Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/dugazon s. f.

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Administration du grand dictionnaire universel (6, part. 4p. 1357).

DUGAZON s. f. (du-ga-zon). Théâtre. Nom. donné aux actrices de l’Opéra-Comique qui se distinguent dans les rôles créés autrefois par la célèbre Dugazon, ou dans des rôles analogues : Les dugazons tiennent les rôles d’ingénues amoureuses et de soubrettes.

— Encyel. Au théâtre, lorsqu’un acteur a fait preuve de talent, d’originalité dans un emploi quelconque, qu’il est doué de facultés particulières, les auteurs s’empressent de lui tailler des rôles dans lesquels ces qualités ’ soient mises en relief et même poussées jusqu’à l’excès. L’acteur inarque à son emfireinte les rôles écrits spécialement pour ui et attache son nom à cette catégorie de rôles. C’est surtout pour les troupes de province que se produit ce classement, et alors, selon la nature du talent de l’artiste engagé, on spécifie qu’il devra jouer les rôles créés à Paris par tel ou tel comédien en renom. C’est ainsi qu’on a dit ou qu’on dit encore : jouer les h lleviou, les Martin, les Trial, les Laruette, les Philippe, les Arnal, les Bouffé, les Achard, les Sainvill.e, les Grassot, les Dressant, les P/iilis, les Déjazet, les Base Chéri, etc., etc.

Parmi les artistes qui ont ainsi donné leur nom à un emploi, il faut citer en première ligne Mm|* Dugazon, la célèbre chanteuse de l’Opéra-Comique. Cet emploi ne forme pas, comme il arrive pour les autres classifications, une fraction d’un autre emploi

plus vaste, mais il en constitue un seul, unique, qu’on désigne toujours sous ce nom, les dugazons. Dans cette acception, le nom de la fameuse comédienne est devenu, comme celui de Trial, au point de vue de l’orthographe, un simple nom commun : on lui a enlevé sa majuscule, et on l’écrit au pluriel avec un s ; et "comme Mm<> Dugazon avait, avec l’âge, modifié la nature de ses rôles sans que son talent ni sa réputation en fussent amoindris, on a les dugazons proprement dites, et les mères dugazons, selon que ces rôles se rapportent aux premières ou aux dernières années de sa carrière.

Voici ce que dit a ce sujet un écrivain spécial : à L’emploi des dugazons se divise en jeunes dugazons et dugazons mères. Cette actrice célèbre a eu seule l’honneur de laisser son nom au genre que la marche du temps

Î)UGÀ

lui a tracé à deux époques de sa vie. Douée d’une sensibilité exquise, d’un organe expressif, elle immortalisa la moitié de sa vie par les rôles de Nina (clans Nina ou la Folle par amour) et de Babet (dans Biaise et Babet) ; dès qu’elle pressentit les prémices de la vieillesse, Marianne, Camille, la Pauvre femme et la Mère du prisonnier la révélèrent sous un autre aspect : c’était vraiment l’actrice de la nature. >

Depuis plus de soixante ans, les compositeurs n’ont cessé de qualifier du nom de dugazons tous les rôles de leurs ouvrages qui rentrent dans le genre créé jadis par la célèbre artiste. Pour caractériser cet emploi, nous dirons qu’il équivaut à celui de second ténor. Eatma, du Caïd ; Isabelle, de Cilles ravisseur ; Charlotte, de VAmbassadrice ; Denise, de l’Epreuve villageoise, etc., sont des jeunes dugazons. Dans le Pré aux Clercs, le rôle de la reine Marguerite de Navarre est une mère dugazon,