Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/lucre s. m.

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Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 3p. 769).

LUCRE s. m. (lu-kre — du lat. lucrum, gain, salaire, mot que Pictet ramène à la racine sanscrite lu, couper, d’où un grand nombre de termes qui désignent le butin, la dépouille, le gain, la récolte : sanscrit lava, lavana, luni, moisson, tonte, lôta, lôtra, butin, pillage ; grec leia, butin, pour lefia, léis, etc. La racine verbale se montre encore dans apo-lauô, prendre part et jouir, d’où apolausis, jouissance, avantage, etc. ; on y rattache aussi latron, salaire, latris, mercenaire, de lao, lafo’, pour lauô. Le latin nous offre, avec lucrum, le nom de la déesse des voleurs, Laverna, d’où laverniones, voleurs ; l’irlandais se rapproche tout à fait du sanscrit par son lot, rapine, mieux sans doute loth, si l’on compare lothar, exactement le sanscrit lotra, action de couper ; l’irlandais nous donne aussi laoi, salaire, luach, salaire, prix, valeur ; le gothique et scandinave laun, ancien allemand laon, anglo-saxon lean, ancien allemand lôn, loon, laon, qui rappelle pour la forme le sanscrit lavana et luni, moisson, n’a, comme le grec latron, que le sens de salaire ; l’ancien slave loviti, prendre, d’où lovu, chasse, loviteli, chasseur, lovlienina, proie, etc., se rapproche davantage de l’acception du sanscrit). Gain, bénéfice qu’on tire de son travail ou de son industrie : L’amour du lucre. Les races pétrifiées dans le dogme ou démoralisées par le lucre sont impropres à la conduite de la civilisation. (V, Hugo.)

— Jurispr. anc. Lucre cessant, Perte d’un profit provenant d’un fonds dont on s’est privé dans l’intérêt d’un autre : L’intérêt de l’argent est fondé sur le lucre cessant.