Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Nain jaune (LE) OU Journal des arts, des sciences et de la littérature

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Administration du grand dictionnaire universel (11, part. 2p. 778).

Nain jaune (le) OU Journal des arts, des sciences et de la littérature, fondé le 15 décembre 1814 par Cauchois-Lemaire. Cette feuille aristophanesque, dont le succès fut très-vif, comprenait des articles de critique littéraire et théâtrale, et, sous le titre de Bruits de ville et revue des journaux, une chronique remplie de traits piquants et d’épigrammes contre les hommes de l’ancien régime. Des caricatures, tirées sur grand papier et coloriées, accompagnaient le texte. Le Nain jaune, dont les principaux rédacteurs étaient Cauchois-Lemaire, Merle, Jouy, Étienne, etc., comptait, parmi ses collaborateurs anonymes, Louis XVIII, qui faisait jeter dans la bouche de fer du journal des épigrammes et des mots aiguisés et mordants. Ce fut la rédaction du Nain jaune qui inventa l’ordre des chevaliers de l’Éteignoir, comprenant les personnalités les plus notables du parti de l’ancien régime, et l’ordre de la Girouette, dans lequel on comprit les hommes politiques les plus connus par la variation de leurs opinions. Lors du retour de Napoléon, le Nain jaune se prononça en faveur du despote, dont il devint l’officieux et plat approbateur, et fut supprimé au retour des Bourbons, le 15 juillet 1815. Cauchois-Lemaire se réfugia alors en Belgique et y fit paraître, de mars à novembre 1816, le Nain jaune réfugié, par une société d’anti-éteignoirs. Cette petite feuille, spirituellement rédigée, se fondit avec le Mercure surveillant et devint le Libéral.

Le Nain jaune fut ressuscité le 13 décembre 1857 par M. Adolphe Jalabert, mais il n’eut qu’une existence éphémère. Il parut de nouveau, le 16 mai 1863, sous la direction de M. Aurélien Scholl, qui en fit une feuille littéraire et légère, destinée à faire concurrence au Figaro de cette époque. Ce journal n’eut qu’un succès médiocre et disparut à la fin de 1865.

En 1867, M. Grégory Ganesco fit reparaître le Nain jaune, dont il devint le rédacteur en chef. D’abord purement littéraire et hebdomadaire, il fut transformé, peu après, en journal politique et bi-hebdomadaire. Le Nain jaune, devenu un journal de l’opposition, eut alors un très-vif succès. Parmi ses rédacteurs, pour la plupart hostiles à l’Empire ou appartenant au parti républicain, nous citerons MM. Ranc, qu’un article sur les insurgés de juin fit condamner à quatre mois de prison, Weiss, Francisque Sarcey, Castagnary, Alfred Deberle, Louis Combes, Siebecker ; citons aussi M. Barbey d’Aurevilly, chargé de la partie bibliographique et théâtrale. Mais bientôt M. Ganesco déserta l’opposition pour se rapprocher du gouvernement. Le Nain jaune, abandonné alors de la plupart des brillants rédacteurs qui avaient fait sa vogue, tomba entre les mains de spéculateurs et do bonapartistes ; il vit disparaître ses lecteurs, ses abonnés, et s’éteignit obscurément.