Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Courrier de la Nouvelle-Angleterre (LE), journal américain

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Administration du grand dictionnaire universel (5, part. 2p. 366).

Courrier de la Nouvelle-Angleterre (LE), journal américain, qui tire sa principale importance de la longue collaboration de Franklin. Ce fut le 17 juillet 1721 que parut le premier numéro de ce journal. Dès le premier jour, la nouvelle feuille différa sensiblement de ses devancières. Celles-ci ne contenaient que des nouvelles locales, des extraits des lettres d’outre-mer, les prix des marchés et quelques annonces, jamais aucun article de fonds. Le Courrier, au contraire, fut exclusivement composé d’articles originaux, de courtes dissertations de morale et de littérature. L’Angleterre avait vu fleurir le Babillard, le Spectateur, le Tuteur, etc. ; ce fut un journal du même genre que voulurent faire Franklin, son frère et son oncle. Le jeune Benjamin contribua sans doute à faire donner au Courrier ce caractère didactique. Il devint bientôt, en effet, un des principaux rédacteurs du Courrier. Cependant rien ne permet aujourd’hui de distinguer la part qui revient à Franklin dans les essais sous forme d’articles ou de lettres et dans les courts paragraphes qui remplissent les premiers numéros du Courrier. Cette égalité de ton tourne à l’éloge du journal autant qu’à celui du jeune auteur : ni l’esprit, ni même le talent d’écrire ne manquaient aux collaborateurs de Franklin. Le Courrier contient, sur les poëtes du temps, des appréciations où un jugement sévère est assaisonné de gaieté ; ce sont de bons articles de critique anglaise ; mais la morale y tient beaucoup plus de place que la littérature ; les vices du temps sont censurés avec verve, quelquefois avec brutalité, et le ton est le plus habituellement celui de la satire. Ni le gouvernement ni le clergé puritain ne sont ménagés ; toutefois on évitait avec quelque soin les personnalités, et il est rare de rencontrer un nom propre dans le Courrier ; la critique demeure presque toujours générale, mais elle arrive parfois à la rudesse et à la violence et même ne hait pas les gros mots. Nous citerons, entre autres polémiques, celle qui eut lieu avec la Gazette de Boston, à propos de la pratique de l’inoculation. Cette querelle dégénéra en une affaire politique et valut un mois de prison à James Franklin. Durant cet intervalle le Courrier fut dirigé par Benjamin, dont la vivacité mit en émoi toute la ville de Boston et souleva la colère de la législature du Massachusets. Une nouvelle peine vint frapper James Franklin, comme propriétaire du journal : il lui fut défendu d’imprimer le Courrier ni aucun pamphlet, avant de l’avoir soumis à la révision du secrétaire de la province. C’était un essai de censure préventive. James Franklin sortit d’embarras en mettant son journal sous le nom de son frère, qui en resta l’éditeur nominal tant que le journal vécut, c’est-à-dire jusqu’à la fin de 1727, époque à laquelle James Franklin, qui faisait de médiocres affaires à Boston, émigra dans la colonie de Rhode-Island.