Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Aali-pacha (méhémet-emin) (supplément)

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Administration du grand dictionnaire universel (16, part. 1p. 7-8).

AALI-PACHA (Méhémet-Emin), homme d’État turc, né à Constantinople en 1815, mort en 1871. Il obtint, fort jeune, un emploi dans le bureau de traduction de la Porte, s’y fit remarquer par sa vive intelligence et fut nommé, à dix-neuf ans, second secrétaire d’ambassade à Vienne. En 1836, il quitta cette ville, fit un voyage à Saint-Pétersbourg et, de retour à Constantinople, il fut nommé premier drogman de la Porte (1837). Aali devint ensuite secrétaire d’ambassade (1838), puis chargé d’affaires à Londres (1839), sous-secrétaire d’État des affaires étrangères en 1840 et ambassadeur à Londres de 1841 à 1844. De retour à Constantinople, il fut nommé membre du grand conseil, ministre par intérim des affaires étrangères (1844), chancelier du divan (1846) et cette même année ministre des affaires étrangères. En 1848, il reçut la présidence du conseil, reprit quelque temps après le portefeuille des affaires étrangères et montra dans ces fonctions une attitude pleine de fermeté, en refusant nettement de rendre à l’Autriche les réfugiés hongrois qui avaient cherché un asile en Turquie. Vers cette époque, Aali reçut le titre de pacha et la dignité de muchir. Au mois d’août 1852, il remplaça Reschid-Pacha comme grand vizir : mais, au mois de novembre suivant, il tomba en disgrâce et quitta le pouvoir. Le gouvernement de Smyrne, qu’on lui donna peu après, lui fut presque aussitôt enlevé. Toutefois, en 1854, il devint gouverneur général de Brousse et revint bientôt à Constantinople, où il fut chargé, comme président du tanzimat, de préparer les réformes dont il avait été constamment l’artisan. En même temps, il reçut le portefeuille des affaires étrangères (1654). Au commencement de l’année suivante, il alla assister aux conférences de Vienne et, au mois de juillet, il revint occuper le poste de grand vizir. Envoyé comme ministre plénipotentiaire au congrès de Paris, il y défendit avec beaucoup de talent les intérêts de son pays et signa le traité de paix du 30 mars 1856. Au mois de novembre suivant, Aali-Pacha fut remplacé au grand vizirat par Reschid-Pacha et devint peu après ministre sans portefeuille et membre du conseil d’État. Rappelé au ministère des affaires étrangères en juillet 1857, au grand vizirat en janvier 1858, il fut remplacé en 1860 dans ces dernières fonctions par Mehémet-Ruchdi-Pacha, mais il garda la présidence du tanzimat. De nouveau grand vizir en 1861, il fut remplacé au bout de quelques mois par Fuad-Pacha, qui lui donna le portefeuille des affaires étrangères, et, à ce titre, il négocia des traités de commerce avec la France et l’Angleterre. Ce remarquable homme d’État conserva dans les conseils du sultan Abd-ul-Aziz la même influence que dans ceux de son prédécesseur. Au mois de mars 1864, il présida la conférence diplomatique dans laquelle les représentants des puissances signataires du traité de Paris réglèrent la situation des Principautés-Unies. Pendant l’insurrection crétoise, Aali-Pacha reprit les fonctions de grand vizir (février 1867), et, pendant le voyage qu’Abd-ul-Aziz fit à Paris et à Londres cette même année, il fut investi de la régence. Pour mettre un terme à l’insurrection crétoise, il accorda une amnistie ; mais voyant l’inefficacité de cette mesure, il employa des moyens de rigueur envers les insurgés, puis se rendit lui-même en Crète (1868), dans l’espoir de pacifier le pays. Nommé encore une fois grand vizir, il remplissait ces fonctions lorsqu’il mourut au mois de septembre 1871. C’était un homme à l’esprit très-ouvert, très-favorable au progrès, un homme d’État très-laborieux, qui dans ses loisirs s’adonnait à la poésie. Malgré tous ses efforts, il fut impuissant à réaliser les réformes dont il comprenait la nécessité et ne put arrêter la Turquie dans la voie de la décadence et de la ruine.