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539. Le jour est passé et le soir venu ; la nuit est à son milieu, et l’obscurité s’est épaissie. Alors il y eut un grand bruit et un grand mouvement de moines, de chanoines, de simples clercs. La reine s’en va pieds-nus au moutier. Girart se leva et vint là. Auprès d’un autel faiblement éclairé, sous une arcade, il la trouva priant. Il se glissa tout près d’elle, et ne demeura point muet : « Dame, pour l’amour de Dieu qui fait miracles, et pour l’amour des saints que vous avez requis, et pour l’amour de Girart qui te fut engagé, dame, je te crie merci pour que tu me viennes en aide ! » La reine lui dit : « Brave homme barbu, que savez-vous de Girart ? qu’est-il devenu ? |
E quant ele lo tec coinut laſſaz
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540. — Dame, pour tous les saints que vous priez et pour l’amour de Dieu que vous adorez, et par cette vierge dont, il naquit, si vous voyiez ici le comte Girart, dites-moi, reine, qu’en feriez-vous ? » La reine répond : « Brave barbu, vous faites grand péché en me conjurant[1]. Je voudrais avoir donné trente cités pour que le comte fût vivant et eût paix et toute la terre dont il a été dépouillé. » Alors Girart se rapprocha d’elle et lui bailla l’anneau, et dit : « Voyez ! je suis ce Girart dont vous parlez ! » Et, quand elle tint l’anneau, elle le reconnut bien. Il n’y eut Vendredi-Saint qui tînt : sur le lieu Girart fut sept fois baisé. Elle appela Aïmar, clerc lettré : « Cet homme est de mon pays, et sa famille est alliée à la mienne. Cherchez-moi Bienassis, amenez-le-moi. » Et le clerc répondit : « Volontiers. » Il y alla et la reine fit éloigner ses damoiselles. |
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541. Elle prit Girart par le col et le baisa souvent, car elle l’aimait, et le tira en un coin, sous l’arcade, et lui demanda tout ce qu’elle voulait ouïr ; et, pendant qu’il contait, elle avait grande douleur, |
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542. « Sire, où est ma sœur ? — Dame, là dehors en l’hôtel d’Hervieu, l’aubergiste. Jamais on ne vit dame de sa valeur : de mille vies je n’aurais pas la moindre, mais elle m’a sauvé par sa douceur, par son bon conseil, par son amour ; c’est elle qui m’a fait venir ici, malgré mes craintes. — Sire, ne vous troublez pas, car j’ai pour moi la fleur du conseil de la cour de l’empereur. Je leur ai tant donné de richesses et d’argent, que les meilleurs d’entre eux me sont tous dévoués. Et ne cherchez pas d’autre protection, si je ne réussis pas à vous secourir en ce besoin, car je fais de mon seigneur ce que je veux. » Elle appela le chantre Bienassis, du moutier Sainte-Croix : « Logez ce pèlerin, lui et sa femme. Il est de mon pays, je m’intéresse à lui. Nos parents sont du même lignage. Et faites cela si secrètement qu’au dehors les mauvais plaisants n’en sachent rien, ni chevalier, ni sergent mauvaise langue. — Volontiers, » répond-il, et, plein de joie, il se hâte de conduire Girart dans sa meilleure chambre. La reine y entra pour voir sa sœur, tandis que son escorte restait au dehors. Je ne vous conterai pas la douleur, les pleurs, les paroles qu’il y eut entre eux : la reine ne s’éloigna qu’au jour. |
Anz quaoreſt la croiz o dex fu mis
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543. Ce fut le jour du vendredi saint. La reine appelle l’évêque Augis : « Sire, pour Dieu, priez le roi et ses amis de faire grâce à ces malheureux qu’il a déshérités et réduits à la misère, qu’il pardonne toute rancune à ses ennemis, à tous ceux, morts et vivants, à qui il en veut. » L’évêque fait à sa volonté et parla à Charles en homme habile. Avant d’adorer le bois de la croix où Dieu fut crucifié, le roi lui octroya toutes ses demandes, et accorda le pardon qui lui était demandé. La reine envoya dire chez Bienassis que Girart peut changer ses larmes en rires joyeux, car un jour sa terre lui sera rendue. |
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544. Le lendemain fut le samedi, veille de Pâques : le roi était baigné, tondu et rasé. La reine avait revêtu des pailes de soie tels que jamais on n’en vit meilleurs, soit rouges, soit foncés. Elle s’approcha du roi et doucement elle lui dit : « Sire, écoutez un songe qui ne se vérifiera pas. Cette nuit, avant le jour, il m’a semblé voir le comte Girart venir par une route, entrer ici dedans par cette porte, et jurer sur les saints, comme homme loyal, que jamais, tant qu’il vivrait, il ne vous viendrait par lui trouble ni mal. Ta salle était tendue de dossiers[2] neufs, de pailes, de tapis, de housses, et il était le puissant sénéchal de ta cour. — Hé Dieu ! » dit le roi, « que ne l’est-il ! Je voudrais qu’il fût vivant et sain et sauf. Et pourtant il m’a fait une mortelle guerre, et m’a causé, à moi et aux miens, mille douleurs poignantes ! |
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545. — Sire, » dit la reine, « accordez-moi un don : c’est que j’envoie savoir s’il est vivant ou non. Car, l’autre jour, j’ai entendu dire au vieux Droon[3] qu’il était encore vivant dans le royaume d’Oton. Roi, laisse le venir en ta maison, et, pour Dieu et pour moi, pardonne-lui, et il te servira à éperon[4] ; car il est ton homme, le meilleur de ton royaume. » Et elle s’agenouilla et, lui prenant le pied, le lui baisa. Le roi la relève, contrarié ; il ne lui dit pas non, mais lui accorde sa demande, pensant bien que Girart avait péri sous Roussillon, là où il fut blessé à la poitrine[5]. Mais le lendemain, l’accord étant fait, il regretta bien ce qu’il avait fait. |
