Auserlesenes…. History-Buch, éd. de 1732, pp-931-949 (VI, 73). Dans la première édition, de 1687-1692, cette version manque, mais à sa place on y voit figurer une version du miracle de la Vierge (voy. ci-dessus p. 123, note 4).
  287. Abrahamische Lauber-Hütt, publication posthume (1721-1723), t. II, pp. 100-102 (VIII, 4).
  288. Der Teutsche Historien-Schreiber, n° 39.
  289. Voy. Oper. poet. pars scenica (1604), pp. 149-226. La « comédie » a été traduite en allemand par Jacob Frischlin, frère de l’auteur.
  290. Voy. P.-O. Bäckström, Svenska Folkböcker, t. I (1845), pp. 266-268.
  291. Handbuch für Reisende am Rhein von Schafhausen bis Holland, pp. 475-478 (n° XI).
  292. Rheinische Geschichten und Sagen, t. I, pp. 215-217,
  293. Deutsche Sagen, t. II, pp. 102-104 (n° 437).
  294. Voy. Chr. Kuffner, Hesperidenhain der Romantik, t. I P. 176 ss.
  295. Die Volkssagen des Rheinlandes, t. I, pp. 51-59. Geib donna plus tard (en 1836) ce même conte en prose, avec beaucoup d’amplifications de détail, dans son ouvrage intitulé Die Sagen und Geschichien des Rheinlandes, pp. 297-306,
  296. Das Nahethal in Liedern, 2e éd, (1852), pp. 122-149.
  297. Pp. 259-271.
  298. Voy. Folk-Sagor för Gamla och Unga, t. II (1843), pp. 69-75.
  299. Die Sagen des Rheinlandes, pp. 210-218. Il existe de cet ouvrage des traductions françaises et anglaises.