Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/tolérance s. f.

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Administration du grand dictionnaire universel (15, part. 1p. 267-268).

TOLÉRANCE s. f. (to-lé-ran-se — rad. tolérer). Action de tolérer ; condescendance, indulgence qui empêche de réprimer ou de condamner : Nous demandons la tolérance ; accordons-la, exerçons-la pour en donner l’exemple. (Buff.) Dans la vie sociale, la vertu la plus utile est la TOLÉRANCE. (Mme  Monmarson.) La TOLÉRANCE n'est pas exclusive de la lutte. (L. Jourdan.) Quand la politesse va jusqu'à une TOLÉRANCE aveugle, elle équivaut à une trahison envers soi-même. (De Custine.) La TOLÉRANCE n'est pas la liberté. (E. de Gis.)

Tolérance religieuse ou simplement Tolérance, Condescendance par laquelle on laisse à chacun la liberté de pratiquer la religion qu'il professe : Il est affreux d'enseigner que la TOLÉRANCE est dangereuse. (Volt.) La TOLÉRANCE est le résultat d'une foi éclairée. (E. Alletz.) L'absolue liberté de la controverse religieuse résulte du principe de la TOLÉRANCE. (Villemain.) De l'inutilité des persécutions et des tortures est née la TOLÉRANCE RELIGIEUSE. (E. de Gir.)

Tolérance théologique ou ecclésiastique, ou simplement Tolérance, Condescendance par laquelle on souffre toutes les opinions qui ne sont pas manifestement contraires à la doctrine de l'Église : L’Église latine a toujours usé de TOLÉRANCE pour l'Église grecque. (Acad.) — Tolérance civile ou simplement Tolérance, Permission accordée par un gouvernement de pratiquer dans l’État certaines religions qui n'y sont pas légalement reconnues.

Maisons de tolérance, Maison de prostitution : Il est interdit à une maîtresse de MAISON DE TOLÉRANCE de garder ses enfants chez elle. (Frégier.)

— Monn. Quantité en plus ou en moins que l'État tolère dans le poids des monnaies ou dans les proportions de l'alliage.

— Administr. milit, Écart toléré dans les dimensions des armes et des projectiles,

— Méd. Faculté qu'a un sujet de résister aux effets naturels de certaines substances : L'innocuité des poisons sur Mithridate est un fait de TOLÉRANCE fort célèbre.