Leſ contes ot mandaz e les marchis
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546. Le lendemain, on célébra la Pâque. Le roi ouït la messe à Sainte-Croix. Quand il eut porté couronne et fut sorti de l’église, on demanda l’eau[6] et on s’assit à table. Et quand on eut mangé, midi étant passé, on étendit par la salle des tapis neufs et dessus on plaça deux fauteuils d’or massif. Charles, le roi de France, s’assit en l’un et fit asseoir la reine en l’autre. Les comtes et les marquis, mandés par lui, étaient présents. Le roi se leva et s’adressa à tous : « Le comte Girart, qui a été banni, vous avez tous bien ouï dire qu’il est mort. Pardonnez-lui, tous ceux d’entre vous à qui il a fait tort : son âme s’en trouvera mieux en paradis. » Tous lui ont octroyé sa demande, excepté le comte Aïmar et Henri que Girart avait défaits en bataille, tuant leur frère et faisant Henri manchot de la main droite[7]. Celui-ci pardonna à contre-cœur. La reine lui baisa la bouche et le visage. Elle appela Aïmar, celui de Paris[8] : « Prenez un vêtement de toile, du vair et du gris, et courez chez Bienassis, habillez le pèlerin et sa femme et amenez-le-moi ici. » Il obéit, et amena Girart au palais par l’escalier de marbre noir, et le fit asseoir sur les degrés de la salle, auprès du dais[9]. Sa barbe avait cru et blanchi, et lui séait très bien sur la fourrure de gris. Il ne pensait pas que personne pût le reconnaître, mais le roi le reconnut aussitôt à son large visage. De colère il devint tout noir ; il maudit, au nom de Dieu, le pardon qu’il lui avait accordé et traita la reine d’enjôleuse. |
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547. Quand le roi vit Girart, il fut pris de colère ; il appela Otoer et Bertelais, le comte Aïmar et don Estais[10]. Il les emmène à un bout de son palais : « Seigneurs, c’est bien Girart, ce félon mauvais. Sur moi s’est abattu ce coquin puant ; mais je ne crois pas qu’il s’engraisse longtemps en ma cour, car demain je le ferai pendre à Montgelais. » La reine fit signe au comte Bertelais, qui accourut aussitôt, puis, prenant le roi par la main, elle l’attira à elle : « Ah ! sire roi de France, ami, que fais-tu ? Girart vient se livrer à vous, voilà le fait. Maintenant, roi, tu peux le faire pendre, le mettre à mort. Pourtant, il est prêt à jurer sur saint Gervais et à donner mille otages qui resteront en ta cour que jamais il ne vous faillira, pour rien au monde. Je serai son garant, avec Estais et tous les chevaliers d’ici à Aix. » Par ces paroles, elle lui casse le bec, et le roi lui concède tout ce qu’elle demande, et plus encore. |
E lo reis reſpondet aiſi o cuel
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548. « Sire, » dit la reine, « puisque vous lui avez pardonné toute colère, tout ressentiment, rendez-lui une terre en plaine, une ville sans forteresse. Puis il n’y aura personne en France qui ose lui mettre le siège, à qui je ne fasse couper la tête ; et, si je ne le fais, tenez-moi pour une mauvaise femme ! » Et le roi répondit : « Je le veux bien. » Et sur-le-champ le roi lui rend la terre en plaine par un rameau [11]. |
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549. Le comte reçut du roi son fief par le rameau ; il s’inclina profondément jusqu’à ses pieds ; le roi fut assez bon pour le relever : « Seigneur, » dit Girart, « Fouque et les siens et tous les Juifs de cette cité (Orléans) dépendent de mon fief[12]. Si vous gardez le fief, j’en prendrai mon parti, mais rendez-moi Fouque, pour l’amour de Dieu. — Par mon chef ! » dit le roi, « pas si facilement. » À ce moment, des nouvelles arrivent par un courrier, et on lit les paroles que contient la lettre. |
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551. Le roi s’en alla le long de la Loire, sur la grève, ayant avec lui ses comtes et ses barons. Les deux fils d’Andefroi, les trois fils d’Aimon, les quatre d’Aimeri, qui tenait Noyon[16], et en dernier lieu Bernart, qui s’était joint à eux, excitent le roi contre le duc : « Ah roi ! quelle indignité tu fais ! Les Bourguignons ont tué nos pères, et voilà tu retiens Girart pour ton homme et lui fais pardon ! — C’est la reine, seigneurs, qui me l’a fait faire ; mais il n’est pas mon homme et ne l’a pas été depuis qu’il m’a tué de mes gens. » Le premier parla Oudin[17], qui tint Medon et trois cités le long de la mer et Port-Andon : « Votre nièce la rousse au talon contrait, la fille de Thierri, le riche baron, elle qui vous demanda Fouque, parce que les frères de celui-ci avaient tué Thierri en trahison[18], nous crûmes qu’elle se vengerait sur lui ; mais loin de là, elle en est devenue amoureuse à ce point qu’elle s’est enfuie avec lui à Oridon, en une tour bien haute, au sommet d’une colline située dans la forêt d’Ardenne sur l’Argençon[19]. Elle lui a fait des chaînes d’argent, non pas de laiton, et depuis l’a gardé en une prison où il est plus à son aise qu’un poisson dans l’eau, et