Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Abd-el-kader (sidi-el-hadji-ouled-mahiddin)

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Administration du grand dictionnaire universel (1, part. 1p. 16).

ABD-EL-KADER (Sidi-el-Hadji-Ouled-Mahiddin), célèbre chef arabe, né vers 1807, sur le territoire des Hachems, aux environs de Mascara, fils du marabout Sidi-el-Mahiddin. En 1832, il commença à prêcher la guerre sainte, et, à la tête de 10,000 cavaliers, il vint assiéger Oran ; mais le général Boyer, qui commandait nos troupes, le força à battre en retraite. En 1834, il conclut avec le général Desmichels un traité qui lui constituait un véritable royaume limité par le Chélif, et dont Mascara était le chef-lieu. Plus tard il remporta contre le général Trézel un avantage qui redoubla le fanatisme des Arabes. Le maréchal Clauzel, le général Bugeaud, le duc d’Orléans avec le maréchal Valée, luttèrent encore avec énergie contre cet ennemi souvent vaincu, mais toujours infatigable et jamais abattu. Sa puissance n’avait fait que s’augmenter par suite des conditions avantageuses que lui avait faites le général Bugeaud, par le traité de la Tafna (3 mai 1837). La prise de la Smala, par les chasseurs du duc d’Aumale, en 1842, le força à se réfugier dans le Maroc, dont l’empereur Abd-er-Rahman se décida, en 1844, à attaquer les positions françaises. La victoire d’Isly, remportée par le maréchal Bugeaud, força Abd-er-Rahman à cesser de soutenir la cause d’Abd-el-Kader ; mais celui-ci trouva dans l’énergie de son caractère la force de lutter encore, soit contre le Maroc, soit contre les Français jusqu’en 1847. Après avoir vu périr dans une dernière affaire ses plus dévoués partisans, il se rendit au général Lamoricière, demandant à être mené à Saint-Jean-d’Acre ou à Alexandrie. Mais on le fit embarquer pour la France avec sa famille, et il fut détenu successivement au fort la Malgue, au château de Pau et à celui d’Amboise. Napoléon III lui rendit la liberté à l’occasion de la proclamation de l’empire. Alors il se retira à Brousse, avec toute sa suite, où il vécut dans la retraite jusqu’au tremblement de terre qui détruisit cette ville en 1855. De là il se rendit à Damas, où le massacre des Maronites servit à faire éclater sa grandeur d’âme, en lui fournissant l’occasion de protéger les chrétiens au péril même de sa vie. Aujourd’hui il habite la Mecque, lieu de sépulture du Prophète. Abd-el-Kader est actuellement âgé de 56 ans ; son visage est pâle et d’une beauté régulière, pleine de gravité et de mélancolie. Le tour de ses paupières, peint en noir, donne à ses yeux une grande expression de fatigue et de souffrance. De petites moustaches, peu fournies, et une barbe noire ; ornent sa figure. Son langage est riche en expressions métaphoriques, et les images gracieuses, qui sont un des caractères de la poésie orientale, abondent dans sa conversation : « Vous devez avoir froid, lui disait le préfet de Toulon, chargé de le recevoir. — Oh ! non, répondit-il, la chaleur de votre amitié fait fondre pour moi la glace de l’air. »

Le nom d’Abd-el-Kader est acquis à l’histoire, où il occupe une place glorieuse à côté des Judas Machabée, des Witikind, des Bolivar et de tous ceux qui ont lutté vaillamment pour l’indépendance de leur pays.