— 'Encycl. Philos. « Qu'est-ce que la tolérance ? dit Voltaire. C'est l'apanage de l'humanité ; nous sommes tous pétris de faiblesses et d'erreurs : pardonnons-nous réciproquement nos sottises, c'est la première loi de la nature. » Chez les Juifs, la secte des saducéens fut respectée malgré ses croyances ; les Grecs pratiquèrent la tolérance en respectant Épicure et ses disciples. Quant à Socrate, sa mort doit être moins attribuée à l'intolérance religieuse et au fanatisme qu'à des inimitiés personnelles. Les Romains se montrèrent les plus tolérants de tous les peuples ; ces grands conquérants comprirent qu'ils ne pouvaient conserver toutes les provinces que leurs armes avaient réduites à la soumission qu'à l'unique condition de respecter les croyances des vaincus ; non-seulement les dieux étrangers étaient supportés, mais encore ils avaient leur place à Rome ; les Juifs purent élever des synagogues. Les chrétiens, il est vrai, finirent par ne pas rencontrer la même bienveillance ; mais ils avaient d'abord été tolérés, comme toutes les sectes religieuses, et ils ne furent persécutés que lorsqu'ils déclarèrent la guerre aux autres cultes, au nom d'un principe que Rome ne pouvait pas admettre, à savoir qu'eux seuls avaient raison. Ils renversèrent les idoles ; on les contraignit au respect des lois. Il ne s'agissait donc pas, comme les historiens ecclésiastiques veulent le faire entendre, de les contraindre à adorer un Dieu qui n'était pas le leur, mais bien de les empêcher de briser les statues des dieux romains et de continuer une propagande dangereuse pour la sécurité de l'État. De fait le christianisme, devenu puissant, renversa non-seulement le paganisme, mais l'empire, ce qui montre que les empereurs, en le combattant, pressentaient très-bien sa puissance d'action. Thomas d'Aquin reconnaît d'ailleurs que, si les disciples de Jésus ne détrônèrent pas les empereurs, c'est que cette tâche fut trop lourde pour leurs forces. L'intolérance fit son apparition dans le monde avec le christianisme. Dès le premier siècle, les ébionites, qui niaient que Jésus-Christ fût un Dieu, se virent persécutés par les chrétiens ; les nicolaïtes, qui demandaient la communauté des biens, c'est-à-dire exactement ce que prétendaient opérer les apôtres, furent considérés comme les pires ennemis de l’Église naissante ; les gnostiques soulevèrent l'indignation des fidèles et furent traités d'idolâtres. Tertullien, Praxéas, Origène, Novatien, Novat, Donat, Sabellius eurent, avant même le règne de Constantin, à se repentir de leur indépendance, et bientôt après les disputes des athanasiens et des eusébiens firent couler le sang. Dès l'origine, on vit les apôtres se diviser entre eux et se déclarer la guerre ; la lutte de saint Paul et de saint Pierre à propos de la circoncision des gentils a laissé des traces ineffaçables dans les Actes des apôtres, quel que soit le soin que l'on ait pris plus tard pour atténuer le caractère très-vif de ces luttes et en effacer le souvenir. Dès le Ier siècle, la Judée compta une vingtaine de sectes et un nombre incalculable de prophètes et de messies. Il y avait alors une trentaine d’Évangiles, tous différents et dont les doctrines opposées étaient soutenues avec acharnement par les sectaires qui appelaient de toutes leurs forces les rigueurs du pouvoir contre les sectes rivales. « Lorsque enfin, dit Voltaire, quelques chrétiens eurent embrassé les dogmes de Platon et mêlé un peu de philosophie à leur religion, qu’ils séparèrent de la juive, ils devinrent insensiblement plus considérables, mais toujours divisés en plusieurs sectes sans que jamais il y ait eu un seul temps où l’Église chrétienne ait été réunie. Elle a pris naissance au milieu des divisions des juifs, des samaritains, des pharisiens, des saducéens, des esséniens, des judaïtes, des disciples de Jean, des thérapeutes. Elle a été divisée dans son berceau, elle l’a été dans les persécutions mêmes qu’elle essuya quelquefois sous les premiers empereurs. Souvent le martyr était regardé comme un apostat par ses frères, et le chrétien carpocratien expirait sous le glaive des bourreaux romains, excommunié par le chrétien ébionite, lequel ébionite était anathématisé par le sabellien. » Malheureusement l’intolérance persista. Il serait trop long d’énumérer toutes les cruautés ordonnées au nom d’une religion qui se prétendait religion de paix et d’amour, depuis les massacres des albigeois, auxquels Simon de Montfort et le légat du pape excitaient les soldats en leur disant « Tuez toujours, Dieu reconnaîtra ses élus », jusqu’à la Saint-Barthélemy.

La tolérance n’a donc jamais été une vertu chrétienne ; la foi exclut toute idée de tolérance. Les musulmans ont agi comme les chrétiens ; les huguenots ne se sont pas montrés moins cruels. Toute religion qui a la prétention d’être seule en possession de la vérité est fatalement intolérante. La philosophie seule peut admettre la tolérance comme un principe et la faire prévaloir ; mais alors ce sera fait des religions, puisqu’elle les placera toutes ex æquo.