elle préfère vivre avec lui[20] qu’épouser le riche comte d’Alsace[21] ou celui de Bretagne à qui vous l’avez donnée par notre entremise, et qui, à cause d’elle, nous fait maintenant la guerre[22]. Mandez-lui de vous le rendre, et, si elle dit non, nous lui donnerons l’assaut de toutes parts, car, si elle restait avec ce félon, ce serait dommage et honte pour le royaume. » Et Charles répondit : « Je vous les abandonne, mais je ne veux pas trahir Girart tant qu’il sera en ma cour et en ma demeure. Mais, une fois parti, celui qui lui fera payer ses torts, je lui pardonne. » Là se trouvait Bertran de Val-Olec, fils de Begon[23] cousin germain de Girart et de Fouque ; il n’y avait mieux emparenté dans le royaume, et son père avait été le meilleur chevalier qui fût. Les paroles qu’il entendit ne lui firent pas plaisir ; il s’éloigna sans bruit et se rendit en la chambre où était Girart et lui rapporta là ce qu’il avait entendu. |
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552. Il ne laissa dans la chambre que quatre personnes, lui compris[24]. Il prit à part la reine et Girart : « Tous les ennemis de Girart se mettent ensemble, et le roi écoute les plus malveillants d’entre eux. Si vous ne prenez conseil, si vous n’agissez prudemment, ils chercheront querelle à Aupais à cause du duc Fouque, et l’assiègeront avant qu’il soit peu. » La reine répond : « Puisse Dieu les[25] en garder et me donner les moyens de les protéger ! » |
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553. Girart eut grand’peur lorsqu’il entendit ces paroles, et la comtesse se mit à pleurer. La reine les réconforte par de bonnes paroles : « Ne vous effrayez pas, sœur, pour l’amour de Dieu. Quand le roi vous eut enlevé votre fief, il m’a donné l’oscle[26] de ma sœur : Dijon et Roussillon, le château et la tour, Châtillon, Montargon, Vaucouleurs. Je les ai si bien gardés qu’ils sont pleins de richesses. Là, du moins, vous ne rencontrerez aucun opposant. Puis je vous donnerai un cheval si vif, qu’il n’y a meilleur ni outremer, ni en deçà. En outre, j’ai avec moi un chasseur qui a été élevé chez vos parents. Il vous guidera à la brume. Moi, je vous suivrai le matin, au point du jour, menant avec moi Bertran et ma sœur. » Elle manda aussitôt le chasseur, qui s’empressa d’accourir avec les quatre fils qu’il avait eus de son épouse. |
Font li ueſtir gonele e chaperon
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554. La reine demanda au vieux Droon[27] s’il savait aller par les bois à Roussillon. « Oui, » répondit-il, « je puis aller la nuit jusqu’à Dijon. — Or, guidez-moi ce comte : vous en serez récompensé. — D’abord je serai son homme, et aussi ces quatre jeunes gens, qui sont mes quatre fils, vaillants chevaliers. » Le comte reçut leur hommage et leur promit des dons, car, par la suite, il fit du plus pauvre un riche baron. « Ne perdons pas de temps en paroles, » dit Droon. On fit vêtir à Girart gonelle et chaperon, on lui fit venir Bauçan, le cheval arabe, et le comte y monta, dehors au perron, et plaça un javelot derrière l’arçon : « Maintenant, allez à la grâce de Dieu ! [dit la reine] : le roi demande de la venaison fraîche, mais celle qu’il veut n’est pas de saison. » Ils s’en vont par la cité au galop, et, quand ils furent dans le bois, vers Saint-Fagon[28], ils chevauchèrent toute la nuit jusqu’au jour, et passèrent l’Yonne au gué de Salon[29]. Droon prit du pain, du vin, de l’avoine à Tonon[30], et, auprès d’une fontaine, près d’une ruine, il fit manger les hommes et les chevaux, et fit dormir un peu ceux qui en eurent envie. De là, ils sont allés à Roussillon. |
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555. Dans le bois, sous Roussillon, en un verger, le comte est descendu de son destrier : « Que ferons-nous là, mes compagnons ? [dit Girart.] Attendrai-je Bertran et ma femme, ou enverrai-je dans la ville un messager pour connaître les dispositions des habitants ? Car j’ai vif désir de secourir Fouque. — C’est là ce qu’il vous faut faire[31], » dit Droon. « J’irai, emmenant avec moi mon fils Auchier qui vous annoncera ce qui se passe. » |
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556. Droon entra à cheval dans le château. Il trouva mille des habitants en rondes et en danses[32], trois mille sur le grand chemin et trois cents chevaliers prenant joyeusement leurs ébats sur une esplanade[33]. Quand ils virent Droon, ils s’interrompirent : « Dis-nous des nouvelles de la cour royale, si tu en sais. — Volontiers, j’en sais de Girart, le bon et loyal comte. — Tu te moques de nous, et c’est mal. — Mais c’est pure vérité, par saint Martial ! » Et il fait lire la lettre par Begon Bigal. Et cette lettre envoie à tous le salut de la part de Girart le duc, le puissant guerrier à qui le roi a rendu son fief principal. Et la reine mande au sénéchal[34] que ceux du donjon descendent et préparent des logements à Girart. Ce fut alors une joie telle qu’on n’en vit jamais. |
E ſos fiz primerans a girart cor
