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Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/BAUDOUIN ou BALDUIN, nom de cinq rois de Jérusalem, appartenant à la famille des comtes de Flandre

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Administration du grand dictionnaire universel (2, part. 1p. 386-387).

BAUDOUIN ou BALDUIN, nom de cinq rois de Jérusalem, appartenant à la famille des comtes de Flandre. Le premier, qui descendait du comte Baudouin V, est : Baudouin Ier, roi de Jérusalem, mort en 1118. Fils d’Eustache, comte de Boulogne, il accompagna, en 1095, son frère Godefroy de Bouillon, beaucoup moins pour contribuer à la délivrance du tombeau du Christ, que dans l’espoir de conquérir quelque principauté. Envoyé en Cilicie avec Tancrède, prince de Tarente, pour soumettre le pays, il eut avec ce dernier de violents démêlés au sujet des villes de Tarse et de Malmista, qui étaient tombées en leur pouvoir ; il fit enlever la bannière de Tancrède pour y planter la sienne, et les deux chefs, oubliant quels ennemis ils étaient venus combattre, en vinrent aux mains avec leurs troupes. Bientôt après, appelé par le prince d’Édesse, il franchit le Taurus, passa l’Euphrate, entra dans cette ville, dont il chassa la garnison mahométane, et trempa, dit-on, dans une sédition, où le prince d’Édesse, qui l’avait adopté, perdit la vie. Devenu comte d’Édesse « par la grâce de son épée (1097) », il resta dans cette ville, s’occupant de consolider son pouvoir, et fort indifférent aux travaux des croisés, qui assiégeaient et prenaient Jérusalem. Mais à la mort de son frère Godefroy, il céda sa principauté à son cousin Baudouin de Bourg, et s’empressa de se rendre à Jérusalem pour y recueillir l’héritage du chef de la croisade. Moins scrupuleux que ce dernier, Baudouin n’hésita pas à prendre le titre de roi de Jérusalem, recueillit les débris de l’armée croisée conduite au secours des chrétiens de Palestine par Hugues le Grand et Guillaume d’Aquitaine en 1101, et les conduisit au combat de Rama (27 mai 1102), où ils furent presque tous massacrés. Assiégé dans Jaffa, le roi de Jérusalem se dégagea et battit ses ennemis dans une vigoureuse sortie ; puis, profitant de sa victoire, il s’empara de Saint-Jean-d’Acre en 1104, de Beyrouth en 1109, et de Sidon en 1110. Après avoir vaincu les Sarrasins en plusieurs rencontres et agrandi son royaume, ce prince mourut de la dyssenterie à Lavis, dans le désert, en revenant d’Égypte. Son corps fut envoyé à Jérusalem, pour y être enterré près de celui de Godefroy de Bouillon, pendant que ses entrailles étaient déposées en un lieu, connu depuis lors sous le nom de Hégiarat-Barduil, c’est-à-dire le sépulcre ou la pierre de Baudouin ; — Baudouin II, cousin du précédent, lui succéda en 1118 sur le trône de Jérusalem, comme il lui avait succédé, dix-huit ans auparavant, dans sa principauté d’Édesse. Il s’était acquis, parmi ses compagnons d’armes, une grande réputation par son courage, ses talents militaires, sa prudence, son désintéressement, sa piété ; et nul plus que lui n’était digne de prendre le pouvoir en main. Un de ses premiers actes fut d’aller délivrer Antioche, menacée par les musulmans. Après les avoir battus en plusieurs rencontres, il revint à Jérusalem, où il apprit que le comte d’Édesse, Josselin de Courtenay, venait de tomber au pouvoir des Sarrasins. Il partit aussitôt pour le délivrer ; mais il tomba dans une embuscade, et fut fait prisonnier par Balak, en 1124. La régence du royaume fut alors déférée par les principaux croisés à Eustache Garnier, seigneur de Césarée et de