Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/LÉON Ier (saint), dit le Grand, pape

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Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 1p. 370).

LÉON Ier (saint), dit le Grand, pape, né à Rome vers 390, mort en 461. Dans un voyage qu’il fit en Afrique pour porter les lettres du pape Zozime, qui condamnaient Pelage, il se lia avec saint Augustin, puis il revint à Rome, gagna la confiance de Célestin Ier, qui l’ordonna diacre, et devint le premier ministre de ce pontife. Léon avait été envoyé dans les Gaules pour réconcilier les généraux Aétius et Albin lorsque, Sixte III étant mort, il fut, bien que simple diacre, élu pape en 440. Il s’attacha à rétablir la discipline et l’unité dans l’Église, mais il persécuta les manichéens et les pélagiens, ce qui lui fait moins d’honneur, détruisit les libertés de l’Église des Gaules et approuva les actes du concile de Chalcédoine (451), sauf celui qui donnait au siège de Constantinople des prérogatives l’égalant au siège de Rome. En 452, au moment où le farouche Attila marchait sur Rome, il alla au-devant de lui, et parvint par son éloquence à obtenir du Fléau de Dieu qu’il s’éloignât de l’Italie. Il fut moins heureux avec Genséric et ses Vandales, qui ravagèrent la ville éternelle (455). On attribue à ce pontife la suppression de la confession publique, remplacée par la confession secrète, l’extension du célibat aux sous-diacres, l’établissement des rogations et des quatre-temps, etc. D’après les anciens auteurs, le pape Léon, vers la fin de sa vie, ayant donné sa main à baiser à une femme d’une grande beauté, éprouva une émotion charnelle dont il voulut se punir en se coupant la main. C’est alors que s’introduisit l’usage de baiser les pieds du pape. Ajoutons, d’après la légende, que la sainte Vierge intervint miraculeusement et remit en parfait état le membre mutilé du pontife. L’Église honore saint Léon le 11 avril. On a de lui 141 lettres, 96 sermons, un code des anciens canons, un traité sur la vocation des gentils. Ses œuvres ont été publiées sous le titre d’Opera omnia (Rome, 1753-1755, 3 vol. in-fol.), et rééditées depuis. L’abbé de Bellegarde a donné une traduction française de ses Sermons (Paris, 1701).

Léon arrêtant Attila (SAINT), fresque de Raphaël, dans la Chambre d’Héliodore, au Vatican. Le roi des Huns est arrêté dans sa marche vers Rome par l’apparition de saint Pierre et de saint Paul, patrons de la ville sainte, descendus du ciel à la prière du pape saint Léon. Le souverain pontife, revêtu de ses insignes, est assis sur une haquenée blanche dont un écuyer tient la bride ; il est accompagné de deux cardinaux en robe rouge, montés sur des mules, et de deux officiers de sa maison, portant l’un une croix, l’autre une massue. La dignité du pape et de son cortège contraste avec les attitudes violentes et les expressions effarées d’Attila et de sa suite, qui occupent la droite de la composition. Le roi barbare, qu’on a quelque peine à distinguer au milieu de son entourage, est monté sur un cheval noir tacheté de blanc, qu’un gros écuyer tient par la bride ; il regarde avec effroi les deux saints qui semblent fondre sur lui, du haut du ciel, l’épée à la main. Deux soldats précèdent Attila et lui montrent le pape. À côté de lui est un cavalier coiffé d’une sorte de casque orné de plumes. Plus à droite, deux chefs barbares, armés de lances, cherchent à maîtriser leurs chevaux impatients et fougueux : l’un est revêtu d’une cotte de mailles d’acier, l’autre d’une armure d’écailles d’or. Au fond, les soldats barbares sortent d’un défilé et commencent à se débander. Un paysage simple et grandiose encadre cette scène : vers la gauche s’étend la campagne romaine, si majestueuse et si sublime dans sa tristesse ; dans le lointain apparaissent les murailles de Rome ; des palais, des maisons et le Colisée couronnent le tout.

Raphaél a donné à saint Léon les traits de Léon X. Toutes les figures du cortège pontifical semblent être des portraits ; on a même cru reconnaître dans le porteur de massue le Pérugin, mais cette opinion n’est pas fondée. On a prétendu aussi fort gratuitement qu’Attila avait été représenté par l’artiste sous les traits de Louis XII, roi de France. On ne saurait douter toutefois que le sujet ait été choisi pour faire allusion à la sortie des Français hors d’Italie, sous le règne de Léon X. Ce qui rend cette supposition admissible, c’est que le poème latin de Gyraldus, publié par Roscoë, fut composé alors pour célébrer la retraite des Français, sous l’allégorie de l’expulsion des Huns. Passavant, qui a fait cette remarque, apprécie ainsi l’œuvre de Raphaël : « L’exécution de cette fresque est, en général, de la main même du maître. Cependant le groupe du pape et de sa suite est d’un dessin bien plus fin et mieux senti, d’une couleur plus vigoureuse et plus transparente que la partie du tableau consacrée au groupe d’Attila et de ses Huns. Néanmoins toute cette peinture est harmonieuse dans son ensemble comme dans ses détails. »

Le Saint Léon arrêtant Attila a été gravé par F. Aquila, S. Bernard, L. Collignon, A. Banzo, Volpato, G. Mochetti, Pietro Anderloni, Fr. Giangiacomo, etc. Une belle copie de cette fresque se voit au musée Européen, à Paris.