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557. Quand ils entendirent parler de leur seigneur, il n’y eut si dur qui pour lui ne pleurât : « Sire, quand le verrons-nous ? Dis-nous le jour. — Vienne au-devant qui l’aime ! il vient là dehors. Et vous, chanoines et clercs de Saint-Sauveur[35], faites procession en son honneur. Vous, chevaliers, venez avec moi ! » Ils sont sortis à sa suite...[36], et tout d’abord son fils[37] court à Girart et lui conte quelle joie on fait pour l’amour de lui. Le comte monte à cheval et court à leur rencontre. Tous veulent le baiser, demaines[38], vavasseurs, bourgeois, sergents grands et petits. Il n’y a pauvre ni riche qui ne rende grâces à Dieu. |
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558. Girart baise d’abord ceux qui étaient à cheval, les plus dévoués, les brillants damoiseaux qui ont fait toute leur croissance ; puis il mit pied à terre entre les petites gens. Et, quand il les eut tous baisés et reconnus, il fut reçu par la procession et fit son offrande aux reliques. Puis, étant sorti des voûtes de l’église, il adressa à tous ses remercîments et ses saluts. Et ils lui répondent : « Sire, soyez le bienvenu, car vous nous avez sauvés et délivrés tous. Ceux qui vous avaient trahi, qui avaient excité la colère de Charles contre vous, nous les avons vaincus et tués. Vous n’avez plus à craindre d’être jamais conquis par personne. |
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559. — Bonne gent, » dit Girart, « hommes incomparables, vous m’avez toujours servi en barons. Je n’aurais pas été conquis par le roi Charles, sans la trahison de Richier[39]. Je vous demande maintenant un service à titre de faveur. C’est d’envoyer en hâte à Dijon pour que viennent les chevaliers et les gens de pied ; aussi ceux de Montargon et de Châtillon. Et vous, mes amis de Roussillon, aidez-moi dans l’entreprise pour laquelle je semons mes hommes. Il s’agit d’un besoin, pressant : de délivrer de prison mon cousin[40] Fouque. » Et tous répondent d’une voix : « Vous ne trouverez personne qui vous dise non. » Cependant Oudin et les siens ont semons leurs hommes pour aller mettre le siège à Oridon : il a envoyé à Mantes et à Noyon[41]. Des deux parts[42] on a rivalisé d’activité ; la bonne reine s’est mise à faire des largesses. Les Bourguignons sont dans la joie à cause de Girart. Il sont bien heureux de ce que Dieu le leur a rendu. |
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560. Avant que le roi eût fini de délibérer avec les siens, la reine faisait envoyer de son argent, de l’or vermeil à tous les vaillants damoiseaux qu’elle connaissait. Donner, voilà ses tours et ses créneaux ! Jamais sur d’aussi beaux yeux cils ne se sont abaissés, jamais cheveux n’ont couvert si belle tête[43]. Elle prie chacun de se tenir prêt à partir au point du jour, et commande à Bertran de l’éveiller de bon matin : « Nous verrons bien, » dit-elle, « qui seront nos fidèles. » |
Nou conte ſunt au rei tot trei lor paire Furent nec bout terri e german fraire
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561. Il y avait auprès du roi neuf comtes, fils de trois frères qui étaient neveux de Thierri. Ils vinrent au roi et lui dirent : « Sire, voici que Bertran veut vous faire la guerre. Il a l’air de vouloir se séparer de vous comme fit son père[44], car il raccole à votre cour tout ce qu’il en peut tirer à lui. Il n’y reste plus un chevalier de haut rang. » La reine répond : « Il ne les gardera pas longtemps, car je mènerai ma sœur en la terre qui lui fut donnée en douaire[45]. — Par saint Hilaire, » reprit Oudin, « si elle prend mon ennemi sous sa sauvegarde, je lutterai contre elle, de toutes mes forces. — Ne dites pas cela, frère ! » répondit la reine. Alors Pépin, son fils aîné, prit la parole ; c’était un damoiseau de quinze ans, de bonne mine, sage, courtois, plein de libéralité : « Celui qui veut faire honte à ma dame, à ma mère, n’a qu’à se tenir en garde contre moi, lui et sa demeure ! » L’empereur, l’entendant ainsi parler, garde le silence. |
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562. Au roi sont venus comtes et comtors. Avant que Girart rentre en sa terre, ils lui feront, disent-ils, voir la mort de près. Mais, grâce à Dieu, grâce à Bertran et au veneur, grâce à la reine qui sut choisir la fleur [des chevaliers]...[46] Bertran fut bon chevalier, je n’en sais pas de meilleur ; il avait vingt-cinq neveux, de grande valeur, tous fils de frère ou de sœur, aucun n’était d’un degré plus éloigné ; il avait aussi deux cents chevaliers, riches vavasseurs, tous de sa mesnie, bons combattants. Quand il entendit les nouvelles, il accourut avec eux : « Que réclamez-vous à Girart, seigneurs ? Vous croyez l’avoir trouvé comme un berger[47] ! Le roi l’a reçu pour son homme, et, ce jour-là même, avec le roi vous complotez sa mort, vous les plus hauts de la cour ! C’est chose malséante, quand on est en conseil avec un empereur, de lui donner un avis qui cause son déshonneur. Français et Bourguignons ne s’aiment pas. Mais si les Bourguignons ont tué vos pères, vous avez tué les leurs. Vous ne devez pas ranimer une si vieille querelle. — Bertran, » dit la reine, « pas de colère ! Puisque le roi et le plus grand nombre des siens y sont opposés, ne prenez pas Girart sous votre conduite. Mais je rendrai à ma sœur son douaire, et, si le comte y vient pacifiquement, elle l’hébergera, comme celui qui est son mari, et moi je la guiderai demain au jour, menant avec moi mon fils aîné. — Par mon chef ! » dit le roi, « pas même le cadet ! — Et j’emmènerai Bertran, qui m’est dévoué, qui, par ton congé, tient de moi son fief. » De colère le roi changea de couleur, mais il se tut, ne voulant pas découvrir ses mauvais desseins. |
