Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/ÉDOUARD Ier, roi d’Angleterre, de la dynastie des Plantagenets, surnommé Long-Shanks à cause de l’extrême longueur de ses jambes

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Administration du grand dictionnaire universel (7, part. 1p. 201).

ÉDOUARD Ier, roi d’Angleterre, de la dynastie des Plantagenets, surnommé Long-Shanks à cause de l’extrême longueur de ses jambes, né à Westminster en 1239, mort en 1307. Il était fils de Henri III et d’Éléonore de Provence. Édouard fut d’abord investi du gouvernement de la Guyenne, soutint son père contre Simon de Montfort et les barons anglais, mais fut fait prisonnier à la bataille de Lewes (1264). L’année suivante, il parvint à s’échapper, gagna sur le comte de Leicester (Simon de Montfort) la bataille d’Evesham et rendit à son père le trône avec la liberté. La soif des aventures le conduisit bientôt à Tunis où saint Louis venait de mourir ; il passa de là en Orient, et ne revint en Europe qu’à la mort de son père. Il fut couronné sans obstacle (1272) et gagna aussitôt l’affection de ses sujets par la modération, la justice et la vigilance dont il fît la base de son gouvernement. « J’observerai la grande charte, dit-il aux barons du royaume, et vous l’observerez comme moi. Je serai juste envers vous et vous le serez envers vos vassaux.» Édouard s’attacha à réprimer le brigandage, chassa des tribunaux les juges corrompus, rétablit l’économie dans les dépenses, l’ordre dans les recettes, la pureté dans les monnaies, l’égalité dans les taxes, imposa le clergé comme les laïques ; mais il se montra d’une sévérité excessive envers les juifs, que leurs richesses faisaient accuser de toutes sortes de crimes, et il en fit pendre un très-grand nombre. Aux travaux du législateur il ne tarda pas à mêler les entreprises guerrières, et si son pouvoir s’en accrut, il n’en fut pas de même de sa gloire, car l’esprit de conquête lui fit entièrement oublier l’esprit de justice. Il commença par attaquer les Gallois, vivant depuis huit cents ans indépendants au cœur de l’Angleterre, remporta plusieurs victoires sur leur chef Léolyn, qui périt en combattant, et sur le frère de ce dernier, David, qu’il eut la barbarie de faire écarteler ; condamna à mort tous les bardes du pays de Galles pour les empêcher d’appeler de nouveau la nation à l’indépendance, et partagea le pays en comtés et en baronnies sur le modèle de l’Angleterre. La reine étant venue le rejoindre au château de Caernarvon et y ayant accouché d’un fils, Édouard donna à l’enfant, son premier-né, le titre de prince de Galles, et c’est depuis lors que ce titre a été constamment porté par l’héritier de la couronne d’Angleterre. En 1284, Édouard se rendit en France pour vider un différend entre Philippe le Bel et Alphonse, roi d’Aragon, au sujet du royaume de Sicile, et ne revint en Angleterre qu’en 1289. Il eut à punir à son retour un grand nombre de juges prévaricateurs, expulsa sur la demande du parlement, en 1290, 16,100 juifs dont les biens furent confisqués. Ayant par ce moyen rempli ses coffres, il résolut de conquérir l’Écosse, que se disputaient seize prétendants. Choisi par eux pour être l’arbitre de leurs prétentions, il saisit avec empressement cette occasion, s’empare des places fortes, désigne pour régner Baliol, celui des concurrents qui lui parait le plus capable de lui livrer la liberté de sa patrie, et le force à lui prêter foi et hommage comme vassal. Mais, abreuvé d’humiliations, Baliol secoue le joug et proclame l’indépendance de la couronne. Aussitôt Édouard Ier fond sur l’Écosse, remporte une victoire sur Baliol et l’emmène prisonnier à Londres, après avoir mis des garnisons dans toutes les villes principales. La guerre ayant éclaté sur ces entrefaites entre la France et l’Angleterre, Édouard demanda des subsides au Parlement pour combattre son nouvel ennemi, et dut s’engager, lui et ses successeurs, en 1297, « à ne lever aucune taxe, à n’imposer aucune charge sans le consentement commun et la volonté libre des archevêques, évêques, prélats, comtes, barons, chevaliers, bourgeois et autres hommes libres du royaume. » Il se rendit en Flandre, mais fut forcé de retourner en Écosse où une révolte formidable contre la domination anglaise venait d’éclater sous les ordres de Wallace, le héros des montagnes. Celui-ci, après avoir écrasé les armées du roi d’Angleterre, sous les ordres du comte de Warren, avait chassé d’Écosse tous les Anglais qu’il n’avait pas fait passer au fil de l’épée. Édouard, à la tête de 100,000 hommes, se jeta peu après sur l’Écosse et remporta la sanglante bataille de Falkirk, qui le remit en possession de toutes les provinces méridionales (1298). Une nouvelle insurrection ayant éclaté sous les ordres de Wallace en 1302, Édouard eut à recommencer la conquête de l’Écosse : il couvrit ce pays de ruines et de sang pendant deux années et vainquit l’héroïque Wallace, qu’il eut la cruauté de livrer au supplice (1305). Il mourut au moment où il préparait une expédition décisive contre ce pays, soulevé de nouveau à la voix de Robert Bruce (1307), Comme guerrier, Édouard Ier a terni ses qualités brillantes par d’injustifiables cruautés ; mais il montra une sagesse éclairée dans le gouvernement et accomplit d’importantes réformes dans l’administration de la justice et des finances. De plus, il donna au Parlement le droit de consentir l’impôt, créa les juges de paix et institua la Chambre des communes. On date de son règne la naissance du gouvernement représentatif, et il a été lui-même surnommé le Justinien anglais.