Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/BEURNONVILLE (Pierre RIEL, marquis DE), maréchal de France

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Administration du grand dictionnaire universel (2, part. 2p. 658).

BEURNONVILLE (Pierre Riel, marquis de), maréchal de France, né en 1752 à Champignolle (Aube), mort en 1821. Engagé volontaire en 1774, il servit dans l’Inde sous Suffren, de 1779 à 1781, devint major et commandant des milices à l’île Bourbon, où il se maria avec une jeune et riche créole, et, de retour en France, il acheta la lieutenance de la compagnie des suisses du comte d’Artois. Aide de camp du maréchal Luckner en 1792, nommé maréchal de camp et lieutenant général la même année, il prit part, sous les ordres de Dumouriez, à la première guerre de la Révolution, se signala aux batailles de Valmy et de Jemmapes ; fut appelé au commandement de l’armée de la Moselle et éprouva des échecs dans diverses rencontres avec les Autrichiens. Pour en atténuer l’effet, il donna dans ses rapports, notamment dans celui qui concernait le combat de Grewenmacheren, un exemple de réticences et de mensonge qui est resté le chef-d’œuvre du genre : « Après trois heures d’une action terrible, écrivait-il, les ennemis ont éprouvé une perte de 10,000 hommes ; celle des Français s’est réduite au petit doigt d’un tambour. » Ce bulletin ridicule donna lieu à cette épigramme :

Quand d’ennemis tués on compte plus de mille,
Nous ne perdons qu’un doigt, encor le plus petit ;
            Holà ! monsieur de Beurnonville,
            Le petit doigt n’a pas tout dit.

Et les soldats eux-mêmes, commentant l’hyperbole, ajoutaient plaisamment que le petit doigt s’était retrouvé. Nommé ministre de la guerre en 1793, il dénonça à la Convention les projets de Dumouriez, qui venait de lui adresser une lettre confidentielle, et fut chargé d’accompagner à l’armée les commissaires envoyés pour surveiller la conduite du général et s’emparer de sa personne ; mais ce projet ayant échoué, Beurnonville et les commissaires furent livrés aux Autrichiens, puis échangés plus tard contre la dauphine, fille de Louis XVI (1795). De retour en France, Beurnonville devint successivement commandant en chef de l’armée du Nord (1796), ambassadeur à Berlin et à Madrid (1800-1802), sénateur (1805), comte de l’Empire, etc. En 1814, il demanda le rappel des Bourbons, fit partie du gouvernement provisoire choisi par Talleyrand, et fut nommé ministre d’État et pair de France par Louis XVIII. Proscrit pendant les Cent-Jours, il se rendit à Gand, d’où il revint avec le roi, qui le réintégra dans ses dignités, lui donna le bâton de maréchal en 1816 et le titre de marquis en 1817.