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563. Oudin prit le roi à part, loin des autres. Il s’adressa à ses cousins et ses amis : « Ce Français métis, demi-bourguignon[48], nous montre ici l’orgueil d’Antoine[49]. Roi, la reine sait si bien vous oindre par ses paroles, que vous voilà tout retourné. C’est un don trop grand que du Rhin au Groing[50]. On voit bien qu’il ne tient guère à sa terre, celui qui laisse sortir de sa main un fief pareil. |
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564[51]. — J’ai fait une sottise, » dit le roi, « cela peut arriver : c’était après le vin, non pas à jeun. Je ne veux pas perdre cent ni mille pour un ; mais je trouve bon que vous en vouliez à Fouque. J’enverrai à Aupais Berart Brun, pour qu’elle m’envoie Fouque à Aix[52] ou à Laon. Et, si elle refuse, je donne à chacun le droit de lui abattre son château, de lui enfoncer et démolir sa tour et ses remparts. » Tous ensemble le remercient. |
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565. La reine se leva au point du jour ; elle et sa sœur montent sur des palefrois, elles sortent d’Orléans suivies de cinq cents chevaliers dont le pire était vassal courtois, et qu’elle avait su s’attacher[53]. Traversant les embûches préparées contre Girart, ils sortent du bois et de l’Orlenois. La reine prit logement [pour la nuit] en Herupois[54], et dit à Bertran de vouloir bien chevaucher la nuit, car il y a presse : « Portez à Aupais ce bref, soyez mon messager. Je lui donnerai Fouque que je lui ai promis. Pour lui, l’orgueil des Français[55] me veut grand mal, et aussi pour toute ma terre, par la foi divine ! Mais je ne veux pas qu’elle tombe entre les mains d’Oudin ni du roi. Et dites-moi à Girart de n’y pas aller. J’y ai envoyé, en cas de besoin. Qu’il n’y ait personne qui ne prenne les armes, sauf les clercs, les moines et les bourgeois âgés. » Bertran s’inclina en remerciant et partit au galop. Il trouva Roussillon bien gardé par cinq cents chevaliers aux heaumes tout frais, et par dix mille sergents ou bourgeois, tous empressés à faire tout ce que Girart leur demande. |
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566. Bertran s’entretient avec Girart et dit à Droon : « Portez cette lettre à Aupais et à Fouque ; qu’ils fassent tout ce qui s’y trouve marqué. J’irai après vous à Oridon ; avec moi viendront mes compagnons, et les hommes de ce fief, ceux aussi de Dijon. Faites conduire Baudouin et le comte Odon, deux lieues en plaine dans le bois d’Arton[56], et de là aux barrières près de l’Argenson[57]. Dans le bois resteront tous les gens de pied. — J’irai, » dit Girart, « non pas vous. — La reine vous mande de n’en rien faire présentement, pour ne pas fournir un grief au roi ; elle prend tout sur elle. » Tout étant ainsi réglé, [Bertran partit au galop[58]], Bertelais de Brian[59] se rendit auprès de Gui, le fils de Fouchier, le riche larron, et Droon alla, à force d’éperons, à Oridon ; mais le messager de Charles[60] y fut le premier. |
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567. Le messager de Charles dit à Aupais : « Charles, ton oncle[61], te mande de te rendre auprès de lui à Aix : il te donnera pour mari le duc d’Alsace, ou celui des Bretons, qui est preux et aimable, qui lui a déclaré la guerre à cause de toi[62]. Ainsi la paix sera faite. Et toi, de ton côté, rends-lui Fouque. — Que je sois maudite, si je vous le rends ! » dit Aupais. — Le roi te fera guerre et tourment ; avant que le soleil se couche, il te mettra le siège ; et, quand tu verras ravager tes vergers et tes clôtures, tu ne penseras pas à embrasser Fouque. — Messager, va-t’en, c’est trop m’insulter ! » Et Berart Brun s’en va plein de colère ; il monte à cheval, part au galop et va faire son rapport à Oudin. |
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568. Le messager du roi était sorti, quand celui de Girart entra. Aupais, qui était en haut, le vit descendre de cheval. Derrière lui, à distance elle vit venir Bertran. De peur le cœur lui trembla dans la poitrine[63]. Elle fait fermer les portes, et prend les clés. « Eh bien ! qu’allez-vous faire, Fouque, cher seigneur ? je vois déjà les enseignes occuper les hauteurs ! — Je n’y sais pas d’autre remède que de me défendre, en homme qui n’a d’autre choix que de se faire tuer ou d’être pris. » Il fait couper ses chaînes[64], prend un écu, revêt le haubert, ceint l’épée. Il n’y avait guerrier qui sût mieux faire face à un adversaire. « J’aime mieux mourir, » dit-il, « que me laisser prendre vif ! |
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569. — Fouque, voyez-vous que d’enseignes flottent au vent ? Je crains que ma dame[65] me manque de foi. Fouque, j’ai fait en vous mauvaise attente ; j’y ai perdu mon temps et ma jeunesse. Pour vous, mes hommes ont été si fort indisposés contre moi, que je n’ai reçu de mon fief ni avoir ni rente. Je n’ai pas de vassaux pour vous défendre, et je vous verrai mourir, malheureuse et affligée ! » Au moment où elle se désolait ainsi, Droon crie à la porte : « Laissez-moi entrer, la belle ; je vous apporte des saluts qui vous réjouiront le cœur ! » |