En matière politique, l’intolérance a des conséquences plus désastreuses encore. Tout gouvernement qui proscrit un parti, persécute une classe de citoyens, amène forcément des discordes et des troubles. L’intérêt de l’humanité exige la liberté d’opinion la plus absolue, la liberté des cultes, la liberté de conscience. Le seul moyen d’arriver à distinguer la vérité de l’erreur, et par cela même de travailler à améliorer le sort de ses semblables, n’est-il pas de comparer entre elles les diverses lois, les mœurs, les coutumes, les cultes ? La force et la crainte ne sauraient réussir là où la raison commande, et à notre époque on n’arrive plus à convaincre par la violence. On pourrait même croire que le clergé catholique a toujours été de cet avis et que l’inquisition serait un vain rêve si l’on s’en rapportait aux citations suivantes, empruntées aux Pères de l’Église, aux conciles et aux prédicateurs. Le clergé a pris à tâche, par ses actes, de démentir ces maximes, mais elles n’en prouvent pas moins que la tolérance religieuse était admise par les esprits les plus élevés.

« C’est une impiété d’ôter, en matière de religion, la liberté aux hommes, d’empêcher qu’ils ne fassent choix d’une divinité ; aucun homme, aucun dieu ne voudrait d’un service forcé. » (Tertullien, Apologétique.)

« Si on usait de violence pour la défense de la foi, les évêques s’y opposeraient. » (Saint Hilaire).

« La religion forcée n’est plus religion ; il faut persuader et non contraindre. La religion ne se commande point. » (Lactance.)

« C’est une exécrable hérésie de vouloir attirer par la force, par les coups, par les emprisonnements, ceux qu’on n’a pu convaincre par la raison. » (Saint Athanase.)

«  Rien n’est plus contraire à la religion que la contrainte. » (Saint Justin martyr.)

« Persécuterons-nous ceux que Dieu tolère ? » (Saint Augustin.)

« Qu’on ne fasse aucune violence aux juifs. » (Quatrième concile de Tolède.)

« Nous ne prétendons point détruire les erreurs par la violence. » (Discours du clergé de France à Louis XIII.)

« Nous savons que la foi se persuade et ne se commande point. » (Fléchier.)

Les philosophes sont naturellement plus explicites encore :

« L’expérience nous apprend que la violence est plus capable d’irriter que de guérir un mal qui a sa racine dans l’esprit. » (De Thou.)

« Si le ciel vous a assez aimés pour vous faire voir la vérité, il vous a fait une grande grâce ; mais est-ce aux enfants qui ont l’héritage de leurs pères de haïr ceux qui ne l’ont pas eu ? » (Montesquieu.)

On pourrait multiplier ces citations à l’infini ; nous nous bornerons à donner ici cette prière de Voltaire, l’une des plus belles pages qui soient sorties de sa plume : « Ce n’est plus aux hommes que je m’adresse, c’est à toi, Dieu de tous les êtres, de tous les mondes et de tous les temps ; s’il est permis à de faibles créatures, perdues dans l’immensité et imperceptibles au reste de l’univers, d’oser te demander quelque chose, à toi qui as tout donné, à toi dont les décrets sont immuables comme éternels, daigne regarder en pitié les erreurs attachées à notre nature ; que ces erreurs ne fassent point nos calamités. Tu ne nous as point donné un cœur pour nous haïr et des mains pour nous égorger ; fais que nous nous aidions mutuellement à supporter le fardeau d’une vie pénible et passagère ; que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants, entre tous nos usages ridicules, entre toutes nos lois imparfaites, entre toutes nos opinions insensées, entre toutes nos conditions si disproportionnées à nos yeux et si égales devant toi ; que toutes ces petites nuances qui distinguent les atomes appelés hommes ne soient pas des signaux de haine et de persécution ; que ceux qui allument des cierges en plein midi pour te célébrer supportent ceux qui se contentent de la lumière de ton soleil ; que ceux qui couvrent leurs robes d’une toile blanche pour dire qu’il faut t’aimer ne détestent pas ceux qui disent la même chose, sous un manteau de laine noire ; qu’il soit égal de t’adorer dans un jargon formé d’une ancienne langue, ou dans un jargon plus nouveau ; que ceux dont l’habit est teint en rouge ou en violet, qui dominent sur une petite parcelle d’un petit tas de la boue de ce monde et qui possèdent quelques fragments arrondis d’un certain métal, jouissent sans orgueil de ce qu’ils appellent grandeur et richesse, et que les autres les voient sans envie ; car tu sais qu’il n’y a dans ces vanités ni de quoi envier ni de quoi s’enorgueillir. Puissent tous les hommes se souvenir qu’ils sont frères ! qu’ils aient en horreur la tyrannie exercée sur les âmes, comme ils ont en exécration le brigandage qui ravit par la force le fruit du travail et de l’industrie paisible ! Si les fléaux de la guerre sont inévitables, ne nous haïssons pas, ne nous déchirons pas les uns les autres dans le sein de la paix, et employons l’instant de notre existence à bénir également en mille langages divers, depuis Siam jusqu’à la Californie, ta bonté qui nous a donné cet instant. Amen. »

