Fragments sur la structure et les usages des glandes mammaires des cétacés/Explication de la deuxième planche

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Appareils mamellaires des cétacés.

EXPLICATION DE LA SECONDE PLANCHE.

Cette seconde planche, portant pour titre : Appareils mamellaires des Cétacés, est composée des six figures ci-après :

Fig. I. Cette figure montre, dans leurs rapports respectifs, les méats de sortie des produits mamellaires, sexuels, urinaires et intestinaux.

Au milieu et longitudinalement sont le clitoris C, la vulve V, et plus bas l’anus A.

Sur les flancs sont les organes mamellaires M, apparens seulement dans notre sujet par un sillon étroit, à bords serrés et résistans. On a indiqué par des points la suite et les dépendances de l’organisation mamellaire, de la façon que la dissection les a fait apercevoir sous la peau et en a révélé l’essence. Ceci est indiqué à droite par le signe e, quand à gauche l’on a complété ce renseignement par l’addition, en dehors de la figure, d’un tracé également ponctué, exprimant la grandeur et la position de la glande. Le prétendu bout de sein, ou le bout urétro-mamellaire, est contenu dans le sillon chez les vierges et point au-dehors apparent, même en cicatrice : tel est le fait sur lequel Aristote et Rondelet ont insisté : ce n’était qu’un fait de premier âge.

Fig. II. Cette figure représente une portion de la région ventrale, la portion faisant face aux intestins. Voici quelles en sont les diverses couches, en commençant par la peau ou par la couche inférieure. À droite, est la tranche des tégumens, et tout en dehors une coupe sur la peau i, i, i. Les lettres j, j, désignent le panicule charnu, et, dans l’intervalle de ces deux couches, se voit l’épaisseur du lard. Les couches suivent, savoir ; en remontant de bas en haut, la peau, le lard, le muscle peaussier ou le panicule charnu, la glande b et les muscles abdominaux B, B. L’objet de la figure II est de placer sous les yeux ces circonstances ; mais on n’a pu rendre la glande apparente qu’en soulevant la masse des muscles abdominaux B, et en la renversant sur elle-même à gauche. Cela fait, la couche subjacente, G, ou la glande, se trouve visible. La dissection a été dirigée de telle manière, qu’il n’y ait que la partie médiane qui soit à nu ; les flancs sont restés couverts par les aponévroses des muscles de l’abdomen ; mais un éclairci ménagé laisse découvrir toute l’ampleur de la glande : voyez g. La glande se continue dans le long canal R, qui, dans les vierges, n’a que l’apparence indiquée dans la figure, mais qui prend chez les adultes, et surtout chez les nourrices, une ampleur considérable : c’est pour cela que nous l’avons nommé le réservoir. Ce canal aboutit, en traversant la peau, dans le sillon mamellaire, et tout au fond du sillon est le bout urétral u. L’on a tiré avec des nérines et avec violence ce sillon mamellaire, ce qui a fait passer l’espace mamellaire à la configuration d’un lozange, et a permis par suite d’apercevoir le fond de la cavité et le petit organe u.

Fig. III. Les deux figures précédentes ont été réduites de moitié ; cette troisième est de grandeur naturelle. Les mêmes lettres s’appliquent aux sujets analogues : G est la glande, R le réservoir, et M le sillon mamellaire ; mais celui-ci est ouvert et préparé par la dissection de façon que le bout urétro-mamellaire u soit parfaitement apparent. Le réservoir a été fendu sur la ligne médiane, et étalé au moyen d’épingles, pour faire voir ses follicules intérieures, tout son tissu muqueux et les bouches assez spacieuses des glandules de Brunner. Un orifice de communication avec l’intérieur de la glande se voit en g. Le bout, u, est bordé de papilles.

Fig. IV. Cette figure est de grandeur naturelle ; elle représente l’état du sillon mamellaire d’une partie envoyée à Paris, de Saint-Brieuc, par M. Le Maout[1], ancien pharmacien. Cette pièce est venue, avec beaucoup d’autres provenant de l’échouement de 27 dauphins globiceps. L’expéditeur a pris sur la plage plusieurs morceaux qu’il a placés confusément dans un tonneau, et sans user des précautions ordinaires de conservation. Parvenus à Paris dans un état de putréfaction complète, l’on n’a pu s’attacher qu’à un seul objet, à cause de l’importance de sa révélation, à l’objet de la fig. 4. Je dois ajouter que les deux côtés étaient semblables, et qu’il est à présumer que l’entassement et la décomposition des sujets n’auront apporté que peu de changemens aux rapports des parties.