La maiſnade girard qi por te uent Char meſcharniſ dazele gant (pechat fajs)
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570. Quand elle entendit Droon qu’elle connaissait, elle courut lui ouvrir la porte, et, le prenant par le poing : « Droon, quelles nouvelles ? qui sont ces gens ? — C’est la mesnie Girart qui vient pour toi, envoyée par la reine qui vous attend. — Où est-elle ? — À Roussillon. Tiens ce bref que je te présente de sa part. » De joie elle l’embrassa, en prenant le bref. « Dis-tu vrai, au sujet de Girart, sur ton salut ? — Oui certes, puisse Dieu tout puissant me protéger ! » Elle vient, toute joyeuse, à Fouque : « Fouque, je vous apporte des nouvelles qui vous plairont, de la part de Girart le duc, votre parent. — C’est mal, damoiselle, de vous moquer ainsi. » |
E quant folche loit o lui ſirais E quant il lesgardet riſ len li cais
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571. Fouque l’entend ; il se fâche : « C’est grand péché, damoiselle, de vous moquer ainsi de moi. Le comte Girart est mort ; je ne le verrai plus. » Pour toute réponse, elle lui remit la lettre scellée ; il l’ouvrit, et, quand il l’eut regardée, son visage s’épanouit. « Ce bref dit de bonnes paroles, s’il est véridique[66]. — Sire, c’est un grand avantage qui te vient, et à moi une grande joie. La reine chevauche, tandis que tu reposes. Elle cherche à faire la paix entre Girart et le roi. À Roussillon, où elle est, elle te donnera à moi, si tu vas la trouver. Mais, avant de sortir d’ici, tu me jureras par saint Gervais de me prendre pour femme. — Je te le promets, damoiselle, et je t’en donne ma foi avec un baiser. » À ce moment, arrive Bertran, montant les escaliers, avec lui cent chevaliers de sa mesnie, et Fouque, en les voyant, fut plus heureux qu’il n’avait jamais été en sa vie. |
E monte en cheual anblant mouent
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572. Bertran demanda : « Est-ce qu’il y a querelle entre vous ? — [Non, » dit Fouque, tranquillement[67]], « mais elle me demande un serment. — Sire, si elle en demande un, fais-lui-en cent. » Elle entra dans sa chapelle, en prit les reliques, et, sur un évangéliaire à la reliure d’or resplendissant, il lui a juré tout ce qu’elle a voulu. Elle embrassa Bertran et dit en riant : « Je vais prendre mari bien pauvrement ; je ne porte avec moi ni or, ni argent, ni paile, ni velours, ni pourpre, ni ornement. » Et Bertran répond courtoisement : « Mais vous apportez votre grande beauté, votre personne gracieuse ; et c’est donner un grand trésor que de rendre Fouque. Maintenant partons vite ; pas de lenteurs. Un message est venu en hâte m’annoncer que tous tes parents chevauchent pour te nuire. » Alors damoiselles et sergents se mirent à pleurer. « Et nous, que ferons-nous, chétifs, malheureux ? » Fouque, quand il les entendit, fut saisi de pitié : « Je vous octroie, » dit-il, « ce château en chasement[68], et, si vous le perdez, je vous en rendrai un meilleur. Venez à moi tous avec confiance, car je ne vous abandonnerai pas, tant que je vive. » Bertran prend Aupais par le bras, la fait descendre et la met en selle sur un cheval amblant, bon coursier. Puis il prit Cabauchan[69] par le frein, et l’offrit à Fouque, en disant : « De la part de Girart le duc, je vous présente ce cheval, le meilleur, le plus rapide que j’aie jamais vu. » Fouque saute en selle sans toucher à l’étrier, et les assistants se disent : « Voilà un homme qui a eu des geôliers à sa convenance ; ses membres ne se sont pas raidis dans la prison. » |
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- ↑ Conjurer, en droit féodal, voulait dire mettre en demeure ou sommer, au nom de la foi jurée, d’accomplir un devoir. Le seigneur pouvait conjurer son vassal, et réciproquement le vassal pouvait conjurer son seigneur ; voir, sur ce sens, Du Cange, conjurare. Ici conjurer est employé dans une acception différente : c’est mettre la personne interpellée dans l’obligation de répondre la vérité, une réponse mensongère ou évasive devenant un parjure à cause des noms sacrés qu’a invoqués l’auteur de la question. Ainsi, dans une enquête datée de 1089, un témoin est mis en demeure de déclarer la vérité sous la foi du serment. Il refuse de prêter le serment et de répondre. On l’y contraint aussitôt en le conjurant : « Isoardus et archiepiscopus dixerunt Petro Bailo ut diceret veritatem sicut ipse sciebat, ut ipse possit jurare quod ita sit. At ille noluit jurare nec dicere veritatem. Illi vero constrinxerunt eum per fidelitatem Dei et sancte Marie et sancti Marcellini et sancti Victoris, et per fidem quam eis debebat, ut verum diceret et juraret. Ille, constrictus, dixit se esse facturum quod ipsi videbant. » (Cartul. de S. Victor de Marseille, II, 563.)
- ↑ On appelait ainsi, jusqu’au xviie siècle les grandes tentures de murailles ; Du Cange, dorsale ; Cotgrave, dossier de pavillon.
- ↑ « Au comte Drogon », Oxf. L ; mais il faut admettre la leçon de P. (v. 6976). On verra tout à l’heure (§§ 553-4) qui était ce personnage dont il n’a pas été question jusqu’ici.
- ↑ C.-à-d. en qualité de chevalier, il s’agit du service militaire.
- ↑ Voy. §§ 491 et 521.