— Législ. Maisons de tolérance. V. PROSTITUTION.

Tolérance (TRAITÉ DE LA), par Voltaire (1763, in-8°). Ce traité fut composé à l’occasion de la mort de Jean Calas ; il en existe un grand nombre d’éditions de la même année, toutes de format in-8° et la plupart sans lieu ni date. Il débute par une histoire abrégée de la mort de J. Calas et l’examen des conséquences de son supplice. À ce propos, Voltaire jette un coup d’œil sur la Réforme et examine si la tolérance est dangereuse et parmi quels peuples elle est permise : « Quelques-uns ont dit que si l’on usait d’une indulgence paternelle envers nos frères errants qui prient Dieu en mauvais français, ce serait leur mettre les armes à la main, qu’on verrait de nouvelles batailles de Jarnac, de Mont-contour, de Coutras, de Dreux, de Saint-Denis, etc. C’est ce que j’ignore, parce que je ne suis pas prophète ; mais il me semble que ce n’est pas raisonner conséquemment que de dire :   « Ces hommes se sont soulevés quand je leur ai fait du mal, donc ils se soulèveront quand je leur ferai du bien. » J’oserai prendre la liberté d’inviter ceux qui sont à la tête du gouvernement, et ceux qui sont destinés aux grandes places, à vouloir bien examiner mûrement si l’on doit craindre, en effet que la douceur produise les mêmes révoltes que la cruauté a fait naître ; si ce qui est arrivé dans certaines circonstances doit arriver dans d’autres ; si les temps, l’opinion, les mœurs sont toujours les mêmes. » Il est constant qu’au moment des guerres du XVIe siècle, si l’on excepte un petit nombre de lettrés et de gentilshommes, le gros de la nation était hostile à la Réforme. Elle fut proscrite par l’opinion publique, imprégnée des idées catholiques du moyen âge. Ce fut l’opinion publique qui organisa la Ligue et détrôna les Valois, qui n’étaient point des réformés, mais qu’on accusait de tiédeur contre les réformés. Au XVIIe siècle, lors de la révocation de l’édit de Nantes, il n’en était déjà plus de même. L’acte de Louis XIV fut purement politique : il voulait supprimer un parti qui faisait échec à son omnipotence. Au XVIIIe siècle, il n’y avait plus de guerres religieuses possibles, et on aurait pu rendre aux protestants leurs droits civils sans froisser en aucune manière l’opinion publique. Voltaire a donc raison de dire que les temps et les mœurs ont changé.

La tolérance est d’ailleurs de droit naturel. L’auteur examine à ce sujet si les Grecs et les Roumains ont pratiqué la tolérance. Les légendes des martyrs semblent dire que non. « Il est bien difficile de savoir précisément, dit Voltaire, pour quelles raisons ces martyrs furent condamnés ; mais j’ose croire qu’aucun ne le fut sons les premiers Césars pour sa seule religion : on les tolérait toutes ; comment aurait-on pu rechercher et poursuivre des hommes obscurs qui avaient un culte particulier, dans le temps qu’on permettait tous les autres ? Les Titus, les Trajans, les Antonins n’étaient pas des barbares ; peut-on imaginer qu’ils auraient privé les seuls chrétiens d’une liberté dont jouissait toute la terre ? »

