Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/ORLÉANS (Ferdinand-Philippe-Louis-Charles-Henri, duc D'), fils aîné du roi Louis-Philippe

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Administration du grand dictionnaire universel (11, part. 4p. 1484).

ORLÉANS (Ferdinand-Philippe-Louis-Charles-Henri, duc d’), fils aîné du roi Louis-Philippe, né à Palerme le 3 septembre 1810, mort le 13 juillet 1842. En 1814, il vit pour la première fois la France, qu’il quitta pendant les Cent-Jours et où il revint avec sa famille en 1817. Son père lui donna d’abord pour précepteur M. de Boismilon, qui devint plus tard son secrétaire des commandements, puis l’envoya, aux applaudissements de la bourgeoisie libérale, faire ses études au collège Henri IV (1819). Le jeune prince suivit les cours sur le pied de la plus parfaite égalité avec les autres élèves, montra un goût particulier pour l’histoire et la poésie latine, et remporta quelques prix aux distributions du collège et du grand concours. Ferdinand d’Orléans passa ensuite les examens exigés pour l’admission à l’École polytechnique, fut nommé, en 1824, colonel du 1er régiment de hussards et s’occupa particulièrement alors d’apprendre la théorie de l’art militaire. Il venait de faire un voyage en Écosse (1829) et se trouvait en garnison à Joigny lorsque éclatèrent les événements de juillet 1830. Par son ordre, ses soldats prirent la cocarde tricolore le 1er août, et il changea, le 8, après l’avènement de son père au trône, son titre de duc de Chartres contre celui de duc d’Orléans et de prince royal. Chargé, la même année, de la distribution des drapeaux tricolores aux gardes nationales et aux troupes des départements, il fut parfaitement reçu à Lyon ; mais des sifflets l’accueillirent lorsqu’il revint dans cette ville en 1831, pour y rétablir l’ordre à la suite des journées de novembre. On le vit alors s’attacher, par son extrême modération, à calmer l’irritation populaire et employer toute son influence pour empêcher qu’on ne traitât avec rigueur ceux que la faim avait poussés à la rébellion. Le choléra qui vint ravager Paris en 1832 lui fournit une nouvelle occasion de se signaler. Il visita l’Hôtel-Dieu pendant le plus fort du fléau et reçut à cette occasion une médaille du conseil municipal de Paris. À la fin de cette même année, lors de la campagne de Belgique, il prit le commandement de la brigade d’avant-garde, concourut aux opérations qui amenèrent la prise d’Anvers et se conduisit bravement à l’attaque de la lunette de Saint-Laurent. En 1835, le duc d’Orléans passa en Afrique, fut blessé au combat d’Habrah, tomba, par suite des fatigues qu’il avait éprouvées, assez gravement malade et revint en France. En 1836, il fit en Allemagne un voyage pendant lequel il vit la princesse Hélène de Mecklembourg, qu’il épousa à Paris le 30 mai 1837. Pendant les fêtes célébrées à cette occasion, beaucoup de personnes furent étouffées au Champ-de-Mars. En apprenant ces malheurs, la princesse Hélène s’écria : « C’est comme aux fêtes de Louis XVI. Quel affreux présage ! » Dans une séance de la Chambre des pairs, où il siégeait depuis 1830, le marquis de Dreux-Brézé ayant blâmé le duc d’Orléans d’avoir épousé une princesse protestante, le jeune prince lui répondit par ces remarquables paroles : « J’ai vu inscrite dans notre code fondamental, à la première ligne, la liberté religieuse comme la plus précieuse de toutes celles accordées aux Français ; je ne vois pas pourquoi la famille royale serait seule exclue de ce bienfait, qui est entièrement d’accord avec les idées qui règnent aujourd’hui au sein de la société française. »

En 1839, le maréchal Clausel ayant préparé une expédition en Afrique dans le but de reconnaître la grande communication destinée à unir Alger et Constantine, le duc d’Orléans retourna en Algérie, prit le commandement d’une division et franchit les Portes de fer, réputées infranchissables. L’année suivante, accompagné de son jeune frère, le duc d’Aumale, il fit sa dernière et sa plus brillante campagne. Le courage qu’il déploya notamment aux combats de l’Affroum, de l’Oued’Ger, du bois des Oliviers, à la prise de Médéah et surtout à celle du teniah de Mouzaïa, où il commanda en personne la colonne qui attaquait de front, lui fit le plus grand honneur. Peu après, il fit ses adieux à l’armée d’Afrique et retourna à Paris. À partir de ce moment, il s’occupa exclusivement de l’organisation et de l’inspection des troupes. C’est lui qui organisa notamment les chasseurs à pied de Vincennes, désignés sous le nom de chasseurs d’Orléans. Il revenait des eaux de Plombières, où il était allé conduire sa femme, et se disposait à partir pour le camp de Saint-Omer, lorsque, en se rendant à Neuilly pour faire ses adieux à sa famille, les chevaux de sa voiture s’emportèrent en face de la porte Maillot. Soit qu’il eût voulu s’élancer à terre, soit qu’il eût été précipité par une secousse, il tomba la tête la première sur le pavé et se cassa la colonne vertébrale. Transporté chez un épicier voisin, il y expira quelques heures après, le 13 juillet 1842. Après avoir été exposé cinq jours à Notre-Dame, son corps fut transporté dans la sépulture de sa famille, à Dreux. De son mariage avec la princesse Hélène, il avait eu deux fils, Louis-Philippe-Albert, comte de Paris, né à Paris en 1838, et Robert-Philippe-Louis-Eugène-Ferdinand, duc de Chartres, né à Paris en 1840.

« Le duc d’Orléans, dit M. Alby, était de haute taille, blond, bien fait, et donnait beaucoup de soin à sa toilette. L’affabilité et la franchise caractérisaient sa figure, qui était ordinairement fort colorée. Il parlait avec une égale facilité l’italien, l’anglais et l’allemand. Aimant les arts par instinct et par goût plus que par étude, il se plaisait à leur prodiguer des encouragements et visitait souvent les ateliers de Paris dans lesquels il avait fait des commandes. » Son extrême affabilité, l’agrément de son commerce, sa générosité envers les artistes et les gens de lettres lui avaient acquis de nombreuses sympathies. C’était du reste un prince à l’esprit ouvert et libéral, qui paraissait attaché au gouvernement constitutionnel et pénétré largement des idées de la Révolution. Dans son testament on trouve ce passage remarquable : « Que le comte de Paris soit un de ces instruments brisés avant qu’ils aient servi, ou qu’il devienne l’un des ouvriers de cette régénération sociale qu’on n’entrevoit encore qu’à travers tant d’obstacles, qu’il soit roi ou qu’il demeure défenseur inconnu et obscur d’une cause à laquelle nous appartenons tous, il faut qu’il soit avant tout un homme de son temps et de la nation, serviteur passionné, exclusif, de la France et de la Révolution. »

Une statue équestre, qui lui avait été élevée dans la cour du Louvre, fut renversée après la révolution de 1848.