- ↑ Pour se laver les mains, comme toujours avant le repas.
- ↑ Il n’a pas été fait allusion jusqu’à présent à cet événement.
- ↑ Le clerc mentionné aux §§ 537 et 540.
- ↑ La partie de la salle où était le dais et en même temps la place d’honneur était un peu plus élevée que le reste.
- ↑ Bertelais est peut-être identique au Bertolais du § 37, mais Otoer et Estais sont nouveaux.
- ↑ Mode d’investiture ; voy. Du Cange, III, 884 c, investitura per ramum et cespitem.
- ↑ On a vu plus haut, §§ 105, 106, 113, que Fouque avait à Orléans un palais, et, § 439, qu’il tirait des juifs de cette ville des revenus considérables ; voir p. 53, n. 4. On a d’ailleurs des témoignages historiques sur l’existence d’une colonie juive à Orléans depuis les premiers temps du moyen âge. Elle est mentionnée, plus d’une fois, par Grégoire de Tours (Longnon. Géogr. de la Gaule au vie siècle, p. 179), plus tard par Raoul Glaber (l. III, ch. vii ; cf. Riant, Invent. crit. des lettres histor. des Croisades, xii). Cette colonie a dû subsister jusqu’à l’expulsion générale des juifs en 1300 ; voy. l’acte publié par M. S. Luce, Revue des études juives, II, 41-4.
- ↑ Cette tirade, où plusieurs passages sont obscurs, ne se trouve pas dans P.
- ↑ Ce nom se trouve dans Wace, Brut, v. 13201, du moins selon l’édition de Leroux de Lincy ; dans l’endroit correspondant de Geoffroi de Monmouth (X, x) il y a Lagivius.
- ↑ La leçon de L., par les destrez, peut s’entendre à la rigueur ; celle d’Oxf., per unt al trez, m’est tout à fait obscure.
- ↑ Andefroi, Aimeri, Aimon sont les neveux (§§ 107, 213) ou les fils (§ 184) du duc Thierri d’Ardenne ; les deux premiers ont péri dans les guerres contre Girart, voy. §§ 395, 396. Aimeri est, en effet, qualifié de seigneur de Noyon au § 107.
- ↑ L. Oldins, Oxf. Liudins ou Hudins, P. (v. 7074) Augiers. Cet Oudin, qui n’a pas encore paru dans le poëme, jouera bientôt un rôle considérable. Il était neveu de Thierri, voy. § 611.
- ↑ C’est la première fois qu’il est question de cette circonstance.
- ↑ Oridon est connu d’ailleurs, bien qu’on n’en ait pas déterminé la
position. Auberi le Bourguignon a pour ennemi, dans la chanson qui
lui est consacrée, un « Lambert d’Oridon » qui avait, dit le poëme
...................grant terre a justicier
Et Oridon qui siet sur le rocher
Dedens Ardenne, le boschaige plenier.
(Tobler, Mittheilungen ans Altfranzœsichen Hondschriften, 1870, p. 253.)Ce Lambert avait pour père, selon la même chanson (p. 255), Tiebert d’Orion. Orion et Oridon paraissent être deux formes, la seconde plus archaïque ou plus méridionale, du même nom. Dans Gui de Nonteuil paraît un traître appelé Tibaut d’Orion, dont le château paraît offrir une grande analogie de situation avec l’Oridon de Girart de Roussillon :
Atant es vous Tiebaut le seignor d’Orion,
D’un chastel orgueilleus sor l’eve d’Aubenchon
(Gui de Nanteuil, vv. 1145-6.)Quant à l’Argenson qui reparaît plus loin (§ 567), on pourrait se hasarder à l’identifier avec l’Armançon, qui se jette dans l’Yonne, un peu au-dessus de Joigny. L’Yonne est peu éloignée de Roussillon, voy. § 554, et Roussillon paraît être à peu de distance d’Oridon, voy. §§ 567-569.
- ↑ Le sens paraît être : « elle aime mieux avoir de lui un enfant illégitime (avoltron).... »
- ↑ Oxf. d’Ausais, L. d’Ausis, P. (v. 7087) de Reims.
- ↑ Il ne faut pas oublier que le seigneur a le droit de marier à son gré les filles ou veuves tenant fief de lui.
- ↑ Oxf. Beson, P. (v. 7099) Aimon. La leçon Begon, fournie par L., est sûrement la bonne. L’auteur a voulu rattacher ce Bertran au Begon de Val-Olei du § 385 ; mais la mention qui suit d’un lien de parenté entre Bégon et Girart est nouvelle.
- ↑ Les trois autres étaient la reine, Girart et sa femme.
- ↑ Cest-à-dire Aupais et Fouque.
- ↑ Voy. p. 17, note 4.
- ↑ C’est le chasseur mentionné au § précédent.
- ↑ Oxf. et L. « au sens Droon », simple cheville.
- ↑ Ce nom ne se retrouve plus.
- ↑ Dans Oxf. seul : le vers manque dans P. et L. a une cheville. Ce nom est peut-être corrompu. Une petite rivière qui se jette dans l’Yonne, en face de Joigny, porte le nom de Tholon.
- ↑ C.-à-d. : « il faut envoyer un messager. »
- ↑ A tresches e a bal, locution courante ; cf. Aliscans, éd. Guessard et de Montaiglon : James n’irez a tresches ni a bax (p. 196).
- ↑ Il y a un développement analogue dans Huon de Bordeaux. Lorsque
Huon arrive dans la cité de l’émir Gaudisse,
.M. paiens trove qui viennent d’oiseler
Et autres .M. qui i doivent aler.Mil en trova qui ferent les cevaus
Et autres .M. qui traient es travaus ;
.M. en trova qui juent as escas
Et autres .M. qui del ju furent mas.
