Gaspard de la nuit (éd. 1920)/Le Bibliophile

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Livre II
Gaspard de la nuitMercure de France (p. 88-89).


X

LE BIBLIOPHILE


Un Elzevir lui causait de douces émotions ; mais ce qui le plongeait dans un ravissement extatique, c’était un Henri Étienne.
Biographie de Martin Spickler.


Ce n’était pas quelque tableau de l’école flamande, un David Téniers, un Breughel d’Enfer, enfumé à n’y pas voir le diable.

C’était un manuscrit rongé des rats par les bords, d’une écriture tout enchevêtrée et d’une encre bleue et rouge.

— « Je soupçonne l’auteur, dit le bibliophile, d’avoir vécu vers la fin du règne de Louis XII, ce roi de paternelle et plantureuse mémoire.

» Oui, continua-t-il d’un air grave et méditatif, oui, il aura été clerc dans la maison des sires de Chateauvieux. »

Ici il feuilleta un énorme in-folio ayant pour titre : le Nobiliaire de France, dans lequel il ne trouva mentionnés que les sires de Chateauneuf.

— « N’importe, dit-il un peu confus, Chateauneuf et Chateauvieux ne sont qu’un même château. Aussi bien il est temps de débaptiser le Pont-Neuf. »