Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/berrichon, onne s.

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Administration du grand dictionnaire universel (2, part. 2p. 609-610).

BERRICHON, ONNE s. (bè-ri-chon, on-nel. Celui, celle qui est du Berry : De l’autre côté cette profonde antipathie du Berrichon laisse toujours quelque chose d’inachevé. (G. Sand.) Achetez, disait Grand-Louis avec l’admirable patience dont sont doués les Berrichons. (G Sand.)

— adj. Qui a rapport, qui appartient au Berry ou à ses habitants : Une poussière épaisse s’élevait sous leurs pieds, circonstance qui n’a jamais empêché le paysan berrichon de danser avec ivresse. (G. Sand.) Je sais plusieurs complaintes et ballades berrichonnes qui n’ont plus ni rime ni raison. (G. Sand.)

— Agric. Se dit surtout des productions animales de ce pays : Bœuf berrichon. Cheval BERRICHON. Mouton BERRICHON.

Encycl, Moutons berrichons. Le Berry a été de tout temps renommé pour la production du mouton, surtout à cause du nombre considérable d’animaux qu’il fournit. Autrefois, on divisait les moutons berrichons en fins, en mi-fins et en gros. On ne distingue aujourd’hui que deux types, le mouton de Champagne et celui de Crevant. Nous dirons en même temps quelques mots du mouton nivernais, qui n’est, tout au plus, qu’une variété de celui du Berry.

Mouton de Champagne. Il est ainsi appelé parce qu’on le trouve dans les plaines déboisées du Berry qui portent le nom de Champagne. Petit, à tête fine, presque toujours nue ainsi que les membres, il a une laine courte, douce et assez fine, dont les brins, en zigzags rapprochés, forment des mèches prismatiques et ondulées. Cette laine, qui a le caractère du mérinos, était jadis considérée comme de première beauté. Les gens de condition stipulaient dans les contrats de mariage qu’on donnerait à la future épouse une robe de drap de fine laine du Berry. (Instituts consulaires de Jean Toubeau.) Cette race a conservé ses qualités, même après le croisement avec des races à cet égard fort inférieures. Très-sobre et d’un engraissement facile, le mouton de Champagne ne fournit pas seulement de belle laine, il donne encore une viande excellente. On distingue dans le pays quatre variétés, dont les deux premières, le mouton de Champagne commun et le mouton de Brion, constituent le vrai type berrichon, ou, si l’on veut, le type barrois des marchands.

Le mouton de Brion, élevé aux environs de Brion et de Levroux, descend, dit-on, d’une race espagnole. Il est, en effet, le plus remarquable par la finesse du lainage, et un peu plus fort de taille ; mais cette différence s’explique par la nature même du pays où il est élevé : il appartient en réalité au même type que le mouton des communes les moins fertiles.

On appelle mouton de Bois-Chaud celui qu’on élève du côté de Dun-le-Roi, aux environs de Châteauneuf, et dans les parties boisées des départements de l’Indre et du Cher. Les moutons de la Brenne, ordinairement mal soignés et habitant un pays marécageux, ont une laine plus grosse, sont plus petits, et présentent une certaine ressemblance avec le petit marchois. Ils appartiennent cependant au type de la Champagne.

Mouton de Crevant. Il est élevé au sud de Châteauroux, du côté de La Châtre, d’Argenton, et vendu, en général, aux foires de Crevant, d’où lui est venu son nom. Cette sous-race berrichonne descend, assure-t-on, de la race anglaise de Dishley. Elle a la tête tantôt légèrement busquée, tantôt droite, souvent tachée, mouchetée et nue, ainsi que les jambes et quelquefois le dessous du cou. Le corps est long et très-fort, le garrot épais, la laine bien plus grasse et plus dure que celle des vrais berrichons.

Le mouton de Crevant a une grande aptitude à prendre de la graisse ; on l’emploie pour améliorer, au point de vue de la boucherie, les autres sous-races du pays. On ne cherche pas généralement à le rendre plus productif au point de vue du lainage, parce qu’on croit que le poids grossit la laine, et aussi parce que les cultivateurs qui achètent pour engraisser préfèrent les moutons à tête chauve et à ventre nu, comme prenant plus facilement la graisse.

