Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/FRÉDÉRIC-GUILLAUME II, roi de Prusse, neveu et successeur du grand Frédéric

La bibliothèque libre.
Administration du grand dictionnaire universel (8, part. 2p. 798).

FRÉDÉRIC-GUILLAUME II, roi de Prusse, neveu et successeur du grand Frédéric, né en 1744, du prince Auguste-Guillaume, mort en 1797. Après lu mort de son père, il fut déclaré prince royal par Frédéric II, qui lui fit donner une éducation sévère ; mais, entraîné par ses goûts pour le plaisir, il se livra à des dérèglements qui, pendant longtemps, le mirent en froid avec son oncle. Les preuves de bravoure qu’il donna à Neustaedt. en Silésie, pendant la guerre de la succession de Bavière (1778), le réconcilièrent complètement avec le roi de Prusse ; et quand il arriva à Breslau et se présenta devant Frédéric, au retour de cette campagne, celui-ci l’embrassa en lui disant :« Vous n’êtes plus mon neveu, vous êtes mon fils. » Lorsqu’il monta sur le trône, en 1786, Frédéric-Guillaume II trouva le trésor public rempli, l’administration et l’armée dans un très-bon état, la Prusse en paix avec ses voisins, et devenue, entre les mains de son prédécesseur, presque l’arbitre de l’Europe. Mais ce prince ne sut pas suivre les traces du grand Frédéric. Il gaspilla en folles prodigalités les finances de la Prusse et lança ce pays dans des guerres ruineuses et sans utilité. Il comprima la révolution de Hollande (1787-1788) ; mais il fut moins heureux avec la France. Ardent promoteur de la coalition de Pilnitz (1791), il fit marcher contre nous, en 1792, une armée qui vint se fondre dans les marais de la Champagne. Le 5 avril 1795, il était contraint de signer, à Bâle, la paix avec la République française, en lui abandonnant la rive gauche du Rhin. Pendant qu’il se battait contre la France, Frédéric-Guillaume jouait le plus triste rôle vis-à-vis de la Pologne. Il prit part aux deux derniers partages de ce pays, malgré le traité du 29 mars 1790, d’après lequel la Prusse avait garanti au roi de Pologne, Poniatowski, l’hérédité du trône dans sa famille, l’intégrité du royaume de Pologne et un secours de 40,000 hommes d’infanterie et de 4,000 hommes de cavalerie, dans le cas où les puissances étrangères se mêleraient des affaires intérieures de la Pologne. Catherine II ayant profité du moment où la Prusse et l’Autriche se trouvaient en guerre avec la France pour s’emparer de la Pologne, Frédéric-Guillaume se trouva dans l’alternative ou de faire la guerre à la Russie ou de se joindre à elle pour partager la proie qu’elle convoitait. C’est ce dernier parti qu’il se hâta de prendre. Il envoya dans la Grande-Pologne (1793) un corps d’armée qui s’empara, avec Dantzig et Thorn, d’un vaste territoire comprenant 1,000 milles carrés. La diète polonaise de Grodno se vit contrainte de consentir à la cession des territoires qui venaient d’être soustraits, par la force, à la Pologne. Mais, dès l’année suivante (1794), une grande insurrection éclata dans ce pays, sous le commandement de Kosciusko et de Madalinski. À plusieurs reprises, les Russes et les Prussiens furent battus. Cependant, encore une fois, la juste cause se vit écrasée. Battu, le 10 octobre 1794, par le général russe Fersen, Kosciusko fut fait prisonnier, et la dernière forteresse des patriotes, Praga, dut se rendre, le 4 novembre, au général russe Souvaroff. Cette victoire donna lieu au troisième partage de la Pologne, qui valut à la Prusse une augmentation de 2,200,000 habitants.

Ce chiffre s’accrut de 85,000 par l’annexion des principautés d’Anspach et de Baireuth, achetées en 1791, moyennant une rente de 500,000 florins, servie au margrave Christian-Frédéric-Charles-Alexandre. Malgré l’agrandissement de la Prusse, non-seulement le trésor public, qui contenait 70 millions d’écus à la mort du grand Frédéric, se trouva vide à la fin du règne de Frédéric-Guillaume, mais encore l’État se trouva endetté de 22 millions d’écus. Sous le règne de ce prince, la tolérance éclairée du grand Frédéric, la liberté de pensée, si favorable au développement d’une jeune nation, reçurent une funeste atteinte par l’édit de religion (1788) et par différentes mesures prises dans un esprit rétrograde, notamment par l’établissement de la censure. Toutefois, Frédéric-Guillaume réduisit les taxes publiques, facilita le commerce, l’industrie, protégea l’agriculture, fonda plusieurs institutions pour l’enseignement, et publia, en 1794, le code prussien, que son oncle, Frédéric le Grand, avait fait en partie élaborer, et qui s’est maintenu jusqu’à nos jours. Ce prince épousa, en premières noces, Élisabeth-Christine Ulrique, princesse de Brunswick. En 1769, il divorça d’avec elle et se remaria avec la princesse Louise de Hesse-Darmstadt, morte en 1805. De ce mariage sont issus quatre fils : Frédéric-Guillaume III, son successeur, né en 1770, mort en 1840 ; Louis, mort en 1796 ; Henri, mort en 1846, et Guillaume, mort en 1851.