Quoi qu’il en soit, j’ai trouvé tout le sillon, M, dans un état singulier de mollesse : ses bords sont raides dans le jeune âge ; je les ai là trouvés[2] non plus droits, mais sinueux et sous une apparence de bourrelets. L’afflux sanguin aura-t-il occasioné cette métamorphose ? C’est à peu près dans le centre qu’existe très visiblement le bout urétro-mamellaire, u, lequel est circulaire, large et fort peu voûté. Le méat excréteur ou la sortie du canal montre une fente, Lett. or, unique et longitudinale d’une à deux lignes d’ouverture : psm désigne la peau extérieure au sillon mamellaire.

Il est parvenu de la baie de Talberg, près de Tréguier, par les soins de M. Le Maout père, beaucoup de renseignemens contradictoires, entre autres, le fait démenti dans une dépêche postérieure, et où l’on affirmait qu’un petit dauphin était encore suspendu à la tétine de sa mère. Le directeur des douanes de Saint-Malo, M. de Carrey, m’en avait écrit et n’y trouvait qu’une historiette extrêmement agréable dans le genre des Contes de Perrault (Lettre sous la date du 9 mars). Il y avait eu sans doute réminiscence chez M. Le Maout, d’une allégation de ce genre dans le sein de l’Académie des sciences, qui fut publiée et aussi le lendemain démentie dans les journaux. Un autre renseignement fourni par les dépêches de la côte de Bretagne, c’était que des bouts de sein, essayés sur le frais, laissaient passer le lait par plusieurs petits orifices. La pièce envoyée par M. le Maout contredit cette assertion : elle s’accorde au contraire et avec le bout de sein de baleine par Ruisch, fig. 5, et avec les remarques plus anciennes de J. D. Major, et enfin avec mes propres observations.

M. Bords du sillon mamellaire renflés, tortueux et disposés sous une apparence de bourrelets.

u. Le bout urétro-mamellaire, accru et prolongé, au point de former une légère saillie entre les bords tortueux du sillon.

or. L’orifice intérieur du réservoir, l’unique pertuis, par où le lait est éjaculé.

psm. Une portion cutanée enceignant le sillon mamellaire.

Fig. V. Bout urétro-mamellaire d’une baleine.

Cette figure donne colossalement, en raison du volume considérable des baleines, le même bout urétro-mamellaire que nous venons de signaler à l’égard des figures 2, 3 et 4, sauf que cet organe u est, dans nos figures 2 et 4, vu de face, et que dans la figure 5 il est montré de profil. Les mêmes lettres s’appliquent aux détails correspondans.

Le trajet du lait, ductus lactiferus, qui va s’enfoncer entre les couches musculaires, est ici indiqué par deux lignes ponctuées, Lettre r.

Fig. VI. Le relief de la mamelle d’une femme.

or, or, or. Multiples méats excréteurs.


  1. J’ai reçu d’un de mes anciens disciples, M. Emmanuel Le Maout, une lettre, sous la date du 12 mars 1834, écrite de Guingamp, Côtes-du-Nord, où, s’élevant avec force contre l’esprit et les termes de la correspondance des membres de sa famille au sujet des Dauphins échoués dans le voisinage de Tréguier, il signale cette inconvenance et déclare repousser loin de lui la responsabilité d’une aussi blâmable attaque.
  2. Je me suis, mais inutilement, rendu attentif à cet état de choses, pour y rechercher, le cas d’une trace de fatigue en raison de la fréquence des approches. Car c’est le court moment d’union, un acte phénoménal analogue, des circonstances semblables dans l’action, et vraiment tout ce qui se passe dans l’approche du coq et de sa poule, qui réalise l’acte de la lactation des Cétacés : mêmes instincts, besoin, vigueur, prestesse, éjaculation et absorption du liquide éjaculé, dans la semi-conjonction des Cétacés nourrices et de leurs petits.