.M. en trova, saciés a esciant,
Qui as puceles juent a lor talant
Et autres .M. qui del vin sont bevant.
(P. 161.) - ↑ Qui administrait pour elle le château de Roussillon.
- ↑ Il a déjà été question du moutier Saint-Sauveur au § 458.
- ↑ Devers pontor ?
- ↑ Le fils de Droon. Il est nommé dans P. (v. 7193), Auchier.
- ↑ Voy. p. 186, n. 4.
- ↑ Voy. §§ 59 et suiv. L’auteur oublie la trahison plus récente des §§ 418-28. On peut, à la vérité, adopter la leçon de P. (v. 7213) del portier, au lieu de Richiers, et rapporter cette allusion à la seconde trahison, mais voir plus loin, § 594.
- ↑ « Neveu », dans les mss., comme ci-dessus, p. 161, n. 1.
- ↑ Mantes appartenait aux fils d’Andefroi, Noyon à ceux d’Aimeri ; voy. § 551.
- ↑ Du côté de Girart et de celui d’Oudin.
- ↑ L’auteur semble oublier que le mariage de la reine Elissent remonte à plus de trente ans. En effet, l’accord conclu à la suite de la bataille de Vaubeton a duré cinq ans (§ 199) ; la seconde guerre dure aussi cinq ans (§ 416) ; enfin Girart a été banni pendant vingt-deux ans (§ 334).
- ↑ Son père était ce Bégon (§ 551) qui avait quitté Charles (§ 352).
- ↑ On ne voit pas le rapport de cette réponse avec les paroles qui précèdent. Le texte est ici peu sûr.
- ↑ Il y a ici, dans Oxf. seul, un vers que je n’entends pas : Tunant, peuder e el temor. Le sens paraît être que les ennemis de Girart eurent lieu de se repentir.
- ↑ Berger (cf. ci-dessus § 287) s’employait comme synonyme de sot, innocent, homme sans défense ; voy. les exemples du Roman de la Rose et de Bertran du Guesclin cités par M. Littré à l’historique de ce mot, et Roman de la Violette, v. 1554.
- ↑ C’est Bertran.
- ↑ Antoine le triumvir ?
- ↑ Est-ce Logroño en Espagne, dans la province de Burgos ? Cette ville est appelée « le Groing » en ancien français ; voy. Gui de Bourgogne, v. 70 ; Froissart, édit. Luce, VII, 28, etc. Il a été dit au commencement du poëme (§ 36) que les possessions de Girart s’étendaient du Rhin à Bayonne. Cet immense fief avait été concédé par le roi à titre d’alleu (§§ 31, 33).
- ↑ Laisse omise dans L.
- ↑ C’est la première fois qu’Aix-la-Chapelle est mentionné comme l’un des lieux de résidence de l’empereur.
- ↑ On a vu plus haut, §§ 560-1, par quels moyens.
- ↑ On a vu plus haut (§ 323) que le poète désignait sous le nom de Hérupois « ceux d’entre Loire et Seine ». Voici, sur la Hérupe, un texte qu’on n’a pas encore cité et qui s’ajoute au témoignage, jusqu’à présent unique, que fournit sur cette dénomination géographique, la chanson des Saxons. Il est fourni par le préambule d’une curieuse chronique du xiiie siècle : « Segnor et dames, el comencement des regnes, quant non furent mis es terres par les Grieus, sachiés que France fu premierement clamée Gale ; et bien sachiés que trés dont furent .iij. contrées Gales nomées : la première est joste les mons de Mongieu, de la trosques a Sene le vielle ; la seconde est de cha les mons trosques al Rosne, et la tierce oltre le Rosne : si fu clamée Gale li Belguene. Et en celi partie si est Hurupe, trosque et regne de Vaccée, c’est trosqu’a Gascoigne. » (Bibl. de l’Arsenal, ms. 3216, fol. cccj.)
- ↑ L’orgueil des Français était proverbial ; voy. les textes cités dans
une note de ma traduction du poëme des Albigeois, II, p. 351, n. 2.
On lit dans Aiol, v. 1157 (cf. 1771) :
François sont orgueillous, desmesuré.
- ↑ D’Aro, L., ce même bois est appelé plus loin, § 605, d’Argon.
- ↑ Voy. p. 254, n. 1, fin de la note 4.
- ↑ Dans P. seul (v. 7347).
- ↑ Bercelaie de Brie, Oxf. ; Bertelme de Bruiant, L. ; Bertelai de Brian, P. (v. 7348).
- ↑ Berart, voy. § 564.
- ↑ On a vu plus haut (§ 112) que Thierri, père d’Aupais, avait épousé une sœur de Charles ; cf. p. 187, n. 1.
- ↑ Voy. §§ 550, 551.
- ↑ Elle croit que ce sont les troupes royales qui arrivent.
- ↑ Douces chaînes, assurément, les chaînes d’argent mentionnées plus haut, § 551.
- ↑ La reine.
- ↑ On verra plus loin encore, § 624, que Fouque sait lire.
- ↑ Vers qui ne se trouve que dans L.
- ↑ On voit que la concession est faite à des personnes déjà établies sur la terre du seigneur concédant. C’est le caractère propre du chasement ; voy. ci-dessus, p. 225, n. 1.
- ↑ Oxf. et P. sont d’accord, ici, comme aux §§ 573 et 580. Au § 580 L. a balcan ; aux §§ 572 et 573 la leçon est incertaine par suite d’une déchirure dans le parchemin.