Sidon, qui eut à la fois à combattre les Turcs de la Syrie et les Sarrasins d’Égypte, et qui, cependant, grâce à des secours amenés par les Vénitiens, put s’emparer de Tyr après un siège de cinq mois. Bientôt après, Josselin de Courtenay ayant pu s’échapper du château de Khortobert, où il était prisonnier, rassembla une armée, fondit sur les musulmans, et délivra Baudouin (1125), qui revint à Jérusalem pour guerroyer de nouveau. Après un règne de douze ans, pendant lequel les ordres militaires de Saint-Jean et du Temple avaient été approuvés par le pape, Baudouin mourut en 1131, laissant son royaume très-agrandi à son gendre Foulques d’Anjou ; — Baudouin III, petit-fils du précédent par sa mère Mélisande, succéda, en 1142, à son père Foulques d’Anjou, et mourut en 1162. Zenghi, sultan d’Alep, s’étant emparé de la principauté d’Édesse, les chrétiens d’Orient jetèrent un cri d’alarme, qui fut entendu en Occident. Une nouvelle croisade, ayant à sa tête Conrad, empereur d’Allemagne, et Louis VIII, roi de France, fut organisée ; les deux souverains arrivèrent en Palestine en 1148 ; Baudouin alla les rejoindre, et leurs armées réunies firent le siège de Damas. (V. Damas [Siège de.]) Mais les princes croisés, n’ayant pu réussir à s’emparer de cette ville, revinrent en Europe, laissant Baudouin aux prises avec les ennemis les plus redoutables. Le roi de Jérusalem ne se découragea pas. Il accepta la lutte que lui offrait Nour-Eddyn, fit relever et fortifier Gaza (1149), s’empara d’Ascalon (1153) pour son propre compte, et de Césarée (1159) pour celui de Renaud, prince d’Antioche. Baudouin mourut, âgé seulement de trente-trois ans, empoisonné, dit-on, et sans laisser de postérité. Il eut pour successeur Amaury ; — Baudouin IV, né en 1160, mort en 1185, succéda, en 1173, à son frère Amaury sur le trône de Jérusalem. Mis, à cause de son jeune âge, sous la tutelle de Milon de Planci, puis du comte de Tripoli, il était, de plus, accablé d’infirmités qui devaient le rendre à jamais incapable de gouverner par lui-même. Baudouin vit son règne troublé par les attaques continuelles des musulmans d’Égypte et d’Asie, en même temps que par les prétentions des nobles et du clergé. Saladin, à la tête d’une puissante armée, envahit la Palestine, battit les croisés près de Sidon (1178), et les défit de nouveau l’année suivante ; mais en 1182, Baudouin, devenu majeur, marcha contre le sultan, le battit près d’Ascalon et le força à se retirer en Égypte. Cette victoire, toutefois, ne put amener Saladin à demander la paix, et bientôt on le vit recommencer les hostilités. Baudouin, devenu aveugle, rongé par la lèpre, laissa le commandement de son armée à Guy de Lusignan, qu’il avait fait marier avec sa sœur Sibylle et nommé régent du royaume. Mais celui-ci, dépourvu de talents militaires, ne sut pas profiter d’une circonstance favorable qui s’offrait pour écraser l’ennemi, et dut résigner le commandement devant les murmures de l’armée. Saladin, ayant consenti à accorder une trêve, Baudouin envoya, en 1184, le patriarche de Jérusalem en Occident, pour implorer le secours des chrétiens et prêcher’une nouvelle croisade. Mais il mourut dans cet intervalle, désignant son neveu Baudouin pour lui succéder ; — Baudouin V, neveu du précédent, était fils de Sibylle et de son premier époux, Guillaume de Montferrat. Ce n était qu’un enfant, qui mourut au bout de sept mois de règne, en 1185. Il fut empoisonné, dit-on, par sa propre mère, qui espérait, par ce crime, assurer le trône à son second mari, Guy de Lusignan. Un an après (1186), Jérusalem tombait au pouvoir de Saladin.