Mouton nivernais. Dans la partie septentrionale du département du Cher, la race berrichonne se modifie ; elle devient trapue et surtout laineuse ; la toison est fermée sous le ventre et s’étend sur la tête jusqu’entre les oreilles : c’est alors le mouton nivernais, que l’on croise depuis un certain nombre d’années avec le mérinos. Ces croisements ont produit des métis qui présentent une laine meilleure, mais aussi, le plus souvent, des formes moins régulières que le vrai type berrichon.

Comme tous les habitants des terres ingrates, le mouton du Berry émigre ; il est engraissé dans les vallées plus fertiles qui traversent ou limitent la province ; souvent même, il va dans les provinces voisines.

Après avoir essayé, non sans succès, d’améliorer la race berrichonne au point de vue du lainage par des croisements avec les mérinos, on cherche surtout maintenant à la perfectionner pour la boucherie. C’est dans ce but qu’on a employé les béliers anglais, le dishley, le new-kent, le southdown. Plus petits que les races anglaises, les métis anglo-berrichons sont plus forts que les vrais berrichons ; ils ont des formes qui laissent peu à désirer. Les descendants du bélier southdown ont, comme la race paternelle, les oreilles fines, la face et les jambes noirâtres ou marquées de taches noires assez nombreuses ; ceux du dishley ont de légères taches bleuâtres à la face et aux paupières, qui sont minces, délicates et comme transparentes ; les produits du new-kent présentent à peu près les mêmes caractères. Sous le rapport de la laine, ces croisements n’ont pas eu partout les mêmes succès. Les métis provenant des béliers dishley ou newkent et des brebis à laine commune ont une toison très-rude, souvent cotonneuse, inférieure, en un mot, à celle des animaux indigènes. D’un autre côté, le southdown et le dishley, croisés avec les brebis de Brion et les métisses-mérinos, ont donné de belles laines, et l’on a vu naguère au marché de Sceaux des moutons anglo-berrichons aussi remarquables par leurs mèches longues et douces que par leur corps bien fait et trapu.

Bœuf berrichon. Nulle part, dans le Berry, l’espèce bovine ne présente les caractères d’une race particulière propre au pays qu’elle habite. Les riches herbages de Germiny, du côté de La Guerche, nourrissent quelques-unes des plus précieuses familles de la race charolaise. À l’extrémité opposée de la province, vers le Poitou et la Touraine, sont des bœufs qui, par leur taille moyenne, leur poil jaunâtre sur le dos, noir sur une partie de la tête, aux membres et à la queue, se rapprochent du poitevin.

Du côté du sud, les bœufs du Berry sont en général d’un noir mal teint, un peu ventrus, travaillant bien avec peu de nourriture : ils se mêlent avec la race de la Marche. Vers le nord et dans la Sologne, on trouve de petits animaux à corps trapu, très-bas, à ventre gros, à croupe étroite, à cuisses minces, à encolure grêle, à poil blanc, rouge, noir ou pie. Ces animaux, que l’on rencontre encore dans l’Orléanais, sont très-agiles, très-sobres et d’un bon rendement pour ce qu’ils consomment.

Cheval berrichon. L’élevage du cheval, dans l’ancienne province du Berry, a d’abord été restreint aux plateaux calcaires compris entre le Cher et la Loire ; il s’étend aujourd’hui dans tout le Berry, et se perfectionne à mesure que l’amélioration du sol et de l’agriculture fait des progrès. Se conformant à la nature de leurs terres, les cultivateurs s’occupent, les uns de la production, les autres de l’élevage des chevaux. Les contrées à vallées humides, les arrondissements de Saint-Amant, du Blanc, de La Châtre, et une partie de celui de Sancerre, entretiennent des juments poulinières, tandis que les environs de Bourges, d’Issoudun et de Cnâteauroux, dont les pâturages sont maigres et secs, achètent des poulains, les élèvent en les utilisant à des travaux agricoles, et les fournissent ensuite à quelques départements du sud et du sud-est.

On ne trouve pas de race bien déterminée dans le Berry. Les éleveurs achètent le plus souvent des poulains poitevins, qu’ils choisissent parmi ceux de la race propre aux diligences, mais sans s’arrêter à aucun caractère bien particulier, pas même à une couleur plutôt qu’à une autre. On voit par là qu’il serait difficile d’assigner des caractères aux chevaux berrichons. Seulement, on peut dire qu’en général ils présentent les formes raccourcies du cheval commun, plutôt que l’élégance et l’horizontalité du corps que l’on remarque sur les beaux percherons.