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Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/thermidor s. m.

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Administration du grand dictionnaire universel (15, part. 1p. 98).

THERMIDOR s. m. (tèr-mi-dor — du gr. thermê, chaleur). Onzième mois du calendrier républicain, commençant le 19 ou le 20 juillet et finissant le 17 ou le 18 août.

— Adj. Style thermidor, Genre de décoration lourd et de mauvais goût qui caractérise les édifices construits dans les dernières années de la Révolution française.

Thermidor (JOURNÉE DU 9) [27 juillet 1794]. Depuis le rapport de Vadier sur Catherine Théot, Robespierre avait cessé de prendre part aux délibérations du comité de Salut public, où il ne comptait plus que des adversaires, de même que dans le comité de Sûreté générale. Le seul membre influent qui fût son ami, Saint-Just, remplissait une mission aux armées. Celui-ci étant de retour, Robespierre songea à frapper un grand coup pour ressaisir la direction des affaires, qui échappait de ses mains. Envoyer à l’échafaud les députés qui lui étaient le plus hostiles dans les deux partis extrêmes, en les représentant comme les continuateurs d’Hébert et de Danton, tel était son moyen. Déjà, il les avait renfermés dans un cercle étroit d’espionnage, mais non sans leur donner l’éveil. Le 8 thermidor, il lut à la tribune un long discours dans lequel il attaquait les comités de gouvernement, désignait, sans les nommer, ceux qu’il voulait sacrifier et faisait sa propre apologie. Dans le premier moment, la Convention vota l’impression du discours et son envoi à toutes les communes ; mais les représentants sur la tête desquels était suspendu le glaive éclatèrent tout à coup contre le dictateur, et le décret fut rapporté. Le soir, Robespierre lut son discours aux Jacobins ; on l’applaudit beaucoup ; on chassa de la salle ceux des députés qui s’étaient opposés à l’impression ; Biilaud-Varennes et Collot d’Herbois, deux membres du comité de Salut public, étaient du nombre. Ils se rendirent au comité pour lui faire part du traitement dont ils venaient d’être l’objet. L’indignation fut grande parmi leurs collègues. Saint-Just était là, silencieux, écrivant sur une table. On l’interpelle vivement, on s’approche, on saisit son manuscrit : c’était un projet de discours, où, plus explicite que Robespierre, il dénonçait nominativement les membres des comités. On lui fit promettre de ne pas faire usage de ce qu’il avait écrit ; mais le lendemain, dès l’ouverture de la séance de la Convention, il monta à la tribune pour y lire sa harangue. Il ne put pas aller au delà du quatrième alinéa. Tallien (v. ce nom) l’interrompit. Ce fut alors un torrent de dénonciations, d’imprécations et d’injures contre Robespierre. La Plaine, sur laquelle il comptait, l’abandonna. Chaque fois qu’il voulait prendre la parole, Sa voix était étouffée par le cri : « À bas le tyran ! » poussé de tous les côtés de la salle. Enfin on le décréta d’arrestation, lui, son frère, Saint-Just, Couthon et Lebas. La même mesure fut prise contre Hanriot, commandant de la garde nationale, Dumas, président du tribunal révolutionnaire, et autres. Ils restèrent à peine en prison quelques heures ; on les délivra par ordre du conseil de la Commune, alors en pleine insurrection contre la Convention nationale. Lorsque la Convention apprit qu’ils étaient à l’Hôtel de ville, elle les mit hors la loi, ainsi que tous les municipaux. Ceux-ci prenaient des mesures énergiques pour assurer le succès de l’insurrection. Ils avaient déjà réuni la plupart des sections autour d’eux ; mais Hanriot, investi du commandement, était ivre depuis le matin. Robespierre, hésitant devant cette levée de boucliers contre la représentation nationale, paralysait le mouvement par son inertie. La Convention, au contraire, agissait avec vigueur. Elle avait chargé Barras et d’autres représentants de diriger la force armée contre la Commune. Ils se répandirent dans tous les quartiers de Paris pour y haranguer le peuple et ils obtinrent un plein succès. À sept heures du soir, la Convention n’avait pas un seul homme pour elle ; mais, vers trois heures du matin, elle avait réuni assez de forces pour envahir l’hôtel communal et se saisir de tous ceux qui s’y trouvaient. Parmi les prisonniers, cent quatre furent exécutés les 10, 11 et 12 thermidor, après la seule constatation de leur identité devant le tribunal révolutionnaire ; c’étaient Robespierre et son frère, Saint-Just, Couthon et Lebas, le commandant de la force armée, le président du tribunal révolutionnaire, le dernier président des Jacobins, le maire de Paris, l’agent national de la Commune, tous les membres de la municipalité ou du conseil général. V. Robespierre, Tallien, Merda, etc.