Voltaire est dans le vrai. Jamais on n’aurait songé à poursuivre les chrétiens s’ils ne se fussent eux-mêmes faits persécuteurs. C’est lorsqu’ils prétendirent à la suprématie de leur culte sur tous les autres, lorsqu’ils prêchèrent ouvertement le renversement de ce qu’ils appelaient les idoles, c’est-à-dire l’abolition du culte officiel, que l’État se crut obligé de sévir. Les empereurs manquèrent au principe de la tolérance, mais seulement contre ceux-là mêmes qui proclamaient comme un dogme fondamental le principe de l’intolérance. Ajoutons qu’il a bien raison de révoquer en doute la plupart des légendes de martyrs et de combattre les écrivains qui les ont transmises à la postérité. Quelques-unes des persécutions furent réelles ; elles étaient méritées. On agit contre les chrétiens précisément comme ils devaient agir plus tard lorsqu’ils furent les maîtres. En établissant l’inquisition, ils ont prétendu que l’intolérance était de droit divin ; alors pourquoi se plaignent-ils que les empereurs romains aient été intolérants envers eux ?

Voltaire termine par des vœux en faveur de la tolérance universelle et par une prière que nous avons transcrite dans l’encyclopédie qui précède.

Tolérance aux pieds du trône (LA), par Turgot (Londres, 1778, in-8°). C’est un mémoire en faveur des protestants. À dix ans de la Révolution française, l’opinion publique était encore obligée de se faire bien petite devant le pouvoir royal. Après avoir exposé la rigueur et l’inflexibilité des lois qui frappaient les protestants, Turgot s’attache à dégager de ces tristes mesures la responsabilité de Louis XIV et de Louis XV. Ce sont les jésuites qui ont tout fait. D’ailleurs, il n’a garde de demander pour les religionnaires l’égalité avec les autres citoyens. « Nous ne, proposons pas, dit-il, de tolérer les dogmes de la religion réformée, mais de cesser d’opprimer ceux qui la professent. Nous ne demanderons pas que les protestants aient un culte et des Ministres, nous demandons qu’ils puissent avoir des enfants : Nous ne parlons point d’introduire dans l’État deux religions, quoique la liberté des cultes publics n’ait excité aucun trouble dans les États qui l’ont établie. Mais nous dirons qu’il faut que tous les hommes qui vivent dans un État, qui payent les impôts, qui obéissent aux lois, y jouissent des droits de l’homme et du citoyen. »

Mais à quoi se réduisent ces droits ? En définitive, à peu de chose. Ne pas exclure les réformés de certaines carrières, la médecine, le barreau, par exemple, puis régulariser leurs mariages, leurs baptêmes, leurs sépultures. « La naissance et la mort d’un homme sont des faits purement physiques, qui peuvent être constatés avec des formes prescrites par la loi civile… Quant aux mariages, le prince pourrait statuer que la liaison qu’un protestant contracte avec une femme par déclaration leur donnera à tous deux les mêmes droits, les assujettira aux mêmes devoirs que s’ils avaient contracté un mariage. Une telle loi n’aurait pas plus de rapport aux lois ecclésiastiques, qu’une loi qui renouvellerait parmi nous l’adoption des anciens Romains. Cette espèce de contrat aurait tous les effets civils du mariage, sans être un sacrement, de même que les mariages de tous les peuples, ou infidèles ou idolâtres, qui ne sont pas non plus des sacrements. » Tous les vœux, toutes les réclamations de l’auteur se bornent donc à demander l’état civil. Pour en montrer l’opportunité, la nécessité, Turgot répond d’avance aux objections, montre la possibilité d’une émigration nouvelle en Amérique qui serait une ruine pour la France : « Pour l’éviter, il ne nous reste que deux partis, ou de conserver des lois sanglantes dont l’inutilité est prouvée, ou d’ôter aux protestants le désir de chercher une nouvelle patrie, en la rétablissant dans les droits que la loi ne peut ravir avec justice qu’aux hommes qui ont mérité de les perdre par un crime. »