Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/RONSIN (Charles-Philippe), auteur dramatique et révolutionnaire français

La bibliothèque libre.
Administration du grand dictionnaire universel (13, part. 4p. 1372-1373).

RONSIN (Charles-Philippe), auteur dramatique et révolutionnaire français, né à Soissons en 1752, décapité à Paris le 24 mars 1794. Il fit de bonnes études et débuta dans la littérature par une traduction en vers de la Chute de Ruffin, poëme de Claudien, publiée à Bouillon en 1780 (in-8°). En 1786 parut son Théâtre (1 vol. in-12), imprimé au profit de sa belle-mère et renfermant trois tragédies, Sédécias, Isabelle de Valois, Hëcube et Polyxène, et une comédie en un acte, le Fils cru ingrat. Ces pièces ne paraissent pas avoir été représentées. Lorsque la Révolution éclata, Ronsin l’accueillit avec enthousiasme. Il fut nommé capitaine d’honneur de la garde nationale parisienne et se signala par son exaltation au club des Cordeliers. Il donna au théâtre, en 1790, Louis XII, père du peuple, tragédie dédiée à la garde nationale, et une comédie ayant pour titre la Fête de la liberté. La Ligue des fanatiques et des tyrans, tragédie en trois actes et en vers, qu’il fit représenter en juillet 1791, eut un succès prodigieux ; les prêtres et les rois y sont voués à l’exécration des peuples. Chose digne de remarque, le Moniteur fit un compte rendu avantageux de la pièce. Ce journal donna aussi beaucoup d’éloges à une autre tragédie révolutionnaire du même auteur, Arétophile ou le Tyran de Cyrène, jouée au Théâtre-Français au mois d’octobre 1793. Ronsin, reconnu dans une loge, lors de la première représentation, fut salué des bravos unanimes des nombreux spectateurs qui remplissaient la salle. Il avait été nommé, le 18 avril précédent, adjoint au ministre de la guerre, Bouchotte ; peu de temps après, la Convention l’avait mis à la tête de l’armée révolutionnaire, dont elle venait de décréter la formation. Employé dans la Vendée et à Lyon, sa conduite fut partout énergique ; mais on ne put jamais lui reprocher d’avoir outré les ordres, déjà si terribles, des représentants en mission dans ces contrées. Il sut se faire aimer de sa troupe et y maintenir la discipline. À la fin de septembre 1793, Ronsin se présenta à la barre de la Convention pour y rendre compte de sa mission, et il y fut très-applaudi. Toutefois, son langage et son attitude parurent dangereux à Danton et à son parti, qui savaient que Ronsin était dévoué à la faction hébertiste et tout disposé à seconder un mouvement qui donnerait à la Révolution une activité nouvelle, aux aspirations du peuple vers l’égalité, une satisfaction vainement attendue. Camille Desmoulins commença à l’attaquer ouvertement dans son Vieux Cordelier ; Fabre d’Églantine le dénonça à la tribune, et il fut arrêté avec un adjoint de Bouchotte, Vincent, jeune homme plein d’ardeur. Réclamés avec instance par les Cordeliers, ils furent remis en liberté au bout de quarante jours (fin de février 1794). Sorti de prison, Ronsin promit à ses amis qu’il ne retournerait à l’armée qu’après avoir délivré beaucoup de chaleureux Républicains qui avaient été aussi mis en arrestation ; il manifestait le désir d’être Cromvwell pendant vingt-quatre heures, pour purger la République de ses ennemis. Après un discours véhément qu’il prononça aux Cordeliers (11 ventôse an II), le club voila d’un crêpe noir la Déclaration des droits de l’homme, jusqu’à ce que le peuple eût recouvré ses droits et que la faction des modérés fût anéantie. C’était une sorte de levée de boucliers ; douze jours après, tous les chefs du parti hébertiste furent arrêtés. Traduit devant la tribunal révolutionnaire comme aspirant à jouer le rôle de Cromwell et « comme ayant voulu donner un tyran à l’État, » il fut condamné à mort. Ronsin montra pendant son procès une grande fermeté qui ne se démentit pas sur l’échafaud.