Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/BONAPARTE (Napoléon-Louis), second fils de Louis, roi de Hollande, et d’Hortense de Beauharnais

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Administration du grand dictionnaire universel (2, part. 3p. 954-955).

BONAPARTE (Napoléon-Louis), second fils de Louis, roi de Hollande, et d’Hortense de Beauharnais, né à Paris le 11 novembre 1804, fut le premier des Bonaparte inscrit sur les registres de l’État comme prince français. Napoléon Ier et Madame mère le tinrent sur les fonts baptismaux, et ce fut le pape Pie VII qui le baptisa. Trois ans après sa naissance, la mort prématurée de son frère Napoléon-Charles fit de lui l’héritier du trône de Hollande, et, en 1809, Napoléon Ier le créa grand-duc de Berg et de Clèves. Le 1er juillet 1810, après l’abdication de son père, le jeune Napoléon-Louis fut reconnu comme roi par les Hollandais sous la régence de sa mère, Hortense de Beauharnais ; mais l’empereur envoya son aide de camp, le général Lauriston, pour le chercher et le ramener à Saint-Cloud. Le jeune prince resta jusqu’en 1815 en France, élevé par sa mère et l’abbé Bertrand, son précepteur. Son père fut obligé de s’adresser aux tribunaux pour l’avoir auprès de lui, et sa mère ne le rendit que forcée par un arrêt de la cour de la Seine en date du 7 mars 1815. L’ex-roi de Hollande l’emmena à Rome où il partagea bientôt les idées de révolte de l’Italie contre la domination autrichienne. Aussi son père fut-il obligé de le conduire à Florence pour le mettre à l’abri des soupçons du pouvoir lors de la révolution de Naples. Napoléon-Louis épousa, en 1827, sa cousine Charlotte, la seconde fille du roi Joseph, née à Paris le 31 octobre 1802 et morte sans enfants, à Sarzane, le 2 mars 1839. À partir de ce moment, il abandonna la politique pour ne plus s’occuper que de mécanique, et il eut la gloire de doter l’industrie de quelques inventions utiles, dont il se plaisait à faire lui-même l’application dans une papeterie qu’il avait établie à Seze-Vezza. Déjà, en 1828, il avait publié sur la direction des ballons un livre qui fit avancer de quelques pas la science aérostatique. Ce prince, dont les sentiments étaient libéraux, et que sa mère n’avait réussi à détourner d’aller prendre part aux événements de Grèce qu’en lui faisant comprendre que son nom serait plus nuisible à l’indépendance hellénique que son bras ne lui serait utile, fut sollicité, en 1830, par quelques amis de Paris, de venir aider à faire reconnaître les droits de son cousin Napoléon II et appuyer ses prétentions au trône de France. « Le peuple est seul maître, répondit-il ; or il a reconnu un nouveau souverain. Irais-je porter la guerre civile dans ma patrie, lorsque je voudrais la servir au prix de tout mon sang ? » Ces sentiments étaient d’autant plus louables qu’une tentative pouvait avoir quelque chance de succès sous un gouvernement qui n’était pas issu du suffrage populaire, au moment de la mise en accusation du ministère. La Corse lui adressa aussi des propositions avantageuses, qu’il repoussa également, et là aussi peut-être le moment était propice. Pie VII venait de mourir, et l’Italie espérait secouer le joug de la papauté. La Romagne, Plaisance et Modène s’étaient soulevées, et la révolte gagnait chaque jour du terrain. Napoléon-Louis quitta alors son père et sa femme pour aller, de concert avec son frère Charles-Louis, organiser la défense de Foligno. Bien secondés, ils étaient sur le point d’occuper Civita-Castellana, lorsque leur mère leur fit abandonner cette entreprise en disant que leur nom servirait de prétexte au gouvernement français pour refuser son appui. Les deux frères gagnèrent Bologne, et, lorsque l’Autriche pénétra dans les États de l’Église, ils se retirèrent à Forli. À peine arrivé dans cette ville, le prince fut attaqué de la rougeole. Il succomba le 17 mars 1831, quelques heures avant l’arrivée de sa mère, qui accourait près de son lit de douleur. Il mourut sans enfants. Sa veuve lui survécut pendant huit ans.

Le prince Napoléon-Louis était philosophe par caractère. Doué d’un grand et généreux courage, IL était toujours prêt à marcher à la défense des opprimés. Passionné pour l’indépendance, et, par suite des événements politiques, ne pouvant en jouir comme il l’eût désiré, il se consolait dans le commerce des sciences et des lettres. On lui doit la traduction française de la Vie d’Agricola, de Tacite, publiée à Avignon en 1828 ; celle de l’Histoire du sac de Rome en 1527, raconté en italien par un de ses ancêtres supposés, Jacopo Buonaparte (Florence, 1829), et, enfin, une bonne Histoire de Florence, imprimée à Paris en 1833.